Sur le pierreux chemin de nivôse

Publié le 8 Janvier 2017

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Sur le pierreux chemin de nivôse

Je vais

La minéralité est un muret compatissant

Elle revêt sa parure d'enfant

Et mime les rêves en tenue de mystère.

 

Sur le pierreux chemin

Nivôse se tait

Dessine des parcours ténébreux

Ou la tourbe a trempé ses lèvres de feu

Dans la boisson des hommes vrais

A sublimé son lit de ténébreux frissons

Jusqu'à les étendre à l'ensemble de la nuit.

 

La houille est un cœur arraché au forceps de la vie

La houille a épousé le blé son cœur

Plus jamais la vie n'a été la même

Les hommes avaient deux compagnons de route.

 

Le chemin était encore vierge

Il n'avait pour semelle que ses pierres généreuses

Parfois son tranchant acéré

Et voilà qu'ils ont découvert le bitume

En ont fait un sparadrap d'amertume

Lissant les nids de poule

Rebouchant les belles ornières

Qui ne faisaient trébucher que les bourgeois ensommeillés.

 

Un parfum musqué et utérin envahissait les nuées

Le soufre souffrait de ne pas être compris

Et dans sa profonde meurtrissure de Vulcano

Il fumait sa rage édulcorée

La lave sa sœur et sa moitié

Accompagnait sa fureur d'une chaude exactitude

Elle s'écoulait la lave

Volonté de couvrir ce qui fut froid et gel

Dans la limite du temps des hommes

La lave est une inconnue dévoreuse de terre

Elle happe à n'en plus finir les frontières

Aplanissant les restes dévorés de l'humanité.

 

Sur son lit tendre et vibrant

Dormait

Aimante

La terre végétale et sa petite vie confuse :

Tiens ! se disait-elle

Je mijote une fricassée de fibres à nulle autre pareille

Que des racines juteuses aimeront déguster

Mais voici que le fumier avait son mot à dire

Lui qui n'avait pour tout propos qu'une odorante mélopée

Son parfum n'avait d'égale que la misérable attitude développée par le pouvoir

Décisif des hommes

De laisser croupir dans la misère une part essentielle de l'humanité.

 

D'autres forceps avaient tiré tel un fil enrobé de glue

Le salpêtre des veines ouvertes de l'Amérique

Un sang épandu en était l'écrin douloureux

Et le granite mon ami de toujours

Etait là lui aussi

Celui qui dessinait dans la rose de la pierre bretonne

Des figures de proue

Des arquebuses de volonté

Son sang de mica rongé avait épousé deux pierres conquises

Jamais il n'avait su choisir entre les deux concurrentes.

 

Une couverture délicate et pure

Se glissait

Anguille l'argile

Sur le chemin de la connaissance

Désireuse de se laisser pétrir tant et plus

Par des mains délicates

Elle se vautrait, conquise

Sur le tour de la témérité

En pots en cruches en tasses de thé

Se déclinait sa belle carte de visite.

 

L'ardoise elle

Avait choisi son propos d'engagement

Toujours l'ardoise avait été du côté des plus humbles

En toiture elle désirait finir ses jours

Maîtrisée par les mains de l'amour

Elle dominait les villages subtils

De sa sombre attitude capacitaire.

 

Le grès était un fier matériau puisé dans les veines de la mère

Il aimait exprimer ses vérités du haut de son antériorité

Pas une table qui n'eut sa sage écriture

Ni son vin tiré dans le pichet de ses vertus.

 

Et lui ce père du feu ?

Celui sans qui nos aïeux n’auraient pas résisté aux errements du temps ?

Silex

Rudiment des chemins confus

Habillé en éclats de tutus

Chaudement récompensés.

La marne était sa moitié

Dévoreuse de limons elle étendait sa blanche chair

A la limite de ses frontières entre craie et soleil couchant

En son calcaire vertueux

La pierre à chaux soufflait le chaud et le froid

Et le marbre quand à lui

Etait le fruit de l'espérance d'une bourgeoisie aux désirs futiles.

 

La pierre à plâtre de Montmartre avait décidé d'habiller de son étole

Les murs des habitations

Il était chaud et malléable comme la pâte à modeler

Lisser sa peau de blanche colombe était un délice à ne pas mettre

Entre toutes les mains.

 

Dans l'épuisette du réconfort

Dans la salière de l'éternité

Git le diamant pur du sel

Eclat de vie cristal intime sourire précieux

Et toi fer

Vertueux compagnon

De rails en poutres

D'étagères en pinces monseigneur

Nulle vie sur terre ne peut se passer de tes services

Tu es le prince que dis-je le roi de la planète

Arcane majeur des conquêtes, le noble fer en sa robe de volonté.

 

Celui-ci a vu s'écouler des monceaux de sang et de peste

Son extraction maudite est un rudiment de la persécution des exploiteurs

Le cuivre, el cobre dans sa parure maudite

Contamina nombre de vies contamine encore les cœurs et les âmes ouvrières.

Dans le brasage l'étain a exprimé ses vœux

Cassitérite à l'état natif il ne vit sa possibilité que par les alliances confuses

Que seuls les hommes ont découvertes.

Sans pour autant les faire sauter

Les plombs

Sont autant de clous au cercueil humain

Chaque plomb pince un nerf de contamination

Et plombe jusqu'aux vies pures et natives

Peuplant les glaces déterminées.

 

Le zinc a galvanisé la blende en feuille de protection

Il a anobli tout à coup ses traits

Pour en faire une délicate gaine de sûreté.

 

Sur le chemin pierreux de nivôse

Se termine la course mensuelle du vent

Dans un pli de son coude la terre-mère a camouflé son poison

Il pollue plus que de raison

Et dans son venin s'éteignent eaux et vies

Sans lui la planète boiterait un peu moins

Mais surtout sans les hommes exploitant son amertume :

Mercure ton nom de dieu n'est pas le plus merveilleux des écrins

Et je jure

Que tu aurais mieux fait de rester enterré.

 

En glissant sur le mois de la pierre

La minéralité a bercé son doux balbutiement confus

Elle a bu sa lie

En a fait un poème que la muse échevelée écrit sans faute

Si j'étais pierre du chemin

Je serais granite marne ou ardoise

Silex ou caillou rond

Laissant dans le giron de la mère les sombres attitudes cachées

Là où les hommes ont tiré son lait

Pour en faire des choses certes nécessaires

Son écrin de verdure

Sa belle chevelure

S'altèrent

Et son air pollué

Est comme une boîte de lait concentré

Eventée la date de péremption a été oubliée dans le tiroir

des incertitudes.

 

Carole Radureau (08/01/2017)

 

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La perle de bitume

Matériau présent naturellement dans l'environnement mais qui est aussi fabriqué après distillation de certains pétroles bruts. Naturel il est composé d'un mélange d'hydrocarbures.

La perle de lave

Roche en fusion plus ou moins fluide émise par un volcan lors d'une éruption.

La perle de silex

Roche sédimentaire siliceuse très dure constituée de calcédoine presque pure et d'impuretés.

La perle de pierre à chaux

La chaux est un élément chimique minéral, l'oxyde de calcium de formule brute CaO.

La perle de smithsonite

Minéral constitué d'oxyde de zinc connu sous l'Antiquité sous le terme de  calamine.

Rédigé par caroleone

Publié dans #Mes anar-poèmes, #La pierre

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A
C'est un fabuleux travail que tu as fait là, en plus de ce très beau poème je vais y revenir parce qu'il faut du temps pour tout voir et lire, mais bravo, le peu que j'en ai déjà lu est passionnant et j'aime ta présentation élégante.
C
J'étais un peu en rade depuis le début de l'année et celui-ci est sorti d'une traite (3 pages) à 1 heure du mat lors d'une nuit qui fut plus agitée que les jours (enfin c'est un peu mon quotidien en fait). Et je suis contente de m'être levée, de ne pas avoir laissé s"éteindre une telle inspiration toute pleine de minéralité. J'aime particulièrement ce texte, je suis contente de l'avoir produit, je croyais que ma muse était morte et non, elle était en encore en vacances. La présentation, c'est en fait qu'OB, quand ils ont encore changé l'administration en fin d'année nous a remis celle que l'on avait avant. Tout défaire et refaire, tout ça pour ça, quelle perte de temps quand j'y pense. On a plus de liberté avec cette formule, il ne manque que les smileys que l'on pouvait inclure avant. On est obligés de s'adapter, il faut être très malléable dans tous les domaines si l'on veut continuer et survivre à tout cela.