Berta Cáceres vit dans les paroles

Publié le 14 Avril 2024

Diane Calero*

11 avril 2024 

Il existe des discours comme ceux de Berta Cáceres qui acquièrent le pouvoir d'immortalité dans la pensée collective. Mais qui était Berta ? Une femme d'origine Lenca qui, avec ses idées, a réussi à unifier une société en faveur de la protection de notre nature, étant l'une des défenseures des droits de l'homme et de l'environnement les plus connues au Honduras et dans le monde. En 1993, Berta a cofondé le Conseil Civique des Organisations Populaires Indigènes (COPINH) pour la défense du territoire et des droits du peuple Lenca.

Le 3 mars 2016, elle a été assassinée pour mettre fin au pouvoir de ses idées militantes ; cependant, ses paroles ont gagné en force, parmi lesquelles se détache une phrase transcendantale "tu as la balle... J'ai la parole... La balle meurt quand elle explose... La parole vit en se reproduisant", d'où l'expression suivante est née : "Berta n'est pas morte "Elle s'est multipliée !"

Il ne fait donc aucun doute que ses discours ont permis aux idéaux de protection de rester vivants dans la société, servent d’inspiration à de nouveaux défenseurs de la terre.

Tout cela nous amène aux questions suivantes : avez-vous déjà réfléchi à la façon dont les paroles peuvent unifier une société ? Dans quelles pensées cette union est-elle maintenue ?

Ce ne sont pas les seules questions à vous poser, vous pouvez remettre encore plus en question tous les discours qui vous entourent, puisque notre société est construite à partir d'eux. Maintenant, la clé est d’identifier lesquels d’entre eux sont édifiants, leurs caractéristiques et leurs variations. Le plus pertinent est donc de vous l'expliquer à travers un fragment extrait du discours de Berta Cáceres lors de la remise du Prix Goldman de l'Environnement (2005) :

"Réveillez-vous ! Réveillez-vous, humanité ! "

[…] Il n’y a plus de temps. Bâtissons alors des sociétés capables de coexister de manière juste, digne et pour la vie. Rassemblons-nous et continuons avec espoir […] à prendre soin du sang de la terre et de ses esprits.

Avec ce discours, évidemment, l'objectif est de sensibiliser la société en général à la protection de l'environnement, mais ce qui est intéressant, c'est la manière dont le message est transmis et justifié. Premièrement, le recours aux métaphores et aux analogies est très récurrent dans ce type de discours. Par exemple, en reliant l'eau de la terre au sang du corps, nous faisant comprendre que négliger la terre, c'est négliger la vie. De même, il fait également allusion à la perspective spirituelle partagée par la majorité des peuples autochtones, dans laquelle ils expliquent le lien entre la nature, l'esprit et l'humain.

D'autre part, il commence par un appel à l'attention du monde, comme un rappel de la situation actuelle, même s'il se concentre sur la diffusion de solutions sous des émotions pleines d'espoir et en incluant tout le monde dans son appel sans marquer de différences ni minimiser personne, car, même si nous sommes tous différents, nous sommes également dignes et capables de contribuer à un objectif commun, en mettant l'accent sur nos aspects positifs.

En nous concevant ainsi, nous parlons de dépolarisation, car elle évite la vision classifiée ou divisée que nous avons du monde, qui affecte notre attitude envers nous-mêmes. C’est l’une des caractéristiques les plus pertinentes du discours constructif.

Dans chaque discours, il y a toujours une idée générale ou une idéologie qui guide l’orateur pour tisser les bons mots sur lui-même. Dans ce cas, le fragment révèle la conviction que la solution est de concevoir la Terre et ses éléments comme un être vivant intégral et immanent pour générer des actions pour protéger et prendre soin de l'environnement.

Maintenant, demandons-nous, pourquoi promouvoir ce type de discours ?

Est-ce bénéfique ?

C'est certainement, en nous rappelant notre lien inhérent avec la nature, ce lien qui a peut-être été corrompu, mais jamais disparu, qui nous permettra de voir et d'agir envers le monde d'autres manières qui cherchent à le reconstruire.

Ainsi, les idéaux que Berta a construits tout au long de sa vie la maintiennent vivante dans ses discours, qui peuvent être retrouvés retranscrits et commentés dans divers articles que vous pouvez lire pour en savoir plus sur Berta et son impact sur la société, parmi lesquels : l'article « Berta Cáceres, leader indigène hondurienne, féministe et militante environnementale » par la Commission nationale des droits de l'homme ; « Berta Cáceres : « nous avons le défi de continuer à faire de cette rébellion une réalité » publié dans Capire ; « Berta Cáceres : Une graine qui s'est multipliée dans les luttes rebelles » publiée sur le site Internet de l'Association pour les Droits des Femmes et le Développement (AWID) ; « Berta Cáceres et le féminisme décolonial » écrit par Ochy Curiel dans « Huellas Inspiradoras » ; et un espace au COPINH dédié au récit de l'histoire de Berta Cáceres et de sa lutte.

*Chercheuse en analyse critique du discours

traduction caro d'un article paru sur Desinformémonos le 11/04/2024

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Peuples originaires, #Honduras, #Berta Cáceres, #Lenca

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