Pérou : Les oiseaux dans le grand déluge (cosmovision Esse-eja)
Publié le 2 Décembre 2023
"Quand il a plu au loin" est un mythe que les Esse-eja (famille Takana), où au départ deux frères nommés Noíja pêchent au barbasco (nivrée), quand ils remarquent que tous les poissons connus sous le nom de boquichicos (Prochilodus nigricans) se rassemblent dans le creux d'un ravin.
Ces poissons sont caractérisés par le fait qu'ils se nourrissent de vase, et qu'ils sont équipés de dents viliformes qui leur permettent de racler le fond de la rivière. Le débit de la rivière augmente tellement que les boquichicos, qui sont normalement des poissons sont poussés par la force de l'eau dans le ravin.
Le ravin est conçu comme un lieu clos auquel on accède par une porte, tout comme l'entrée de l'eau, référence que l'on retrouve dans d'autres mythes de l'eau et il est intéressant de noter que le texte indique que les frères Noíja se tiennent à la "fenêtre du ravin". Ces frères sont les oiseaux "budusqui", en espagnol régional. Claudia Gálvez-Durand (1994, p.20) les identifie comme appartenant à la famille Momotidae espèce Momotus momota et connus sous le nom de budusqui. Les frères voient que le ravin qui s'effrite et ils avertissent leur compagnon du danger.
momotus momota (motmot houtouc en français) By Paulo Antonio Santos - Imported from 500px (archived version) by the Archive Team. (detail page), CC BY 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=126450222
Mais l'irréparable se produit, tout s'effondre et l'eau recouvre la terre. Le paysage est transformé : "Tout le monde est parti. Il ne restait plus rien. Personne n'est venu, personne n'est parti."
Le ravin n'existe plus et, de plus, les survivants subissent leur propre transformation, un villageois appelé Tsaja devient Martin-Pêcheur (Alcedo atthis).Ce bel oiseau se trouve presque partout dans le monde et il en existe plusieurs espèces au Pérou.
Les frères Noíja, nos héros, deviennent des oiseaux budusqui. En souvenir de la catastrophe, leurs petites pattes sont collées l'une à l'autre. Tout le rio Baawaja (aujourd'hui Tambopata) a été effacé. Le mythe se termine par ces phrases :
Leurs cadavres ont noirci la terre.
Les îles qui s'y trouvaient autrefois,
ont disparu, elles n'existent plus.
traduction caro
source De todas las sangres: las aves en la mitología amazónica