Mexique : Le peuple Ch’ol

Publié le 6 Novembre 2023

Mexique : Le peuple Ch’ol

"Ch'ujtiat, le Seigneur du Ciel, a créé la Terre, Tumbala est le yutbal-lum, le nombril, l'endroit où la Terre a été formée. Puis il créa les 12 chuntie winik, semblables à des hommes, pour la porter, la Terre est plate, ils se fatiguent de la porter et quand ils veulent changer d'épaule, la Terre bouge et il y a des tremblements. Il créa aussi les premiers hommes, semblables aux chuntie winik, mais non immortels, qui vécurent et furent ingrats envers Ch'ujtiat, qui envoya un déluge pour les tuer tous ; quand la pluie cessa....".

Fragment de la cosmogonie des Choles

Peuple indigène du Mexique vivant dans les états du Chiapas et du Tabasco, c'est un peuple de descendance maya.

Les noms

Nom sous lequel ils sont connus au Mexique : Choles (singulier ch’ol)

  • Ch’ol = les winik parlant ch’ol t’an
  • Chol = les chroniqueurs espagnols du XVIe siècle désignaient par le mot chol à la fois la langue et le groupe ethnique.
  • En ch’ol t’an le mot chol = milpa

C’est pourquoi les Ch’oles sont également connus sous le nom de « milperos » (ceux qui travaillent la milpa).

Autodésignation : winik = homme et xixik = femme

Winik est utilisé pour s’autodésigner ainsi que leurs compatriotes autochtones dont ils disent alors qu’ils sont winikon bã lojon.

Au niveau régional les habitants de Tumbalá sont xk’ukwits (= colline du quetzal)

Les habitants de Tila sont : ajlumab (seigneurs du pays)

Les habitants de Limar sont : otulab

Kaxlan est le mot utilisé par les Ch’oles pour désigner les étrangers (encomenderos, ladinos, agriculteurs, église, gouvernement, ceux qui ne « travaillent pas, ceux qui ne « produisent pas de la nourriture, ceux qui »vivent du travail des winiks).

 

Population 

 

  • Mexique : 166.947 personnes (2019)
  • EU : 2100 personnes (2023)

 

Por Sirkoft - Obra do próprio, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=50267508

 

Langue

La langue Lakty'añ, ou plus communément appelée Ch'ol, est une langue appartenant à la famille maya ; la langue la plus proche est le Chontal du Tabasco. Elle est parlée dans les États de Campeche, Chiapas et Tabasco. Elle est actuellement considérée comme une langue en voie d'extinction. Lors du recensement de 2010, 222 051 locuteurs ont été recensés. La norme d'écriture de la langue ch'ol a été récemment publiée. Les deux variantes de Lakty'añ sont présentées ci-dessous :

  • Ch'ol du Nord-Ouest/ Lakty'añ (Nord-Ouest).
  • Ch'ol du sud-est/ Lakty'añ (sud-est).

(source INPI)

 

Localisation

 

 

Ils vivent dans la région nord-ouest de l’état du Chiapas et dans le Tabasco, sur un territoire bordé au nord par l’état de Tabasco et la municipalité de Catazajá, au Chiapas, au sud par les municipalités de Simojovel, Yajalón et Chilón, à l’est par la municipalité de La Libertad et à l’ouest la municipalité de Huitiupán.

 

Tila, Chiapas

 

  • Au Chiapas (nord) : Palenque, Tila, Sabanilla, Tumbalá, Salto de agua, Ocosingo, Yajalón, Catazajá Huitiupán, Chilón.
  • Au Tabasco : Amatlán, La Libertad, Macuspana
  •  

On distingue 3 zones dans la région :

  • 1. La zone montagneuse comprenant une partie des municipalités de Tila, Tumbalá ey Sabanita.
  • 2. La zone comprenant le côté oriental de la montagne centrale où se trouvent les vallées du Tulejá, Limar et Cinal.
  • 3. La 3e zone comprend une partie de la montagne s’étendant de la municipalité de Palenque à l’extrémité des plaines bordant la municipalité d’Ocosingo.

C’est une région de fortes précipitations toute l’année. Les plus fortes se situent entre juillet et janvier. Le climat est principalement chaud et humide, la température annuelle moyenne fluctue entre 24 et 26 °.

 

Misol Ha (Salta del Agua) De Ovedc - Trabajo propio, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=42712250

Rio Tulija, Salto del Agua De cesar.ruiz - https://www.panoramio.com/photo/53310994, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=21870887

 

La végétation est de type forêt sempervirente, forêt qui subit une ample déforestation de la part des non indigènes (kaxlanes pour les Ch’oles) alors que le peuple Ch’ol est respectueux de l’environnement.

Les nombreux animaux de la selva sont : boas, iguanes, sarcoramphes-roi, sangliers, tatous, ratons laveurs, chauves-souris, porcs épic, blaireaux, cerfs, tlacuaches, margays, écureuils, renards, perroquets, perruches, faucons, hérons.

La terre n’est pas une marchandise

La terre n’est pas une marchandise, elle ne peut donc pas être détenue en tant que propriété individuelle, c’est la mère qui donne la vie, la terre offre mais exige. La terre est en usufruit si elle est exploitée.

 

 

Histoire

 

On attribue à leurs ancêtres préhispaniques la construction de sites archéologiques de la région

  • Vers 1530 : Début de la conquête de la selva chiapanèque par les conquistadores espagnols. Ils se réfugient dans la selva Lacandona.
  • A partir de 1559 : le frère dominicain Pedro Lorenzo persuade les indigènes vivant dans la forêt de se déplacer vers la rivière pour former leurs villages dans le but de les évangéliser. Les Ch’oles s’installent dans ce qui est aujourd’hui Palenque, Tila, Tumbalá, Yuyuxumil (Rio Amarillo), Octipoé et San Pedreo Sabana. Ils passent du système de l’encomienda à celui de la finca. Après ce déplacement c’est le début de l’encomienda à Chilón, San Padro et Yuyuxlumil.
  • Lors de la révolution mexicaine, l’indépendance du Chiapas et son annexion au Mexique et la guerre de Réforme, les Ch’oles ne sont utilisés que dans le but d’alimenter des révoltes et comme force de travail.
  • Ensuite arrivent les entreprises allemandes et anglaises pour procéder à l’exploitation du bois précieux, seulement le transport du bois est compliqué dans cette région.
  • En 1874, les paysans introduisent le café dans la région qui deviendra une importante zone de production. Les Ch’oles encore une fois ne seront que des serviteurs dans ce système de péonage basé sur la dette.
  • Vers 1936, vient le moment de la réforme agraire. Celle-ci divise les grandes exploitations de café. C’est la transformation de l’économie de la milpa à la monoculture de café.

 

Défense du territoire et participation à l’EZLN

 

 

Les Ch’oles ont de bonnes relations avec leurs voisins Tseltales, Tsotsiles et Zoques avec lesquels ils ont un intérêt commun par rapport aux métis, la défense et la restitution de leurs terre. Certains Ch’oles participent depuis 1994 aux actions de l’EZLN (Armée Zapatiste de Libération Nationale) pour de meilleures conditions de vie. Ils ont un représentant au sein du Comité Clandestin Révolutionnaire Indigène (CCRI) et certains de leurs membres vivent dans les communautés autonomes zapatistes de La Paz, El Trabajo, Che Guevara et Vicente Guerrero.

 

Choles de l'ejido Tila (source CNI)

 

Organisation politique et sociale

 

La base de la société est le conseil communautaire comprenant des réunions délibérant des questions internes de la communauté, de l’organisation du travail, de la recherche de solutions aux problèmes fonciers, des besoins divers de la population.

Les autorités du cabildo indigène sont les pasaros, des anciens reconnus pour leur expérience, leur sagesse, leurs qualités morales, bien que de nos jours les curanderos qui sont dépourvus de poids politique sont reconnus par les Ch’oles comme des figures importantes d’identité et soutien idéologique.

Le délégué ejidal est aussi un personnage important qui doit résoudre les problèmes locaux liés à la terre.

L’assemblée d’ejidatarios a pour but de défendre et revendiquer leurs droits sur leurs terres.

La société est basée sur la parenté et la coopération collective comme mécanisme de résistance pour maintenir les traits culturels.

Le mariage est quant à lui la base de la famille, il est très important et se forme assez souvent entre des parents de la même localité. Certains mariages sont arrangés depuis l’enfance. Ils se marient rarement avec des personnes d’autres endroits.

 

La maison

 

image

 

C’est une cabane rectangulaire soutenir par 6 poteaux en bois enfouis dans le sol. Les murs sont en bahareque, un mélange de boue, de fumier et de paille) le toit est couvert de palmes et d’herbe, le sol en terre battue.

 

 

Economie

 

(Fotografía de Adriana Corroy, 2017 source)

L’économie est basée sur l’agriculture, maïs, haricots, pommes de terre, café. Ce dernier est une culture des plus importantes des Hautes terres aussi bien pour l’autoconsommation que la vente.

Dans les plaines côtières, les cultures sont la canne à sucre, le riz, les arbres fruitiers (manguiers, bananiers, agrumes). Cette économie n’est pas suffisante pour couvrir les besoins de la famille et par conséquent, la migration vers les centres urbains et touristiques y compris Palenque est pratiquée pour y travailler comme salarié.

Les aliments sont le plus souvent à base de maïs, on peut citer les totopastes, les tortillas et tamales à base de masa colada, les boissons pozol blanco et chicha.

 

Religion/cosmovision

 

Grotte de Jolja'a

 

Syncrétisme religieux catholique et évangélique avec les croyances anciennes mayas.

L’homme fait partie de la nature d’où sa relation intime avec un ensemble d’altérités naturelles, sociales et culturelles les entourant.

La terre est vécue comme étant une mère, la source de la subsistance de la vue.

Il y a un important culte religieux aux racines anciennes qui a pour espace les grottes.

Trois sont très importantes par leur signification symbolique : Jolja’a à Tumbalá, Rowuan à Palenque et la grotte de Tila.

Des rituels y sont pratiqués pour demander la pluie, vénérer les divinités indigènes et catholiques.

Le sanctuaire du Christ noir à Tila est un axe fondamental de la religiosité indigène du sud-est mexicain.

 

Fêtes

 

Christ noir de Tila

 

Le maïs est fêté comme un dieu, au cours de nombreux rites liés au cycle agricole :

  • Rite lié à la mort du « dieu du maïs »
  • Rites pour les semailles, fête de la Santa Cruz
  • Rites liés aux pluies et à la fertilité agricole
  • Cérémonies consacrées à la récolte du maïs, fête de la Santa Rosa le 30 août

Festivités de nature communautaire qui débutent la veille de la fête avec des messes célébrées dans les temples et des rites effectués dans la maison des intendants. Ce sont les tatuches (anciens) ou majordomes qui dirigent ces fêtes, accompagnés par des musiciens, les femmes s’occupant de fournir nourriture et boisson.

Tila est l’un des centres religieux les plus importants de la région ch’ol déjà par la présence du Christ noir ou christ guérisseur qui est un christ natif, symbole de l’identité ch’ol et de la fertilité, protecteur des guérisseurs et patron de Tila. On le célèbre le 15 janvier (señor d’Esquipula). Le 3 mai (Santa Cruz), à Pâques (christ sur le mont Calvaire) et du 14 au 18 juin (fête-dieu).

A Tumbalá, les principales fêtes sont la fête de la Candelaria le 2 février, le Señor del Pozo le 23 mars, San Miguel Arcángel le 8 mars et Santa Cruz le 3 mai. La carnaval a lieu du 2 au 8 février avec la fameuse danse du tigre.

A Palenque: du 1er au 5 août a lieu la fête patronale, le 5 octobre Saint François d’Assise, le 12 décembre la Vierge de Guadalupe.

A Sabanilla : du 1er au 5 janvier c’est la fête du Señor d’Esquipulas, le 25 juin la fête du Seigneur de la Miséricorde, le 8 mars la fête de St Michel Archange.

A Salto del Agua, le 1er juin, fête de la Trinidad, le 8 décembre la Vierge de la Concepcion, le 12 décembre la Vierge de Guadalupe, le 31 décembre la Sainte Famille.

 

Médecine traditionnelle

 

Medicina tradicional utilizada por médicos tradicionales de la etnia chol, “Tiemelonla Tsijibu Bij” (source)

Ils distinguent les maladies nécessitant l’attention d’un médecin et celles qui peuvent être traitées par un guérisseur.

Le guérisseur pose un diagnostic qui suit une enquête sur les évènements sociaux vécus par le patient (conflits et autres sources de problèmes).

Son traitement est à base de prières, d’invocations aux saints et aux verges, avec des bougies et de l’encens.

Les sage-femmes sont très respectées et reconnues, elles sont appelées sabadoras et levanta molleras.

En complément

Dossier sur Espoir Chiapas

Ejido Tila, un exemple de lutte pour la défense de la terre et des territoires

Patrimonialisation de la danse du tigre dans le village ch’ol de Puxcatán, au Mexique 

Sources : wikipedia, INPI, pueblos indigenas.es

 

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Peuples originaires, #Mexique, #Ch'ol

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