Río tóxico (rivière toxique) : L'exploitation minière, le mercure et les assassinats continuent d'affecter le rio Atrato en Colombie

Publié le 21 Novembre 2019

par Frederick Gillingham, Melisa Valenzuela le 10 novembre 2019 | Traduit par Mabel Pedemonte

  • Des décennies de conflit interne ont alimenté une vague sans précédent d'exploitation minière illégale dans la région colombienne du Chocó, décimant le bassin de l'Atrato et provoquant une crise environnementale et humanitaire.
  • Dans une décision historique rendue en 2016, la Cour constitutionnelle colombienne a reconnu le rio Atrato comme une entité soumise aux droits environnementaux au moment même où le pays signait des accords de paix historiques, mais, après trois ans, une nouvelle phase de conflit affecte la région du Chocó.
  • La contamination au mercure et au cyanure provenant des activités minières industrielles en fait le fleuve le plus pollué de Colombie, et une opération d'élimination promise en 2016 ne s'est pas encore concrétisée.

Traversant le département de Chocó, dans le nord-ouest de la Colombie, le fleuve Atrato a été pendant des siècles le moyen de subsistance des communautés indigènes et afro-colombiennes qui vivent sur les rives du fleuve. Cependant, des décennies de conflits internes ont alimenté une vague sans précédent d'exploitation minière illégale, décimant le bassin fluvial et provoquant une crise environnementale et humanitaire dans l'une des régions les plus riches en biodiversité de la planète.

Dans un arrêt historique rendu en 2016, la Cour constitutionnelle colombienne a reconnu le fleuve Atrato comme une entité soumise à des droits environnementaux, obligeant l'État à mettre en œuvre "la protection, la conservation, l'entretien et la restauration" du fleuve et des communautés qui lui sont liées. La résolution est arrivée au moment où le pays signait des accords de paix historiques entre les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie (FARC) et l'État, qui ont apparemment mis fin à plus d'un demi-siècle de guerre et d'insurrection.

La contamination par le mercure et le cyanure provenant des activités minières industrielles fait de l'Atrato le fleuve le plus pollué de Colombie. Photo : Frederick Gillingham.


Cependant, trois ans plus tard, une nouvelle phase de conflit affecte la région du Chocó. La violence et les déplacements continuent d'affecter les populations le long de l'Atrato, qui restent les plus pauvres du pays. Des combats sporadiques entre groupes paramilitaires, tels que les Forces d'Autodéfense Gaitanistes de Colombie (AGC) et l'Armée de Libération Nationale (ELN) - le plus grand groupe de guérilla du pays - comblent le vide laissé par les FARC. Les défenseurs de l'environnement chargés de superviser l'application de la décision judiciaire se plaignent de l'absence totale d'action et de protection de l'État. Avec la menace constante d'intimidation et la peur d'être tués pour avoir fait leur travail, ils désespèrent d'une amélioration, même minime.

Le Chocó abrite l'un des écosystèmes les plus diversifiés du monde. On estime que 54 850 espèces animales vivent dans la selva dense du Chocó. Cependant, les opérations minières à ciel ouvert et la déforestation à grande échelle menacent cet habitat unique et précieux. La contamination au mercure et au cyanure provenant des activités minières industrielles en fait le fleuve le plus pollué de Colombie, et une opération d'élimination promise en 2016 ne s'est pas encore concrétisée.

L'un des nombreux affluents de l'Atrato qui serpente à travers le Chocó. Photo prise par Bram Ebus pour Mongabay.
 

Río tóxico offre une perspective exceptionnelle du conflit environnemental du Chocó, l'un des problèmes les moins traités et pourtant les plus urgents en Amérique latine, à travers l'expérience de trois témoins : un mineur, un pêcheur et un gardien de rivière. Les nouvelles générations sont aujourd'hui confrontées à une menace existentielle, car l'État ne remplit pas ses obligations légales et les communautés ethniques de la principale voie navigable du Chocó se disputent un fleuve qui est crucial pour leur culture, leur identité et leur survie.

traduction carolita d'un article paru sur Mongabay latam le 10 novembre 2019

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