Après la Grande Guerre, le sort des mères et des veuves

Publié le 16 Décembre 2013

 

Si la France victorieuse va rendre hommage à ses enfants morts pour la patrie dans chaque ville, bourg et hameau, elle oublie les mères dont les fils sont morts au combat et les veuves de guerre. Et si l'historien a comptabilisé les pertes humaines et établit des courbes et des statitiques, la douleur et le quotidien de ces femmes est passée à la trappe.

Dans un cimetière parisien. 1er novembre 1918. Source  ECPAD

 

Pourtant, déjà en mai 1918, madame B. , de la Celle-Saint-Cloud en Seine-et-Oise, écrit à son maire pour obtenir les 150F accordés aux familles éprouvées. Elle a perdu ses deux fils à la guerre en 1915, l'aîné en Argonne, le cadet en Artois: "J'ai 60 ans, je ne peux travailler que très peu. Mon mari ne peut suffire car la vie est de plus en plus chère". Le kg de boeuf qui coûtait 1,70F en 1914, atteint 4,30F en juillet 1918.

 

Les veuves de guerre doivent attendre la loi du 24 juin 1919 pour percevoir une pension. Mais l'administration demande force certificats et attestations diverses. Encore la pension est-elle profondément inégalitaire: la veuve d'un militaire mort au combat ou des suites de blessures va toucher plus que la veuve du soldat mort par maladie ou dans un camp de prisonniers; à cela s'ajoute selon que l'on est veuve d'un lieutenant (1 650 ou 1425F par an) ou simple poilu ( de 563 ou 375F). Soit pour ce dernier chiffre 31,25F par mois quand un ouvrier perçoit 8F par jour.

Si les enfants des tués sont déclarés pupilles de la nation, la veuve n'en a pas la puissance paternelle; celle-ci est délégué à un homme, le plus souvent membre de la famille du père décédé.

Ci-dessous pièces à fournir pour la veuve de guerre au ministère de la Guerre:

 

http://img715.imageshack.us/img715/4526/pensions45.jpg

 

Des discours culpabilisent aussi les "mauvaises veuves" qui se sont remariées avant deux ans de veuvage. Dans La voix des morts, en 1926, Eugène Figuière les fustige: "celles dont les pensées jamais ne s'arrêtent vers les pauvres croix de bois. (...) Elles ont bien d'autres choses à faire, cheveux courts, jupes courtes, cigarettes, chapeau cloche et perception régulière de la pension du mort". Mais pour autant, seulement 29% des veuves de guerre vont se remarier.

 

Côté travail, les femmes doivent quitter leurs postes, pour celles qui travaillent encore au sortir de la guerre. "Si elles travaillent, elles risquent de ne pas se marier, et si elle se marient, elles limiteront leurs naissances. (...) Il vaudrait mieux que le ménage soit pour la femme tout son docte entretien, comme dit Molière", écrit le Petit Réveil de Seine-et-Oise.

En 1921, les femmes au travail ne sont pas plus nombreuses qu'avant 1914. Va être interdit toute information sur la contraception et la loi du 31 juillet 1920 définit l'avortement comme un crime.

 

Voir aussi mon livre Le Travail des femmes autrefois aux éditions l'Harmattan.

Rédigé par caroleone

Publié dans #Commémoration de la grande guerre

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