par Rodolfo Chisleanschi le 14 décembre 2022

Les pertes économiques dues à la sécheresse et le besoin pressant d'obtenir des devises étrangères ont conditionné presque toutes les questions socio-environnementales de l'année.
De nombreux incendies, des affrontements de plus en plus violents entre les communautés indigènes et les forces de sécurité, et l'enregistrement de deux jaguars adultes dans le Chaco ont été les événements les plus marquants de l'année.

"L'agenda environnemental doit également être productif. Dans le pays et la région dans lesquels nous vivons, cinq enfants sur dix vivent dans la pauvreté. La seule solution pour sortir de ce niveau d'opprobre est la production, mais nous devons comprendre la nécessité de modifier les méthodes de production qui ne peuvent plus être celles du XXe siècle", déclare Juan Cabandié, ministre argentin de l'environnement et du développement durable, qui désigne directement l'axe central autour duquel tourne pratiquement tout ce qui s'est passé en matière d'environnement en Argentine en 2022.

L'objectif productif répond à une raison très concrète : l'Argentine doit payer une dette de 44 milliards de dollars au Fonds monétaire international (FMI), ce qui la contraint à procéder à un ajustement sévère de ses dépenses budgétaires et à se procurer désespérément des devises étrangères grâce aux exportations.

Le résultat est visible derrière plusieurs des événements qui ont marqué l'année civile. De la prolifération des incendies aux discussions autour de l'actualisation tant attendue de la planification territoriale des forêts indigènes dans des zones aussi sensibles et vulnérables que le Gran Chaco ; et de la nouvelle extension de la loi sur les zones humides au Congrès à la reprise de projets d'énergie hydroélectrique à fort impact environnemental. Il y a aussi les conflits de plus en plus fréquents avec les communautés indigènes qui réclament la restitution de leurs territoires ancestraux, et les incitations constantes à la réalisation de projets agro-industriels, d'élevage, d'extraction minière et d'hydrocarbures, au prix d'une dégradation environnementale de divers écosystèmes.

📷 Déforestation dans le département d'Alberdi, Santiago del Estero. Décembre 2021. Photo : avec l'aimable autorisation de Greenpeace.

En outre, et pour la troisième année consécutive, le phénomène climatique La Niña a fait sentir son influence, prolongeant une situation de sécheresse qui affecte les écosystèmes ainsi que les activités humaines et l'économie nationale. Le dernier rapport de la Direction nationale des risques et des urgences agricoles porte à 163 millions d'hectares la superficie touchée par le manque de précipitations, ce qui signifie que la récolte de 3,45 millions d'hectares de blé est en danger. Une étude du Mouvement CREA, une organisation d'entrepreneurs agricoles, estime les pertes causées par cette situation à 2,5 milliards de dollars. Le déficit causé par ce manque d'eau est, paradoxalement, la goutte d'eau qui fait déborder le vase et relance le débat entre la production (ou le développement économique) et la conservation des espaces et des ressources naturelles.

Le mauvais : terre brûlée et une loi qui n'a pas encore été adoptée

Entre 2021 et 2022, le feu a touché plus de 1,8 million d'hectares dans 23 des 24 districts du pays (seule la ville de Buenos Aires a été épargnée). Cette année, tout a commencé en janvier dans la province de Corrientes, où les incendies ont dévasté 12 % de la superficie provinciale selon le rapport de la station expérimentale de l'Institut national de technologie agricole, et s'est propagé jusqu'en décembre, lorsque plus de 8 000 hectares ont brûlé en Terre de Feu, doublant presque en 2022 les superficies brûlées un an plus tôt.

Les causes d'une telle prolifération d'incendies sont multiples et l'augmentation de 3000 % du budget alloué au système national de gestion des incendies s'est avérée inutile pour réduire les points chauds et agir dès les premières étincelles. Le changement climatique, la diminution des nappes phréatiques, la mauvaise prévention et les moyens limités pour agir dès que les premières flammes se propagent ne sont que quelques-unes des raisons, mais une se démarque des autres : l'intentionnalité liée au brûlage des pâturages pour l'activité agricole ou les développements immobiliers.

📷 Un groupe de caïmans se rafraîchissant dans un trou d'eau, avec en toile de fond la fumée causée par les incendies. Photo : avec l'aimable autorisation d'Emilio White.

Entre août et octobre, Rosario - la deuxième ville d'Argentine en termes de population - a été engloutie dans d'épais nuages de fumée à cause des incendies qui brûlent sur les îles du delta du fleuve Paraná, situées sur la rive orientale du fleuve. Pendant plusieurs jours et selon la direction du vent, les cendres ont envahi l'air, compliquant la respiration et causant d'innombrables problèmes de santé, dans une situation qui s'est répétée année après année lorsque la saison du renouvellement des pousses qui nourrissent le bétail de plus en plus abondant arrive.

L'augmentation du nombre de bovins et la diminution de l'humidité entraînent des incendies incontrôlables. "Avant, on pouvait allumer une allumette, mais aujourd'hui tout est en feu à cause du changement climatique", a déclaré Graciela Camaño, députée nationale de la coalition d'opposition Consenso Federal, dans une interview accordée à Mongabay Latam.

"Il existe un réseau de grand pouvoir et de complicité avec les propriétaires de ces champs, avec ceux qui accordent des permis pour y garder le bétail, avec le pouvoir judiciaire et avec le pouvoir économique qui doit être démantelé", dénonce le ministre Cabandié. En 2020, son ministère a intenté une action en justice contre certains des propriétaires fonciers où des incendies ont été détectés, mais l'affaire est bloquée dans les tribunaux d'Entre Ríos, la province à laquelle appartiennent les îles.

"Le problème le plus grave est que, année après année, il y a un impact cumulatif des incendies", explique Raúl Montenegro, biologiste, professeur à l'université de Cordoba et lauréat du prix Nobel alternatif 2004. "Dans ma province, les plus de 10 000 hectares brûlés cette année doivent être ajoutés aux 50 000 hectares brûlés en 2020 et 2021", poursuit Montenegro, qui ajoute à cette détérioration "le défrichement [déforestation] effectué pendant la même période et la destruction de la biodiversité par l'application massive de pesticides".

📷 Incendies dans la réserve privée de Don Luis, dans la province de Corrientes. Photo : Emilio White.

De nombreuses autres régions du pays ont souffert des incendies, mais les événements survenus à Iberá et dans le delta ont relancé la pression en faveur de l'adoption de la loi sur les zones humides, longtemps retardée. L'idée de promulguer une loi qui fournirait un cadre général pour la protection de ces écosystèmes (ils couvrent 21% de la surface de l'Argentine) est contrariée depuis dix ans, et 2022 n'a pas fait exception. Malgré la présentation d'une douzaine de projets de loi, la question a subi des retards dans son traitement au sein des différentes commissions de la Chambre des députés.

"L'agrobusiness, l'exploitation minière et le développement immobilier sont les lobbies qui agissent derrière les législateurs et empêchent tout progrès. L'exploitation du lithium dans les salines est la question qui concerne le plus les provinces du nord ; et l'agrobusiness, les provinces de la Mésopotamie et de la Pampa", explique Nadia Boscarol, biologiste et coordinatrice politique du programme Blue Corridor à la Wetlands Foundation/Wetlands International.

Le 10 novembre, un consensus a été atteint pour que la question puisse être débattue à la Chambre des députés, mais elle n'a finalement pas été débattue en séance publique.

Ce qui est inquiétant : les projets de loi économiques controversés

"Tout le monde célèbre l'apparition des jaguars comme quelque chose de vertueux, mais il y a des représentants de secteurs qui ne lient pas leur conservation à la préservation des forêts indigènes sur pied. Nous devons changer les paradigmes de production et apprendre à regarder les choses différemment", déclare Marta Soneira, ministre de l'environnement et du développement durable du Chaco.

Les discours en faveur d'une transformation du mode de production se multiplient et il y a des fonctionnaires et des législateurs qui soutiennent résolument cette voie, mais 2022 laisse trop d'exemples en sens inverse qui ouvrent un panorama de préoccupations. En voici trois.

Tout d'abord, il y a le projet de loi sur le développement agro-industriel, une loi en instance devant le Congrès dont l'objectif, comme l'a déclaré le gouvernement national dans sa présentation, est de consolider l'Argentine en tant que leader du commerce international des produits alimentaires. La loi envisagerait, entre autres mesures, des avantages fiscaux pour l'achat de semences et d'engrais transgéniques et élargirait la frontière agricole pour atteindre 200 millions de tonnes de céréales destinées à l'exportation. "C'est un plan qui continue à approfondir le modèle d'agro-exportation et le lobby des entreprises monopolistiques", se plaint Agustín Suárez, porte-parole de l'Unión de Trabajadores de la Tierra, une organisation qui regroupe les producteurs agricoles familiaux.

📷 La quasi-totalité du centre du continent - l'Amazonie, le Cerrado, la Chiquitania et le Chaco - est consacrée à la même activité économique : l'exportation de matières premières, principalement des céréales et de la viande vers l'Asie et l'Europe. Photo : Marcos Beltramino.

Le projet entre en conflit avec les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre du pays. "L'augmentation prévue de la production est en opposition directe avec l'objectif de neutralité carbone d'ici 2050", explique María Marta Di Paola, titulaire d'une maîtrise en relations économiques internationales. Les différentes utilisations des sols sont actuellement à l'origine de 37 % des émissions de l'Argentine, selon le dernier inventaire national des gaz à effet de serre disponible en 2019, et la prévision d'une nouvelle expansion de l'activité jette un doute sur la réalisation de l'objectif, malgré les promesses d'application de la haute technologie pour y parvenir.

D'autre part, il y a les explorations sismiques controversées pour les hydrocarbures dans la mer d'Argentine. Un an après qu'une mesure de précaution ait interrompu le début des travaux autorisés par le gouvernement pour la recherche de gaz et de pétrole à quelque 300 kilomètres des côtes de Buenos Aires, la Cour d'appel a annulé cette sanction. "Ce jugement est une condamnation de la mer argentine car il ignore les preuves que cette activité affecte directement le climat, la biodiversité marine et les communautés", déclare Luisina Vueso, coordinatrice de la campagne océans de Greenpeace. La décision du tribunal permet à la société norvégienne Equinor, qui est chargée de l'exploration, de commencer les travaux, même si la bataille juridique peut se poursuivre devant les tribunaux supérieurs. La zone prévue pour les travaux est une zone de passage lors des migrations annuelles de la baleine franche australe (Eubalaena australis), parmi de nombreuses autres espèces qui habitent le plateau continental.

📷 Affiche contre les plateformes pétrolières offshore devant l'une de ces structures. La justice argentine a autorisé l'exploration pour ouvrir de nouveaux puits à 300 kilomètres des côtes de Buenos Aires. Photo : Mitja Kobal/Greenpeace.

La prochaine décision controversée du gouvernement concerne la reprise de la construction des barrages Néstor Kirchner et Jorge Cepernic sur le fleuve Santa Cruz, suite à un récent accord entre les gouvernements argentin et chinois, pays auquel appartient la principale entreprise de construction. "Ce n'est pas une priorité au niveau national, et on avance à tâtons car l'un d'entre eux - le barrage Kirchner - est au point mort parce qu'il y a eu une erreur de calcul dans le choix du site et qu'ils doivent le changer", résume Sofía Nemenmann, cofondatrice de la plateforme Río Santa Cruz Sin Represa (fleuve Santa Cruz sans barrages).

La construction des barrages a été la cible de critiques dès le début, et cela s'est accentué l'année dernière lorsque le manque de fiabilité des études d'impact environnemental est devenu évident. "La Cour suprême de justice a demandé à l'Institut national de prévention sismique de produire un rapport et celui-ci était lapidaire. Il indique qu'il n'existe pas d'études adéquates des failles géologiques qui traversent la rivière ni d'informations suffisantes pour prendre en compte les effets sur ces failles", indique le rapport.

La construction des barrages a fait l'objet de critiques dès le départ, qui ont atteint leur paroxysme l'année dernière lorsque le manque de fiabilité des études d'impact environnemental a été révélé. "La Cour suprême de justice a demandé à l'Institut national de prévention sismique de produire un rapport, et celui-ci était lapidaire. Cela indique qu'il n'existe pas d'études appropriées sur les failles géologiques qui traversent la rivière, ni d'informations suffisantes pour envisager les effets que le poids de l'eau du nouveau lac qui sera créé par le barrage pourrait avoir sur ces failles", explique Nemenmann.

Le pire : l'éternelle marginalisation des peuples autochtones

Le 4 octobre, les forces fédérales ont expulsé la communauté mapuche Lafken Winkul Mapu des terres qu'elle revendique comme ses terres ancestrales à Villa Mascardi, à quelques kilomètres de San Carlos de Bariloche. La procédure comprenait l'arrestation et le transfert en garde à vue de femmes (dont l'une était enceinte et sur le point d'accoucher) et de leurs enfants, et a conduit à la démission d'Elizabeth Gómez Alcorta, ministre de la Femme, du Genre et de la Diversité.

Quelques mois plus tôt, à Andalgalá, dans l'État de Catamarca, à l'autre extrémité de la cordillère des Andes, la police locale a utilisé des balles en caoutchouc pour réprimer les protestations des habitants contre les travaux de faisabilité du projet Agua Rica-MARA, une mine de cuivre, d'or et d'argent à ciel ouvert située sur les flancs de la montagne Aconquija, à laquelle s'opposent depuis une décennie les habitants et les communautés indigènes Diaguita de la région. Pendant ce temps, dans les hautes terres de Jujuy, la communauté indigène de Collamboy a dénoncé "l'usurpation des pâturages traditionnels" par la société transnationale Minera de Litio Australes S.A. et le gouvernement provincial.

📷 Des membres de la communauté guaranie Mbyá, dans la province de Misiones, demandent l'application de lois défendant leur droit de posséder les terres de leurs ancêtres. Photo : communauté guarani Mbyá.

Une fois de plus, l'année 2022 a été émaillée de conflits socio-environnementaux et de mauvaises nouvelles provenant de différentes régions du pays où vivent des communautés de peuples indigènes. Du nord au sud, nous souffrons d'un "terricide" qui tue toutes sortes de vie", souligne Evis Millán, militante du Mouvement des femmes et des diversités indigènes pour le bon vivre (Movimiento de Mujeres y Diversidades Indígenas por el Buen Vivir).

Avec des caractéristiques différentes selon qu'elles sont originaires des régions montagneuses, du Chaco ou des provinces centrales du pays, les communautés partagent un point commun dans leurs revendications : "Le modèle de méga-extraction qu'on veut nous imposer à tout prix n'est pas compatible avec notre mode de vie, où l'eau et la montagne sont des éléments centraux de la production et de la vie et non des marchandises à exploiter", affirment les membres de l'Union des peuples de la nation Diaguita de Catamarca. "Derrière la militarisation de nos terres se cachent des intérêts immobiliers, miniers et forestiers", dénonce Millán, membre de la communauté mapuche Pillan Mahuiza, en Patagonie centrale.

Il y a eu peu de réponses à une situation qui n'est pas nouvelle. Le plus frappant a été le lancement, en novembre, du Frente Indígena Plurinacional (Front indigène plurinational), une table ronde qui cherche à réunir des représentants des anciens habitants de l'Argentine et des organes de décision politique dans le but de légiférer "avec les peuples indigènes et non pour eux".

L'initiative s'est toutefois heurtée à une certaine résistance depuis son lancement. "Il nous est difficile de croire en un État qui, depuis des siècles, mène la même politique de génocide", déclare Evis Millán. En 2022, la lutte des Mapuche a généré des escarmouches de plus en plus fréquentes et violentes. Rien ne permet de penser que l'année prochaine sera différente.

Le répétitif : une déforestation qui se poursuit sans relâche

Les dernières données officielles publiées cette année, bien que portant sur l'année 2021, étaient une fois de plus catégoriques : 54 % des zones déboisées appartenaient à des zones classées " rouges " ou " jaunes " selon les plans d'utilisation des terres forestières indigènes (OTBN) des provinces respectives où la déforestation a eu lieu. En d'autres termes, il s'agit de zones dans lesquelles il est interdit d'exercer tout type d'activité productive ou dans lesquelles ces activités doivent être menées sans toucher un seul arbre. Dans les deux cas, il s'agit d'endroits où la déforestation est interdite par la loi.

Comme c'est le cas depuis le début de ce siècle, la région du Chaco en Argentine subit les pires conséquences d'une pratique que ni la loi forestière de 2007, ni les autorités nationales ou locales concernées n'ont pu arrêter. Cette année, les discussions les plus importantes ont eu lieu dans la province du Chaco, où, après près d'une décennie de retard, l'OT susmentionné n'a toujours pas été mis à jour.

"Malgré la sentence judiciaire ordonnant d'arrêter la déforestation et de résoudre les graves problèmes détectés, 2022 a été l'année qui a enregistré la plus grande déforestation depuis 2018 et au cours de laquelle a été enregistrée la plus grande déforestation illégale", a dénoncé l'organisation Somos Monte le 7 décembre, après la présentation d'une nouvelle proposition de carte de gestion forestière par l'État qui, selon le groupe, ne respecte pas plusieurs directives de légitimité.

La précédente, signée par le gouverneur du Chaco, Jorge Capitanich, avait déjà été critiquée. "Elle réduit la valeur de conservation de plus de 300 000 hectares de forêts indigènes ; elle autorise le défrichement de jusqu'à 20 % des propriétés situées dans les zones jaunes, en violation de la législation nationale ; elle ne sanctionne pas ceux qui ont déboisé illégalement et ne les oblige pas à restaurer la forêt ; Le comité qui a élaboré la proposition n'était composé que de représentants de l'industrie des secteurs agricole et forestier, et il n'y a pratiquement pas eu de consultation publique comme le prévoit la loi", résume Matías Mastrángelo, l'un des 1 000 scientifiques du Conseil national de la recherche scientifique et technique qui, en novembre, ont envoyé une lettre au gouverneur provincial pour lui demander de retirer sa proposition et d'ouvrir le débat à l'ensemble de la société.

"Nous devons être honnêtes. Au cours des deux dernières années, 26 000 hectares ont été déboisés illégalement et cela nous préoccupe", déclare Marta Soneira, ministre provinciale de l'environnement et du développement durable, qui plaide en faveur d'une amélioration des mécanismes de contrôle mais reconnaît que le nouvel OTBN "ne propose toujours pas de politique de déforestation zéro, bien que les zones rouge (interdiction totale) et jaune (production liée à la conservation du milieu naturel) soient augmentées.

Ce qui se passe au Chaco, en tout cas, n'est pas une exception. À Salta, aucun accord n'a été trouvé pour mettre à jour la carte avec une nouvelle ordonnance, et au niveau national, le budget alloué à la loi forestière pour 2023 représente à peine 10,35 % de ce que la norme juridique elle-même établit. Cela démontre clairement que pour les autorités argentines, la conservation est encore loin d'être une priorité.

Les points positifs : plus de zones protégées et réintroduction d'espèces

Un nouveau parc national, l'extension de deux autres, un avis favorable à la création d'une quatrième zone protégée, qui aura sûrement lieu en 2023, et l'apparition simultanée de deux jaguars mâles adultes (Panthera onca) dans le Chaco sont autant de petites perles dans une année particulièrement difficile pour la conservation en Argentine.

"La réalité est qu'au cours des 20 dernières années, une politique d'État a été maintenue en ce qui concerne la création de nouveaux parcs nationaux avec le soutien de tous les blocs politiques et l'appui consensuel des provinces et de leurs assemblées législatives", déclare Federico Granato, président de l'administration des parcs nationaux (APN), et dans ce sens, il souligne ce qui s'est passé avec Ansenuza, la plus grande zone humide saumâtre du continent : "Sa création en tant que parc est un exemple de la façon de procéder pour créer une zone protégée. Nous avons collaboré avec les maires locaux, les ONG qui ont canalisé les contributions des donateurs et les communautés liées au territoire et au réseau qui constitue sa diversité naturelle et culturelle", explique M. Granato.

📷 Un groupe de flamants roses (Phoenicopterus chilensis) s'alignent sur le front de la lagune. Cette espèce peut être observée toute l'année à Ansenuza car elle y a ses zones de nidification. Photo : Yanina Druetta.

Plus de 300 espèces d'oiseaux se rassemblent chaque été à Ansenuza, un lac endoréique situé dans la province de Cordoba, au centre du pays. Son accès au plus haut niveau de protection de l'environnement est directement lié à l'extension de 8 000 hectares du parc national de l'Aconquija, situé à près de 800 kilomètres au nord, à Tucumán, puisque plusieurs des cours d'eau qui forment le bassin de la rivière Salí-Dulce, principal affluent de l'Ansenuza, prennent leur source dans ses collines.

Le parc national du Pré-Delta, dans la province d'Entre Ríos, s'est également agrandi grâce à l'ajout d'un ravin qui contribue à former des corridors biologiques reliant des espèces de flore et de faune de différentes régions d'écosystèmes, comme le Chaco et la jungle de Misiones. À court terme, la Laguna del Palmar, sur le fleuve Paraguay dans la province de Chaco, devrait être approuvée comme nouvelle zone protégée, et le parc national Islas de Santa Fe, sur le fleuve Paraná, devrait être agrandi.

Les deux jaguars que plusieurs pièges à caméra ont réussi à capturer dans le nord du Chaco ont également été la grande surprise de l'année. Avec une population estimée à seulement 15 spécimens dans toute la région, l'apparition de ces individus laisse espérer une augmentation de la présence du tigre d'Amérique dans une zone où son rôle de prédateur supérieur est essentiel pour l'équilibre de la biomasse.

La découverte du premier nid d'aigle noir et blanc (Spizaetus melanoleucus) dans une zone protégée de Misiones et l'enregistrement dans le parc national d'Iguazú d'un tyran de Cayenne (Myiozetetes cayanensis), un oiseau dont la limite méridionale de distribution se situait jusqu'à présent au Brésil, viennent s'ajouter au chapitre des bonnes nouvelles en matière de conservation de la biodiversité.

D'autre part, la présentation de la première stratégie nationale sur les espèces exotiques envahissantes a été saluée comme un événement pour les personnes impliquées dans la lutte contre ces espèces. "Du nord au sud, nous avons des espèces exotiques, à commencer par le ligustrum à Jujuy, qui appauvrit la forêt et retire des ressources aux populations indigènes, jusqu'à la Terre de Feu, où nous avons les problèmes environnementaux et économiques du castor et du vison d'Amérique", explique Sergio Zalba, consultant de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture pour l'élaboration de la stratégie.

Image principale : Déforestation dans le département d'Alberdi, Santiago del Estero. Décembre 2021. Photo : avec l'aimable autorisation de Greenpeace.

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traduction caro d'un article de Mongabay latam du 14/12/2022

Las deudas ambientales de Argentina en 2022: incendios y sequía intensa, conflictos con los pueblos indígenas y creciente deforestación

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bilan environnemental