Pablo Neruda : La bonté combattante

Publié le 23 Octobre 2012

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La bonté combattante

 

Mais je n’eus pas la bonté morte dans les rues.

Je refusai son aqueduc, ce n’était là que purulence.

Et je n’effleurai pas l’eau polluée de sa mer.

 

Je creusai, extrayant le bien comme un métal,

plus loin que les yeux qui mordaient,

et mon cœur né dans les épées

grandit en pleines cicatrices.

 

Je ne sortis pas comme un fou poignarder

l’homme

Ou l’éblouir à coups de terre.

 

                                           Mon rôle

n’était pas de blesser, de cracher le venin

ni d’attacher l’être sans défense à des liens

qui croiseraient sur lui leurs fouets glacés.

Je n’allai pas chercher l’ennemi sur la place,

le guettant d’une main masquée :

je ne voulus que laisser croître mes racines,

et le sol qui déploya ma haute mâture

décrypta le secret gisant des larves.

 

Lundi voulut me mordre et je lui tendis quelques

feuilles.

Mardi vint m’insulter : je restai endormi.

Puis mercredi surgit avec ses dents hargneuses :

je le laissai passer : je forgeais mes racines.

Quand jeudi arriva avec sa lance noire,

son fer empoisonné d’écailles et d’orties,

je l’attendis, bien campé dans ma poésie,

l’aveuglant d’une grappe au plein clair de la

lune.

 

 

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Venez ici vous briser contre cette épée.

 

Venez vous écraser sur mes domaines.

 

Venez en jaunes régiments

Ou avec la congrégation des sulfureux.

 

Vous mordrez une ombre et un sang de carillons

sous les sept lieues de mes poèmes.

 

Pablo Neruda ( Je suis, chant XVI, le chant général)

 

 

 


Rédigé par caroleone

Publié dans #Fragments de Neruda

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H
<br /> Bonsoir Caro<br /> <br /> <br /> Pas trop de temps et beaucoup de fatigue ces derniers jours, mais celui là, je ne pouvais pas le laisser passer ! <br /> <br /> <br /> La poèsie comme on l'aime, celle qui réfléchie,qui se révolte,  qui lutte et qui rend fort ! Neruda est vraiment un maestro qui orchestre les mots pour sublimer leur musique cachée. Sa<br /> poèsie est vraiment une arme de bonté, qui combat sans tuer et qui est invincible !<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Quand plus rien de personnellement exaltante n´est attendu,<br /> Plus on palpite et plus on est  proche de la conscience,<br /> Existant comme un fauve, aveuglement affirmé,<br /> comme un pouls qui frappe les ténèbres,<br /> <br /> <br /> quand on regarde en face<br /> les vertigineux yeux clairs de la mort, <br /> on dit les vérités : <br /> Les barbares, les terribles, les amoureuses cruautés.<br /> <br /> <br /> On dit les poèmes <br /> qui élargissent les poumons de tous ceux qui,<br />  asphyxiés,<br /> demandent a être,  demandent du rythme, <br /> demandent des lois pour ce qu´ils éprouvent d´excessif.<br /> <br /> <br /> Avec la vitesse de l'instinct, <br /> avec l´éclair du prodige, <br /> comme une évidence magique, ce qui est réel nous transforme <br /> en ce qui est identique à à lui-même.<br /> <br /> <br /> Poésie pour le pauvre, poésie nécessaire <br /> comme le pain de chaque jour, <br /> comme l'air que nous exigeons treize fois par minute, pour être et tant que nous sommes donner un oui qui nous glorifie.<br /> <br /> <br /> <br /> Parce que nous vivons par à-coups, parce que c´est à peine s´ils nous laissent <br /> dire que nous sommes ceux qui nous sommes,<br /> nos chants ne peuvent être, sans péché, un ornement. <br /> Nous touchons le fond.<br /> <br /> <br /> Je maudis la poésie conçue comme un luxe <br /> culturel par ceux qui sont neutres <br /> Ceux qui, en se lavant les mains, se désintéressent et s´évadent. <br /> Je maudis la poésie de celui qui ne prend pas parti jusqu'à la souillure.<br /> <br /> <br /> Je fais miennes les fautes. Je sens en moi à tous ceux qui souffrent <br /> et je chante en respirant. <br /> Je chante, et je chante, et en chantant par delà mes peines<br /> personnelles, je m'élargis.<br /> <br /> <br /> J´aimerais vous donner la vie, provoquer de nouveaux actes, <br /> Et je calcule en conséquence, avec technique, ce que je peux faire. <br /> Je me sens un ingénieur du vers et un ouvrier <br /> qui travaille avec d'autres l'Espagne dans ses aciers.<br /> <br /> <br /> Telle est ma poésie : poésie- outil <br /> a la fois battement du coeur de l´unanime et aveugle. <br /> Telle est, arme chargée de futur expansif <br /> avec laquelle je vise ta poitrine.<br /> <br /> <br /> Ce n'est pas une poésie pensée goutte a goutte. <br /> Ce n'est pas un beau produit. Ce n'est pas un fruit parfait. C´est similaire a l'air que nous respirons tous<br /> et c´est le chant qui donne de l´espace a tout ce nous portons en nous.<br /> <br /> <br /> Ce sont des mots que nous répétons en les sentant<br /> nôtre , et ils volent. Ils sont plus de ce qu´ils nomment. <br /> Ils sont le plus nécessaire : ce qui n'a pas de nom. <br /> Ce sont des cris au ciel, et sur terre ce sont les actes.<br /> <br /> <br /> GABRIEL CELAYA - La poèsie est une arme chargée de futur<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />
C
<br /> <br /> Bonsoir Serge,<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Je te remercie sincèrement d'avoir pris le temps de venir commenter ce texte et de nous offrir ce magnifique poème de Celaya. Il y a tant à apprendre et à comprendre dans ses paroles, c'est riche<br /> d'enseignements pour qui veut s'en donner la peine. J'y ai lu quelques petits messages qui ont fait mouche en plein coeur tout comme avec les écrits de Pablo .<br /> <br /> <br /> C'est chouette de se découvrir une arme pacifiste et savoir quels pouvoirs elle détient <br /> <br /> <br /> J'aimerais en jouer plus souvent et mieux mais il faut encore lire, apprendre et découvrir.<br /> <br /> <br /> Merci encore mon ami, bonne soirée de repos et bonne journée de jeudi ( attention jeudi arrive avec sa lance noire, son fer empoisonné d'écailles et d'orties)...chais pas où il allait chercher<br /> tout ça en attendant.<br /> <br /> <br /> Bises<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> caro<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> Quel beau compagnon de route, Caro,  et on se rend bien compte que les plus profonds de tes textes sont imprégnés de son humanité.<br /> <br /> <br /> Bises<br /> <br /> <br />  <br />
C
<br /> <br /> Bonsoir Michèle,<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> C'est vrai que s'il y a un auteur qui m'inspire et m'apporte une influence, ce ne peut-être que lui car je l'ai beaucoup lu et je le lis encore. J'ai toujours près de moi ses livres et je sais<br /> bien dans lequel puiser selon les thèmes pour y trouver de la force. Ces écrits sont de prodigieuses sources de connaissances, de la géographie, de l'histoire, de la politique, de l'humanisme, de<br /> la nature, des gens de la terre, des gens simples, des choses de la vie, des sentiments aussi car les poèmes d'amour à Mathilde sont de purs joyaux, la mer, les coquillages, le pain, le vin tout<br /> y a sa place pour peu que ce soit des éléments de la vie simple de l'homme. Sans chichis ni bling bling, du pur de l'authentique. Il n'y a à mes yeux qu'un auteur non poète qui puisse rivaliser<br /> sur les chants de la terre c'est Giono. Giono, l'autodidacte écrit des phrases qui sont autant de poèmes tout au long de ses livres.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> J'ai besoin d'aller à nouveau puiser des forces dans le puits de la pachamama et ses substances aimables et animées qui dansent dans nos yeux d'humanistes épris de liberté et de sincérité.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Bises et merci de ta visite<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> caro<br /> <br /> <br /> <br />
S
<br /> Pour réhausser le niveau de mon dernier commentaire , voici un poème dédié par Aragon à Pablo Neruda, dans le<br /> "nouveau crève-coeur" (dont Ferrat a extrait "complainte de Pablo Neruda)  :<br /> <br /> <br /> La boite à papillon<br /> <br /> <br /> "Tu m'as donné l'eau bleue et la boue jaune<br /> "Le maïs fauve et la couleur du bruit<br /> "Les jeux du jour les ailes de la nuit<br /> "Les papillons qu'un pied nu d'enfant suit<br /> "Tu m'as donné le ciel de l'Amazone<br /> <br /> <br /> "Tu m'as donné le coeur et la magie<br /> "Les souvenirs d'un amour sans miroir<br /> "Les charmes blancs des après midi noirs<br /> "Les yeux perdus des enfants sans mémoire<br /> "Les papillons que brûle la bougie<br /> <br /> <br /> "Tu m'as donné ces papillons lyriques<br /> "Leurs corsets gris par l'épingle tenus<br /> "La feuille morte et la fleur inconnue<br /> "L'ombre du feu que poursuit un pied nu<br /> "Tu m'as donné l'azur de l'Amérique<br /> <br /> <br /> "Tu m'as donné le parfum qui grisa<br /> "Notre jeunesse à nos cheveux pareille<br /> "Tu m'as donné les taches du soleil<br /> "Les papillons qu'un rire d'enfant effraye<br /> "Je les ai mis dans la chambre d'Elsa <br /> <br /> <br /> Amitiés<br />
C
<br /> <br /> Ouah!! c'est superbe !<br /> <br /> <br /> Imagine un peu Serge, nos compagnons de route tous deux communistes qui se livrent à une joute poétique !<br /> <br /> <br /> C'est un  rêve que je n'aurais jamais vu......il manque Maïakovski et Federico et là, c'est direct au paradis d'allah !! ( pour ceussent qui y croient)<br /> <br /> <br /> Elsa avait une sacrée chance quand même......on lui écrivait des poèmes magnifiques qui ont fini en chanson et on habillait sa chambre des mots de Pablo, je l'envie pour le coup.<br /> <br /> <br /> Merci beaucoup Serge, ça me fait plaisir de vous voir apporter vos mots aussi.<br /> <br /> <br /> Bises<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> caro<br /> <br /> <br /> <br />
S
<br /> C'est toute la différence entre un grand poète humaniste et les autres, Caro !<br /> <br /> <br /> Voilà qui devraient rendre plus humbles ceux qui veulent poéter plus haut que<br /> <br /> <br /> leur c...  <br /> <br /> <br /> Amitiés<br />
C
<br /> <br /> Bonsoir Serge,<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> En effet c'est là toute la différence et les mots de Pablo ont une profondeur que peu d'auteurs ont, mais il y a de superbes textes d'autres auteurs pour parler et décrire les maux des hommes et<br /> les valeurs qui justement sont remises en question en ce moment. Et l'on en est amené à se dire que nos combats à nous autres sont bien puérils, bien petits, néanmoins il convient de mettre à<br /> l'oeuvre et tester ses capacités de réaction et ses règles de morale.<br /> <br /> <br /> C'est vrai c'est chiant et pas marrant pour les autres cette impression de sérieux et d'avancer porteur de savoirs et de règles de conduite mais cela vaut mieux de jeter ça sur la toile que des<br /> insultes gratuites.<br /> <br /> <br /> Et puis pour arriver à faire de la poésie du niveau de Pablo il faut être investi d'une sacrée mission et avoir reçu de sacrées lettres de noblesse. Ce n'est pas mon cas et bien loin de moi<br /> l'idée d'un jour ressembler à un tel écrivain.<br /> <br /> <br /> Tu vois, je sais toujours trouver en lui ma source d'inspiration et les mots qui me conviennent.<br /> <br /> <br /> Bises et merci de ta visite<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> caro<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
H
<br /> bien dit! rien à ajouter<br /> <br /> <br /> viva el canto general!<br /> <br /> <br /> il ne te manque ton Mikis Theodorakis même si je pense qu'il existe déjà en toi et cherchera un jour à se réveiller et se révéler<br /> <br /> <br /> bises et pensées émues<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Je vais dire la légende<br /> De celui qui s'est enfui<br /> Et fait les oiseaux des Andes<br /> Se taire au cœur de la nuit<br /> <br /> Le ciel était de velours<br /> Incompréhensiblement<br /> Le soir tombe et les beaux jours<br /> Meurent on ne sait comment<br /> <br /> [Refrain] :<br /> Comment croire comment croire<br /> Au pas pesant des soldats<br /> Quand j'entends la chanson noire<br /> De Don Pablo Neruda<br /> <br /> Lorsque la musique est belle<br /> Tous les hommes sont égaux<br /> Et l'injustice rebelle<br /> Paris ou Santiago<br /> <br /> Nous parlons même langage<br /> Et le même chant nous lie<br /> Une cage est une cage<br /> En France comme au Chili<br /> <br /> [Refrain]<br /> <br /> Sous le fouet de la famine<br /> Terre terre des volcans<br /> Le gendarme te domine<br /> Mon vieux pays araucan<br /> <br /> Pays double où peuvent vivre<br /> Des lièvres et des pumas<br /> Triste et beau comme le cuivre<br /> Au désert d'Atacama<br /> <br /> [Re<br />
C
<br /> <br /> Bonsoir Henri,<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Je suis contente de te voir sur ce poème de Pablo et de voir ces paroles de Ferrat : c'est ma chanson préférée de lui comme tu dois bien t'en douter.<br /> <br /> <br /> Mikis Theodorakis, hola, j'en ai pas souvent lu, je connais plus les auteurs russes à vrai dire.<br /> <br /> <br /> Bises et merci de ton passage poétique, voici la chanson.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Bises<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> caro<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
A
<br /> C'est très beau, et tout est dit.<br />
C
<br /> <br /> Tu as vu c'est fou !!<br /> <br /> <br /> C'est de la magie entre mon compañero Pablo et moi, j'ouvre le volume qui ne me quitte jamais Le chant général et je tombe sur ce poème, sans blague, je fais confiance au clin d'oeil de Pablo<br /> comme d'habitude, je lis et voilà, même pas la peine d'écrire tout est dit. Merci Pablo.<br /> <br /> <br /> Je ne sais pas si Serge-Hobo va trouver une explication à ça <br /> <br /> <br /> Bises et merci de ta visite<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> caro<br /> <br /> <br /> <br />