Mexique : Femmes du cas Atenco , Ni oubli ni pardon !
Publié le 26 Mars 2013
Cas Atenco : l’État Mexicain toujours méprisable, lâche et mensonger…
toujours démonstratif de l’excès de pouvoir dont il est bénéficiaire.
Cela fait déjà sept ans que dans les rues de Texcoco et de San Salvador
Atenco les 3 et 4 mai 2006, les trois niveaux de gouvernement avec l’aide
des trois principaux partis politiques et l’ensemble de l’appareil de
l’Etat mexicain ont déchaîné leur violence et leur brutalité par
l’intermédiaire de leurs forces policières et judiciaires contre des
hommes et des femmes qui défendaient le droit au travail et à la
solidarité avec ceux d’en bas. Suite à ces faits, un groupe de femmes qui
avait été détenues et torturées par l’État mexicain dans son ensemble, a
décidé de porter plainte contre celui-ci pour la torture sexuelle qu’elles
ont subi. Ces plaintes ont commencé au niveau national, où comme on
pouvait s’y attendre, elles ont reçu pour toute réponse le silence et
l’oubli. Ce qui a amené cette plainte à un niveau international tel que la
Commission Inter-américaine des Droits Humains. Durant ces sept ans, elles
ont fait avancer avec dignité cette plainte internationale, pour que soit
jugé l’État mexicain.(1)
Le jeudi 14 mars 2013, Italia Mendez a exposé son cas et présenté ceux des
onze compagnes dénonçantes devant la Commission Inter-américaine des
Droits Humains à Washington. Ces onze compagnes ont décidé avec rage et
dignité de continuer la lutte et la dénonciation de l’attaque perpétrée à
Atenco par l’État Mexicain.
Pour elles, il est clair que l’utilisation de la torture sexuelle est un
outil de contrôle social qui non seulement affecte d’une manière directe
les femmes survivantes, mais aussi les collectifs, les organisations et la
société. Depuis l’opération policière à Atenco en 2006 et durant
l’exposition du cas Atenco à Washington ce 14 mars 2013, l’État continue
de nier qu’il y ait eu des femmes torturées sexuellement en raison d’une
stratégie étatique. Il continue à déclarer avec insistance que ce qui
était arrivé aux femmes sur le parcours vers la prison de Santiaguito, à
Toluca, État de Mexico, était le fait d’actes isolés, accomplis par des
policiers qui ont agi de leur propre chef. Or, il s’agit en réalité d’une
stratégie délibérée à l’encontre des femmes, qui a été employée pendant
les deux jours qu’a duré la répression. (2)
Suite à la réunion des femmes survivantes du cas Atenco à la CIDH à
Washington, représentées d’une part par Italia Mendez et leurs
accompagnateurs du centre de droits humains « Prodh » et d’autre part par
les représentants de l’Etat Mexicain – Andrés Díaz Fernández, membre de
l’équipe de défense du Centre Prodh a déclaré que « le fait pour l’État
Mexicain de présenter aux femmes du cas Atenco une « solution amicale »
représentait la dernière carte qui pouvait être jouée par l’État afin
d’éviter un examen par la Cour et en même temps, cela représentait une
maniéré d’atténuer le cas Atenco partout dans le monde. Il est clair que
par cette proposition, l’intention de l’État était de minimiser le niveau
des violations graves aux droits humains à San Salvador Atenco ».(3)
Bref, l’État Mexicain a tenté en vain durant l’audience publique à la CIDH
par l’intermédiaire de sa représentante Lía Limón García, sous-secrétaire
aux Affaires Juridiques et aux Droits Humains, de négocier une « solution
amicale » avec les onze femmes qui ont été agressées sexuellement pendant
l’opération policière de 2006 à Atenco et qui portent plainte, afin
d’éviter une sanction éventuelle de la Cour Interamericaine des Droits
Humains (CoIDH). Ce que les femmes d’Atenco ont instantanément refusé.
Bárbara Italia Méndez Moreno – représentante des onze femmes qui ont été
agressées sexuellement- a donné lecture d’une lettre écrite par
celles-ci, devant les magistrats Tracy Robinson, Rosa Maria Ortiz et
Rodrigo Escobar (ce dernier étant le rapporteur auprès de la CIDH pour le
Mexique ), les représentants de l’État mexicain, les avocats des victimes
– du Centre de Droits de l’homme Agustín Pro Juárez (le Centre Prodh) et
du Centre pour la Justice et le Droit international (CEJIL) – ainsi que
devant des dizaines de personnes qui se sont rendues à l’audience :
« Nous ne voyons pas de possibilité et ce n’est pas notre désir d’explorer
une solution amicale, puisque l’État a démontré pendant plus de six ans,
non seulement son incapacité à répondre à nos demandes de vérité et de
justice, principalement parce que les seules actions qu’il ait menées
visaient notre dénonciation à niveau inter-américain et international,
mais aussi parce qu’il continue de répandre une fausse information sur ce
qui s’est passé à Atenco et sur la recherche de justice. » (4)
Dans cette missive adressée au mexicain Emilio Álvarez Icaza secrétaire
exécutif de la CIDH, les onze femmes qui soutiennent le cas, enregistré
sous la référence 12.486, ont sollicité le rapport de fond, à fin
d’initier un litige au tribunal inter-américain.
D’autre part, Barbara Italia a rappelé pendant la lecture de la lettre que
« l’État avait eu l’opportunité dès 2006 de démontrer une volonté
politique à fin d’enquêter et sanctionner les violations commises » Le
texte envoyé à la CIDH le 8 mars dernier a été signé par Mariana Selvas
Gómez, Georgina Edith Rosales Gutiérrez, María Patricia Romero Hernández,
Norma Aidé Jiménez Osorio, Claudia Hernández Martínez, Ana María Velasco
Rodríguez, Yolanda Muñoz Diosdada, Cristina Sánchez Hernández, Patricia
Linares, Suhelen Gabriela Cuevas Jaramillo et Bárbara Italia.
Et le combat continue…
« Après six ans de résistance nous continuons à construire la mémoire
collectivement, en cherchant une réparation, non seulement de nous-mêmes,
mais aussi du tissu social, des organisations et des collectifs qui nous
accompagnent. Nous réclamons justice, mais pas uniquement par la
judiciarisation de notre cas à travers des instruments internationaux,
puisque nous savons qu’il n’y a pas de justice à attendre des institutions
(…)Nous ne pouvons réparer ce qui est cassé que si nous continuons à nous
organiser, en luttant pour l’autonomie et la liberté. »(5)
Nous disons à nos compagnes que la lutte continue pour que la mémoire ne
soit pas étouffée par le pouvoir de l’État et de ses institutions. Cette
mémoire, c’est à nous de la nourrir, de la réfléchir, de l’entretenir pour
qu’elle ne tombe pas dans l’oubli comme le souhaiterait l’État.
Les trois passants
Plus d’infos:
http://liberonsles.wordpress.com/les-prisonniers-datenco/
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(1) Déclaration de solidarité avec les femmes dénonçant le cas Atenco
devant la Commission Inter-américaine des Droits Humains. Réseau contre la
Répression et pour la Solidarité (RvsR)
(2) À Atenco : « Nous ne pourrons réparer ce qui est cassé que si nous
continuons à nous organiser » Article écrit en 2012, par Barbara Italia
Mendez
(3) Atenco, ni perdón ni arreglo “amistoso”. Revista Proceso 18/Mar/2013
por Gloria Leticia Díaz
(4) Ibid
(5) Op cit : À Atenco : Nous ne pourrons …par Barbara Italia Mendez