Machu Picchu : un patrimoine menacé par le tourisme
Publié le 2 Juillet 2011
Lima, correspondante - Victime de son succès, le Machu Picchu, élu "nouvelle merveille du monde" en 2007, a une fois de plus échappé de peu à la liste noire du patrimoine en danger de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco). Après de longs débats à Paris, fin juin, les membres du Comité du patrimoine ont décidé de ne pas inclure le site emblématique de la culture inca, toutefois placé "sous haute surveillance".
Les autorités péruviennes devront donc mettre rapidement en place des mesures afin de protéger le Machu Picchu. Après avoir résisté pendant des siècles aux intempéries et séismes fréquents dans la région, il pourrait succomber à la pression touristique.
Les experts de l'Unesco estiment que la forteresse inca est menacée par "un excès de visiteurs". Depuis 2008, chaque jour, 1 600 personnes en moyenne l'ont visitée. "Vous imaginez tous ces gens marchant sur les terrasses agricoles ?, s'indigne l'historien Donato Amado Gonzales, qui vit dans la région de Cuzco. Leur passage détériore forcément le site."
Entrée limitée
Comme lui, nombreux sont ceux qui réclament un contrôle plus strict de l'entrée des visiteurs. "Le Machu Picchu a été construit pour héberger une population de 500 à 600 personnes, mais pas 2 000 par jour", s'inquiète encore le scientifique. Aujourd'hui, l'entrée au site est limitée par l'Institut national de la culture à 2 500 visiteurs par jour.
Les défenseurs de la cité inca, classée au Patrimoine de l'humanité en 1983, s'inquiètent du développement incontrôlé d'Aguas Calientes, un village qui s'étend au pied de la cité, à 2 000 mètres d'altitude, et accueille les touristes de passage. En quelques années, l'endroit s'est transformé en un marché géant, entouré de tous types d'hôtels à l'agencement anarchique. La construction d'une route allant d'un village proche à Aguas Calientes a attiré l'attention de l'Unesco.
Dans les années 1990, le gouvernement d'Alberto Fujimori a provoqué un tollé en voulant construire un téléphérique pour transporter les voyageurs d'Aguas Calientes au Machu Picchu. Le projet est réapparu en 2007, forçant l'Unesco à intervenir contre un ouvrage qui "romprait l'unité de la structure patrimoniale". La lutte continue entre ceux qui voient dans le site le moteur du tourisme national (62 % des touristes souhaitent se rendre dans l'ancienne cité) et les défenseurs du site.
L'alerte de l'Unesco a en tout cas eu des répercussions immédiates sur les célébrations prévues le 7 juillet. La majeure partie des festivités commémorant la "découverte" du Machu Picchu en 1911 par Hiram Bingham aura lieu à Cuzco et non pas sur place, comme initialement prévu. Seules deux cérémonies officielles symboliques devraient avoir lieu dans la cité, en petit comité.
Chrystelle Barbier Article paru dans l'édition du 02.07.11
SOURCE : Papy Mouzeot