Le testament de Bertold Brecht

Publié le 14 Juillet 2010

Le testament de Bertolt Brecht

13-07-2010

 

 

 

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Avignon Off. En présentant « La vie de Galilée », la Compagnie de Grand Soir remet le théâtre de Brecht à la portée de tous. Avec bonne humeur et sans démagogie.

On ne s’étonnera pas que le dramaturge est-allemand se soit intéressé de très près au destin de Galilée, ce savant mathématicien qui affirma, contre toute croyance scientifique mais surtout religieuse, que la terre n’était pas immobile, qu’elle n’était qu’une planète tournant autour du soleil, comme la lune et toutes les autres. Il invente une lunette pour observer de près les astres. La vérité devient trop évidente, le Clergé, qui aime à croire que Dieu l’a placé au centre de l’univers, la refuse en bloc, oppose de fallacieux arguments et menace de torturer Galilée pour affirmations blasphématoires. Le savant, soucieux de son confort et terrorisé par la torture, consent à se rétracter… et continue ses recherches dans la clandestinité malgré une cécité galopante. Comment ne pas songer à Brecht lui-même contraint à des « arrangements » avec le pouvoir politique en pleine ascension dictatoriale ?

 

Les vérités qui dérangent

 

On retrouve dans « La vie de Galilée » les thèmes chers à Brecht : son combat contre les idéologies arbitraires, contre les théories douteuses, acceptées sans discernement sous couvert de religion ou de superstition. On y entend même son cri pour que « les petites gens » accèdent à une vie plus digne. Le but des puissants n’est-il pas de conserver leurs intérêts quoi qu’il arrive, de rester aveugles face aux vérités criantes, aux faits incontestables ? Quand on constate l’inéluctable dégradation de la planète malgré toutes les sonnettes d’alarme tirées depuis des années (y compris par Tchékhov !), comment ne pas admirer une fois de plus l’extraordinaire lucidité du père de « Baal » ? Ce visionnaire propose une solution au désastre annoncé :

 

« Des maîtres, des curés, des princes violents, des adorateurs de la propriété entretiennent une misère millénaire mais artificielle qu’il est manifestement possible d’éliminer en les éliminant eux-mêmes ».

 

Antonia Malinova a magnifiquement compris dans quel univers Bertolt Brecht devient limpide, convainquant. Populaire. On ne peut que la féliciter d’avoir fui les idées tenaces et ennuyeuses qui encrassent la fameuse distanciation brechtienne. Si distanciation il y a, c’est dans son parti-pris de nous inviter dans un cabaret où l’on joue, on « clowne », on danse, on chante, on joue de la musique pour raconter l’extraordinaire destin de Galilée. Les comédiens endossent plusieurs rôles avec un enthousiasme communicatif : un morceau de tulle, une casquette, un simple accessoire suffisent pour que le spectateur s’y retrouve. Ici point de décor, ou plutôt si : un décor musical formidable dessiné par le talent protéiforme de Boris Barcaroli qu’on découvre également comédien.

 

Cette « Vie de Galilée » muscle nos zygomatiques par le rire et nos neurones par la réflexion. On a participé à une vraie fête. Un évident partage entre acteurs, auteur et spectateurs. Une fête quoi ! Où l’on peut même boire un verre de Château Coupe-Roses. Un petit rosé gouleyant comme Galilée savait en apprécier.

 

 

Jean-Louis Châles pour le journal la marseillaise

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Rédigé par caroleone

Publié dans #Arts et culture

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