La poésie résistante : Viviane Dubray-Snoec

Publié le 14 Février 2011

VIVIANE DUBRAY-SNOEC

 

 

C'est le 22 octobre que, prisonnière comme eux à Châteaubriant, elle les vit partir pour la mort. C'est le lendemain, le 23 octobre 1941, que Viviane Dubray- Snoec écrivit le poème que vous êtes en train de lire.

 

Poème ou témoignage ?

 

Poème et témoignage. Le choc entre les deux, entre deux mêmes silex si différents et l'éblouissante clarté qui en jaillit...

Ets-il incongru ou indispensable d'ajouter que Viviane Dubray- Snoec avait un fils adolescent, un de ceux que les allemands en fuite fusillèrent, en 1944, à la carrière du bois de Boulogne ?

 

Sur elle, nous n'avons pu en savoir plus....

 

Alain Guérin ( 100 poèmes de la résistance)

 

 

 

 

 

22 OCTOBRE

 

 

Châteaubriant, Choisel, Carrière sanglante !

Ces mots qui font frémir prononcés à voix lente

Pour qu'ils soient à jamais incrustés dans nos coeurs

Symbole d'héroïsme et vision d'horreur !

 

Au seuil de la baraque, immobile et tremblante,

La conscience troublée de me voir impuissante,

Je vois gardes français et soldats allemands

Mitrailleuses braquées, mettre le siège au camp.

 

Dans le silence alors s'avancent les otages

Ils saluent poing levé, criant ferme : " Courage!"

Calmes, simples, fiers, sublimes et si beaux

Qu'ils semblent les vainqueurs de leurs tristes bourreaux.

 

Qu'ils soient jeunes ou vieux, tous ont la même flamme.

J'entends Granet nous dire : "Embrassez bien ma femme."

Et le coeur bondissant, je réponds au salut.

De pleurs mes yeux voilés qu'en bloc ne les voient plus.

 

Ordre est donné : "Chacun dans une baraque." Muettes,

Pâles, désemparées, aux crânes des tempêtes,

Nous guettons faits et bruits. Que font-ils enfermés

Dans la baraque six, nos amis condamnés ?

 

Des camions, des soldats, des moteurs grinçants grondent....

Je risque un oeil....Je vois Timbaud, Ténine......Ils montent

Dans un triste fourgon, mains liées; mais leurs voix

Libres, frappent près d'eux tous les chiens aux abois.

 

Soudain, la Marseillaise et l'Internationale.

Ils nous chantent leur foi, c'est leur lutte finale !

Le camp répond. Le chant monte, s'enfle, grandit....

Ils partent.....Les rumeurs s'estompent, c'est fini.....

 

Vite on se rue dehors, on pleure, on chante, on crie...

Ils en ont pris vingt-sept et comble d'infamie

L'un  dix sept ans à peine, et trois moins de vingt ans

Têtes dignes d'un tueur et non d'un conquérant.

 

En ordre rassemblés, nous leur crions vengeance.

C'est l'heure !....Ils vont mourir. Recueillons-nous....Silence

Ils sont tombés chantant- dans leur dernier sommeil

Sans bandeaux, regards fiers - irradiés de soleil.

 

Peuple de tes combats, ce sont de lourdes pages

Le temps n'oubliera pas ces grands et fiers visages

Que les balles d'hitler ont fait muets et glacés

Par leur vie, par leur mort, nos devoirs sont tracés

 

Vous complices, tremblez, la douleur est féconde

France en tes flancs meurtris, tressaille un nouveau monde

L'étoile soviétique illustre le ciel noir

De l'homme en désarroi, lumineux espoir.

 

France, raison, clarté guide une fois encore

Abats l'esprit obscur, tourne-toi vers l'aurore

Pour que la terre un jour dans ses enfantements

A des millions de morts ne demande le sang.

 

 

 

 

 

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                                                                 Un groupe d'internés du camp de Choisel dont : Charles Michels (1), Maurice Ténine (2), Désiré Granet (3), Henri Pourchasse (4), Guy Môquet (5) et Jules Auffret (6), fusillés le 22 octobre 1941. Source : Amicale de Châteaubriant - Voves-Rouillé

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Rédigé par caroleone

Publié dans #La poésie que j'aime, #Devoir de mémoire

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C
<br /> je savais que ça te plairait....au moins, on est 2 à en être content !!<br /> <br /> <br />