Colombie et Vénezuela : Le peuple Wayuu

Publié le 14 Décembre 2011

LES  WAYUU

 

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Peuple amérindien semi-nomade qui vit à la frontière de la Colombie et du Venezuela.

Ce peuple est également connu sous le nom de " GUAJIRO/GOAJIRO".

Population

Ils sont  au nombre de 500.000 répartis comme suit :

Colombie, péninsule de la Guajira : 45 % de la population de la péninsule

Venezuela , état de Zulia : 8 % de la population

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C’est le peuple indigène le plus important en nombre de la Colombie.

La Guajira est une région désertique, qui a pour seule ressource le charbon dont je vous parlerais dans un prochain article

Langue : le wayuunaiki, langue arawake

Sur le nom Wayuu : il veut dire « personne », les Wayuu ne se reconnaissent pas sous le nom « indien »

Leurs territoires mythiques

-          Winpumuin : la région de toutes les eux

-          Wopumui : la région de tous les chemins

-          Palamuin : la région de la mer sacrée

-          Jaseleemui : la région des dunes

-          Jalala : la région des pierres

 

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                                                                               La Guajira

Nous commencerons cet article par une des problématiques rencontrées par ce peuple, une fois n’est pas coutume.

Ces espaces d’une beauté envoûtante sont des zones protégées par le gouvernement colombien : sanctuaire de la flore et de la faune de Los Flamencos, le parc naturel national de Macuira et le parc naturel de la Sierra Nevada de Santa Marta. Malgré tout, cela n’empêche pas que l’on assiste depuis 1998 à des violations, des crimes et des massacres sur ces territoires. La Guajira est envahie par les paramilitaires qui avec la complicité directe de l’armée ont commis les pires atrocités pour essayer de chasser les wayuu.

Leur objectif est clair : garantir l’exploitation de toutes les ressources de la région afin de les revendre aux multinationales étrangères qui visent les richesses de cette terre.

 

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Le gouvernement accorde des permis d’exploitation à des compagnies pétrolières américaines afin qu’elles puisent dans le sous-sol des autochtones les ressources dont elles ont besoin. Ce faisant, le gouvernement colombien contrevient ainsi à l'article 330 de sa propre constitution et à de nombreux engagements pris avec les ethnies autochtones, tout en ignorant les mécanismes de concertation qu'il a lui-même mis en place pour rassurer symboliquement la communauté internationale. C’est encore l’armée colombienne, fortement équipée par les États-Unis, qui assure la sécurité des compagnies pétrolières américaines. En même temps, les «forces de sécurité» expulsent manu militari les paysans et les indigènes qui s'opposent pacifiquement à cette violation flagrante de la loi et de leurs droits; certains villages autochtones sont même «déplacés» par l’armée.

 

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Leurs origines

Il est possible que les ancêtres des wayuu viennent d’Amazonie. Il y a environ 5000 ans, l’arawak s’est divisé en 6 ou 7 branches linguistiques différenciables. Certaines divisions issues du « proto norte » dont les wayuu se sont répartis sur les territoires de la Guyana, du Sinamaica-Venezuela et de la région de la Guajira.

Colonisation

Les wayuu ont réussi à conserver une relation indépendante et arrivèrent à développer des relations commerciales avec les ennemis européens des espagnols : les anglais, les français et les hollandais.

Le 2 mai 1769 : jour de la Guajiridad, symbole d’un soulèvement victorieux des wayuu contre la couronne espagnole à Riohacha.

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  Photo Alexander Rieser

 

Système normatif

 

Le système normatif Wayuu, appliqué par le Pütchipü’üi (palabrero) est inscrit au patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’UNESCO :

Son système législatif forme un ensemble de principes, de procédures et de rites qui régulent la conduite sociale et spirituelle de la communauté. Inspiré des principes de réparation et de compensation, le système est appliqué par les autorités morales locales, les Pütchipü’üi ou palabreros (orateurs), qui sont expertes dans le règlement des conflits et des désaccords entre les clans matrilinéaires locaux. Quand se pose un problème, l’intervention du Pütchipü’üi est sollicitée par les deux parties en conflit, l’offenseur et l’offensé. Après avoir analysé la situation, le Pütchipü’üi informe les autorités concernées de son intention de résoudre le conflit de manière pacifique. Si la parole – Pütchikalü – est acceptée, le dialogue s’établit en présence du Pütchipü’üi qui agit avec diplomatie, prudence et intelligence. Le système de compensation emploie le symbolisme, représenté essentiellement par l’offrande de colliers faits de pierres précieuses ou le sacrifice de bétail, de moutons et de chèvres. Même les crimes les plus graves sont compensés, les compensations étant remises lors de cérémonies particulières auxquelles sont invitées les familles en conflit afin de rétablir l’harmonie sociale à travers la réconciliation. Le Pütchipü’üi acquiert son rôle de par sa condition d’oncle maternel – un rôle honoré dans le système Wayuu des clans matrilinéaires – et en possédant un caractère fondé sur l’éthique et la morale.

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Les mythes

Selon l’anthropologue Michel Perrin, il existerait 400 mythes wayuu. L’un d’eux exprime l’existence d’un couple aussi opposé que complémentaire, Juya et Pulawi.

Juya est la pluie, représentant l’hyper masculin.

Pulowi est la maîtresse du gibier naturel, représentante de l’hyper féminin.

Toutes les pulowi sont les épouses de Juya.

L’union de Juya et Pulowi reproduit le mariage guajiro qui est polygyne * et matrilocal *, ce qui veut dire que l’homme unique et mobile partage son temps entre ses épouses, fixes, multiples et dispersées sur un vaste territoire.

Peu à peu, les croyances catholiques et protestantes apportées par les colons imprègnent une partie de la communauté wayuu.

Un peuple chamanique

 

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     « Je me considère comme un Indien, et j’en suis très fier. »                                             

Au Vénezuela, des indigènes dont les Wayuu donnent un rituel chamanique pour la santé du président Chavez

Une définition du chamanisme apportée par Michel Perrin :

Le chamanisme est un système destiné avant tout à penser le malheur, à en garantir les humains, à les en soulager, qu’il s’agisse de maladies, de problèmes économiques, climatiques ou politiques : revers à la chasse, épizooties, famines, intempéries, conflits guerriers etc…

Le chaman (ouutsu) est huit fois sur dix une femme et joue un rôle essentiel par la fréquence de ses « bons rêves » qui sont soumis à une interprétation collective au sein du groupe familial ou local.

Le rêve est un vagabondage nocturne de l’âme qui pet annoncer la maladie ou la mort.

Pour ce peuple, être chaman, c’est pouvoir communiquer à volonté avec le « monde-autre », monde invisible peuplé de dieux, d’esprits, de spectres et d’ancêtres. C’est savoir se mettre en relation avec les êtres surnaturels qui déterminent les destins des hommes et du monde.

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Les compétences Wayuu

D’autres personnalités comme le “Piachi”, médecin traditionnel et le “Palabrero”, le médiateur, sont quotidiennement sollicités. Lors d’un récent passage dans la capitale indigène d’Uribia, le ministre de la Justice a notamment souligné l’importance et l’exemplarité du rôle du palabrero dans le fonctionnement de la justice de la région. La “Partera” est l’accoucheuse Wayuu; en plus de savoir mettre au monde, il semblerait qu’elle ait de vastes connaissances en terme de suivi de grossesse, qui aurait surpris plusieurs praticiens modernes.

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Rites et coutumes

Le peuple wayuu est le seul peuple matrilinéaire du pays.

Ils sont organisés en système de clans de ligne maternelle, associés aux animaux éponymes. Les clans sont la « chair » ou » é’inuku », qui est l’apport de la femme dans la reproduction biologique. On est wayuu de par l’appartenance au clan de la mère. L’homme, lui apporte le sang.

Leur système de gouvernement repose sur trois catégories de détenteurs de l’autorité :

-          L’alaula, l’oncle maternel

-          Le pütchipü, l’homme ou la femme, médiateur qui est chargé d’employer des paroles de paix

-          L’outsu, l’homme ou la femme qui sert de trait d’union entre le monde naturel et le monde surnaturel

L’oncle maternel reconnu par l’état

L’autorité au sein du clan est représentée par l’oncle maternel-alaüla-. Il possède l’autorité sur les autres membres, et les enfants n’héritent pas de leur père sinon de l’oncle maternel de leur clan. Dans la législation indigène Wayuu, reconnue par l’Etat Colombien, l’alaüla est considéré comme une entité de droit public, et l’un de ses devoirs est de maintenir la cohésion interne du groupe.

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     Dessin Henry Diaz                                                          

Principe fondateur des communautés wayuu : "sukaipa"

Il consiste à résoudre les conflits internes et s’appuie pour se faire que la logique de responsabilité sociale et collective.

Grâce à cette structure identitaire et politique, les wayuu ont pu préserver l’harmonie de leurs territoires.

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Habitat

Les rancherias

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Elles sont composées de 5/6 maisons, et isolées les unes des autres afin d’empêcher le  mélange des troupeaux de chèvres. Ce sont les femmes qui sont les gardiennes des rancherias.

La maison typique est une petite structure nommée « piichi » ou « miichi », divisée en deux salles dans lesquelles on accroche les hamacs pour dormir.

Près de la maison existe un secteur commun appelé « luna » qui reste ouvert et permet de se réunir, de se reposer et recevoir les visiteurs.

La rancheria possède une école qui existe depuis la loi 115 de 1994. Les écoles suivent le système éducatif national et les langues enseignées sont l’espagnol mais également le wayuunaiki.

 

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Ressources

Elles proviennent de l’élevage de chèvres qui représente l’activité économique la plus importante. Le nombre de têtes de bétail est le symbole de la richesse et du pouvoir.

Ils pratiquent également la pêche.

Artisanat wayuu

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Tissage traditionnel qui fait partie de l’initiation des adolescentes à la vie adulte et qui consiste en la confection d’habits, de sacs, de tapis etc….

Fêtes traditionnelles

Danse de la chèvre ou "kaulayaa" : carnaval en remerciement des bonnes récoltes et de la pluie

La yonna : cette fête célèbre les occasions spéciales de la vie matérielle et spirituelle, telles que les offrandes, les révélations, les guérisons…..

Photo Alexander Riesergallery13.jpg      Photo Alexander Rieser                                                 

 

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Quelques mots savants

La polygynie est pour un homme le fait de vivre avec plusieurs femmes ou, plus généralement, la situation d'une espèce animale dans laquelle le mâle s'accouple avec plusieurs femelles.

La matrilocalité est un principe de fonctionnement de certaines sociétés traditionnelles selon lequel l'épouse reste dans le village ou le lieu de résidence de sa mère une fois le mariage contracté. Exemples d’ethnies matrilocales : Hopis, Iroquois, Maoris

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Sources : wikipédia, rouge midi, un peu partout sur le net, matricien.org

 

Caroleone

 

Mise à jour le 01/09/2012

Une lecture en français recommandée pour ce peuple :

Le chemin des indiens morts de Michel Perrin 

Être un guérisseur wayuu à l'heure de la mondialisation, et comment ne pas mourir en essayant

Carmen Laura Paz Reverol, Morelva Leal Jerez, Johnny Alarcón Puentes, Carlos Valbuena Chirinos, Nelly García Gavidia, Dilia Flores Díaz1

Le point de départ de cette recherche est l'intérêt d'analyser le rôle du guérisseur ou "oütshi" du peuple Wayuu du Venezuela dans le cadre de la dynamique de traversée des frontières culturelles qui doit être menée actuellement et les changements survenus en termes de perception de son rôle, l'efficacité ou non de ses traitements, les différents itinéraires thérapeutiques, la récurrence à d'autres modèles de guérison, les migrations vers les zones urbaines et les nouvelles pratiques et représentations assumées dans sa relation avec l'altérité. Sur la base d'une méthodologie ethnographique qualitative, nous avons pu partager les expériences de six guérisseurs du peuple Wayuu dans la Guajira vénézuélienne, municipalité de Paez, État de Zulia, Venezuela. Grâce à eux, nous avons pu saisir le sens, la signification qu'acquiert pour eux la maladie et le traitement de la même dans le cadre de leur système de guérison. L'observation et les entretiens approfondis ont été utilisés comme stratégies de base pour la collecte d'informations. Plusieurs points de convergence ont été trouvés entre les expériences des guérisseurs concernant leur rôle au sein du peuple Wayuu, dans lequel la préoccupation pour la perte de validité du guérisseur Wayuu a été mise en évidence. Cependant, on a trouvé des nuances qui nous permettent de parler de différences en termes de manifestations et de perceptions de chaque sujet sur l'importance qu'ils ont encore dans le système de guérison Wayuu pour répondre aux processus de soins des maladies reconnues dans la culture. Il est conclu qu'à l'heure actuelle, tant le franchissement incessant des frontières culturelles par le guérisseur Wayuu que sa validité en termes de représentations et de pratiques de guérison au sein du système de guérison Wayuu ont généré des changements dans les fonctions et les caractéristiques de l'activité des guérisseurs Wayuu, repensant leur rôle prépondérant en tant qu'acteur social dans le contexte d'une mondialisation qui parie sur leur disparition.

Mots clés : Wayuu, Guérisseur, Mondialisation, Guajira, Venezuela.

https://scielo.isciii.es/scielo.php?script=sci_arttext&pid=S1132-12962010000200003

Si la traduction en français de cet article vous intéresse, merci de me laisser un message sur la page d'accueil du blog.

La ressource en eau dans les communautés indigènes Wayuu de La Guajira en Colombie.

Partie 1 : Un regard sur les connaissances et pratiques ancestrales

 

Alcides R. Daza-Daza

Nelson Rodríguez-Valencia

Alexis Carabalí-Angola

 

L'objectif de la recherche était d'étudier les connaissances, les croyances et les pratiques ancestrales des communautés indigènes Wayuu de La Guajira en Colombie sur le thème de l'eau et la manière dont elles traitent et gèrent cette ressource pour leur durabilité. Le travail a été développé dans le cadre du projet cofinancé par les directives de Colciencias pour l'aménagement du territoire côtier et marin dans le département de La Guajira. Le type de recherche est historique, documentaire et explicatif. L'entretien a été utilisé comme instrument de collecte des informations, qui est composé de questions ouvertes et semi-structurées. Les questions ont été regroupées en composantes afin de faciliter leur analyse descriptive. Les résultats montrent que les pratiques ancestrales de gestion de l'eau dépendent de la présence ou de l'absence d'eau. Cela signifie que dans les zones où l'eau est plus disponible, les communautés ont des comportements et des coutumes différents en termes d'administration, de conservation et de bonne utilisation de la ressource, par rapport aux zones où l'eau est rare.

https://scielo.conicyt.cl/scielo.php?script=sci_arttext&pid=S0718-07642018000600013

Si la version traduite en français de ce travail vous intéresse, merci de me contacter (messagerie du blog)

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Colombie, #Venezuela, #matrilinéarité, #Peuples originaires, #Wayuu

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M
Merci beaucoup pour cet article très intéressant. C'est magnifique de voir des peuples encore intacte malgré toute cette modernisation!
C
Bonjour,<br /> <br /> Si cet article et tous les autres peuvent servir à faire mieux connaître les peuples premiers, ils auront alors remplis leur rôle et je ne me serais pas donné du mal en vain.<br /> Merci de ta visite et toutes mes amitiés<br /> <br /> caroleone
M
cette langue est une langue officielle ?
C
Bonsoir,<br /> <br /> Oui, bien sûr le wayuunaiki est une langue reconnue officiellement. Elle fait partie de la famille des langues arawak ou arawakiennes qui est une famille linguistique regroupant de nombreux locuteurs en Amérique du sud.<br /> Amitiés<br /> caroleone