Guerrero , indigènes et afro mexicains en lutte contre la marginalisation
Publié le 8 Septembre 2011
LE GUERRERO EN QUELQUES DONNEES
La montaña
Lorsque l’on veut découvrir le Mexique en sortant des sentiers battus, on laisse de côté les plages d’Acapulco et de Puerto Vallarta, oh ! combien célèbres et touristiques pour découvrir un Guerrero touché par une extrême misère, pour découvrir un contexte multiethnique et surtout découvrir la présence d’une importante communauté afro mexicaine dont j’ignorais l’existence et je pense ne pas être la seule.
Cet article pour réparer mon ignorance et vous fournir de l’information sur la problématique de cet état qui rivalise avec mon état de prédilection, le Chiapas pour ce qui est des luttes, de la misère et du combat pour la vie et la dignité.
Bienvenue dans l’état de Guerrero : Vous allez en lire des horreurs !!
Prenons conscience de toutes ses misères, inadmissibles au XXIe siècle !!
caroleone
La population autochtone est répartie dans 4 grands groupes :
- Nahuatl 40 % (les nahuas sur cocomagnanville)
- Mixtèques (na savi) 28 % ( les mixtèques sur cocomagnanville )
- Tlapanèques (me’phaa) 22% (les me'phaa sur cocomagnanville)
- Amuzgos (suljaa) 9% ( les amuzgos sur cocomagnanville)
nahuas
Autres groupes minoritaires 1 %
Une grande disparité de revenus
Exemple : Acapulco : 5 % de la population plus de 15 ans) ne perçoit pas de revenus
Acatepec ou Atlixtac (Montaña) : 80 % de cette population est sans situation.
Logement :
- 40 % des logements ont un sol en terre battue
- 29 % des logements n’ont pas accès à l’eau courante
Analphabétisme : 22 % (50.5 % de la population autochtone)
Mortalité infantile :
- Chilapa : 89 décès d'enfants pour mille naissance (moyenne nationale 28/1000, moyenne pays industrialisés 6/1000)
- Mortalité des femmes indigènes : 281 /1000 (moyenne nationale 151/1000, non indigène 51/1000)
Soins médicaux : 96% de la population indigène n’a pas accès aux services de santé
La stérilisation forcée : régulation de la natalité ou politique ethnocide?
En 1998, 14 hommes tlapanèques, 18 hommes mixtèques et 10 femmes nahuálts ont été stérilisés sous pression, chantage et promesses mensongères, par le Ministère de la Santé du Guerrero, d’après le Centre des Droits Humains de la Montaña Tlachinollan AC.
17% des violations des droits humains des indigènes, selon les cas dénoncés et documentés par Tlachinollan, touchent le droit à la santé (refus de soigner, négligence médicale et stérilisation forcée, entre autres).
http://www.tlachinollan.org/casos/ecologistas/ecologistas.htm
Autour de Tlapa s’étend la Montaña entre 600 et 3000 mètres d’altitude. C’est la partie la plus abrupte et la plus accidentée de l’état.
La Montaña est l’une des 7 régions composant l’état de Guerrero, c’est l’une des régions les plus marginalisée et les plus pauvres du Mexique comme le sont également les états du Chiapas et d’Oaxaca. Cette pauvreté rappelle celle des pays d’Afrique.
C’est l’une des zones prioritaires du Mexique qui ont un dénominateur commun :
- Pauvreté
- Trafic de drogues
- Migration
- Violence
- Militarisation
Metlatonoc est la municipalité la plus pauvre du pays.
La Costa chica
Elle est située au sud de l’état à l’ouest d‘Acapulco. Différentes populations et groupes ethniques forment une mosaïque culturelle : c’est l’une des deux régions du Mexique (avec Veracruz) qui connait d’importantes communautés afro mexicaines. Deux groupes indigènes sont présents également dans la région, les amuzgos et les mixtèques.
Comme la région de la Montaña, c’est l’une des régions les plus pauvres du Mexique.
Les cultures sont celles du maïs pour la confection des tortillas et aussi les noix de coco, mangues, sésame et pastèques, haricots rouges et hibiscus.
La population afro mexicaine de la Costa chica : existe t-elle pour le gouvernement ?
Depuis des siècles, le Mexique a basé son identité sur l’idéologie du mestizo, mélange de sang espagnol et du blanc ainsi que des peuples indigènes plus foncés.
Elle ignore de ce fait la minorité mexicaine qui a des ancêtres africains.
Les afro mexicains constituent la troisième branche du Mexique. Elle est reconnue depuis 1992 officiellement par les autorités mexicaines mais malgré tout, la classe politique mexicaine à tendance à mettre en pratique la négation de cette branche.
Pour le Mexique, en général le peuple afro descendant n’existe pas, la population n’est même pas recensée et dans les écoles, seules les deux branches indigènes et européennes sont étudiées.
Pourtant un grand héros national mexicain d’origine noire fut président de la république : Vicente Guerrero.
Les africains arrivent au Mexique
1521/1640 : Ce sont évidemment des esclaves africains qui touchent les premiers le sol mexicain. Malgré la présence d’une forte population indigène au Mexique, l’importation d’esclaves est nécessaire aux conquérants, surtout après la découverte des gisements d’argent à Zacatecas et Guanajuato. Il faut également remplacer dans les mines les indigènes morts en grand nombre d’épidémies.
Dans l’état de Guerrero, c’est le port d’Acapulco qui participe au trafic d’esclave.
Les trois états mexicains qui bordent le pacifique seront ceux qui verront s’implanter la population afro mexicaine : Guerrero, Veracruz et Oaxaca.
Il faut rappeler que les afro mexicains participèrent à la lutte pour l’indépendance du pays, ce qui est occulté dans l’histoire !
Dans le Guerrero, la population afro mexicaine représente 450.000 personnes( 3% de la population) selon l’UNAM (université nationale autonome mexico), la moitié de cette population vit dans une situation de forte marginalisation.
Présence militaire : les arguments officiels
- Le combat contre le trafic de drogues. En 2000, le Ministère de la Défense Nationale (SEDENA) a envoyé au Guerrero 3.000 militaires pour combattre le trafic de drogues. 1/6 des effectifs militaires assignés à la lutte contre le trafic de drogues au Mexique se trouvent au Guerrero.
- La loi fédérale sur les armes et explosifs.
Activités des militaires au Guerrero, selon les organismes de défense des droits humains :
- Investigation de délits
- Persécution de membres présumés de groupes armés
- Harcèlement des communautés organisées
Le Centre des Droits Humains Tlachinollan rapporte, entre 1996 et 2004, 68 cas de violations de droits humains par l’Armée, parmi lesquelles :
- Dommages et lésions
- Exécution extrajudiciaire
- Détention arbitraire
- Violation sexuelle
- Abus d’autorité
- Soustraction illégale de ressources naturelles
- Affectation de la libre circulation
- Harcèlement sexuel
- Obstruction du travail de journalistes
- Violation de domicile
A ce jour, tous ces cas demeurent impunis. Aucun membre de l’Armée n’a été puni pour les violations aux droits humains.
La culture du pavot
L’état du Guerrero est le premier producteur de pavot du pays, qui représente 60% de la production mexicaine.
Quand il n’y a pas d’autre opportunité pour survivre :
- Les communautés se lancent dans la culture de stupéfiants quand elles ne trouvent aucune autre issue possible, à cause entre autres de la chute totale des prix des produits agricoles (comme le café, le maïs, les haricots, l’hibiscus). Et malgré tout, leur niveau de vie ne s’améliore pas.
- On peut produire 4 kilos de pavot sur un hectare. Au Guerrero, le kilo s’achète 30.000 pesos. Au fur et à mesure que l’on s’approche des Etats-Unis, sa valeur augmente au point d’être triplée après la frontière.
Inefficacité de la lutte contre le trafic de drogues :
- Selon le Centre des Droits Humains de la Montaña Tlachinollan, au lieu de combattre les raisons qui amènent à cultiver la drogue (la pauvreté), c’est un combat contre les communautés autochtones qui est mené.
- La culture et le trafic de drogues illicites d’Amérique du Sud vers les États-Unis ne cessent d’augmenter.
Police Communautaire
La Police Communautaire a été créée en 1995 face au problème de la délinquance dans la région Costa Montaña et face à un système judiciaire officiel considéré comme corrompu et monoculturel. Les communautés se sont organisées pour mettre en place leur propre système de police communautaire. Mais elles sont allées au delà: elles ont construit leur propre système de justice et de rééducation par le biais de la récupération de leurs propres systèmes de normes sans laisser de côté le droit positif mexicain.
En 1998, elles ont créé la Coordination Régionale des Autorités Communautaires (CRAC), un organe communautaire chargé de rendre la justice communautaire. Ils cherchent ainsi à “rééduquer” les délinquants: elles ne parlent pas de punition mais de sanction, de réconciliation ou de réparation des dommages.
- Page Web de la Police Communautaire
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- Dossier de SIPAZ: 10 ans au service du peuple: La Police Communautaire au Guerrero (Janvier 2006)
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- 95% de délinquance en moins dans six municipalités du Guerrero (Article de La Jornada)
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- http://cocomagnanville.over-blog.com/article-communique-de-la-police-communautaire-du-guerrero-83041382.html
DES MINES A PRESENT ……
En 2011, trois exploitations minières devraient débuter :
Un projet d’une entreprise anglaise Hochschild mining : Corazon de Tinieblas
Vers San luis Acatlan, Zapotitlan Tablas et Malinaltepec y tlacoapa.
Deux projets mexicains/multinationaux San Javier et La diana
A Lliatenco et Malinaltepec
Bien que le Guerrero soit parmi les états de plus grande biodiversité du Mexique, ses ressources naturelles présentent un haut niveau de détérioration qui se manifeste par la perte de diversité de la flore et de la faune sylvestres, la déforestation, l’érosion des sols, la diminution des nappes phréatiques et la disparition des fleuves au moment de l’étiage. Cette importante richesse naturelle se voit sérieusement menacée par la constante destruction des écosystèmes du fait de facteurs comme le changement dans l’utilisation des sols, les incendies de forêt, la déprédation de la flore et la faune sylvestres, le peu ou l’absence totale de traitements des résidus solides et l’expansion des villes, entre autres.
Le Guerrero c’est :
costa chica
- Le 4e état de plus grande biodiversité de la république
- Tous les types de végétation adaptés aux zones tempérées, sèches, tropicales et côtières
- 6000 espèces de plantes (1/5e du Mexique)
- Des gisements : albâtre, marbre, argent, or, plomb, zinc
- 3 parcs nationaux
- 2 sanctuaires
- 1332 espèces de vertébrés (336 en voie d’extinction)
“LA TERRE N’EST PAS À VENDRE”
Depuis l’année 2003, de nombreuses communautés de l’état de Guerrero s’opposent vigoureusement à la construction du barrage de La Parota sur le fleuve Papagayo. Sa réalisation inonderait plus de 17.000 hectares, exigerait de déloger quelques 25.000 personnes et mettrait en danger 75.000 autres personnes, en aval, par la perte de leurs ressources en pêche et de leurs autres moyens de subsistance. Le Conseil des Coopératives agricoles et des Communautés d’Opposition à La Parota (CECOP) a dénoncé la violation systématique de leurs droits fondamentaux, y compris l’assassinat de plusieurs de leurs leaders. Actuellement, les habitants reçoivent avec espoir des nouvelles qui tendent au gel de ce projet.
NOUVELLE ALERTE A LA PAROTA (GUERRERO, MAI 2007)
Petit historique des luttes et répressions
- 30 décembre 1960 : Tuerie de Chilpancingo, revendications des cultivateurs de coprah et de café, des instituteurs et étudiants
- 1963 : Genaro Vasquez, un maître d’école, prend les armes à la tête d’une association nationale civique révolutionnaire ( ACNR)
- 20 août 1967 : A Acapulco, Lucio Cabañas, un autre instituteur fonde le parti des pauvres, PDLP
- Années 70 : actions armées
- 29 mai 1974 : enlèvement de Ruben Figueroa, candidat priiste au poste de gouverneur de l’état, personnage connu pour ses méthodes de gangster
- 1994 : Naissance de l’organisation paysanne de la Sierra du Sud (OCSS), le plus puissant des mouvements métis et indigènes. Répressions, assassinats, exactions, comparaison avec l’EZLN qu’il est sensé accompagner
- 28 juin 1995 : massacre d’Aguas Blancas, 17 morts
- 7 juin 1998 : massacre d’El Charco, 11 tués dans une école, tortures, arrestations
Genaro Vasquez
Paroles de l'EZLN du 7 mars 2001 à Iguala, Guerrero.
Je vous remercie pour l'attention que vous porterez à ce document qui est loin d'être complet.
La pauvreté extrême du Mexique et de l'état du Guerrero ne peut nous laisser indifférents. Déjà, en parler, c'est mettre un nom sur des visages, des ethnies, des évènements. En parler, c'est se rendre compte de leurs luttes, de leur existence misérable et c'est aussi ensuite en parler autour de nous : car les petites rivières font les grand fleuves et quand l'être humain est solidaire, il peut à son tour renverser les montagnes.
SOYONS SOLIDAIRES !! TODO PARA TODOS !!
Caroleone