Chiapas : Des organisations dénoncent la criminalisation d'un défenseur Tsotsil après qu'il ait exigé la justice pour le meurtre de son fils
Publié le 5 Février 2025
Avispa Midia
Par Sare Frabes
30 janvier 2025
Plus de 30 organisations sociales et de défense des droits humains au Mexique exigent la libération de Mario Gómez López, un défenseur Maya Tsotsil qui a été privé de liberté vendredi dernier (24) par la police municipale de San Cristóbal de Las Casas, Chiapas.
Selon une action urgente du Réseau national d’organisations civiles pour les droits de l’homme « Tous les droits pour tous » (RedTDT), Gómez López a été arrêté arbitrairement alors qu’il allait travailler comme maçon, sans que lui ou sa famille ne soient informés de la raison de son arrestation.
RedTDT affirme que la privation de liberté du défenseur Tsotsil a entraîné des violations de la procédure régulière, entravant son droit de communiquer avec ses avocats et sa compagne, Pascuala López López, également défenseure des droits humains.
Les organisations affirment que sa localisation n’a pas été signalée dans un premier temps. Les autorités, tant municipales qu'étatiques, ont refusé de fournir des informations aux membres de la famille et aux défenseurs pour le localiser.
On a appris plus tard que Gómez avait été transféré au Centre de réinsertion sociale pour personnes condamnées numéro 14 (CERSS n° 14) « El Amate », dans la municipalité de Cintalapa, accusé des délits d'atteintes à la paix et à l'intégrité physique et patrimoniale de la communauté et l'État. « Des délits éminemment politiques », précise RedTDT.
En arrière-plan, expliquent les organisations, se trouve la lutte pour la justice que Mario Gómez et Pascuala López ont menée pour le meurtre de leur fils, Mateo Gómez López, 19 ans, survenu le 3 février 2021.
L'assassinat de Mateo s'est produit dans un contexte d'intimidation, de harcèlement et d'opposition du jeune Tsotsil au recrutement par le groupe armé « Sentimientos de la Nación », qui opère à San Cristóbal de las Casas, selon la résolution de la Commission. La Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) a accordé des mesures conservatoires à Mario Gómez et à Pascuala López en janvier 2023, afin que l’État mexicain puisse mettre en œuvre des mesures pour leur protection.
À la recherche de la justice
Mario Gómez López fait partie de la communauté de Santa Cruz, de l'ejido Cuxtitali El Pinar, et avec son épouse Pascuala López, ils ont entrepris une lutte pour exiger que les autorités de l'État du Chiapas enquêtent et punissent le ou les auteurs du meurtre de leur fils, Mateo.
« Ce cas est un exemple de la manière dont la population civile est prise au milieu de la violence générée par la dispute territoriale entre groupes criminels, ce qui conduit à des menaces constantes, au harcèlement, à l'intimidation et même à la violence physique et psychologique », soulignent les organisations de défense des droits de l’homme qui composent le RedTDT.
Le réseau souligne que Pascuala López bénéficie également de mesures de protection au titre de la Convention des Nations unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. En effet, elle est victime de diverses formes de violence émanant de groupes criminels locaux, ainsi que de la violence structurelle liée à l'administration et à l'obtention de la justice, « qui, loin de respecter les protocoles d'action dans une perspective de genre et de garantir le droit des femmes à une vie sans violence, ont exercé une violence misogyne, hétéropatriarcale et raciste à l'encontre de Pascuala », précise-t-il.
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Les défenseurs des droits humains au Chiapas mettent en garde contre un contexte risqué pour leur travail. La femme autochtone Tsotsil Pascuala López (au premier plan, à gauche) a participé à des réunions avec des organisations internationales qui ont visité l'État du sud du Mexique en avril 2023.
À leur tour, Mario Gómez et Pascuala López sont intégrés au Mécanisme de Protection des Défenseurs des Droits Humains et des Journalistes du Ministère de l'Intérieur. Cela ne les a toutefois pas empêchés d’être victimes d’attaques telles que celle survenue en avril 2022.
À cette occasion, une vingtaine de personnes ont encerclé leur domicile et Pascuala « a été emmenée, battue, frappée à coups de pied, étouffée et agressée avec des armes à feu ; tout cela aux mains du même groupe criminel qui a pris la vie de son fils, en représailles à sa demande de justice et d'identification des responsables", accuse RedTDT.
Selon le soutien apporté par le RedTDT à Pascuala López, les autorités du Chiapas « ont fermé les portes de la justice, lui refusant toute information et l'intimidant ; elle a également été diffamée et étiquetée sur les réseaux sociaux avec des adjectifs racistes, misogynes et discriminatoires.
RedTDT insiste sur le fait que l'arrestation de Mario est en représailles directe aux accusations portées contre les groupes criminels responsables du meurtre de son fils. En outre, ils préviennent que la vie et l'intégrité personnelle de Mario Gómez sont en grand danger car Ciro « N », arrêté pour le crime de tentative de féminicide contre Pascuala López, est également détenu à « El Amate ».
Face à cette situation, les organisations de défense des droits humains appellent à une manifestation pacifique pour exiger la fin des violences et des persécutions contre les défenseurs des droits humains au Chiapas. La réunion aura lieu ce jeudi (30) devant le ministère de l'Intérieur à Mexico.
De son côté, la rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, Mary Lawlor, s'est exprimée sur ses réseaux sociaux contre la détention arbitraire de Gómez López et a déclaré que le défenseur « doit être libéré ».
traduction caro d'un article d'Avispa midia du 30/01/2025