Bangladesh : Le peuple autochtone Jumma violemment agressé

Publié le 11 Octobre 2024

Du 19 au 20 septembre 2024, dans la région des Chittagong Hill Tracts au sud-est du pays, des colons bengalis, soutenus par l’armée, ont attaqué les populations Jummas, brûlé des centaines de leurs maisons et de leurs magasins.

Des autochtones ont perdu leur vie. Malgré le couvre-feu décrété le soir du 20 septembre l’inquiétude reste intense chez les Jummas.

Le 25 septembre dernier, une manifestation de soutien au peuple Jumma s’est tenue devant l’Ambassade du Bangladesh à Paris.

À cette occasion, un mémorandum a été remis à l’Ambassade par un collectif d’association (La Voix des Jummas, European Jumma Indigenous Council, Survival, France Libertés et ICRA International).

 

Embrasement dans les Chittagong Hill tracts : les Jummas agressés par les colons bengalis.

 

À partir du 19 septembre 2024, à la suite de l’assassinat signalé d’un Bengali le 18 septembre dans la région de Khagrachari, une série d’agressions violentes a été lancée contre les Jummas. Cet incident a été exploité par les organisations de colons bengalis, qui se sont empressées d’accuser la communauté Jumma sans aucune enquête fondée. Le chef de la police locale a corroboré une autre version des faits, mais la violence s’est intensifiée.
Ce soir-là, les Jummas sont devenus des cibles à Dighinala, où ils ont fait l’objet d’attaques brutales qui ont entraîné la destruction de leurs maisons et de leurs biens. Un jumma, qui n’a pas réussi à fuir, a été égorgé et a perdu la vie.



Répression violentes des manifestations pacifiques jummas

 

En réaction, des jeunes de la région ont organisé des manifestations pacifiques à Khagrachari. Hélas, ces manifestations ont fait l’objet d’une intervention militaire vers 21 heures, au cours de laquelle les forces armées ont ouvert le feu sur des manifestants non armés. Cette violente répression a fait au moins trois morts officiellement et de nombreux blessés.

À la suite de ces événements, les jeunes Jummas de la principale ville de la région, Rangamati, ont organisé une manifestation le matin du 20 septembre 2024 pour protester contre les exactions. Ils se sont toutefois heurtés à l’hostilité des colons bengalis qui ont riposté par des jets de pierres.

Des rumeurs provenant d’une mosquée locale ont indiqué à tort que des Jummas avaient l’intention d’attaquer, ce qui a incité les manifestants à commettre de nouvelles violences. Des tactiques similaires ont été observées lors d’attaques antérieures, démontrant un schéma inquiétant de désinformation menant à de la violence.
Tragiquement, au cours de la réaction violente à Rangamati, il a été confirmé qu’un jeune jumma a été tué et que de nombreux autres ont été blessés. Des propriétés appartenant à des Jummas ont été incendiées, notamment les bureaux du président du Conseil régional des Chittagong Hill Tracts. Des rapports font également état d’actes de vandalisme au détriment d’un temple bouddhiste important de la région, l’étendue des dégâts étant encore en cours d’évaluation.

 

Le gouvernement doit réagir !

 

L’implication des forces militaires dans ces incidents est particulièrement préoccupante. Des images de la région montrent des militaires qui n’interviennent pas contre des colons armés, ce qui jette le doute sur leur engagement à maintenir l’ordre et à protéger les communautés vulnérables.

Cette situation est en contradiction avec l’engagement du gouvernement intérimaire du Bangladesh dirigé par Muhammed Yunus, prix Nobel de la paix en 2006. Ce dernier avait promis, le 25 août 2024, de défendre les droits et la sécurité de tous les citoyens, y compris les peuples autochtones.

D’ailleurs, le fait qu’il prononce le mot “autochtones” (Adivasi en bengali) pour parler des Jummas lui a valu de nombreux reproches de la part des Bengalis qui ont appelé à ce qu’il s’excuse voire démissionne. L’embrasement actuel peut être interprété comme une conséquence de cette position assez inédite de la part du gouvernement intérimaire sur la question du CHT et la mort du colon bengali le 18 septembre comme le prétexte à de nouveaux troubles.

Le gouvernement doit urgemment mettre en place des actions pour ramener la sécurité des peuples Jummas dans les CHT. Le respect des droits de l’Homme doit guider les actions qui viseront à ramener le calme dans la région. Une enquête doit être menée pour punir les responsables des exactions et leurs complices et comprendre le rôle qu’a joué/joue l’armée.


Les Jummas de France, entre inquiétude et colère.

 

Nous, la communauté Jummas de France avec nos proches, sommes très inquiets pour nos familles qui sont sur place. Certains ont fui leurs maisons pour aller dans la jungle, d’autres se sont barricadés dans leurs quartiers. En contact réguliers avec eux, ils nous disent qu’ils “vivent dans la peur”, se sentent abandonnés par les autorités et les médias.
Nous sommes attristés, mais nous refusons de baisser les bras. Dans les jours à venir nous allons lancer différentes actions, avec l’espoir d’influer sur l’action de l’armée et du gouvernement du Bangladesh. Cela donnera de la force, de l’espoir à ceux qui vivent dans la peur dans notre région.

Rémi Pflieger Chakma
La Voix des Jummas

 

 

Agir avec les peuples oubliés
www.icrainternational.org

Rédigé par caroleone

Publié dans #Bangladesh, #Peuples originaires, #Jummas, #Droits humains

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