Pérou : Une société minière chinoise entend se joindre au commerce illégal sur le territoire Wampis

Publié le 14 Septembre 2024

Renato Pita

1 septembre 2024

 

Photo : Jorge Camacho

Une fois de plus, le Gouvernement Territorial Autonome de la Nation Wampis a dû activer ses mécanismes d'alerte et a adressé une lettre publique aux autorités péruviennes. A cette occasion, deux représentants d'une société minière chinoise ont été retrouvés sur son territoire. Ces dernières années, l’exploitation forestière et minière illégale a conduit les Wampis à mettre en œuvre des mesures radicales de contrôle territorial.

Le 21 août, deux représentants présumés de la société d'État China Guangxi Lianjinxin Investment ont été surpris sur le territoire Wampis et ont exprimé leur intention de s'implanter dans la zone d'exploitation minière. Immédiatement, le Gouvernement Territorial Autonome de la Nation Wampís (GTANW) a adressé une lettre aux autorités du gouvernement du Pérou, à l'ambassade de Chine dans le pays et à l'opinion publique nationale et internationale 

Plus de dix jours après la publication de la lettre, les autorités nationales n'ont pas répondu aux messages et communications officiels du GTANW. Selon les informations journalistiques , la seule entité qui s'est exprimée après la lettre publique a été le Gouvernement Régional d'Amazonas, qui a indiqué qu'il ignorait la présence d'étrangers et que le Ministère de l'Énergie et des Mines n'avait pas été informé de la présence de ce type d'activités d'une entreprise chinoise. Cependant, le GTANW n’a pas reçu de réponse formelle à son document.

Le territoire de la Nation Wampis est situé au nord du Pérou, dans les régions d'Amazonas et de Loreto . Il s'étend sur 1 327 760 hectares, où se trouvent 22 communautés wampis titrées, avec environ 15 300 habitants, selon les données de 2013 du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Les Wampis bordent les peuples Shuar, Chapra, Achuar, Awajún et les hameaux riverains.

Le territoire des Wampis est situé au nord du Pérou. Les wampis existent depuis des milliers d'années. Photo : Pablo Lasanski

 

En alerte contre les économies illégales

 

L'apparition surprenante et irrégulière d'hommes d'affaires chinois fait sérieusement soupçonner une nouvelle incursion de commerce illégal sur le territoire Wampis. Le vice-président du GTANW, Galois Flores, a déclaré : « Ils ont été informés que l'entrée des sociétés minières, pétrolières ou forestières sur notre territoire est interdite. S’ils sont retrouvés, ils seront mis dans le donjon. De leur côté, les hommes d'affaires chinois ont signé un accord avec l'engagement de ne plus pénétrer dans la zone. 

Dans la lettre publique, le GTANW a fermement exprimé son rejet de toute tentative d’exploitation minière terrestre de l’or sur son territoire, car cela conduirait à « une destruction environnementale et un chaos social, comme cela se produit dans l’enfer minier de Madre de Dios ». Précisément, China Guangxi Lianjinxin Investment a une histoire de travaux miniers dans cette région.

La Nation Wampis s’engage en faveur de sa propre économie durable, qui exclut la destruction de l’exploitation minière et la déforestation de l’agro-industrie.

Au-delà du refus des Wampis, l'exploitation de l'or viole les normes nationales et internationales qui protègent les territoires des peuples autochtones : la Constitution politique du Pérou, la Convention n° 169 de l'Organisation internationale du travail, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Dans son document, le GTANW exige que le ministère de l’Énergie et des Mines, le gouvernement régional d’Amazonas et l’Institut géologique, minier et métallurgique s’abstiennent de « traiter dans leur dos et contre les droits et décisions explicites de la nation Wampis ». À leur tour, ils expliquent que le peuple s'engage en faveur de sa propre économie durable, qui exclut la destruction de l'exploitation minière et la déforestation de l'agro-industrie.

Les Wampis ont formé le GTANW en 2015 et cherchent à atteindre le Tarimaj Pujut ou une vie digne en harmonie avec la nature. Photo de : Levi Panquiez

 

Autocontrôle territorial et surveillance communautaire

 

La présence d’économies illégales en Amazonie et, en particulier, sur le territoire des Wampis a présenté une courbe de croissance dangereuse ces dernières années. Depuis 2000, les communautés du rio Kanus sont confrontées aux dégâts et aux conflits de l'exploitation forestière illégale, des extracteurs illégaux de grumes équatoriennes et de bois précieux. Ces dernières années, l’avancée de l’exploitation minière illégale a conduit le GTANW à mettre en place un système d’autocontrôle territorial et de surveillance communautaire : depuis les opérations de réquisition de bois jusqu’à l’expulsion des extracteurs illégaux.

En l'absence d'intervention des autorités, le système de contrôle des wampis repose sur des décisions collectives et des accords successifs adoptés en assemblées intercommunautaires et inter-bassins, qui ont été communiqués à l'État péruvien par des documents officiels. Dans ce contexte, disposer d'un Gouvernement Territorial Autonome est un outil pour faire face aux menaces contre la conservation du territoire, préserver les coutumes et garantir la vie de la population.

Une fois de plus, le GTANW appelle les autorités péruviennes à coopérer dans la lutte frontale contre l'exploitation minière et forestière sur leur territoire. Les Wampis en appellent à la défense de l'environnement et des vies humaines de ceux qui constituent la frontière vivante.

 

Renato Pita est communicateur, membre du programme Politiques publiques et droits des peuples autochtones du Pérou EQUITY. Il est l'auteur du livre « Le rêve du tigre Achuar. Témoignage et souvenirs du leader indigène Tomás Maynas Carijano » (IWGIA, 2024).

traduction caro d'un article de Debates indigenas du 01/09/2024

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Pérou, #Peuples originaires, #Wampis, #GTANW, #pilleurs et pollueurs

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