Bolivie : Les peuples Urus (Peuples de l'eau)

Publié le 17 Avril 2024

Daniel Mauricio Choque, Leader des Urus du lac Poopó. De Chiliguanca - Trabajo propio, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=92216624

 

La nation Uru est constituée de 8 communautés et ayllus situés à Oruro et La Paz en Bolivie ainsi que 4 établissements situés dans des îles principales de la baie intérieure de Puno au Pérou. Il existe également des établissements au Chili suite au déplacement de Chipayas. Les communautés se sont établies dans cet espace lacustre andin entre le lac Titicaca, le rio Desaguadero, le rio Barra, le lac Poopó et le rio Lauca. Ces communautés ont toujours eu un étroit contact avec l’eau. Ce milieu est de nos jours grandement menacé par le réchauffement climatique et à l’heure où j’écris cet article, les Urus du Lac Poopó font face à la disparition du lac avérée en 2015.

 

 

Autodésignation : qhasqot zoñi (ou qhaz zoñi, qot zoñi ou seulement zoñi) un nom qui fait référence à l’homme de l’eau ou des rivières et des lacs. C’est par ce nom qu’ils veulent se différencier d’autres noms qui leur ont été donnés tels que ushlas, muratos ou qhapiños à Puno.

Leur autodésignation est une référence à leur vie, aux activités qu’ils ont menées depuis le début de leur existence en tant que peuple autochtone, autour de l’eau. Le besoin des Urus d’être en contact avec le lac est si fort que s’ils en sont séparés, ils ne se sentent pas complets.

 

By dondelord - https://pixabay.com/photos/peru-lake-titicaca-male-1383414/, CC0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=84490496

 

Leur mode de vie, leur cosmovision sont entièrement dépendants du lac si bien qu’ils ont le sentiment de faire partie de lui.

« Pourquoi nous appelle-t-on » peuple de l’eau » ? Parce que nos grands-parents ont toujours vécu sur l'eau, sur la rivière, le peuple Uru ne cultivait pas, il a toujours vécu du lac, sa nourriture a toujours fait partie de l'eau, c'est pour cela qu'on les appelait qhas zoñi. Ils n'avaient pas encore d'animaux à quatre pattes, de moutons, de lamas, de cochons, ils vivaient toujours sur le lac. Avant, cet endroit était de l'eau pure."

Quand j'étais enfant, je me souviens que les gens vivaient sur des pâturages aquatiques.

Ils se nourrissaient aussi d'oiseaux. Les Uru n'avaient pas peur d'aller dans l'eau (membre de la communauté, groupe de discussion, 9.5.19).

 

Uros de Puno

 

Une indigène âgée de 90 ans en train de moudre de la quinoa sur l’île des Uros -De Rodolfo E. Edelmann – Trabajo propio, CC BY 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=9496651

 

Les Urus de Puno se désignent comme les hommes de l’eau car ils vivent sur le lac, dans les totorales, sur les îles flottantes.

« Nous sommes un peuple binational car nous avons nos frères en Bolivie, comme au rio Desaguadero les Uru Irohito, sur le lac Poopó, les Urus de Puñaca Tinta María, de Vilañeque et de Llapallapani. Et les frères Uru Chipaya. Car pour nous, il n'y a pas de frontières, nous sommes comme les poissons et les oiseaux libres, partout où il y a de l'eau ou un lac, c'est notre territoire parce que nous sommes des hommes du lac et de l'eau. (Julio Villca, 04.06.19)

Le territoire des Uros de Puno est le lac Titicaca habité depuis toujours par leurs ancêtres. Ils se composent de 4 établissements : Qhapi los Uros, Qhapi Cruz Grande, Río Wily et Chulluni.

 

ARTICLE sur les Uros du Pérou

 

Retrouver les détails des communautés Urus avec le tableau ci-dessous : 

Communauté/ayllu Rio ou lac proche Etablissement Département Pays
Puñaca Tinta María Lac Poopó Lac Poopó Oruro Bolivie
LLapallapani Lac Poopó Lac Poopó Oruro Bolivie
Vilañeque Lac Poopó Lac Poopó Oruro Bolivie
Aransaya Rio Lauca Chipaya Oruro Bolivie
Manasaya Rio Lauca Chipaya Oruro Bolivie
Wistrullani Rio Lauca Chipaya Oruro Bolivie
Ayparavi Rio Barras Chipaya Oruro Bolivie
Urus d'Irohito Rio Desaguadero Urus de Irohito La Paz Bolivie

Iles Qhapi-Los Uros

Iles Qhapi Cruz Grande,

Iles du rio Wily

Iles et secteur de Chulluni

Lac Titicaca Uros de Puno Puno Pérou

 

ARTICLE sur les Chipayas

 

Langue

 

La langue uru est connue sous de nom de Iru-itu et Uchumataqu. C’est une langue éteinte qui était autrefois parlée par le peuple uru. En 2014, il restait 2 locuteurs natifs sur un groupe ethnique de 140 personnes dans le département de La Paz en Bolivie près du lac Titicaca. Le reste des Urus parlent l’aymara et/ou l’espagnol. La langue uru est proche de la langue chipaya, elle est parfois considérée comme un dialecte de cette langue. L’uru est parfois appelé ochosuma (uchuzuma) nom historique d’un groupe ethnique uru (Campbell, Lyle 2012).

 

Histoire 


Les origines du peuple Uro remontent à des temps antérieurs aux Incas. Selon plusieurs chercheurs, les Uros seraient un groupe des plus anciens habitants du plateau de Collao. Julio Delgadillo (1998) soutient qu’il existe des preuves archéologiques qui permettent d’estimer que les ancêtres du peuple Uro ont occupé la région en 1200 av. J.-C. D’autres chercheurs ont pour leur part relié les origines du peuple Uro à la période dite précéramique, entre 3000 et 2000 av. JC (RDC Puno 2012).

Le Collao est une région qui a connu des occupations successives. Entre le premier et le treizième siècle se trouvaient les Tiawanaku qui auraient habité cette région, qui seraient les porteurs de la langue Puquina, peut-être la langue originaire des Uros (Bouysse-Cassagne 1987). Après la disparition des Tiawanaku, cette zone a été occupée par plusieurs royaumes Aymaras, qui auraient assimilé les premiers habitants, dont les Uros, les acculant à un habitat plus approprié : le lac, le rio  Desaguadero et ses affluents, et en intégrant d’autres à la société agricole Aymara (Prada 2008).

Après la conquête du Collao par les Incas, les Uros auraient été incorporés à l’empire par le paiement de taxes, ces taxes étant le poisson et la fabrication de pétas de paille (Prada 2008, Delgadillo 1998).

 

Suite article uro pérou

 

Economie et vie sociale

 

Les Irohito Urus faisaient du commerce d’aliments obtenus du rio Desaguadero (marchés des villages proches). L’aliment qui était vendu en grande quantité après la pêche était le chhullu (aliment nutritif et curatif utilisé contre la pneumonie). Le tourisme est devenu une option et une stratégie pour générer des ressources économiques au niveau de la communauté pour montrer la culture uru. Ils ont construit un musée communal où ils conservent et exposent ce qui concerne le peuple (vêtements, outils de pêche et de chasse, poteries, vieilles photos).

Les Uros de Puno vivaient de la chasse, de la pêche, de la collecte d’œufs à travers le troc. Puis ils ont commercialisé leurs produits et aujourd’hui ils se sont tournés vers le tourisme qui est important pour visiter les îles flottantes.

Les Urus d’Ayparavi ont une économie basée sur le troc de viande contre d’autres produits. Aujourd’hui ce type d’échange est moins pratiqué.

Les Urus Chipaya, après avoir élevé du bétail, se sont tournés vers la vente de fromages obtenus à partir du lait de brebis.

Les Urus du Poopó avaient une économie familiale reposant sur la pêche pour laquelle les hommes partaient plusieurs jours. ils ont dû changer leur mode de vie pour s’adapter à la disparition du lac : certains ont quitté la communauté, d’autres font paître des moutons pour d’autres personnes, d’autres travaillent à la mine, certains se lancent dans le tourisme exposant leurs propres objets dans le musée communal de Puñaca Tinta Maria qui offre une alternative économique.

 

Navigation

 

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La navigation est une activité caractéristique des Utus de toutes les régions. Elle est apprise dès l’enfance avec la connaissance orale et la pratique de l’imitation, hélas c’est une activité très compromise actuellement faute d’eau dans les rivières et les lacs.

A Irohito, ils réalisent les activités de pêche, chasse, collecte d’œufs, collecte de totoras, d’algues et d’autres plantes aquatiques pour les besoins des familles, tout ceci pouvant se réaliser grâce à la navigation sur le lac ou les rivières. Les produits recueillis peuvent être commercialisés mais ils suffisent bien souvent uniquement aux besoins quotidiens.

Les Urus du lac Poopó ont développé une série de compétences pour naviguer sur les eaux du lac Poopó, par le biais de séjours courts ou prolongés où ils vont pratiquer la pêche, la chasse, la récolte et d’autres activités jusqu’à leur retour sur la terre ferme. Ces pratiques ont été abandonnées en raison des fortes modifications que le lac a subies.

Les Urus d’Ayparati se consacraient autrefois à la navigation quand ils avaient accès aux eaux, pour eux aussi le contexte a changé en raison de l’assèchement du lac et des rivières et l’établissement fixe où ils vivent aujourd’hui.

Les Urus de Puno sont des experts en navigation leur habitat étant toujours centré sur les îles flottantes du lac Titicaca. Leur vie est étroitement liée à ce que le lac fournit.

 

Les embarcations

 

Les embarcations ont progressivement été remplacées. Les ancêtres naviguaient sur des radeaux de totora, ensuite ils ont eu des bateaux en bois puis à rames, à voile ou à moteur.

Les Urus du lac Poopó utilisaient 4 types d’embarcation : le radeau en totora, la baila mono (semblable au kayak), le bateau en bois et le bateau en planches.

A Irohito, ils fabriquaient des radeaux de totora pour la pêche, la chasse, la collecte d’œufs, les voyages et le tourisme. Le bateau de planches apparaît dans les années 65/70.

Les Urus d’Ayparati se souviennent que leurs ancêtres naviguaient sur des radeaux de totora. Actuellement, ils utilisent des bateaux de planches et à rames.

Les Uros de Puno n’avaient que des radeaux de totora puis sont apparus les bateaux à moteur et aujourd’hui les bateaux en fibre motorisés plus légers. Il existe des radeaux pour le tourisme, les balsamarán.

 

VIDEO pesca en Uros Titicaca

 

Les instruments de pêche

 

Autrefois les Urus fabriquaient leurs outils de pêche à partir du totora, de bois, de laine et d’autres matériaux dont le phiri (bâton de plus ou moins 3 mètres de long avec un côté muni de 3 pointes de fer utilisé pour attraper les gros poissons et aujourd’hui pour la chasse).

Le qana était un filet en forme d’entonnoir. Il était tissé avec de la laine ou de la paille et utilisé pour pêcher de nombreux poissons en même temps.

Le filet est le matériel de pêche le plus utilisé actuellement auquel s’adaptent et complètent des pierres, du nylon, un hameçon.

 

Les poissons

 

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Il existe plusieurs variétés de poissons dans les eaux des Urus mais beaucoup ont disparu à cause de la sécheresse, la surexploitation, la contamination et d’autres problèmes rencontrés par les lacs et les rivières.

Les variétés connues étaient :

Lac Poopó : qarachi (orestias albus), mauri (trichomycterus dispar), illa, pejerreye (odontesthes bonariensis)

Puno : mauri, such’i (trichomycterus rivulatus), qarachi, ispi (orestias ispi), boga (orestias pentlandii), picachu (orestias imarpe), punkullo (orestias luteus)

Irohito : qarachi, poisson à tête jaune, mauri, such’i appelé boga

 

La illa

 

C’est un poisson leader qui commande d’autres poissons d’un endroit à l’autre. Les Urus ont leur illa sur leurs bateaux pour attirer les poissons mais aussi les oiseaux (c’est une illa blanche). Il s’agit d’une sorte amulette qui a la vertu de porter chance pour la pêche, la chasse, la collecte d’œufs. Pour les Urus du Poopó, c’était une autorité pour les pêcheurs.

 

L’interdiction ou la rupture

C’est une période pendant laquelle la pêche et la chasse sont interdites afin de respecter la reproduction et la subsistance des différentes espèces de poissons et d’oiseaux et garantir leur maintien ainsi qu’éliminer la surexploitation. C’est devenu une règle de pêche et de chasse.

 

La chasse

 

Les hommes de l’eau s’alimentent également par la chasse aux oiseaux, une activité qui est elle aussi compromise par la réduction des oiseaux aquatiques chaque année moins nombreux pour les mêmes raisons évoquées par ailleurs. Cette activité servait essentiellement à l’auto-consommation.

On note 3 types de chasse : piège, filet et fusils.

La chasse est l’activité principale des Urus d’Irohito qui ont dénombré 36 espèces d’oiseaux sur le rio Desaguadero.

Les Urus du Poopó pratiquaient cette activité de façon minoritaire à cause de la rareté des oiseaux et parce que les personnes ont par la force des choses, dû travailler à l’extérieur pour survivre, ce qui ne laissa plus de temps pour la chasse.

 

Collecte d’œufs

 

Activité particulière fournissant une ressource alimentaire précieuse pour les familles. Tous les oiseaux du lac nichent à partir du mois de mai jusqu’en novembre, les canards pondent leurs œufs en août/septembre, ce sont les plus présents. Les Uus connaissent bien les endroits où nichent les oiseaux dans les totorales où ils approchent avec leurs bateaux pour la récolte. Les enfants connaissent à partir de 7 ans les savoirs liés à cette activité, trouver les nids, savoir quand récolter les œufs. Les Urus se laissent guider par les saisons et les migrations des oiseaux.

 

Spiritualité

 

Les Urus du lac Poopó ont une connexion spirituelle forte avec le lac et lui font des offrandes (ch’uwa) dans des lieux sacrés :

"Depuis les temps anciens, les Urus respectent et remercient la Quta mama, parce qu'elle leur a fourni des richesses pour leur vie sur le lac, et ils continuent à lui demander de leur fournir de l'eau et du poisson."

Le respect et les demandes d'autorisation d'accès au lac sont encore présents dans les communautés du lac Poopó, Irohito, à Chipaya et sur les îles uros de Puno, où l'on invite les feuilles de coca à entrer dans le lac avant de naviguer, bien que toutes ne le fassent pas fréquemment. »

Toutefois, la spiritualité uru est toujours présente dans l'autorisation, les remerciements et la demande aux eaux et à la Quta mama, et c'est la responsabilité des grands-parents et des parents de transmettre ces valeurs aux nouvelles générations.

Urus du lac Poopó

L’eau est le foyer-mère-père des Urus du lac Poopó pour qui le « lac est comme un père et une mère, l’eau est la vie pour les Urus, elle est soin, alimentation, foyer et forces pour résister contre les adversités jusqu’à aujourd’hui.

A Ayparati, l’offrande au rio Barras et aux Mallkus se fait avec le sacrifice d’un lama ou d’un agneau selon les décisions des autorités. Cette tradition a lieu au bord du rio avec la présence d’un asage (aujaton en uru) selon les pratiques culturelles et les croyances pour pouvoir maintenir une relation harmonieuse avec la nature en particulier avec la quta mama.

A Irohito, la wajta est une grande cérémonie pendant laquelle ils réalisent une mesa dulce à la mama quta et aux achachilas. L’offrande est composée de bonbons, alcools, fleurs et s’offre de 2 façons : soit on la brûle, soit on l’immerge dans l’eau.

 

Santé

 

Depuis toujours les Urus se soignent avec les plantes lacustres avec des savoirs ancestraux et parce qu’ils n’ont de centre de santé sur leurs territoires. Ils distinguent les maladies de type spirituel et celles de type physique. Dans le cas des premières, il s’agit d’une frayeur ou d’un esprit qui les surprend ou le fait d’avoir traversé des lieux sans demander la permission. Le 2e type de maladie se réfère aux accidents survenus sur l’eau ou en dehors.

Les médecines traditionnelles sont à base d’espèces qui croissent dans et autour du lac, ils ont appris à en tirer de remèdes au fil du temps.

  • Le sak’a : on utilise la partie blanche de la racine de totora contre les nausées et vomissements et dans les maladies dues à un excès d’alcool.
  • Le chhullo : on utilise la partie blanche du totora contre la fièvre, les maux de tête (elle contient beaucoup d’iode) et cela sert également pour obtenir une bonne dentition.
  • Le sip’i : on utilise la partie brune de la racine de totora (à l’origine c’est le sak’a et cela devient le sip’i à maturité). Consommé dans des soupes, favorise la mémoire et les capacités intellectuelles.
  • Le chumi : c’est la fleur de la totora qui se consomme en maté. Cette infusion soulage les troubles digestifs, les maux d’estomac, la diarrhée, c’est un fébrifuge, utile aussi contre le mal d’altitude. La plante brûlée sert localement de cicatrisant et désinfectant des plaies.
  • Le sqalapuma : fébrifuge, soin des blessures. C’est comme de la laine qui pousse sur l’eau, on la presse un peu quand on la sort de l’eau et on la pose sur la blessure.
  • Lama negra : lorsque l’eau les bords, de la boue reste qui est utilisée comme anti-inflammatoire pour les luxations, les fractures.
  • Lamphaya : contre les rhumes.

Les oiseaux du lac ou des rivières ont des vertus curatives eux aussi que ce soit par leur chair que par leur sang. Des personnes s’en servent pour soigner les maladies pulmonaires, pour la récupération postpartum ou avant les accouchements ainsi que contre l’épilepsie.

La chair de lézard : elle est utilisée contre les fractures, les inflammations ou les rhumatismes. La peau et les viscères sont retirés et appliqués sur la zone affectée.

La graisse de flamant : une fois la graisse obtenue elle est posée sur l’endroit affecté avec un tissu ou un plastique et il faut exposer ensuite cet emplâtre à la lumière du soleil.

 

Alimentation du lac

 

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Les ancêtres de Urus se nourrissaient grâce à la générosité de la mama qucha. A travers le troc, ils obtenaient d’autres aliments essentiels. Leur régime était à base de plantes aquatiques qui poussent dans les yeux d’eau des rivières et les lacs. Ce sont des aliments sauvages qui ne se plantent pas.

  • Lhomi : plante qui pousse dans les lagunes ou les rivières des zones humides ou dans des lieu où il y a de l’eau. C’est une racine blanche que l’on tire de terre, que l’on fait sécher, qui a un goût agréable et sucré.
  • Sawqpira : racines prélevées dans les pâturages qui était la nourriture des anciens et qui est donnée à présent au bétail.
  • Urwa : plante qui pousse dans les rivières, avec une racine blanche et sucrée.
  • Khiwi : c’est l’urwa mûre sucrée et riche qui se mange à partir du mois de juin et en abondance en août/septembre.
  • Ozqu : plante du bord des rivières ou les endroits humides.

 

Par olivier hodac — originally posted to Flickr as 015-lac_popo-flamants, CC BY 2.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=4667865

Par olivier hodac — originally posted to Flickr as 015-lac_popo-flamants, CC BY 2.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=4667865

Le lac Poopó a disparu

 

Photo satellite du lac Poopó prise en septembre 1991. En haut à droite, la tache foncée correspond au lac Uru Uru près duquel est construite la ville d'Oruro. Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=447841

Même si les Urus affirmaient n’avoir jamais vu le lac complètement sec avant 2015 date actée de sa disparition, ce lac a subi plusieurs sécheresses entre 1939 et 1944, 1969 et 1973 et 1994 et 1997. Les effets du changement climatique, la hausse des températures entre 1995 et 2005 qui ont augmenté de plus 0,9% sur les hauts plateaux andins, les effets du système Enso dans l’océan Pacifique, la diminution du lac Titicaca dont le Poopó est subisidiaire par le rio Desaguadero, la conséquence des activités humaines ont raccourci la durée de vie de ce lac.

Une des causes majeures de l’assèchement provient des systèmes de canaux d’irrigation développés par des paysans de la région afin de cultiver du quinoa (la Bolivie est devenue le 1er pays exportateur de quinoa). Ces canaux situés autour du rio Desaguadero ont été installés de façon précaires et sans autorisation, détournant la ressource en eau de son cours principal. Le Desaguadero prenant sa source dans le lac Titicaca fournissait historiquement plus des deux tiers en eau du lac Poopó.

 

Vue aérienne de la ville de Poopó, contaminée par une intense activité minière. 13 juin 2023.

Photo: Sara Aliaga Ticon

L’exploitation minière de nickel, cuivre, cadmium, plomb, argent, zinc joue un rôle important dans la disparition du lac. Le secteur s’est développé suite à l’augmentation des prix des métaux sur le marché international. Les entreprises minières déversent l’eau contaminée dans le lac Poopó où il y a peu de législation pour protéger l’environnement.

Cette pollution trop concentrée dans des quantités d’eau de plus en plus faibles a causé la mort de milliers de poissons en décembre 2014, évènement sans précédent qui a précédé de quelques mois la disparition du lac.

Les déchets miniers excessifs provenant de l’extraction de minerais dans les cours d’eau ont bloqué les rivières, étouffé la végétation, détruit la faune, la flore, la vie aquatique et se sont accumulés au fond du lac réduisant sa profondeur ce qui a favorisé le réchauffement de l’eau et l’évaporation (2000 tonnes de déchets miniers en 2014 atteignaient le lac chaque jour en provenance du rio desaguadero).

 

le flamant rose était une des curiosités du lac Poopó Par Arpingstone — Travail personnel, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=584963

Loi Nº 1255 - Déclare les connaissances, les savoir-faire et les modes de vie liés à l'eau comme patrimoine culturel immatériel de l'État plurinational de Bolivie.

 

En vertu de cette loi, les connaissances, les savoir-faire et les modes de vie liés à l'eau sont déclarés patrimoine culturel immatériel de l'État plurinational de Bolivie, en tant qu'espaces de vie traditionnels et moyens de subsistance de la nation indigène Uru (Qha's - Qot Z'oñi), avec les usages, les pratiques ancestrales et les traditions historiques de l'identité des nations et des peuples autochtones, indigènes et paysans aborigènes. Les ministères correspondants et les entités territoriales autonomes, départementales, municipales et paysannes autochtones, dans le cadre de leurs compétences respectives, devront promouvoir des actions de protection, de renforcement et de diffusion des connaissances, des savoirs ancestraux et des modes de vie liés à l'eau de la Nation autochtone Uru, visant essentiellement à :

►a) renforcer les mesures de coopération aux niveaux municipal, régional, départemental et national, afin que la Première Nation Uru exerce pleinement ses droits civils, sociaux, économiques, politiques, culturels, linguistiques, éducatifs, sanitaires, environnementaux, le respect de ses terres et territoires ancestraux, le logement, le tourisme, la chasse et la pêche d'animaux sauvages non protégés ;

►b) promouvoir sa pleine participation, sur un pied d'égalité, à toutes les sphères de la société ;

►c) identifier les rios Lauca et Barras, où vivent les Uru Chipaya, le lac Poopó, où vivent les Uru del Lago Poopó, et le rio Desaguadero, où vivent les Uru Irohito, comme des espaces de vie traditionnels et des sources fondamentales de subsistance et d'économie.

 

La totora

 

inflorescence de totora

 

C’est une espèce de scirpe proche des joncs.

Nom latin : schoenoplectus californicus

Famille : cypéracées

La tige de la totora mesure entre 3 et 4 mètres de haut. Sa racine est immergée et peut atteindre 4 mètres. Elle pousse dans les lieux lacustres et les zones humides, lacs, lagunes, bord de mer et peut être cultivée par les hommes dans des endroits où elle n’existe plus.

Il existe plusieurs variétés de totora mais en Bolivie, les Urus n’en connaissent qu’une qui porte différents noms selon son âge (cycle de vie), du lieu où elle pousse, de sa couleur etc…

Chilli totora : ramification de la totora. Quand le chilli atteint 3 à 4 mètres de haut, il est appelé churu totora.

Churu totora : elle est considérée comme une totora femelle (china) car elle est tendre et douce. Elle est coupée en octobre jusqu’à début janvier. Elle pousse sous l’eau, ne flotte pas et n’est pas aussi dure que la phuti totora.

Phuti totora : elle est dure comme un bâton, elle tient sur le radeau. C’est une totora considérée comme mâle (urqu) car elle est très dure. Elle est coupée en hiver (fin mai à fin août).

Matara : elle est percée d’un trou au milieu, a la même forme que du coton qui est comme son cœur.

Au Pérou, la totora pousse dans les zones humides et marécageuses des cerros et des hauts plateaux. La tige est courte, fine et poreuse ce qui permet d’absorber les teintures employées par les artisanes. Une autre variété connue au Pérou est la totora marine qui a une écorce plus épaisse, une tige plus longue et plus dure encore. Elle est rarement utilisée pour l’artisanat mais sert plutôt à la construction de radeaux et de toits.

 

Canoës en totora à Huanchaco By SantiagoGG - Own work, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=54341798

 

Importance de la totora pour les peuples Urus

 

►Purification de l’eau

►Protection du sol

►Alimentation humaine

►Fourrage pour les animaux

►Nécessaire à la vie et la reproduction des oiseaux et des poissons

►Amendement pour les plantations

►Construction de huttes, embarcations, iles flottantes

►Traitement des maladies

►Artisanat

►Fabrication de jouets

►Fabrication de papier avec la pulpe

 

"Sans la totora, les Urus pourraient disparaître parce qu'il n'y aurait pas de vie, parce que, en plus d'être une matière première, c'est un aliment, un fourrage, un médicament". (Lorenzo Inda, 31/10/15)

îles flottantes Par Draceane — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=147133195

îles flottantes Par Draceane — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=147133195

Belle totora

Oh ! belle totora
rayonnante dans l'eau,
fraîche et belle
chère totora.

Ton éclat illumine
l'aube lumineuse,
radieuse et belle,
je t'aime, totora.

Oh, quelle belle totora
d'un vert de vie,
d'un vert espoir.
Mon peuple t'adore,
belle totora.

Toi qui, hier, as abrité mon peuple
aujourd'hui et demain tu seras dans mon esprit,
prenant soin du lac, belle totora.

Bertha Choque Villca traduction carolita

Sources :

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