L'abattis de Coq et Cafard (conte Saramaka)

Publié le 11 Mars 2024

Peuple Saramaka

image

 

Autrefois Cafard et Coq étaient bons amis, ils vivaient dans la même maison.
Un jour Coq proposa à son ami Cafard de faire un abattis ensemble cette année-là. -

- Qu’en penses-tu ? 

Ce à quoi Cafard répondit :

- Pas de problème ! 

Quelques temps plus tard, Coq demanda à Cafard :

- Que ferons-nous demain ? Nous pourrions partir à la recherche d’un terrain ? 

Cafard acquiesça. Ils se couchèrent et le lendemain matin, ils sautèrent du hamac, mirent le déjeuner sur le feu. Ils se préparèrent pour partir à la recherche d’un bon endroit à déboiser et prirent leur sabre et leur hache. Ils marchèrent jusqu’à ce qu’ils trouvent une place qui parut leur convenir. Ils regardèrent alentour et décidèrent que le lieu était propice.

Ils se mirent aussitôt au travail et commencèrent à couper. Ils coupèrent jusqu’au soir puis s’en revinrent chez eux. Ils se baignèrent et grimpèrent dans leur hamac pour y dormir jusqu’au lendemain. Ils retournèrent alors reprendre leur travail jusqu’au soir et rentrèrent chez eux. Il en fut ainsi jusqu’à ce que tous les arbres soient coupés et que les feuilles laissées là soient suffisamment sèches pour y mettre le feu. Une fois le tout bien brûlé, ils se mirent à nettoyer jusqu’à ce que tout soit bien propre. Alors ils creusèrent la terre pour y planter toutes sortes de légumes bons à manger et même du riz. Lorsque tout fut planté, ils allèrent chaque jour vérifier que tout poussait bien jusqu’à ce qu’ils estiment que le riz soit suffisamment mûr pour être récolté le lendemain.

Ce matin là, Coq appela Cafard pour partir ramasser le riz avec lui mais ce dernier lui répondit :

- Je n’ai pas bien dormi, je me sens faible.

Coq lui affirma qu’il n’y avait pas de problème, il se débrouillerait tout seul aujourd’hui. Il prit son couteau et son panier et passa la journée à le remplir. À son retour, il se baigna et prépara un bon repas pour son ami, puis, fourbu, il alla dormir jusqu’au lendemain.

Le matin, Coq prépara son panier et partit pour la récolte.
Dès que Coq fut reparti à la cueillette du riz, Cafard se leva, prit le riz, le mit dans un mortier et commença à l’écraser en chantant :

Moi, mon ami Coq a dit que je suis malade,
Moi, mon ami Coq a dit que je suis malade,
Je ne suis pas malade du tout,
Je suis au village en train de piler le riz,
Gin gin gwongolo, gin gin gwongolo. 


Il a pilé tout le riz puis l’a fait cuire et l’a mangé.
À son retour, Coq s’informa de la santé de son ami qui se plaignit encore :

- Non, je ne suis pas rétabli, je ne vais pas bien du tout, je ne me suis même pas levé.

Coq le rassura, fit la vaisselle, prépara le repas et partit se coucher bien fatigué jusqu’au lendemain.
Le jour suivant Coq se leva, se prépara et partit pour l’abattis. Dès qu’il fut en chemin, Cafard se leva, prit le riz et se remit à chanter en pilant :


Moi, mon ami Coq a dit que je suis malade,
Moi, mon ami Coq a dit que je suis malade,
Je ne suis pas malade du tout,
Je suis au village en train de piler le riz,
Gin gin gwongolo, gin gin gwongolo. 


Quand il eut terminé, il mit le riz à cuire, le mangea et repartit se coucher jusqu’à l’arrivée de Coq. Celui-ci s’enquit à nouveau de sa santé :

- Comment vas-tu aujourd’hui ? 

Cafard lui répondit :

-Ça ne va pas du tout, je ne vais pas mieux !

Coq s’inquiéta de ne pas voir le riz :

- Les oiseaux noirs sont venus pour attaquer le riz ? et Cafard confirma qu’il avait passé tout son temps à les chasser et que maintenant il était épuisé.

Coq remarqua :

- Ils en ont vraiment mangé une grande partie ! et Cafard renchérit :

- C’est vrai, ils ont vraiment tout mangé, comment allons-nous faire avec ces oiseaux ? 

Un homme avait vu ce que Cafard faisait. Il appela Coq et lui dit :

- Mon ami, il se passe quelque chose chez toi quand tu n’es pas là. Quand tu partiras demain, fais semblant de partir vraiment mais cache-toi pour regarder ce qui arrive à ton riz. 

Coq le remercia et promit de suivre ses conseils. Coq se baigna et alla dormir jusqu’au lendemain.
Ce jour là, Coq salua son ami :

- Je pars à l’abattis, à plus tard !  mais il fit semblant de partir et se cacha pour voir ce que Cafard faisait. Il n’eut pas à partir très loin que déjà Cafard avait pris le riz, l’avait mis dans le mortier et s’était mis à chanter :


Moi, mon ami Coq a dit que je suis malade,
Moi, mon ami Coq a dit que je suis malade,
Je ne suis pas malade du tout,
Je suis au village en train de piler le riz,
Gin gin gwongolo, gin gin gwongolo. 


Quand Coq vit cela il se mit aussitôt à courir après Cafard jusqu’à ce qu’il l’attrape. Et là, il le dévora d’un coup.
C’est pour cela qu’aujourd’hui, lorsque Coq rencontre Cafard, il le dévore car il n’oublie pas que Cafard l’a dupé en lui dévorant toute sa récolte de riz !

C’est ici que l’histoire se termine.

 

Conteuse : Wilma Pinas
Traduction : Sylvie Abbe)

 

 

Nicolas DARBON, « Bruits, création sonore et performance : trois contes (Palikur, Créole et Saramaka) de Guyane » in Musique et littérature, entre Amazonie et Caraïbes. Autour d’Édouard Glissant, Actes de la journée d’étude organisée à l’Université de Rouen en avril 2012, publiés par Nicolas Darbon.
(c) Publications numériques du CÉRÉdI, "Actes de colloques et journées d'étude (ISSN 1775-4054)", n° 9, 2014.

URL: http://ceredi.labos.univ-rouen.fr/public/?bruits-creation-sonore-et.html

Voir avec ce lien ci-dessus la version dans la langue originale

Autre source : https://www.une-saison-en-guyane.com/article/conte/conte-saramaka-die-woto-u-halakwakwa-ku-ganiyal-abattis-de-coq-et-cafard/

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Guyane, #Peuples originaires, #Saramaka, #Cosmovision, #Les oiseaux

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article