Brésil : Le film "Escute: a terra foi rasgada" montre la lutte des Kayapó, Yanomami et Munduruku contre l'exploitation minière illégale

Publié le 24 Mai 2023

Escute: a terra foi rasgada  : Ecoutez : la terre a été déchirée

Présenté en avant-première lors du 12e festival du film Ecofalante, le documentaire de l'Alliance pour la défense des territoires et de ses partenaires présente l'impact sur les territoires indigènes de ceux qui ressentent la violence à fleur de peau.


Isabella Pilegis - Journaliste ISA
 
Lundi, 22 Mai 2023 à 09:00 AM

 

Affiche officielle du documentaire réalisé par Cassandra Mello et Fred Rahal

 

Présenté en avant-première le 4 juin à São Paulo, lors de la 12e édition du festival Ecofalante, le documentaire Écoutez, la terre a été déchirée, réalisé par l'Alliance pour la défense des territoires et ses partenaires, propose une plongée dans la lutte et la réflexion des peuples Kayapó, Yanomami et Munduruku contre l'exploitation minière illégale sur leurs territoires. 

Réalisé par Cassandra Mello et Fred Rahal, il comprend des enregistrements réalisés entre 2021 et 2022 et des témoignages de leaders de ces trois peuples, les plus impactés par l'avancée de l'exploitation illégale de l'or en Amazonie.

Les leaders indigènes de l'Alliance pour la défense des territoires Davi Kopenawa Yanomami, Beka Munduruku et Maial Paiakan Kayapó ont confirmé leur présence à la séance d'ouverture.

Selon le dossier "Terre déchirée : comment l'exploitation minière progresse en Amazonie brésilienne", publié par l'Alliance en mars, l'exploitation minière dans ces terres indigènes a explosé de 495% entre 2010 et 2020.

L'invasion minière dans ces régions provoque des dommages socio-environnementaux dévastateurs, tels que la déforestation, la pollution des rivières, la contamination au mercure, la propagation de maladies - dont le paludisme -, ainsi que des attaques violentes de la part des mineurs.

Des leaders Munduruku, Yanomami et Kayapó dénoncent dans un film la violence et la destruction causées par l'exploitation minière illégale sur leurs territoires.📷 Teia Documenta

 

De plus, sans aucun moyen de maintenir leur mode de vie, basé sur la chasse, la pêche et la culture du coivara, les indigènes souffrent d'insécurité alimentaire et de malnutrition infantile. Au début de l'année, les images des indigènes Yanomami victimes de la crise humanitaire dans leur territoire ont fait le tour du monde et ont stimulé les actions du gouvernement fédéral pour lutter contre l'exploitation minière dans la région.

Le dossier de l'Alliance explique également les mécanismes qui favorisent l'avancée de l'exploitation minière illégale, fortement mécanisée et capitalisée, et pointe les fragilités institutionnelles de la chaîne aurifère qui favorisent cette activité, en énumérant une série de mesures pour la combattre.

En témoignage au film, des leaders historiques tels que Davi Kopenawa, Megaron Txucarramãe, Tuíre Kayapó Mẽbêngôkre, Alessandra Korap Munduruku et O-é Paiakan Kayapó racontent les impacts de l'exploitation effrénée de la forêt, tels que la contamination des rivières et des sols, l'augmentation de la violence et de la criminalité dans la région, en plus des menaces sur le mode de vie, la culture et la spiritualité de leurs peuples.

"Vous, les journalistes, écoutez ceci. Vous devez faire passer le message à tout le monde. Vous devez faire connaître ce que je dis. Mon discours doit paraître tous les jours, tous les mois dans les journaux. Vous devez montrer mon discours à ces Blancs qui veulent du bois, qui veulent de l'or, qui ne me connaissent toujours pas. Vous diffuserez mon discours partout, pour que les gens sachent qu'il faut respecter la forêt, respecter la terre et respecter nos corps", déclare Tuíre Mẽbêngôkre, leader historique du peuple Kayapó en lutte contre les impacts environnementaux de la construction de la centrale hydroélectrique de Kararaô, comme on l'appelait à l'époque.

L'Alliance pour la défense des territoires est née après la publication d'une lettre-manifeste par neuf organisations indigènes de ces territoires pendant le camp Luta pela vida, en août 2021 (pour en savoir plus, voir ci-dessous). Le documentaire inclut des enregistrements de réunions de l'articulation, qui s'est développée au cours de l'année suivante dans les territoires Munduruku et Kayapó, et la célébration du 30e anniversaire de la démarcation de la terre indigène Yanomami, qui a eu lieu en mai 2022.

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Extrait du film où un enfant indigène joue dans la rivière.
Le film montre la relation des peuples indigènes avec les territoires 📷 Cassandra Mello/Teia Documenta
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"Si la forêt-territoire est sèche, si elle est broyée, si elle est brûlée, nous n'existons pas. Si la forêt souffre, je souffre aussi. Si la forêt pourrit, je porte moi aussi des blessures, des cicatrices. Si la forêt brûle, ma peau aussi se ride", explique le chaman yanomami Davi Kopenawa.

La production présente des éléments de la culture et de la vie quotidienne des peuples Kayapó, Yanomami et Munduruku, révélant leur force, leur beauté et leur pouvoir, et montre l'impact de l'exploitation minière illégale sur les trois territoires.

"Parmi nous, aucun individualisme ne doit prévaloir. Nous devons nous rappeler que nous avons le même sang, la même rivière, la même forêt. Et c'est notre région munduruku que nous défendons. C'est ce que je voulais souligner, pour le dire à tout le monde. C'est ainsi que cela doit se passer, aussi bien dans le Baixo Tapajós que dans le Médio et l'Alto Tapajós. Tout le monde doit parler d'une seule voix et prendre une décision collective. C'est ce qui fera notre force", déclare le cacique Juarez Saw Munduruku, dans le territoire indigène de Sawré Muybu.

Les réalisateurs Cassandra Mello et Fred Rahal rappellent que, dès la première réunion, les dirigeants ont établi ce qui devait faire partie du récit, et soulignent l'importance de la narration, faite de manière personnelle et principalement dans les langues indigènes, afin que le film joue un rôle politique important dans la sensibilisation et la mobilisation pour la défense des droits des peuples et des territoires indigènes.

A propos de l'Alliance pour la défense des territoires

En août 2021, lors du camp Luta pela vida à Brasilia, les dirigeants des terres indigènes les plus touchées par l'avancée de l'exploitation minière illégale se sont réunis pour rédiger un document exprimant publiquement leur rejet des activités minières, considérées comme "une maladie que les Blancs introduisent dans nos territoires". 

La lettre-manifeste a été signée par neuf organisations indigènes : Hutukara Associação Yanomami, Instituto Raoni, Instituto Kabu, Associação Bebô Xikrin do Bacajá, Associação Floresta Protegida, Associação das Mulheres Munduruku Wakoborũn, Associação Indígena Pariri do Médio Tapajós, Hwenama Associação dos Povos Yanomami de Roraima et Associação Wanasseduume Ye'kwana.

De cette rencontre est née une proposition d'alliance entre les peuples Kayapó, Yanomami et Munduruku, afin de renforcer les luttes que chacun de ces peuples promeut pour la défense de ses terres. L'articulation s'est développée tout au long de l'année 2022, dans des actions promues conjointement par les leaders de ces peuples dans les territoires, dans de grandes mobilisations dans les capitales et également au niveau international. La publication du dossier et du documentaire Escute: a terra foi rasgada font partie des efforts promus par l'initiative.

Fiche technique

Titre Escute: a terra foi rasgada

Réalisé par : Cassandra Mello et Fred Rahal

Production : Teia Documenta et Aliança em Defesa dos Territórios

Année : 2023

Durée : 1h 28 m

Support :
Conseil politique de l'Alliance pour la défense des territoires : Dário Kopenawa Yanomami, Alessandra Korap Munduruku, Maial Paiakan Kayapó, Júlio Ye'kwana, Ademir Kaba Munduruku, Doto Takak-Ire Kayapó

Associations : Association Hutukara Yanomami, Association indigène Da'uk, Institut Kabu, Association des femmes Yanomami Kumirãyõma, Association indigène Pariri, Association de la forêt protégée, Association Wanasseduume Ye'kwana, Institut Raoni

Institutions partenaires : Instituto Socioambiental, Greenpeace Brésil

Soutien : Environmental Defense Fund (EDF)

traduction caro d'un article paru sur le site de l'ISA le 22/05/2023

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