Pérou : Campagne : "Non au terruqueo : construisons un pays de droits"

Publié le 14 Mars 2023

Source de l'image : Aprodeh

La campagne cherche à rendre visible, à dénoncer et à enregistrer la stigmatisation subie par les personnes qui participent aux protestations sociales.

Servindi, 11 mars 2023 - L'Association pour les droits de l'homme (Aprodeh), qui a une longue histoire dans la promotion et la défense des droits de l'homme, a lancé la campagne "Non au Terruqueo : construisons un pays avec des droits".

La campagne No al Terruqueo met à la disposition du public le site web https://terruqueo.pe/ qui contient des informations et des outils juridiques pour les personnes victimes de ce type de diffamation.

On y trouve des formulaires de demande de garantie personnelle, les démarches à suivre si l'on souhaite déposer une plainte auprès du ministère public et du pouvoir judiciaire.

Ils peuvent également laisser leur témoignage pour être inclus dans le registre des victimes de cette pratique vexatoire.
 

Une campagne opportune

La campagne arrive à point nommé dans un contexte où le gouvernement de Dina Boluarte a enregistré plus de 60 morts, 120 blessés et plus d'un millier d'arrestations arbitraires lors de la répression des manifestations sociales.

L'exécutif et les secteurs ultra-conservateurs de la politique nationale sont engagés dans une attaque systématique qui stigmatise et dénigre les personnes qui participent à des mobilisations sociales pacifiques, les qualifiant de terroristes.

Outre l'utilisation disproportionnée et violente, certains secteurs politiques se moquent même des symboles ethniques et culturels des manifestants, afin de réduire à néant leurs revendications politiques et sociales.

Terruqueo, un délit de diffamation grave

Selon la législation en vigueur, le fait d'accuser quelqu'un ou de le qualifier de "terroriste" sans preuve est considéré comme un délit de diffamation grave, car il peut avoir de nombreuses répercussions sur la vie de la personne concernée et même sur sa famille.

Gloria Cano, directrice d'Aprodeh, souligne que le terruqueo est utilisé depuis des décennies, dans les premières années de la violence politique, pour justifier des détentions arbitraires, des tortures et des morts, c'est-à-dire des crimes contre l'humanité. 

"L'utilisation du terruqueo a des effets plus importants que n'importe quel autre type de diffamation, car elle vous isole socialement, vous nuit au travail, porte atteinte à votre honneur et à votre dignité, et vous expose même à la possibilité de faire l'objet d'une enquête pour terrorisme", explique Cano.

"C'est grave et cela nécessite des procédures, comme l'engagement d'un avocat pour prendre en charge la plainte pour diffamation, le paiement d'honoraires et le suivi de la procédure. C'est parce que les gens n'ont pas accès à une telle procédure qu'il y a tant d'impunité dans le pays.

C'est comme si nous revenions aux années 80 et 90, mais pas à cause du terrorisme, mais à cause des actions des forces de l'ordre, parce que nous voyons à Ayacucho que les gens sont arrêtés, mis dans une camionnette, emmenés à la caserne de Los Cabitos, ils ne permettent pas au juge constitutionnel de les voir malgré l'habeas corpus, et ils les emmènent par avion à Lima sans que personne ne sache où ils se trouvent, sans permettre à leurs avocats de les voir, sans que le juge constitutionnel ne vérifie les conditions de détention, nous n'avons vu cela que dans les années 80 et 90 - Gloria Cano.

Pour Eduardo Cáceres, chercheur à l'Aprodeh, le "terruqueo" institutionnalisé par le pouvoir exécutif va susciter la réaction des organisations de défense des droits de l'homme, qui dénoncent ceux qui "terruquean". 

"Nous avons un précédent important : il y a quelques semaines, Anahí Durand a gagné un procès contre la journaliste Milagros Leiva pour diffamation aggravée", a souligné Cáceres.

La gravité de la situation réside dans le fait que les autorités encouragent la poursuite des cas d'abus, ce qui accroît la polarisation et l'exacerbation de l'atmosphère.

Ainsi, la stigmatisation du terruqueo prend une ampleur inquiétante dans les secteurs non informés de la société, ou chez ceux qui sont favorables à l'idée de "mettre une balle", comme le proposent les acteurs politiques d'extrême-droite.

Objectifs de la campagne "Non au Terruqueo

Les objectifs de la campagne sont les suivants :

  • informer les personnes qui manifestent de leurs droits et du cadre juridique qui les protège,
  • honorer les personnes qui expriment spontanément leur mécontentement par des moyens démocratiques tels que la protestation pacifique,
  • enregistrer les personnes diffamées afin de rendre cette pratique visible au niveau international, et dénoncer la nature raciste et classiste de cette pratique.
  • dénoncer le caractère raciste et classiste de cette répression disproportionnée à l'encontre de la population. 

Si vous êtes victime de terruqueo, vous êtes diffamé : DÉNONCEZ ! Laissez-nous votre témoignage.

 

www.terruqueo.pe

traduction caro d'un article paru sur Servindi.org le 11/03/2023

 ? Le terruqueo (traduction de la définition de l'article wikipedia)

Le terruqueo est une pratique politique et sociale utilisée par les secteurs conservateurs et la droite péruvienne en général, qui consiste à attribuer à un adversaire, porteur de propositions de gauche ou dissident de l'establishment , des connotations d'assimilation à des comportements ou idées terroristes, ou d'apologie du terrorisme, voire d'appartenance ou d'action au sein de ces groupes armés, afin de le discréditer ou d'invalider son discours .Il a également été défini comme une stratégie politique qui utilise, par association, la peur du terrorisme à des fins politiques et qui réduit à néant tout espace de débat ou de pluralité politique au sein d'un État démocratique.

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Pérou, #Stigmatisation, #Mobilisation, #Terruqueo

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