Violences envers les femmes (et les enfants)
Publié le 25 Septembre 2022
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Le fait est qu’à présent on en parle.
Que nous sommes sans doute moins isolées, isolés.
Le fait est qu’on en parle mais pas vraiment dans le sens où les choses pourraient changer.
Car il y a des lignes à bouger, des lignes encore trop lourdes.
Et nous aimerions que ça presse, car les choses empirent comme empire l’état du monde (c’est-à-dire de la planète).
Le fait est que l’on se demande s’il y a une gradation dans les violences, si la gifle est moins pire que la bastonnade, si l’attouchement sexuel est moins pire que le viol. Ceci, c’est la justice, quand elle est convoquée qui est tenue de décider selon ses propres critères.
J’aimerais dire ce que j’en sais pour l’avoir vécu, j’aimerais dire ce que je ressens, si cela m’est permis, si cela pouvait faire avancer de quelques millimètres, la ligne si lourde à déplacer.
C’est dur quand on est enfant, que l’on a parfois envie de se confier, et que la personne, souvent une personne proche nous répond : "ce n’est pas si grave, il ne t’a pas battue, ce n’est qu’une gifle". Ou encore, "ce ne sont que des cris, tu sais, il ne sait pas ce qu’il dit quand il a bu."
Ou encore à propos d’abus sexuels (dont on ne sait pas alors que cela s’appelle « abus sexuels » et qu’ils en sont réellement) : "ce n’est pas si grave après tout, tu n’as pas été violée".
J’ai pensé, par rapport à cet évènement précisément, jusqu’à l’âge de 42 ans que ce n’était pas grave. Je n’ai rien fait, je n’en ai plus parlé convaincue que j’étais que, effectivement, je n’avais pas été violée, que, effectivement, je m’en remettrais (ce qui est une véritable erreur).
Banaliser les violences qu’elles quelles soient, c’est enfermer une personne dans sa souffrance, la détruire à jamais. Banaliser les violences qu’elles quelles soient, c’est reculer la dénonciation, c’est protéger une personne violente (qui elle aussi aurait besoin de frein et de soins).
Alors, au-delà du fait que l’on souffre, quand on ne nous comprend pas, on se dit, plus tard, avec le recul, quand il n’y a plus rien à faire qu’en tirer des conclusions, de se soigner comme on peut, que l’on réalise comme l’on aurait aimé entendre :
« Je te crois ma petite fille, comme tu as dû souffrir et comme je me sens impuissante pour t’aider, mais tu verras, on va se renseigner, on va voir ce qu’il est possible de faire pour que cela ne recommence pas ».
Ne croyez pas qu’en écrivant cela je fasse des procès d’intention à ceux ou celles qui ont partagé ma vie et ont connu ou su les évènements que j’ai vécu, je sais très bien comme alors, on ne parlait pas de ces choses-là, je sais comme les gens étaient démunis face à la violence au sein de la famille ou au sein de la société-même ou de l’école.
Maintenant on en parle et c’est tant mieux.
Et c’est aussi vrai que l’on se retrouve tellement nombreuses, tellement nombreux avec des histoires similaires, des comportements similaires que seuls des spécialistes peuvent expliquer, et l’on est bien d’accord, nous ne sommes pas des spécialistes. Seulement des personnes qui souffrent et ne peuvent pas mettre de mots sur leurs souffrances. Seulement des personnes qui auraient aimé connaître la tendresse au lieu des affronts.
Seulement des personnes qui réagissent après coup, comme elles ont détruit ce corps, cette vie de toutes les façons qu’elles ont pu trouver sur leur chemin, sans le savoir vraiment ni sans savoir pourquoi.
Seulement des personnes qui ne souhaitent pas que ce qu’elles ont vécu soit vécu par leurs enfants, leurs petits-enfants, par d’autres femmes, par d’autres personnes.
Alors, je pense qu’il ne faut rien relativiser.
Nous avons décidé qu’il fallait croire les femmes quand elles parlent, cela n’est pas facile de prendre la décision de parler (et je dis ça, car moi-même à 58 ans n’ai pas encore tout dit), nous avons décidé qu’il fallait prendre à bras le corps le grand chantier des violences envers les femmes (qui pour moi sont liées aux violences envers les enfants), continuons à en parler.
Continuons à ne plus nous taire.
Continuons à nous solidariser comme le veut la belle sorodidad (sororité) de nos compañeras d’Amérique latine.
Oui, le combat est dur pour les femmes mais elles ont la force et le courage de le mener, toutes générations confondues.
Oui, le discours doit changer, les lignes doivent bouger, nous ne pouvons plus nous permettre, maintenant de laisser dire, de laisser faire. Nous sommes en pleine lutte et cette lutte c’est aussi celle contre les féminicides.
Quand on s’en prend autant aux femmes, quand on s’en prend autant à la terre, notre mère, cela nous interpelle car le féminicide = l’écocide.
Détruire le corps de qui donne la vie.
Un peu, une façon pour l’espèce humaine, de se mettre une balle dans le pied, non ?
Caro
Les paroles de cette chanson en français
Antipatriarcat
Je peux être ta soeur, ta fille, Tamara, Pamela ou Valentina
Je peux être ta meilleure amie, voire ta compagne de vie
Je peux être ta grande alliée, celle qui te conseille et celle qui t'aide
Je peux être n'importe laquelle d'entre elles, ça dépend de comment tu m'appelles
Mais je ne serai pas celle qui obéit parce que mon corps m'appartient
Je décide de mon temps, de la façon dont je veux et de l'endroit où je veux être
Indépendante je suis née, indépendante j'ai décidé
Je ne marche pas derrière toi, je marche à côté de toi
Tu ne vas pas m'humilier, tu ne vas pas me crier dessus
Tu ne me soumettras pas, tu ne me battras pas
Tu ne me dénigreras pas, tu ne me forceras pas
Tu ne vas pas me faire taire, tu ne vas pas me faire taire
Ni soumise ou obéissante
Femme forte et insurgée
Indépendante et courageuse
Briser les chaînes de l'indifférence
Ni passive ou opprimée
Belle femme qui donne la vie
Émancipée dans l'autonomie
Antipatriarcat et joie
Libérer, libérer, libérer, ah ah
Libérez, libérez, libérez
Je peux être chef de famille, employée ou intellectuelle
Je peux être la protagoniste de notre histoire et celle qui fait bouger les choses
Le peuple la communauté, celle qui réveille le quartier
Celle qui organise l'économie de la maison de sa famille
Une femme leader qui se lève
Et brise les chaînes de la peau
Tu ne vas pas m'humilier, tu ne vas pas me crier dessus
Tu ne me soumettras pas, tu ne me battras pas
Tu ne me dénigreras pas, tu ne me forceras pas
Tu ne vas pas me faire taire, tu ne vas pas me faire taire
Ni soumise ou obéissante
Femme forte et insurgée
Indépendante et courageuse
Briser les chaînes de l'indifférence
Ni passive ou opprimée
Belle femme qui donne la vie
Émancipée dans l'autonomie
Antipatriarcat et joie
Libérer, libérer, libérer, ah ah
Libérez, libérez, libérez
Ana Tijoux traduction carolita