Mobilisation historique des peuples indigènes au Brésil

Publié le 3 Mai 2022

Photo : Mídia NINJA

Comme jamais auparavant, des dirigeants de tout le pays se sont réunis pour une démonstration de force contre les politiques anti-indigènes et génocidaires de Jair Bolsonaro. Il ne s'agit plus seulement de violence symbolique ou de racisme déguisé, mais de violence directe. Les peuples indigènes veulent être les protagonistes d'un nouveau modèle de développement et, à cette fin, ils cherchent à augmenter leur représentation au Congrès national. L'unité avec les travailleurs urbains et les agriculteurs familiaux est une exigence fondamentale si nous voulons progresser vers une société plus juste.

Par Indianara Ramires Machado*

Debates indígenas, 2 mai 2022 - Environ 8 000 dirigeants de 200 peuples autochtones de tout le pays se sont réunis à Brasilia pour le 18e Acampamento Terra Livre (Camp de la terre libre). La mobilisation a été organisée par l'Articulation des peuples indigènes du Brésil (APIB) et ses organisations de base, et est considérée comme l'une des plus importantes de l'histoire. Le programme comprenait des assemblées, des discussions et des protestations dans les environs du Congrès national.

La manifestation a été organisée pour résister à une série d'initiatives législatives qui affecteront leurs territoires : le projet de loi 490/2007 visant à modifier le cadre temporel pour les terres indigènes et à permettre l'exploitation minière dans les territoires ; le rejet du "paquet poison" qui permet l'utilisation d'agrotoxines ; les projets qui favorisent l'accaparement des terres ; la modification des règles d'autorisation environnementale pour favoriser l'exploration des ressources naturelles ; et la discussion d'un nouveau statut sur le désarmement et la possession d'armes.

Les peuples indigènes du Brésil dénoncent le fait qu'il ne s'agit plus seulement d'une violence symbolique ou d'un racisme déguisé, mais d'une violence directe. Le génocide se déroule lentement sous les yeux du monde entier. Des violations des droits de l'homme sont commises chaque jour sans qu'aucune action en justice ne soit entreprise. L'impunité règne au Brésil. Nous, Brésiliens, sommes revenus à l'époque de la colonisation et de l'extermination.
 

Protagonistes d'un nouveau modèle de développement

Par cette mobilisation massive, les peuples indigènes ont démontré qu'ils désavouent un projet de "pays et de monde civilisateur", fondé sur les principes de respect de la démocratie, des droits de l'homme, de la justice, de la protection de l'environnement et de Mère Nature. Les communautés exigent que l'État brésilien respecte la diversité ethnique et culturelle du pays, auquel appartiennent plus de 305 groupes ethniques et 284 langues indigènes.

Les peuples autochtones veulent être les protagonistes des projets de vie qui les concernent, exercer leur autonomie sur leurs territoires et participer à la formulation, au suivi et à l'évaluation des politiques publiques qui les touchent. Pour ce faire, il est essentiel d'accroître la représentation des autochtones dans les chambres législatives. Non seulement pour faire face aux menaces qui pèsent sur leurs droits fondamentaux, garantis par la Constitution fédérale de 1988, mais aussi pour établir un dialogue symétrique, sur un pied d'égalité, avec toutes les sphères du gouvernement et l'État brésilien.

Le Campamento Terra Livre a également renforcé l'alliance avec d'autres mouvements populaires de la société. Les problèmes énumérés par les organisations ne se limitent pas aux peuples autochtones et concernent également d'autres secteurs vulnérables : les quilombolas, les communautés traditionnelles, les travailleurs urbains, l'agriculture familiale et les pauvres, principalement des hommes et des femmes noirs vivant dans les banlieues des villes brésiliennes.

Une autre voie

D'un point de vue holistique, les peuples autochtones estiment que la planète ne peut plus supporter un modèle de consommation effrénée. Ce modèle de développement prédateur anticipe la fin du monde. Les peuples indigènes vivent en équilibre avec la nature, mais ces derniers temps, nos valeurs ont été étouffées par l'imposition de modèles d'exploitation des terres qui ne sont pas durables à long terme.

Les peuples indigènes affirment qu'il est possible de vivre avec la diversité et l'altérité. Il est possible de respecter l'autre. Notre principale contribution est très simple : "L'individualité n'est pas plus importante que la collectivité". Nous sommes convaincus que la nature n'est pas une source de ressources, mais une source de vie. Nous ne croyons pas que la marchandise ou l'argent soit la chose la plus importante. Nous nous intéressons au "bien vivre" et au respect des autres, de ceux qui sont différents.

La mobilisation des peuples indigènes du Brésil dans le camp de la Terre libre a réaffirmé que l'unité est une condition fondamentale pour que nous puissions avancer ensemble. Nous avons besoin d'un pays qui soit réellement démocratique, juste, multiculturel, respectueux de la vie et protecteur de Mère Nature. Notre lutte est permanente et maintient une alliance avec les travailleurs de la campagne et de la ville.

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* Indianara Ramires Machado est une infirmière du peuple Guarani Kaiowá, titulaire d'un master en physiopathologie expérimentale de l'université de São Paulo et vice-présidente de l'Acción de Jóvenes Indígenas de Dourados (AJI).

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Source : Publié dans Debates Indígenas, bulletin du mois de mai 2022. Thème : Articles sur la situation actuelle : https://bit.ly/3ku7f30

traduction caro d'un article paru sur Servindi.org le 02/05/2022

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Brésil, #Peuples originaires, #Acampamento Terra Livre

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