Chiapas : Nous exigeons qu'un procès complet soit mené, avec toutes les enquêtes nécessaires pour trouver les responsables du meurtre lâche de notre compagnon Simón Pedro Pérez López (Las Abejas de Acteal)

Publié le 25 Avril 2022

Las Abejas de Acteal Organisation de la société civile
Terre sacrée des martyrs d'Acteal

Municipalité de Chenalhó, Chiapas, Mexique.


22 avril 2022

Au Congrès National Indigène

Au Conseil Indigène de Gouvernement

A la Commission interaméricaine des droits de l'homme

Au peuple croyant du diocèse de San Cristóbal de las Casas

Aux défenseurs des droits de l'homme

Aux médias libres et alternatifs

Aux médias nationaux et internationaux

A la société civile nationale et internationale


Frères et soeurs :

Sur cette terre, 49 graines de dignité ont été semées, compte tenu de la vie de nos 45 frères et sœurs plus les 4 bébés qui n'étaient pas encore nés lorsqu'ils ont été brutalement assassinés par les paramilitaires du PRI de Chenalhó, lors d'une opération anti-insurrectionnelle coordonnée par les trois niveaux de gouvernement en 1997. Ici, nous avons vu à nouveau croître la vie de ses graines et avons partagé leurs fruits, ceci malgré toutes les tentatives du gouvernement de nous acheter, de nous diviser, de nous moquer, de nous diffamer, de nous tromper, de parier sur la fatigue et l'oubli, ils n'ont pas réussi à nous empêcher de réclamer justice, comme ils le font chaque mois, afin que les responsables du massacre, tant sur le plan matériel qu'intellectuel, soient punis.

Nourris par la moisson de vie qui grandit et mûrit chaque jour grâce à l'exemple de nos martyrs, nous continuons à apprendre à lutter de manière non violente contre les mensonges et l'impunité qui apportent la mort et la souffrance à notre peuple.
Et en cette période de l'année où nous semons ce qui nous fait vivre, notre maïs et nos haricots, nous continuons également à semer l'espoir de la justice, en exigeant qu'un procès complet soit réalisé, avec toutes les enquêtes nécessaires pour trouver les responsables matériels et intellectuels du lâche assassinat de notre compagnon Simón Pedro Pérez López, qui a été tué précisément parce qu'il était un défenseur des droits de l'homme, de la vie et du territoire, ce que ne veulent pas ceux qui essaient d'avoir un procès abrégé qui n'incrimine individuellement que son meurtrier matériel présumé et ne mentionne rien du contexte dans lequel Simón Pedro a été exécuté extrajudiciairement afin que ceux qui ont planifié et ordonné son assassinat puissent être libres.

Le système de justice pénale doit intégrer une analyse contextuelle pour comprendre l'ampleur des meurtres qui se produisent dans un contexte de violence généralisée. Le meurtre de Simón Pedro ne peut être compris sans le contexte dans lequel il a travaillé. Simón Pedro était une personne stratégique, qui écoutait et marchait avec son peuple, construisant une communauté pour lutter contre l'injustice et la violence. C'était son péché, de lutter contre l'injustice et la vérité.

Les hommes, femmes, garçons et filles de l'organisation de la société civile Las Abejas de Acteal continueront à nettoyer ce champ de paix que nos martyrs et notre frère Simón Pedro ont semé de leur vie, pour enlever les mauvaises herbes qui tentent de faire taire nos demandes, afin que la justice puisse pousser, arrosée de vérité. La justice sera le fruit de notre lutte et nous permettra de vivre sans impunité, afin que personne d'autre ne soit tué pour avoir défendu le peuple, afin que personne d'autre ne soit massacré pour avoir lutté pour la paix.

C'est pourquoi nous élevons la voix chaque fois que nous entendons que nos camarades sont persécutés et menacés pour avoir dit la vérité qui met les puissants mal à l'aise, comme dans le cas de notre frère Ernesto Ledezma Arronte, qui depuis de nombreuses années documente les violations des droits de l'homme contre le peuple et les dénonce et les diffuse sans crainte. Ce mois-ci, il a de nouveau été la cible de menaces après avoir publié un rapport sur l'extraction du lithium au Mexique et sur les personnes touchées par son exploitation, sur la base d'une enquête menée par le Dr Violeta Remedios Núñez Martínez, professeur à l'UAM Xochimilco, qui se consacre à l'étude des mégaprojets que le gouvernement actuel tente de faire passer au Mexique.

De même, nous ne nous lasserons pas de continuer à témoigner de la valeur et du caractère essentiel de l'œuvre du Père Marcelo Pérez Pérez dans la recherche de la paix. Nous voulons qu'il sache qu'il n'est pas seul et que de nombreux quartiers et organisations le soutiennent et l'appuient, et que nous ne laisserons pas croire tous les mensonges qui sont répandus à son sujet, dans le seul but de couvrir toutes les réalités qu'il a le courage de dénoncer et de faire tomber les initiatives qu'il a la force de réclamer. Nous demandons à Dieu de nous donner plus de pasteurs comme le père Marcelo et de continuer à le soutenir, en lui donnant la force, le dévouement et le courage dont il fait preuve depuis tant d'années. Pour nous, le Père Marcelo est la preuve de la résurrection de Jésus que nous nous trouvons à célébrer et nous savons que nos martyrs d'Acteal le soutiennent également.

Et nous voulons lui transmettre notre joie car nous voyons comment la graine de la dignité germe aussi dans les milpas d'autres compagnons.

Nous voulons être solidaires de nos frères et sœurs Tseltales qui défendent leur territoire à Bachajón et Chilón contre la militarisation et contre les intérêts des entreprises qui veulent les dépouiller de leurs ressources, aidés par la Garde nationale qui a construit une caserne militaire à Chilón sans les consulter, Ils ont violemment réprimé les protestations du peuple, faisant prisonniers José Luis Gutiérrez Hernández et César Hernández Feliciano en 2020 afin de les torturer et de créer la peur parmi les frères qui continuent à lutter légalement et pacifiquement pour le retrait de la base militaire de leurs terres et pour qu'ils puissent vivre en paix.

Aujourd'hui, nos frères et sœurs continuent de faire face à une procédure judiciaire en toute liberté mais avec la menace d'être ré-arrêtés à tout moment. C'est pourquoi le Peuple Croyant a organisé un chemin de croix le 8 avril pour exiger que le recours contre la construction de la caserne de la Garde Nationale, qu'ils déposent depuis 17 mois, soit résolu en leur faveur, et que l'innocence de nos frères et sœurs et les violations des droits de l'homme qu'ils ont subies soient reconnues. Bien que nous n'ayons pas pu être présents avec eux, nous nous joignons à ces demandes et demandons au Dieu de la vie que, de même que nos frères ont partagé la souffrance des tortures de Jésus, nous leur donnions aussi la force qui accompagne la joie de sa résurrection, afin qu'ils ne perdent pas courage et continuent la lutte pour leur liberté absolue et que les droits des peuples indigènes à l'autodétermination dans la zone Tseltal de Bachajón-Chilón soient respectés.

Aujourd'hui, nous voulons également nous faire l'écho des demandes adressées au gouvernement que, dans son communiqué du vendredi saint dernier, le conseil de notre paroisse de San Pedro Apóstol y Mártir à Chenalhó a très bien exprimées, car il est de la responsabilité du gouvernement d'arrêter la spirale de violence que nous connaissons et de garantir effectivement la vie, la tranquillité et la paix dans notre municipalité et également à Pantelhó et Simojovel ; ainsi qu'à Aldama et Santa Martha - où les déplacements forcés et les tirs croisés se poursuivent des deux côtés, et où le Frayba a documenté 437 attaques perpétrées par des groupes armés de Santa Martha au cours du seul mois de mars.

Nous exigeons également que le président municipal de Chenalhó et ses agents ruraux appliquent les accords qu'ils ont signés, dans lesquels ils s'engagent à éliminer les bars de la ville et des communautés, afin de réduire la violence, la décomposition sociale et les décès causés par la consommation de drogues et d'alcool.

Nos frères et sœurs qui s'organisent dans la Caravane pour l'eau et la vie, qui ont rencontré il y a quelques jours les peuples et communautés en résistance coordonnés par le CNI et d'autres adhérents à la Sixième Déclaration de la Selva Lacandone à Oaxaca, nous montrent qu'en dehors du Chiapas, il y a aussi beaucoup de peuples qui sèment les graines de la vie, qui défendent la terre et leur santé contre la dépossession et la déprédation capitaliste, non sans devoir faire face à la violence déchaînée par le gouvernement et ses partenaires criminels. C'est le cas de la communauté d'El Rebollero à San Pablo Cuatro Venados, Oaxaca, qui, rien que ce mois-ci, a subi des attaques armées par des groupes paramilitaires, quotidiennement du 10 au 16 avril contre les familles de la communauté, afin qu'elles abandonnent leurs terres et que l'entreprise canadienne Continuum Resources Ltd. puisse poursuivre sans résistance ses explorations avec la concession que lui a accordée le gouvernement, contaminant sans protester la rivière Valiente qui alimente la région.


Sœurs et frères qui nous écoutez et recevez notre pollen, nous vous demandons de continuer à travailler et à arroser, comme nous et avec nous, la milpa de la paix afin de récolter la justice. Dans le cas d'Acteal, nous vous demandons de continuer à exiger avec nous que la Commission interaméricaine des droits de l'homme publie sans plus tarder son rapport sur le fond et donne des indications précises au gouvernement mexicain pour qu'il punisse les coupables.


Depuis Acteal, Casa de la Memoria y la Esperanza,

Sincèrement

La voix de l'organisation de la société civile Las Abejas de Acteal.

Pour le Conseil d'administration :


Manuel Pérez Jiménez

Président


Antonio Ramírez Pérez

Secrétaire

Victor Manuel López Gómez

Trésorier

Mariano Sánchez Díaz

Secrétaire adjoint

traduction caro d'un communiqué paru sur le site de Las Abejas le 22/04/2022

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