Mexique : Tzam trece semillas : Indépendance vis-à-vis de l'État
Publié le 19 Janvier 2022
Image : A. Sasil Sánchez Chan
Par A. Sasil Sánchez Chan
L'un des événements les plus importants dans la vie des êtres humains est probablement l'apprentissage de la marche ; c'est l'un des premiers événements au cours duquel on peut dire que nous commençons à être indépendants en tant qu'individus. Aller et venir d'un endroit à l'autre, au moment où notre être le souhaite, avec des chutes, des trébuchements ou avec une sorte de soutien, au final, l'idée est celle-là : l'indépendance. J'ai passé un certain temps à réfléchir, en essayant de la définir sous différents angles et avec différents aspects, mais il me semble que je peux la définir comme ce qui circonscrit l'autonomie et le pouvoir : le pouvoir de l'esprit et du corps d'envoyer des indications pour faire bouger les muscles et ainsi faire des pas qui nous amènent d'un endroit à un autre en étant autonome.
D'autre part, le fait de penser à ceux qui parviennent à cet état d'indépendance me fait penser au nombre de facteurs conjugués qui sont nécessaires pour cela, dont certains pourraient être physiques, moteurs, neuronaux et d'autres facteurs externes tels qu'un soutien dans la phase d'apprentissage moteur, un bon développement prénatal, pour n'en citer que quelques-uns. Cela m'amène à m'interroger : une personne en fauteuil roulant est-elle indépendante ? Il semble que le dilemme réside dans la capacité à faire ce qui a été stipulé et légalisé comme indépendant, mais ce sont les personnes qui vivent dans cette condition qui créent les mécanismes qui leur permettent de mener leur vie, en fonction de leur réalité, de leurs ressources et de leur contexte ; c'est-à-dire de manière indépendante, même si des yeux ne les voient pas comme tels.
Je me réfère à cette situation comme à un parallèle avec les femmes indigènes, car plus la différence entre ce qui est défini comme normal ou habituel est grande, plus le déni et/ou la délégitimation sont importants ; cependant, cela ne signifie pas que chaque individu ou communauté forme, façonne et définit sa propre identité au point d'être indépendant, car une telle affirmation contient des caractéristiques qui, me semble-t-il, élargissent la définition même de ce mot.
Avant de continuer, je laisse sur la table le commentaire suivant : je parle à partir de l'expérience d'être née dans le peuple maaya kaaj -Maya-, dans un territoire qui s'est même, selon les événements historiques, déclaré indépendant en 1841, revendiquant le plein usage de sa souveraineté face aux troubles politiques qui prévalaient à l'époque. Tout cela m'amène à penser qu'il suffit probablement d'assumer son identité et son autonomie pour se considérer comme indépendant. Cependant, parler d'indépendance, en tant que femme maya et en tant que peuple, du point de vue de l'État, me rappelle ce mot comme une unité universelle, où les autres formes d'indépendance sont annulées. Il semble que l'événement du 15 septembre, lorsque l'indépendance du Mexique a été obtenue, nous a fait adopter un nationalisme qui nous a automatiquement dépouillés de ce que nous sommes, avant même sa légitimité en tant que nation.
D'autre part, je trouve d'autres façons de définir l'indépendance, à travers les femmes indigènes qui proposent un système robuste, défini et autonome, à tel point qu'elles restent en marge de ce qui est épistémologiquement accepté et légitimé, et comment ne pas définir l'indépendance à partir de ce que nous, les femmes indigènes, avons proposé : le corps, les vêtements, la langue, les pratiques, les connaissances, les systèmes communautaires, l'autorité communale, la communication, etcetera. En pensant aux 500 dernières années de résistance indigène et en regardant le panorama, j'affirme cette vision, malgré la dépossession que cela a représenté, avec l'oppression, le capitalisme et la colonisation.
En tant que femme maya, passante dans cette jungle humaine, je me considère comme indépendante des autres femmes et, en même temps, comme l'oreille d'un épi de maïs de la même espèce, partageant la terre avec d'autres espèces. Cela ne signifie pas que je suis contre eux, mais au contraire, cela contribue à la construction d'une réalité diverse, qui peut être vue et conçue à partir de réalités différentes.
Je crois qu'il est impératif, au niveau du mot lui-même, de devenir indépendant de l'État qui a rendu notre identité dépendante de ses définitions et de ses légitimations. Envisager l'indépendance à partir de la pluralité, comme une manière de reconnaître l'identité des femmes, parce qu'il y a certaines d'entre nous qui, en plus d'être des femmes, proposent au système une identité qui est en dehors du système établi : un féminisme indépendant, un système agricole et territorial indépendant, un territoire corporel indépendant, des styles et des vêtements indépendants, des régimes communaux indépendants, des moyens de communication indépendants, en bref, des systèmes indépendants qui partagent d'autres manières de nous regarder et de nous accepter à partir des diversités que nous représentons.
/image%2F0566266%2F20220118%2Fob_d2d12e_27a6e6ef-b2d7-4012-86ef-1f1494ce7c72.jpeg)
A. Sasil Sánchez Chan
Écrivain originaire de Xaya, Tekax, Yucatán. Elle parle le mayat'aan ou le maya yucatèque. Elle écrit des poèmes et communique dans sa langue maternelle. Elle fait partie du collectif Yúuyum, fait de la radio sur Internet et est rédactrice de K'iintsil dans le journal La Jornada Maya. Elle a étudié la linguistique et la culture mayas ainsi que la création littéraire en langue maya.
traduction caro
/https%3A%2F%2Ftzamtrecesemillas.org%2Fsitio%2Fwp-content%2Fthemes%2Frt_koleti-child%2Fcustom%2Fimages%2F27A6E6EF-B2D7-4012-86EF-1F1494CE7C72.jpeg)
Imagen: A. Sasil Sánchez Chan Por A. Sasil Sánchez Chan Uno de los eventos más importantes en la vida de los seres humanos, probablemente, es aprender a caminar; es de los primeros sucesos en lo...
https://tzamtrecesemillas.org/sitio/independizarnos-del-estado/