Colombie : FIDH et Cajar demandent à la CPI d'agir contre l'impunité des principaux responsables des crimes contre l'humanité commis en Colombie, y compris les crimes contre les peuples indigènes de la Sierra Nevada
Publié le 2 Novembre 2021
par comunicaONIC dans Communiqués d'autres secteurs 29 octobre 2021
par Prensa Cajar | 25 oct. 2021 | Cour pénale internationale, Lutte contre l'impunité, Protection internationale
Rapport présenté sur les crimes contre l'humanité commis à l'encontre des peuples autochtones de la Sierra Nevada de Santa Marta
(Paris, Bogota) 25 octobre 2021 - A l'occasion de la visite en Colombie du nouveau Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, pour poursuivre le suivi de l'examen préliminaire de la situation dans le pays, la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) et le Collectif d'avocats José Alvear Restrepo (Cajar) demandent à la CPI de maintenir l'examen préliminaire, d'évaluer la pertinence et l'authenticité des enquêtes judiciaires sur les principaux responsables de crimes contre l'humanité et, en l'absence de progrès significatifs, de passer à la phase d'enquête.
Dans le cadre de la documentation sur les crimes internationaux et l'impunité structurelle, ils ont remis aujourd'hui le rapport à la CPI "La blessure au cœur du monde : les crimes contre l'humanité commis contre les peuples autochtones de la Sierra Nevada de Santa Marta, Colombie/“La herida en el corazón del mundo: Crímenes de lesa humanidad cometidos en contra de pueblos indígenas de la Sierra Nevada de Santa Marta, Colombia". Ils demandent au Bureau du Procureur de la CPI d'accorder la priorité au suivi des affaires dont les victimes appartiennent à des peuples autochtones, et demandent à la Juridiction spéciale pour la paix (JEP) d'ouvrir un macro-cas qui examine l'impact des massacres contre les peuples autochtones et le rôle des forces de sécurité dans l'expansion paramilitaire.
Entre 2002 et 2009, 180 membres des autochtones de la Sierra Nevada de Santa Marta, en Colombie, ont été tués par l'armée et les paramilitaires. Ce crime contre l'humanité a été perpétré dans le cadre d'une attaque systématique contre la population civile de la Sierra Nevada, mettant gravement en danger la survie physique et spirituelle des peuples autochtones Wiwa, Kankuamo, Arhuaco et Kogui, gardiens du "cœur du monde", la Sierra Nevada de Santa Marta.
Le rapport identifie l'existence de deux types de crimes : les meurtres commis contre les peuples indigènes par des membres de l'armée sous forme de "faux positifs", ou les meurtres commis directement par des groupes paramilitaires, avec le soutien, la tolérance ou l'assentiment de l'État. Ces faits compromettent la ligne de commandement de la deuxième brigade, de la dixième brigade et de la première division de l'armée nationale colombienne. Cette recherche se base sur les informations obtenues lors d'ateliers de documentation, sur le travail de documentation des peuples eux-mêmes, sur le contentieux collectif sur ces meurtres et sur une mission de documentation de la FIDH.
La sélection de membres de communautés indigènes comme victimes de faux positifs par les militaires révèle que ces crimes ont également une dimension raciste et sont le produit de la stigmatisation. Le rapport précise également que, sur les 180 meurtres, 46 correspondent à des faux positifs et 134 à des meurtres commis par des paramilitaires. Ces 134 meurtres sont restés presque entièrement impunis en raison de l'extradition des auteurs vers les États-Unis, du manque de collaboration avec les tribunaux Justice et Paix et de l'absence d'enquête sur les agents de l'État qui ont toléré ou soutenu ces actes. Le JEP a émis un ordre d'enquête qui inclut la plupart des meurtres des peuples indigènes de la Sierra Nevada de Santa Marta directement imputables aux agents de l'État comme faux positifs, mais à ce jour, il n'y a pas eu de poursuites ou de condamnations incriminant les supérieurs hiérarchiques des forces armées colombiennes responsables de ces crimes, par action ou par omission.
La fin de l'impunité et l'accès à la vérité sur les crimes contre l'humanité décrits dans ce rapport constituent une garantie essentielle de la non-répétition de ces meurtres. Aujourd'hui, dans la Sierra Nevada, le scénario actuel continue de présenter de graves risques pour la survie de ses populations autochtones.
La violence illégale dans la région est reconfigurée par des groupes armés qui contrôlent les principales activités licites et illicites dans la Sierra à la recherche d'un plus grand contrôle territorial, dont certains entretiennent des liens avec d'anciens groupes paramilitaires. Cette nouvelle situation a favorisé la destruction des biens culturels, les assassinats de partisans de la communauté, le contrôle de la mobilité, le recrutement forcé de mineurs et le déplacement forcé de la population. Il est important de rappeler qu'en 2020, 47 leaders autochtones ont été assassinés, s'ajoutant aux 262 leaders autochtones assassinés depuis la signature des accords de paix.
Traduction carolita d'un article paru sur le site de l'ONIC le 25/10/2021