Pérou : L'Orpio demande à la CIDH que l'État protège les PIACI (peuples isolés)

Publié le 3 Février 2021

L'organisation autochtone a présenté devant la CIDH une pétition et une demande de mesures de précaution en faveur des peuples indigènes en situation d'isolement et de premier contact.

Servindi, 2 février 2021 - L'Organisation régionale des peuples indigènes de l'Est (Orpio) a demandé que l'État péruvien soit tenu de protéger les peuples indigènes en situation d'isolement volontaire et de premier contact (PIACI).

La demande de l'Orpio, soutenue par ses 13 fédérations de base, a été faite par la présentation d'une pétition et d'une demande de mesures de précaution devant la Commission interaméricaine des droits de l'homme (CIDH).

L'organisation demande que l'État soit tenu d'adopter des mesures pour la protection efficace de la PIACI et de répondre rapidement aux six demandes de création de réserves indigènes qui remontent à 1993.

En outre, des mécanismes de protection territoriale devraient être mis en œuvre dans les zones stratégiques d'accès aux réserves indigènes demandées, ainsi que des cordons sanitaires pour prévenir la propagation des maladies.

La demande présentée par Orpio bénéficie du soutien de l'Institut de défense juridique (IDL) et de la Clinique de droit des droits de l'homme de l'Université d'Ottawa (Canada).


Demande de protection

Lors d'une conférence de presse tenue le mardi 2 février, le président de l'Orpio, Jorge Pérez Rubio, a indiqué qu'ils avaient décidé de se tourner vers la CIDH face à l'inaction de l'État.

"La situation des peuples indigènes en situation d'isolement volontaire et de premier contact est très grave et l'État a systématiquement négligé de les protéger", a-t-il déclaré.

Comme exemple de cette négligence, Pérez a noté le retard dans la création de six réserves indigènes qui ont été demandées par l'État depuis 1993.

Il s'agit des réserves indigènes de Kakataibo, Yavari Tapiche, Yavari Mirim, Sierra del Divisor Occidental, Napo Tigre et Atacuari, situées dans les zones frontalières de l'Amazonie péruvienne.

L'anthropologue Beatriz Huertas, experte des PIACI, a souligné que la création de ces réserves est très importante pour garantir la continuité de la vie collective de ces peuples.

Cependant, elle a déclaré que l'État ne s'est pas conformé à la création de ces réserves qui les protégeraient, malgré le fait que la Constitution elle-même reconnaisse les droits des PIACI.

Au contraire, "l'État a accordé des concessions forestières dans ces territoires, qui sont de plus en plus menacés par des activités illégales telles que l'exploitation forestière illégale ou le trafic de drogue", a-t-elle ajouté.

Un autre aspect qui a motivé les organisations indigènes à se tourner vers la CIDH a été le manque de réponse efficace de la part du système judiciaire péruvien.

Juan Carlos Ruiz Molleda, un avocat de l'Institut de défense juridique (IDL), a mentionné qu'il y a actuellement quatre procès liés aux territoires PIACI qui n'ont pas été résolus.

Trois d'entre eux comprennent des demandes visant à contrecarrer les décisions ou omissions d'entités étatiques qui affectent les peuples autochtones en situation d'isolement et de premier contact.

Et l'une d'entre elles consiste à demander à l'État de se conformer à la création des six réserves indigènes mentionnées ci-dessus.

Dans ce dernier cas, l'avocat Ruiz Molleda a souligné qu'il existe une sentence de première instance qui ordonne au vice-ministre de l'Interculturalité de créer ces réserves.

Toutefois, il a déclaré que le processus est "bloqué" parce que cette décision doit encore être révisée.

La CIDH doit répondre à la demande

La demande de mesures de précaution présentée par l'Orpio devrait être traitée d'urgence par la CIDH, a déclaré Salvador Herencia.

Herencia, qui est directeur de la Clinique de droit des droits de l'homme à l'Université d'Ottawa (Canada), a déclaré que la situation actuelle des PIACI au Pérou mérite une réponse immédiate.

"Ce qui se passe au Pérou avec les peuples indigènes n'est pas de l'oubli, c'est de la négligence de la part de l'État", a-t-il déclaré.

L'expert a également estimé que, dans le cas de mesures de précaution, cette demande remplit les trois conditions fixées par la CIDH.

Ces conditions sont que le cas présenté est urgent, qu'il y a une gravité et qu'il y a une possibilité de préjudice irréparable.

La CIDH doit répondre à la pétition et à la mesure de précaution présentées par l'Orpio. 
Il s'est également dit confiant que cela se produira car, il y a quelques semaines, la CIDH a accordé une mesure de précaution similaire à deux peuples indigènes du Brésil qui n'ont pas été contactés.

"Nous pensons que le cas des peuples indigènes en situation d'isolement et de premier contact au Pérou est similaire à celui présenté par le Brésil, nous espérons donc que la demande sera acceptée", a-t-il déclaré.

Il convient de noter que, bien que la CIDH soit chargée d'accorder la mesure de précaution, dans ce cas, c'est l'État péruvien qui doit ensuite adopter ces mesures en faveur des PIACI.

Ces mesures peuvent être de nature collective afin d'éviter que des individus ne subissent un préjudice irréparable en raison de leurs liens avec une organisation, un groupe ou une communauté de personnes déterminées ou déterminables.

En ce qui concerne le recours de pétition, l'avocat Ruiz Molleda a précisé qu'il s'agit d'une procédure contentieuse qui prend généralement plus de temps.

Ce recours permet aux personnes qui ont subi des violations des droits de l'homme d'obtenir de l'aide.

S'il est accepté, la CIDH enquête sur la situation et peut faire des recommandations à l'État responsable pour rétablir la jouissance des droits dans la mesure du possible.

Le fait : Les 13 fédérations de base qui soutiennent la demande d'Orpio sont :

  • Conseil Urarinas du rio Chambira (CURCHA)
  • Fédération des communautés indigènes du rio Tapiche et Blanco (FECORITAYB)
  • Fédération des communautés indigènes de la province de Requena
  • Communauté native MATSES
  • Organisation des peuples indigènes Kichwa d'Amazonie limitrophes du Pérou et de l'Équateur (OPIKAFPE)
  • Fédération des communautés indigènes du Haut Tigre (FECONAT)
  • Fédération des communautés indigènes du rio Corrientes (FECONACO)
  • Fédération des peuples indigènes Achuar et Urarina du rio Corrientes (FEPIAURC)
  • Fédération des communautés indigènes tessuna et yaguas (FECONATIYA)
  • Fédération des communautés indigènes du Moyen Napo, Curaray et Arabela (FECONCU)
  • Fédération des communautés indigènes du rio Curaray (ORKIWAN)
  • Organisation Kichwaruna Wangurina du  Haut-Napo (ORKIWAN)
  • Fédération des peuples Kichwa du Moyen Tigre (FEPKIMET)

traduction carolita d'un article paru sur Servindi.org le 02/02/2021

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