Brésil : Les Tembé-Theneteraha dénoncent le meurtre d'Isac Tembé dans le cadre de leur lutte pour la terre traditionnelle
Publié le 17 Février 2021
"Nous luttons contre cette violence depuis des décennies et nous n'arrêterons pas tant que pas un mètre de nos terres ne sera occupé illégalement", indique un extrait de la note publiée
PAR LE SERVICE DE PRESSE DU CIMI
Le professeur Isac Tembé, âgé de 24 ans seulement, est parti vendredi dernier, le 12 février, avec un groupe d'indigènes pour aller chasser et n'est pas rentré chez lui dans le territoire indigène d'Alto Rio Guama à Paragominas, au nord-est du Pará. Il a été tué après une attaque injustifiée par des officiers de la police militaire.
La mort est la chronique d'une tragédie annoncée. Le peuple Tembé-Theneteraha subit des menaces et des attaques récurrentes. En septembre 2019, par exemple, le ministère public fédéral (MPF) a demandé à la police fédérale et au commandement de l'armée à Belém (PA) de mener une opération urgente pour prévenir les attaques des bûcherons contre les indigènes.
Secoué, le peuple Tembé-Theneteraha a publié une note dénonçant l'assassinat comme faisant partie du contexte auquel il est soumis dans une terre qui lui appartient. Ils dénoncent également le fait que les policiers ont attribué au professeur décédé une association avec des activités criminelles. "La police militaire a assassiné Isac Tembé à deux reprises : ils ont tué son corps et tentent de tuer sa mémoire en s'attaquant au caractère de notre jeune guerrier et de son leadership exemplaire", lit-on dans la note.
Dans la note, le peuple souligne en outre que "notre territoire subit des invasions et des attaques quotidiennes de la part d'exploitants de bois illégaux ou d'agriculteurs qui insistent pour maintenir leur occupation de certaines parties de la terre indigène d'Alto Rio Guama, par l'élevage de bétail et d'autres activités économiques.
Lisez la note dans son intégralité :
Note publique du peuple Tembé-Theneteraha
Le cœur du peuple Tembé-Tenetehara saigne avec le meurtre brutal de notre jeune guerrier Isac Tembé. La balle qui lui a ôté la vie, à seulement 24 ans, a frappé tous ceux d'entre nous qui ont habité cette terre depuis des temps immémoriaux et qui ont défendu en permanence la forêt et nos connaissances traditionnelles.
Le jeune Isac a été abattu par des officiers de la police militaire dans la nuit de vendredi dernier à 12 heures. Il était parti à la chasse après une journée de travail à construire sa petite maison pour vivre avec sa famille. Nous nous demandons : pourquoi ces agents de la sécurité publique font-ils office de milice privée pour les éleveurs qui envahissent les terres indigènes ? Pourquoi sont-ils arrivés en tirant sur nos jeunes, nos enfants, nos petits-enfants et nos neveux qui chassaient, une pratique qui fait partie de la culture de notre peuple ?
La police militaire a assassiné Isac Tembé à deux reprises : ils ont tué son corps et tentent de tuer sa mémoire en s'attaquant au caractère de notre jeune guerrier et leader exemplaire.
Isac était un citoyen honorable, professeur d'histoire, actif dans la communauté et dans l'organisation des jeunes. Sa femme est enceinte et va bientôt donner naissance à un autre enfant Tembé, ce qui garantit la continuité de ce peuple originaire. Il n'a jamais été impliqué dans un quelconque acte illicite et n'a jamais, dans sa vie, porté ou tiré avec une arme à feu.
Par conséquent, nous rejetons comme un mensonge la version de la police militaire, qui prétend avoir réagi à une agression par des tirs. Nous sommes un peuple de joie et de célébration ; un peuple pacifique, ordonné et respectueux des lois. Nous exigeons des autorités une enquête rapide, transparente et rigoureuse afin d'identifier et de punir les responsables de ce crime.
Notre territoire subit des invasions et des attaques quotidiennes de la part d'exploitants de bois illégaux ou d'agriculteurs qui insistent pour maintenir leur occupation de certaines parties des terres indigènes d'Alto Rio Guama par l'élevage de bétail et d'autres activités économiques.
Nous luttons contre cette violence depuis des décennies et nous n'arrêterons pas tant qu'un seul mètre de nos terres ne sera occupé illégalement. Nous n'avons pas peur. La Constitution fédérale protège nos droits et l'État brésilien doit appliquer ce que la loi ordonne.
Nous appelons les autorités du Brésil et du monde entier à ne pas nous laisser seuls !
Nous exigeons que la Funai, le MPF, la police fédérale et tous les organismes compétents viennent sur notre territoire et voient ce que nous avons vécu.
Nous exigeons une enquête sur les lieux de l'événement. Nous exigeons une réponse urgente car nous ne resterons pas silencieux et ne laisserons pas ce crime impuni.
Que la mémoire vivante d'Isac Tembé renforce notre parcours. Que l'esprit de nos ancêtres guide le peuple Tembé-Tenetehara dans sa lutte pour la vie.
Nous invitons la presse et les autorités à une réunion publique, ce lundi (15), à 10 heures, dans le village de São Pedro, dans le territoire indigène d'Alto Rio Guama, à l'occasion de laquelle le peuple Tembé décidera de la voie de la lutte pour la justice.
Nous demandons justice !
Punition des meurtriers et des commanditaires de la mort d'Isac Tembé !
Terre indigène d'Alto Rio Guama, 14 février 2021. (source)
traduction carolita d'un communiqué paru sur le site du CIMI le 15/02/2021