Brésil : Le peuple Puruborá
Publié le 25 Juin 2020

Les Puruborá dans le Rondonia et doña Emilia, en blouse marron, avec ses filles et petites-filles (Photos : Cimi/RO) image
Peuple autochtone du Brésil vivant dans l’état du Rondônia. Ils ont été officiellement contactés par Rondón au début du XXe siècle dans la vallée du rio Guaporé et ont été pendant des décennies considérés comme éteints ou mêlés à d’autres nombreuses vagues de seringueiros occupant la région qui allait devenir connue plus tard comme le Rondônia. Mais bien que fragmentés et dispersés ils ont réussi à traverser le siècle et en 2001 ils ont tenu leur première assemblée, tous les membres de leurs familles dispersés dans tout l’état et ailleurs, réunis et affirmant leur désir de combat pour la reconnaissance de leurs terres traditionnelles sur les rives du rio Manoel Correia. Le combat continue de nos jours pour ce peuple qui, comme d’autres avec lui est défini comme « résurgent » ou plutôt devrions-nous dire « résistant » de l’Amazonie brésilienne.
Population : 243 personnes (2014)
Autodésignation : puruborá= ce qui se transforme en jaguar pour guérir (se référant aux anciens chamans).
Langue
C’est un isolat linguistique qui appartient au tronc tupí. Elle est peu connue des scientifiques et c’est l’une des langues du tronc tupí qui a le plus grand risque de disparaître dans un avenir proche. En effet elle est peu utilisée comme véhicule de communication depuis longtemps, elle n’est plus enseignée aux enfants depuis au moins trois générations, il y a peu ou peut-être plus de nos jours de locuteurs puisque les 2 derniers qui avaient encore quelques connaissances de cette langue, en 2015 étaient âgés et souffrants. La jeune génération néanmoins semble d’intéresser à d’éventuelles actions de revitalisation de leur langue.
Selon les données recueillies sur la langue puruborá, il a été possible de comparer avec d’autres langues tupí et la plus grande similitude se trouve avec les langues de la famille ramarama (langue karo), les deux langues seraient plus proches l’une de l’autre qu’avec les autres langues du tronc tupí.
Localisation et terre indigène
Il n’y a qu’un seul village, Aperoi sur le bord de la route BR-429.
- T.I Puruborá – 243 personnes, en cours d’identification, état du Rondônia. Villes : Costa Marques, Guajará-Mirim, Porto Velho, Seringueiras.
Leur terre indigène n’a encore été approuvée. La région traditionnelle était couverte de châtaigniers (noyers du Brésil) mais beaucoup d’arbres ont été détruits en raison de l’occupation de la zone par des ranches de bétail et par les plantations de soja. Dans leur mémoire sont présentes les anciennes zones de noyers du Brésil et leur utilisation qu’ils faisaient des noix. C’était autrefois la base de leur alimentation, l’huile de noix et le lait étaient utilisés dans la cuisson des aliments et la friture. Les anciens ont appris aux jeunes générations à extraire l’huile de noix, comme celle du patauá (oenocarpus bataua) et de l’açai (euterpe precatoria). L’huile de noix était utilisée également à des fins médicinales (pour faire tomber la fièvre entre autre).
Brésil - Peuple Puruborá - Historique du contact - coco Magnanville
Doña Emília, matriarche des Puruborá Les premières références aux Puruborá datent du début du XXe siècle. Darcy Ribeiro les considérait également comme "isolés" (c'est-à-dire sans cont...
http://cocomagnanville.over-blog.com/2020/06/bresil-peuple-purubora-historique-du-contact.html

image Doña Emilia
Activités productives
Les chacras sont plus ou moins étendues et produisent du manioc, des haricots, du maïs, des courges, des patates douces, du café. Certaines familles plantent de l’igname pour la vente ce qui leur procure des revenus supplémentaires. Pour autant les terres ne sont pas fertiles et ils s’en plaignent, les bonnes terres comme c’est courant ont été accaparées par les grands propriétaires terriens. De nombreuses plantes sont cultivées autour des maisons, ainsi que des fruits, des épices, des herbes médicinales, des plantes ornementales pour fabriquer des produits artisanaux.
La chasse est rare de nos jours mais ils trouvent encore des agoutis, des pacas et des pécaris.
La pêche rapporte peu en dehors des mois d’été.

Récolte d'ignames Foto: Felipe Vander Velden, 2013.
Organisation sociale et politique
Il y a un manque évident de sources anthropologiques à ce sujet. Les Puruborá qui vivent à Aperoi ont adopté le système régional en cours, ils sont mariés à des colons non indigènes, pour autant ils reconnaissent leur parenté à un ancien ou une ancienne ayant vécu au temps de José Félix.
Deux singularités sont notées quand à l’organisation sociale du groupe. La première fait référence aux multiples relations de commensalité et réciprocité trouvées à Aperoi. Les produits des champs et des jardins sont intégrés dans le réseau de réciprocité avec des échanges de nourriture car pour eux il est évident que cultiver les légumes c’est aussi cultiver les relations. Les femmes soutiennent matériellement les parents proches mais les réseaux de réciprocité peuvent être étendus reliant les ménages parfois donateurs parfois bénéficiaires de la nourriture.
Le protagonisme féminin est une autre institution singulière du groupe forte dans l’organisation politique et sociale des Puruborá. Leur principale représentante est une figure féminine, la leader Hozana Puruborá qui participe à de nombreux évènements dans plusieurs villes et états du Brésil. Elle assume le rôle de médiatrice auprès de la société non indigène.
Les femmes participent activement à la politique chez les Puruhá ce qui génère un scénario dans lequel la division du travail entre les espaces féminins (maison/jardin) et masculin (politique)n'est pas maintenue.
Culture matérielle
Leur artisanat se situe dans la droite ligne de celui des peuples indigènes de la vallée du Guaporé nommé par les ethnologues Complexe Marico. De nombreuses maisons d’Aperoi sont décorées de tapis en patchwork de différentes couleurs, formes et tailles fabriqués par les femmes.
Les matières premières locales sont les ingrédients-clés de leurs fabrications : plumes d’oiseaux sauvages, graines, fibres végétales.

Elles fabriquent des paniers maricos (en fibres de tucumã, astrocaryum aculeatum), des filets de coton et tucumã, des colliers, des boucles d’oreilles, des bagues.
Rituel et chamanisme
Tout ce qui reste des pratiques rituelles et chamaniques des Puruborá est conservé dans la mémoire des anciens (peu nombreux actuellement).il n’y a rien dans les documentations ethnologiques des cent dernières années.

On sait que les chamans utilisaient la poudre de graines d’angico (anadenanthera colubrina) mélangée au tabac et introduite dans le nez par un tube végétal.
Les Puruborá autrefois étaient ornés de peintures corporelles, même dans la vie de tous les jours, les couleurs utilisées étaient le noir, le jaune, le bleu et le blanc, provenant de différents colorants naturels.
Les graphismes représentaient le plus souvent des motifs de jaguar ou de serpents répondant en cela à leur mythologie comme par exemple selon un mythe un serpent est entré dans le vagin d’une femme et ainsi l’enfant est né avec le graphique du serpent et du jaguar.
Ils utilisaient arc et flèches pour mener la guerre et parfois des épées (borduna) en bois de pupunha (bactris gasipaes), l’arc était fait du même bois et sa corde était faite en fibre d’hévéa. Le plumage des flèches était réalisé en plumes d’oiseaux comme le grand hocco (crax rubra, pajuil), la pénélope cujubi (aburria cujubi ou cujubim) et le ara.
Toutes des connaissances encore inscrites dans la mémoire des anciens sont aujourd’hui en cours de récupération par les jeunes Puruborá dans leur stratégie de lutte pour le territoire et la reconnaissance ethnique.
Source : pib.socioambiental