Brésil : Le peuple Paumari

Publié le 22 Juin 2020

 

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Peuple autochtone du Brésil vivant dans l’état d’Amazonas et connu comme les « noamdes du Purus » en raison de la mobilité impressionnante de ses groupes locaux pêcheurs des plaines inondables, ce peuple est l’un des rares peuples indigènes du moyen rio Purus à réussir à survivre sans affrontements armés au cours des deux cycles du caoutchouc qui ont dévasté d’autres peuples indigènes de la région au milieu du XIXe siècle.

Autodénomination : pamoari (= homme, personne mais aussi client). Après les contacts ils ont utilisé également le mot paumari qu’on leur a attribué.

Population : 1804 personnes (2014)

Langue

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Ils la nomment pamoari comme leur nom, elle est de la famille linguistique arawá. Ils sont bilingues en portugais et changent d’une langue à l’autre dans la même phrase.

La langue a été étudiée et il existe de nombreuses publications et analyses détaillées sur elle ainsi qu’un matériel pédagogique diversifié ( les linguistes sont Shirley Chapma, Desmond Derbyshire, Meinke Salzer et Beatrice Senn).

Localisation et terres indigènes

Ils vivent dans le bassin du moyen rio Purus et ses affluents ( Ituxi, Sepatini, Tapauá). Dans l’état d’Amazonas. Ils sont connus pour leur orientation aquatique se manifestant dans leurs habitats traditionnels préférés : plaines inondables, rivières et lacs.

La végétation prédominante de leur territoire est la forêt pluviale alluviale dense et la forêt de plaine inondable en terrasse.

  • T.I Caititu – 308.062 hectares, 1022 personnes, réserve homologuée. Ville : Labreá. 3 peuples y vivent : Apurinã (langue arawak maipure), Jamamadi (langue arawá) et Paumari (langua arawá).
  • T.I Paumari do Cuniuá – 42.828 hectares, 96 personnes, réserve homologuée. Ville : Tapauá. 2 peuples y vivent Apurinã (langue arawak maipure) et Paumari (langue arawá).
  • T.I Paumari do Lago Manissuã – 22.970 hectares, 67 personnes, réserve homologuée. Ville : Tapauá.
  • T.I Paumari do Lago Marahã – 118.766 hectares, 1076 personnes, réserve homologuée. Ville : Labreá. 2 peuples y vivent : Apurinã (langue arawak maipure) et Paumari (langue arawá).
  • T.I Paumari do Lago Paricá – 15.792 hectares, 159 personnes, réserve homologuée. Ville : Tapauá. 2 peuples y vivent : Apurinã (langue arawak maipure) et Paumari (langue arawá).
  • T.I Paumari do rio Ituxi – 7572 hectares, 235 personnes, réserve homologuée. Ville : Tapauá -  peuples y vivent : Apurinã (langue arawak maipure) et Paumari (langue arawá).

Activités économiques

Pêcheurs avant tout

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La pêche est l’activité d’autosuffisance principale, ils pêchent toute l’année avec différentes techniques et se nourrissent quotidiennement de poissons. Les autres animaux aquatiques préférés sont les chélonidés (tortues).

L’agriculture est pratiquée dans les zones humides et sur le continent avec pour culture principale le manioc. Ils cultivent à présent différentes fruits, légumes, plantes médicinales dans les jardins et collectent des fruits sauvages pour leur consommation et des matières premières comme des lianes et des fibres pour la construction des maisons, des bateaux et d’objets divers.

Les boissons sont produites à base de fruits de palmiers açai (euterpe precatoria), bacaba (oenocarpus bacaba) et les noix du Brésil sont très appréciées comme complément alimentaire.

La chasse

Ils ne sont pas connus comme de bons chasseurs et s’ils le font c’est sporadiquement ou occasionnellement dans le cadre de leur partie de pêche si l’occasion se présente.

La vente du poisson

Depuis les contacts avec la société dominante, ils se tournent plutôt vers la vente de poissons de tortues et de produits issus de l’extraction (noix du Brésil, copaiba pour faire une huile médicinale, sorva une espèce amazonienne qui produit du latex non élastique et des fruits comestibles). Ils échangent ces produits conte d’autres de base comme des textiles, des outils, des aliments, des moteurs, du carburant. Ils sont dans cet échange scandaleusement exploités par les regatões ces commerçants fluviaux ambulants qui les asservissent avec un système de dette que peinent à rembourser les familles ce qui les appauvrit encore plus.

Organisation sociale et politique

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Les maisons au bord des lacs à la saison des pluies constituent l’habitat typique des Paumari. Ce sont des radeaux ou jangadas, sortes de maisons flottantes au milieu des lacs et des lagunes dans le but d’être protégés des insectes.

Chaque village était constitué de 8 à 15 maisons comprenant chacune une ou deux familles. Elles étaient situées en bordure de rivière ou de cours d’eau, parfois les villages étaient permanents à la saison des pluies. Aujourd’hui les maisons mobiles représentent une minorité chez les Paumari. On en trouve sur le lac Maranhã et sur le rio Tapuá.Le mariage préférentiel était le mariage entre cousins croisés. Les règles de résidence post-nuptiales sont compliquées : le premier mois le nouveau couple vivait avec la famille de la femme (uxorilocalité) et ensuite avec la famille de l’homme (virilocalité) pendant un autre mois et par la suite il y avait des changements constants pouvant aller jusqu’à deux ans parmi les familles des deux conjoints, ce jusqu’à la naissance du premier enfant.

Le rôle politique dans le passé était plutôt informel et assuré par la personne la plus âgée du ménage. De nos jours il n’y a toujours pas de véritables caciques dans les communautés et ceci peut s’expliquer par le degré élevé de mobilité des familles et la décomposition et recomposition des communautés entravant l’établissement de pouvoirs locaux.

Rituels

Ihinika

A la naissance l’enfant paumari subit une série de rituels appelés Ihinika. L’Ihinika est la soumission de l’âme de l’enfant aux esprits de la nourriture. Après l’accouchement la mère et l’enfant ne peuvent se nourrir avant que leur Ihinika ne soit pratiqué sous peine de tomber rapidement malade car ils considèrent que la nourriture passe par le lait maternel. S cette interdiction n’est pas respectée, l’âme de l’enfant est capturée de suite par l’esprit alimentaire, l’enfant paumari dans le monde visible tombe malalde et peut mourir.

Le nom

Lorsque l’enfant est conçu il reçoit un prénom donné à partir du nom de la nourriture consommé ou intensément souhaitée par la mère le jour de sa conception ou les jours suivants.

Amamajo

Petite maison d'isolement pour une fille dans le village de Santa Rita (Paumari do Lago Marahã). Photo : Peter Schröder/PPTAL , 2000

La femme Paumari subit une ritualisation extrême car en plus du rituel de l’Ihinika qu’elle a subit dès sa naissance, elle le subit a nouveau à chaque fois qu’elle donne la vie.

Un autre rituel d’importance dans la vie Paumari est le rituel de passage féminin nommé Amamajo qui peut être considéré comme une sorte d’Ihinika qui consacre sa sortie de l’isolement de la réclusion. Après ses premières règles la jeune fille entre en réclusion dans une petite maison aménagée au sein de la maison familiale. Elle ne peut pas être vue par les hommes ni toucher le sol. Elle est donc protégée sous un tapis fait spécialement pour l’occasion et qui respecte la forme de la « queue de jaguar ». Lorsqu’elle doit quitter sa petite maison, elle est portée sur le dos par une personne de sa famille. L’isolement peut durer plusieurs mois selon le moment où la fille a eu ses premières règles car il convient que les jeunes filles sortent de l’isolement au moment du début de l’été amazonien dans le Purus (mai/juin).la chamane prend soin de la jeune fille dans le respect des tabous à respecter, certains aliments à ne pas consommer, ne pas sortir seule, ne pas marcher pieds nus ou être vue par les hommes. Sa peau doit être très claire, pour cela elle se protège sous son tapis, car plus elle sera blanche, plus elle sera belle le jour de sa sortie.

Les meilleures créatrices peignent le corps de la jeune fille avec un mélange de roucou et de genipapo en faisant des dessins qui suivent toujours la même conception tout comme la conception du chapeau rituel qui symbolise la poitrine du lamantin.

Amamajo Ritual. Photo: Oiara Bonilla, 2002

Le lamantin est un animal central dans les représentations alimentaires et symboliques des Paumari. Dans le passé il y avait beaucoup de lamantins dans les eaux du Purus et dans les lacs. Ils représentaient une nourriture de choix et c’était sans doute le plat le plus apprécié avec les tortues et les tracajás. De nos jours ces aliments sont rares et non durables en raison de la pêche surtout commerciale.

A la sortie de la fille plusieurs fêtes sont organisées dont la danse du soleil, l’arrivée des prédateurs (poupées représentant des jaguars des serpents, des anacondas, des chauves-souris) et des blancs (jara) qui chassent la fille et doivent être dominés et détruits par les femmes ce sont des « jeux » vécus dans la détente mais qui représentent une partie importante dans le rituel, car leur performance garantit la longévité de la fille

Au final, toutes les figures sont découpées en petits morceaux par les hommes.

 

Artisanat

Leur artisanat répond aux besoins essentiels de la vie de tous les jours : articles ménagers, paniers, passoires, nattes simples qu’ils appellent lits indiens. La céramique est toute simple sans peinture.

L’ornementation corporelle comprenait autrefois des lignes rouges peintes au roucou. Aujourd’hui les femmes portes des colliers et des bracelets qui peuvent être également vendus.

Les bateaux traditionnels étaient des canoës monoblocs de 3,5 à 4,5 de long avec des rames ovales et pointues.

Art graphique

 

Vannerie, village de Crispim. Photo: Oiara Bonilla, 2001.

Les motifs de peinture corporelle et les objets rituels de l’Amamajo ne sont qu’un échantillon de la richesse de l’art graphique Paumari qui se manifeste surtout dans la vannerie (c’est un art féminin). Le panier paumari (rabahi) est fait en fibres d’arumã (ischnosiphon polyphyllus) et tige de bacaba (oenocarpus bacaba) pour les motifs graphiques. Les motifs les plus courants sont la queue de jaguar, la côté de tortue, l’épine de poisson, la chair de tambaqui (poisson colossoma macropomum), la colonne vertébrale de lamantin, le cou de héron agami…..

Pour la vente les femmes fabriquent des anneaux en noix de coco, des colliers en différentes graines, des éventails, des nattes.

Les hommes fabriquent pour l’usage domestique des rames, des canoës, des harpons et ils sont passés maîtres dans l’art de sculpter du bois et la fabrication de pirogues miniatures d’animaux, d’oiseaux, de poissons en bois.

Chamanisme

Dans le passé les chamans jouissaient d’un statut élevé dans les communautés et guérissaient les maux des patients en aspirant des objets considérés comme sources du mal dans le corps des patients. Ensuite ils partaient en forêt pour régurgiter et revenaient avec de petits animaux ou des objets.

Le chaman utilisait du tabac à priser préparé avec des feuilles d’une bignoniacée (tanaecium nocturnum) à la saveur d’amande quand les feuilles sont mâchées. Les feuilles étaient torréfiée puis broyer en une fine poudre filtrée et mélangée au tabac à priser. Le mélange est appelé koribo-mafoni et n’est utilisé que par les chamans à des occasions spéciales comme les soins des patients, les rituels pour protéger les garçons et le rituel de puberté des filles.

Le tabac était traditionnellement inhalé par le biais d’une paire d’os attachés côte à côté avec du fil de coton, les bouts étaient arrondis avec de la cire pour les adapter aux narines.

source : pib.socioambiental.org

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Peuples originaires, #Brésil, #Paumari

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