Argentine - L'extractivisme ne connaît pas la quarantaine

......ce qui est révoltant.....

Viviana Palmbaum
18 mai 2020 

Si la quarantaine est prolongée pour des raisons de santé, l'extractivisme n'est pas considéré comme acquis. Si la santé est ce qui compte, pourquoi sommes-nous encore empoisonnés ?

Les assemblées environnementales dans tout le pays continuent d'attirer l'attention sur les réglementations gouvernementales qui, même en quarantaine, continuent de favoriser le modèle de production extractive, comme l'exploitation minière et la déforestation massive. 

"Si la santé est importante, ne nous empoisonnez pas", disent les différentes assemblées du pays. Cet appel à l'attention se pose face à la disposition signée au sein du Mercosur par le ministre des affaires étrangères Felipe Solá qui réduit les droits de douane pour l'importation d'intrants agro-toxiques.  

Il s'agit d'une réduction de 2 % des droits de douane à l'importation pour les composés de monoisopropylamine et leurs sels et pour la diméthylamine. Tous deux sont utilisés en grande quantité pour la production d'agrotoxines. Les moyens liés à l'agro-industrie mettent en évidence la mesure. Dans les assemblées, ils rappellent que "ceux qui en profitent sont les entreprises qui nous rendent malades". En Argentine, 500 millions de litres de produits agrochimiques toxiques sont pulvérisés chaque année.

La préférence de Felipe Solá pour l'agrobusiness remonte à loin, lorsqu'il a autorisé Monsanto à commencer ses activités dans le pays en 1996. Son importance actuelle dans la région a conduit la table de liaison à demander un entretien avec le ministre des affaires étrangères au lieu du ministre de l'agriculture.

"Activités essentielles"

En même temps que la quarantaine est étendue dans le but de protéger la santé de la population, les activités qui empoisonnent et contaminent nos sols et nos cours d'eau sont encouragées.

Le 2 avril, l'extension des activités essentielles a été publiée au Journal officiel. La décision administrative 450/2020 y inclut la fumigation et les activités liées à la production, à la distribution et à la commercialisation des produits forestiers et miniers.

Le rejet de ces dispositions ne s'est pas fait attendre et les assemblées environnementales et collectives de tout le pays ont fait entendre leur voix en signe d'alarme.  Elles ont également dénoncé le fait que, malgré la quarantaine, la déforestation se poursuivait. C'est ce que révèle Greenpeace, qui affirme qu'entre le 15 mars et le 30 avril, 9 361 hectares ont été défrichés, ce qui équivaut à une perte de quelque 200 hectares de forêt par jour. Les provinces les plus touchées sont Santiago del Estero, avec plus de 4000 hectares défrichés, Formosa avec plus de 1700, Salta également avec 1700 hectares défrichés et Chaco, avec plus de 1400 hectares. La cause principale de la déforestation est l'avancée de la frontière agricole pour le bétail et les plantations de soja. 

Les activités minières ont également été considérées comme essentielles, de sorte que l'industrie a continué sans s'arrêter. Cela implique l'empoisonnement des terres, des cours d'eau et le détournement des ressources en eau.

Juan Cabandié, responsable du portefeuille national de l'environnement et du développement durable, a déclaré il y a quelques jours devant la Commission de conservation des ressources naturelles et de l'environnement humain de la Chambre des députés que "l'eau vaut plus que l'or", reconnaissant la contamination produite par les mégamines et l'approuvant, ainsi que la fracturation, comme des maux nécessaires.

Un projet national

Dans le Chubut, une province où ses habitants ont décidé de dire "Non à l'exploitation minière", le gouverneur Arcioni, alors que les pouvoirs judiciaire et législatif dorment, avance avec des accords illégaux. Le gouvernement, qui ne paie pas les enseignants, les travailleurs de la santé et les employés publics, a engagé un lobbyiste minier bien connu qui a favorisé le pré-accord annoncé par la société Yemana Gold pour l'extraction de l'or avec la participation du groupe IRSA. Cela contredit la consultation populaire de 2003 où 82 % de la communauté a rejeté le projet Cordón Esquel, aujourd'hui rebaptisé Suyai.

A Salta, la société canadienne Barrick Gold a annoncé qu'elle allait exploiter un projet minier appelé El Quevar, dont 70% est orienté vers l'exploitation de l'argent, du plomb et du zinc.

Quelques jours avant que la quarantaine ne soit ordonnée, le secrétaire aux mines de la nation, Alberto Hensel, a assisté à la foire minière de Toronto au Canada, critiquée par l'assemblée "Jáchal No Se Toca". La quarantaine obligatoire dans toute l'Argentine n'a pas empêché les mines d'or de Veladero et de Gualcamayo, à San Juan, de continuer à fonctionner.

La Terre Mère

Lors de la dernière Journée de la Terre, le 22 avril, Navdanya International, Naturaleza de Derechos y la Fundación Salud de la Madre Tierra – HOMEF ainsi que 500 autres organisations et réseaux de 50 pays, ont lancé un communiqué planétaire intitulé "Faire la paix avec la Terre".

Dans le communiqué, ils avertissent que "cette pandémie n'est pas une catastrophe naturelle, tout comme la crise de l'extinction des espèces et les extrêmes climatiques ne sont pas des catastrophes naturelles". Pour ces organisations, les maladies émergentes sont causées par les activités humaines car la terre est un réseau de vie interconnecté. 

Ils appellent à une action mondiale avec un impératif : "Nous devons passer de l'économie de la cupidité et de la croissance illimitée, de la concurrence et de la violence, qui nous ont poussés dans une crise existentielle, à une "économie de l'attention" : pour la Terre, pour les personnes et pour toutes les espèces vivantes.

source d'origine  Marcha

traduction carolita d'un article paru sur Desinformémonos le 18 mai 2020

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