Brésil - Le peuple Atikum
Publié le 21 Mars 2020
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Peuple autochtone du Brésil vivant dans les états de Pernambuco et Bahía et dont la reconnaissance en tant que peuple indigène a démarré dans les années 1940.
Autodésignation : atikum-umã (en référence à une ascendance umã qui serait le « plus vieil indien « et père des Atikum dont la descendance a été élevée dans le village d’Olho d’Agua do Padre. Une autre version dit que le nomAtikum a émergé lors du rituel du Toré.
Langue : portugais. Ils n’ont aucun souvenir d’une langue indigène en dehors de quelques mots faisant souvent référence à des éléments naturels.
Données générales sur le milieu et le mode de vie
Sur la T.I Atikum il y a 20 villages (dénommés par eux-mêmes sites). Dans la chaîne montagneuse Umã le sol est argileux contrairement aux caractéristiques sablonneuses de l’arrière pays. La végétation dans les montagnes est arbustive et de grands arbres existent sur certains tronçons émergents. Les capoieras (forêts secondaires) sont une constante du paysage local.
La faune présente est composée d’éperviers ou faucons, de chouettes, de mouffettes, de tatous, de cobras, de fourmiliers, de pécaris à collier, d’oiseaux du genre penelope. Ces animaux en dehors des rapaces sont souvent chassés avec des chiens et des fusils de chasse par les habitants de la région. La ferme domestique se compose de poulets, chèvres, vaches, moutons et porcs. Ils utilisent souvent des chiens pour garder les maisons. Les fruits sauvages (umbu, fruit de la passion) se démarquent dans la cueillette. Les fruits cultivés sont banane, mangue, noix de cajou, papaye, goyave, jacquier, noix de coco, orange, citron. Il y a également une production de miel.
L’agriculture est la base de leur économie avec une culture de manioc, fèves, maïs, haricots, ricin, coton. S’y ajoute la plantation de marijuana (cannabis sativa) qui, bien qu’elle ne fasse pas partie de l’agriculture Atikum s’ajoute au panorama général puisque les montagnes et les municipalités de Carmaubeira da Penha et Floresta sont insérées dans le dénommé « paysage de marijuana » englobant plusieurs municipalités de l’arrière pays du Pernambuco. Les habitations qui prédominent sont des maisons utilisant comme matériau la boue, la paille et la maçonnerie.
Terres indigènes
- T.I Atikum – 16.290 hectares, 4404 personnes, réserve homologuée située dans l’état de Pernambuco. Villes : Belém do São Francisco, Camaubeira da Penha, Mirandiba, Salgueiro.
- T.I Atikun Bahía – 39 personnes, en cours d’identification.
- T.I Barra – 62 hectares, 183 personnes, état de Bahía. 2 peuples y vivent : Atikum, Kiriri.
Histoire
Depuis les XVIIe et XVIIIe siècles, la région géographique où vivent les Atikum est la théâtre de nombreux conflits entre les indiens et les blancs qui ont de plus en plus pénétré les terres en menant le front de l’expansion pastorale.
Il n’y a pas de mentions d’un groupe indigène du nom Atikum avant les années 1940.
Mais il existe plusieurs références à un groupe dénommé Umã dont une en 1802 par Frei Vital de Frescarolo dans un endroit où se trouve aujourd’hui l’un des villages de la zone indigène.
Cette colonie n’a pas duré longtemps et les groupes Umã ont migré par la suite dans l’arrière pays du Ceará à Sergipe fuyant les pistes du bétail. Les groupes se sont mélangés de plus en plus entre eux y compris avec des noirs quilombolas au cours de ces déplacements.
D’après les registres on sait que :
- Vers 1969, le groupe dénommé Umã traverse la vallée du rio São Francisco ;
- En 1713 ils sont le long du rio Pajeú ;
- En 1746 ils se trouvent à Alagoas entre les rios Ipanema et São Francisco ;
- En 1859 ils sont à Sergipe ;
- En 1801 ils sont installés à Olho d’Agua da Gameleira (où se trouve aujourd’hui le village Olho d’Agua do Ppadre à Serra do Umã d’où ils sont encore présents en 819 ;
- 1838 ils sont près de Jardim dans le Ceará ;
- 1844 ils se trouvent proche de l’ancienne colonie à Baixa Verde.
Au début des années 1940 les membres de la communauté paysanne habitant la Serra se sont identifiés comme les caboclos de la Serra do Umã.
Informés par les indiens Tuxá (de Bahía) qu’il y avait une agence gouvernementale qui reconnaissait les territoires indigènes du nord-est certains caboclos ont cherché à Recife le SPI s’affirmant comme caboclos descendants des indiens Umã et exigeant la création d’une réserve indigène.
Comme moyen de reconnaissance indigène, le SPI (Service de Protection des Indiens) leur a imposé la démonstration du rituel du Toré, une tradition qui, aux yeux de l’inspecteur de l’organe susmentionné témoignait de la « conscience ethnique » des caboclos.
Les indiens n’étaient pas préparés à ce rituel et cherchèrent auprès des Tuxá l’aide nécessaire à l’apprentissage du rituel.
Dans les années 1943 à 1945, un inspecteur du SPI installé à la Serra a assisté au rituel du Toré attestant ainsi de la présence indigène des futurs Atikum sur place.
En 1949 le poste du SPI est fondé et les caboclos atteignent alors la catégorie des indiens reconnus par l’état national.
Le toré est toujours utilisé comme signe diacritique dans le maintien de l’ethnie Atikum et leur confère pragmatiquement le droit d’accès au sol.
Organisation sociale et politique
Le principal élément d’unité dans la Serra est le lien de parenté bien que celui-ci dépasse souvent la frontière ethnique.
L’organisation politique est divisée par l’imposition de l’organe tuteur (d’abord le SPI puis la FUNAI) en cacique ou chef (représentant de la communauté devant la société nationale et celui qui gère les conseils internes, le chaman (celui qui prend soin de la santé des indiens) et des représentants du village formant la direction tribale.
Toutes ces fonctions devraient être remplies par le biais d’élections mais le factionnalisme a favorisé la permanence dans la direction de ceux qui ont pouvoir coercitif en participant à la production de marijuana.
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Foto: Museu do Índio
Le régime de l'indien Atikum
En "apprenant" le toré, les Atikum se sont de plus en plus spécialisés dans cette pratique rituelle. Ils constituaient un ensemble de connaissances qu'ils appelaient la "science de l'indien", revêtue d'une aura de mystère, et qui allait marquer leur spécificité en tant que groupe ethnique. Cet ensemble de connaissances est dynamique et ses ingrédients changent, car de nouveaux éléments apparaissent au cours des rituels et sont incorporés par ses praticiens. Mais si cet ensemble de connaissances est fluide, il doit y avoir quelque chose pour garantir la performance rituelle qui marque son indianité, c'est-à-dire pour confirmer périodiquement sa condition d'indien face aux attentes de l'Etat. Il est donc nécessaire d'avoir un "régime indien". Les membres du groupe doivent être "régimentés dans le toré", qu'ils aient ou non des connaissances plus approfondies, afin que le groupe se présente, de manière essentiellement politique, comme la "communauté indigène Atikum-Umã". (cf : Grünewald, 1993).
Cela conduit à la question de savoir qui sont réellement considérés comme des indiens Atikum-Umã par les Atikum eux-mêmes. Les indiens sont considérés comme ceux qui participent à la tradition du toré, y étant de préférence "régimentés", détenant la "science de l'indien", ici comprise comme un ensemble de connaissances dynamiques sur lequel repose le "secret de la tribu" (cf : Grünewald, 1993). Dans toute cette tradition rituelle, le jurema (Mimosa hostilis Benth) - une plante sacrée qui, du domaine exclusivement indigène, favorise également une séparation entre indiens et blancs, bien que son utilisation soit également commune à d'autres rituels complexes du sertão nord-est, comme le catimbó, par exemple. Les Atikum utilisent l'écorce de la racine de jurema macérée et mélangée à de l'eau comme boisson sacrée ("anjucá") qui représente le sang de Jésus et qui est consommée principalement lors de leurs rituels (torés publics ou privés, ceux-ci étant divisés en œuvres de gentils, terreiro et ouricuri), lorsque les indiens entrent en contact - en grande partie par possession - avec les "charmes de la lumière".
Un article à ce sujet : L'usage rituel de la jurema chez les indiens du Brésil colonial
Source ; pib.socioambiental.org