La dynamique et les processus de changement en Amazonie péruvienne : apprendre des peuples Kechwa-Lamas
Publié le 4 Octobre 2019
Le Pérou possède la septième plus grande superficie de forêt au monde. Son déboisement a commencé plus tard qu'au Brésil et les taux de perte des forêts ont été relativement faibles. L'expansion de l'État en Amazonie a commencé dans les années 1980 par le biais de projets de colonisation subventionnés. Avec le gouvernement néolibéral de Fujimori (1990-2001), l'Amazonie a été davantage ouverte par l'aménagement de routes, ce qui a entraîné une migration massive des populations des Andes. En outre, plusieurs projets d'envergure ont été lancés pour l'extraction de minéraux, de pétrole et de gaz naturel.
Le gouvernement péruvien affirme que l'agriculture à petite échelle ou "migratoire" est responsable de 90% de la déforestation. Mais cette affirmation présente des faiblesses à la fois méthodologiques et conceptuelles. Premièrement, la plupart des données sur la déforestation au Pérou ont été recueillies au niveau agrégé par télédétection (par satellite) et les données au niveau régional sont basées sur les opinions recueillies auprès de fonctionnaires du gouvernement et de travailleurs des ONG. Cela a reflété le discours officiel et manque de preuves empiriques ou d'analyse des facteurs qui déterminent les changements dans l'utilisation des terres.
Deuxièmement, la terminologie de l'agriculture "migratoire" prête à confusion et réunit deux processus distincts dans l'utilisation des forêts. Le premier est celui des systèmes de brûlis pratiqués par les groupes autochtones et par les métis ou les riverains, qui ne conduisent généralement pas à la conversion permanente de la forêt en terres agricoles. La seconde est le défrichement complet de la forêt à des fins agricoles, pratiqué en grande partie par les migrants. La distinction entre les deux processus, les acteurs impliqués, leurs motivations et leurs effets est importante pour mieux comprendre les moteurs de la déforestation et déterminer quelles réponses pourraient être appropriées. Blâmer l'agriculture des petits exploitants comme étant la principale cause de la perte des forêts nie le rôle des politiques et des programmes agricoles du gouvernement dans les changements d'utilisation des terres. Elle ne tient pas compte non plus des compétences du gouvernement en matière de droits d'accès, d'utilisation et de contrôle des terres.
Conservation et agro-industrie : deux aspects de la dépossession
La région de San Martín, en Amazonie péruvienne, était relativement inaccessible jusqu'aux années 1960, lorsque la route principale Fernando Belaunde Terry fut inaugurée. Dans les années 1980, la coca était devenue une importante culture de rente qui attirait les migrations à grande échelle, les changements de paysage avec le défrichement des forêts et un boom économique. La production de coca combinée aux activités de deux groupes de guérilla (Mouvement Révolutionnaire Túpac Amaru et Sentier Lumineux) a provoqué l'instabilité et des niveaux élevés de violence. Cela a conduit à une forte présence militaire qui a limité la séparation des terres en lots individuels ou commerciaux. Après 1995, lorsque la présence militaire a été réduite, la déforestation a augmenté. On estime qu'en 2000, 30 % du territoire régional avait été déboisé. Cela a coïncidé avec le processus de décentralisation de 2002, lorsque le gouvernement régional a repris le développement économique et les ressources forestières.
On s'attendait à ce que les gouvernements régionaux soient en mesure d'assurer une gouvernance plus efficace et durable, de renforcer de plus en plus la démocratie en faisant participer la population locale aux processus décisionnels et d'améliorer les services publics aux citoyens. Cependant, le parti de la Nouvelle Amazonie, qui a fait partie du gouvernement régional de 2007 à 2015, a développé une vision de la production agricole intensive combinée à la " conservation " et au développement de l'écotourisme, et a promu San Martin comme " Région verte ". D'importants investissements ont été réalisés dans les infrastructures, la production de café et de cacao a augmenté et des terres ont été ouvertes pour la culture agro-industrielle du jatropha et du palmier à huile.
De même, 70 pour cent du territoire de la région de San Martín a été délimitée, avec peu de consultation de la population, pour la "conservation". Jusqu'à présent, 1 340 000 hectares ont été fixés, l'objectif de 2,5 millions d'hectares ayant été fixé par le Programme national de conservation des forêts pour l'atténuation des changements climatiques. L'objectif est de contrôler l'accès aux forêts et leur utilisation. La zone de conservation régionale (ACR) Cordillera-Escalera et les zones de conservation et de rétablissement des écosystèmes (ZoCREs) ont largement chevauché les territoires autochtones et, jusqu'à présent, le gouvernement régional n'a pas abordé les droits des communautés autochtones dans la loi.
La conservation et les cultures pérennes, c'est-à-dire celles dont le cycle de vie est long ou permanent, ont jusqu'à présent été considérées comme la réponse régionale à la déforestation. Cependant, les mesures prises par le gouvernement de San Martin pour délimiter et confiner les forêts dans le cadre des plans de conservation constituent une menace existentielle pour l'accès aux forêts et leur utilisation par les communautés Kechwa-Lamas. D'autre part, l'accent mis sur l'agriculture commerciale pérenne est devenu un moteur de la déforestation.
Les agriculteurs migrants se déplacent vers des zones de forêts défrichées pour la production de cultures de rente (café et cacao, par exemple), zones que les communautés Kechwa-Lamas considèrent comme un territoire coutumier. Les plantations commerciales constituent également une menace croissante. Les communautés installées dans des zones reculées, au cœur des forêts, patrouillent constamment leurs territoires pour éloigner les migrants.
Quelque chose est certain. Lorsque la distance entre les zones forestières et les communautés augmente, la taille moyenne des exploitations agricoles diminue, les modes de culture se transforment en cultures pérennes, comme le cacao, et l'utilisation des forêts diminue. En revanche, lorsqu'elles sont facilement accessibles, les forêts sont intégrées dans les activités de subsistance, fournissant une source considérable de nourriture (des plantes aux animaux). Lorsqu'il n'y a pas de forêt à proximité, l'utilisation peut se limiter à la chasse occasionnelle dans une forêt éloignée.
La première concerne les revendications de la population autochtone, principalement les Kechwa-Lamas, sur leurs territoires coutumiers ; la deuxième concerne l'exploitation forestière, principalement par les populations migrantes ; et la troisième, qui relie les deux premières, est l'expansion des cultures commerciales pérennes et des zones de conservation. Cette dynamique a rendu invisible le potentiel des systèmes agricoles locaux à promouvoir des moyens d'existence bénéfiques et durables, ainsi que celui de diverses forêts secondaires (forêts naturellement régénérées) qui pourraient s'avérer être la meilleure protection pour la forêt naturelle.
Régime foncier et utilisation des forêts
En vertu de la loi sur les communautés autochtones, les Kechwa-Lamas ont le droit de revendiquer le droit d'utiliser leurs forêts, bien que la suppression par l'État des droits de propriété sur leurs forêts coutumières fasse l'objet de vifs débats. Il n'y a pas de données sur l'étendue des revendications, mais selon une source informelle : quarante-deux villages ont revendiqué des terres à l'intérieur de la Cordillère-Escalera de l'ACR, dépassant 120.000 hectares. La superficie forestière demandée par les villages varie de 120 à 50 000 hectares. La communauté de Yuri Lamas, l'une des rares à avoir obtenu le titre de territoire forestier, compte 31 000 hectares au sein de l'ACR. Toutefois, le gouvernement régional a été lent à répondre à ces demandes, faisant valoir que ce n'est pas pour des raisons politiques qui n'ont pas respecté la loi, mais pour des raisons budgétaires et techniques et pour les difficultés pour se rendre dans des régions éloignées pour effectuer les mesures nécessaires.
L'accès limité à leurs droits fonciers ouvre aux communautés la porte à la recherche d'autres formes de titres de propriété, comme les concessions. Mais ceux-ci sont très différents. Le titre offre des droits d'utilisation à perpétuité, en grande partie selon les pratiques coutumières, mais avec certaines restrictions. L'approche de la concession, d'autre part, promeut les activités de conservation mises en œuvre avec l'appui technique des organismes intervenants, en utilisant des experts, des techniques, des technologies et des réglementations pour former les habitants à la gestion et à la préservation des forêts selon des protocoles et normes spécifiques. Les concessions s'accompagnent également d'une réduction des droits territoriaux, d'une utilisation réglementée des terres ancestrales et d'accords de concession limités dans le temps, sans garantie de prolongation.
Par conséquent, les options des Kechwa-Lamas pour maintenir le contrôle de leurs territoires traditionnels peuvent être de plus en plus liées à la nécessité de se comporter en "conservateurs" ou "indigènes écologiques". Mais il y a aussi des signes que la nouvelle gouvernance forestière s'oriente vers une utilisation plus marchande des terres pour satisfaire l'expansion des marchés mondiaux et " verts " (p. ex. l'huile de palme et la séquestration du carbone).
L'expansion des cultures pérennes protège-t-elle les forêts ?
L'accent a toujours été mis sur la production agricole dans les plans de développement régional. L'accent mis sur les cultures pérennes (principalement le café, le cacao et le palmier à huile) est souvent présenté comme une expansion plus respectueuse de l'environnement que les cultures annuelles et comme un moyen d'arrêter l'agriculture sur brûlis, réduisant ainsi le besoin d'ouvrir de nouvelles terres.
Les cultures de rente permanentes ont augmenté dans les communautés Kechwa-Lamas. Les agriculteurs ont développé la production de café et de cacao, en mettant l'accent sur le cacao. Cependant, dans aucun des villages, les champs de cacao et de café ne remplacent les champs de culture sur brûlis. Ces dernières, avec les cultures comestibles, peuvent se chevaucher avec les cultures vivaces lors de l'établissement de la couche d'ombre, mais les deux utilisations des terres jouent des rôles fondamentalement différents.
De nouvelles façons de voir et de gérer la forêt amazonienne ?
Les nouvelles approches des forêts de San Martin en matière de moyens d'existence ont évolué au cours des 20 dernières années vers les systèmes agroforestiers et l'intérêt croissant pour les produits non ligneux. Le gouvernement régional et les universités locales ont promu de "nouvelles approches" basées sur la science (cartographie, paquets de gestion des sols et cultures pérennes). Les derniers développements ont été les services écosystémiques ou environnementaux. Au fur et à mesure que les programmes de paiement des services environnementaux et les programmes de compensation tels que REDD se sont développés, de nouveaux intérêts d'utilisation des terres ont émergé. Pour certains, ce marché émergent des services écosystémiques est la principale raison de la faible approbation des titres forestiers pour les communautés.
Actuellement, il y a peu de projets opérationnels REDD à San Martin et ceux en cours sont dirigés vers des zones forestières qui ont d'autres niveaux de protection et de petites populations. Aucun projet REDD n'a encore été mis en place sur le territoire autochtone, bien que des tentatives aient été faites pour persuader les peuples Kechwa-Lamas de vendre leurs droits carbone. Le processus REDD de San Martin organisé en table ronde a été considéré comme le plus progressiste de l'Amazonie péruvienne lorsqu'il a débuté en 2009. Mais les groupes autochtones se sentaient peu représentés et plusieurs d'entre eux ont organisé conjointement une "table ronde autochtone". La principale critique du processus REDD au Pérou et San Martin souligne que le gouvernement péruvien, dans son empressement à mettre en œuvre ce programme, a ignoré le conflit sur les droits fonciers. Les organisations autochtones craignent que le REDD et d'autres programmes similaires n'ouvrent l'Amazonie à l'exploitation des ressources par les transnationales (vertes) et qu'elles ne lancent un autre boom extractif autour des paiements du carbone, comme ce fut le cas pour le caoutchouc et le pétrole.
Paysages forestiers ou paysages marchands ?
Les questions de droits sont au cœur des conflits sur le contrôle des terres. D'une part, du point de vue des Kechwa-Lamas, de nouveaux acteurs sont apparus, appliquant de nouvelles formes de confinement et de privatisation. L'État, représenté par le gouvernement régional, exclut les peuples autochtones par la création de réserves et de zones de conservation. Grâce à des mécanismes de division territoriale - tels que la création de l'ACR Cordillera Escalera et des Zones de conservation et de rétablissement des écosystèmes (Zocres) - le contrôle des populations et des forêts est déclaré. C'est aussi un moyen de créer de nouveaux " paysages marchands ", en termes de séquestration du carbone et de paysages forestiers " vierges " pour la consommation touristique. Ce processus néglige également les cadres juridiques existants qui accordent des droits coutumiers aux peuples autochtones. Bien que le gouvernement ne conteste pas ouvertement leurs droits en soi, ils les minent en réalité par une inaction magistrale.
Les intérêts du capital agro-industriel et la mondialisation de l'économie régionale sont promus directement et indirectement par la promotion de nouvelles agricultures commerciales et plantations d'arbres. Les activités d'expansion des migrants andins, qui bénéficient du développement commercial des plantations promues par le gouvernement, revêtent une importance particulière. Ainsi, un "paysage de travail" se crée aussi à travers de nouveaux processus qui émergent avec les changements socio-économiques, l'évolution des pratiques agricoles et les nouvelles dynamiques urbaines. Les processus qui ne semblent pas se concentrer directement sur les forêts ont souvent d'énormes impacts sur la déforestation, la restauration des forêts et les moyens de subsistance des populations.
Les pratiques des familles Kechwa-Lamas, pour leur part, offrent plus d'espoir pour l'avenir de la forêt que les initiatives de conservation du gouvernement régional. La soi-disant conservation des forêts et la discussion sur le REDD et la séquestration du carbone sont devenues si répandues qu'elles ont occulté d'autres dynamiques en jeu qui sont essentielles en Amazonie. Alors que les peuples Kechwa-Lamas sont utilisés comme une "marque" régionale pour se promouvoir en tant que symbole de la diversité ethnique et culturelle, le modèle promu pour l'utilisation des terres et des forêts dans la région n'est pas basé sur les pratiques Kechwa-Lamas, mais sur la croissance rapide des cultures commerciales, la monoculture et les grandes plantations. Les systèmes Kechwa-Lamistas peuvent nous aider à comprendre les aspects essentiels des systèmes de production et des utilisations des terres les plus divers, combinant la production et la préservation des aliments et des forêts. Malheureusement, la population Kechwa-Lamas est considérée comme un groupe ethnique haut en couleur, mais non comme une source d'inspiration et de connaissances pour l'avenir des forêts de Saint-Martin.
*Cet article est basé sur des recherches menées en 2018 sous le titre : "Forest Dynamics in the Peruvian Amazon: Understanding Processes of Change" (en inglés).
Luis Romero Rengifo, Centro Waman Wasi Lamas, San Martín, Perú, wamanwasi@gmail.com
Marquardt, Kristina, Pain Adam y Bartholdson Örjan, Universidad Agrícola de Suecia
traduction carolita d'un article de WRM bulletin de septembre 2019, le texte original ci-dessous
Las dinámicas y los procesos de cambio en la Amazonía peruana: aprendiendo de los pueblos Kechwa–Lamas
Perú tiene la séptima mayor área de bosque del mundo. Su desbosque comenzó más tarde que en Brasil y las tasas de pérdida de bosques han sido bajas en comparación. La expansión del estado hacia la Amazonía comenzó en la década de 1980 a través de proyectos de colonización subvencionados. Con el gobierno neoliberal de Fujimori, (1990-2001) la Amazonía se abrió aún más a través del desarrollo vial, resultando en migración a gran escala de poblaciones de los Andes. Además, se lanzaron varios proyectos a gran escala para la extracción de minerales, petróleo y gas natural.
El gobierno peruano afirma que la agricultura a pequeña escala o "migratoria" es la responsable del 90% de la deforestación. Pero esta afirmación tiene debilidades tanto metodológicas como conceptuales. En primer lugar, la mayoría de la data sobre deforestación en el Perú se ha recopilado a nivel agregado a través de la teledetección (vía satélite) y los datos a nivel regional se han basado en opiniones recabadas de funcionarios gubernamentales y trabajadores de ONG. Esto ha reflejado la narrativa oficial y carece de evidencia empírica o análisis de los factores que determinan los cambios en el uso de la tierra.
En segundo lugar, la terminología de la agricultura “migratoria" es confusa y agrupa dos procesos distintos en el uso de bosques. El primero es el de sistemas de tala y quema practicados por grupos indígenas y por mestizos o ribereños que por lo general no conduce a la conversión permanente de bosque a tierra agrícola. El segundo es el desmonte completo del bosque para uso agrícola, practicado en gran parte por los migrantes. La distinción entre ambos procesos, los actores implicados, sus motivaciones y efectos es de importancia para comprender mejor los factores que impulsan la deforestación y determinar qué respuestas podrían ser apropiadas. Culpar a la pequeña agricultura como la principal causa de la pérdida de los bosques niega el papel de las políticas y los programas agrícolas del gobierno en conducir cambios en el uso de la tierra. También ignora las competencias del gobierno sobre los derechos al acceso, uso y control de la tierra.
La conservación y la agroindustria: dos aristas del despojo
La región de San Martín, en la Amazonía peruana, estuvo relativamente inaccesible hasta la década de los sesenta, cuando se inauguró la carretera principal Fernando Belaunde Terry. En la década de los ochenta, la coca se había convertido en un importante cultivo comercial que atrajo migración a gran escala, cambios en el paisaje con el desmonte de bosque y un "boom" económico. La producción de coca en combinación con las actividades de dos grupos guerrilleros (el Movimiento Revolucionario Túpac Amaru y Sendero Luminoso) provocó inestabilidad y alto nivel de violencia. Esto condujo a una presencia militar fuerte que limitó la separación de la tierra en lotes individuales o comerciales. Después de 1995, al reducirse la presencia militar, la deforestación fue en aumento. Se estima que el 30% del territorio regional había sido deforestado para el 2000. Esto coincidió con el proceso de descentralización de 2002, cuando el gobierno regional asumió el desarrollo económico y los recursos forestales.
Habían expectativas de que los gobiernos regionales serían capaces de proporcionar una gobernanza más eficiente y más sostenible, fortalecer cada vez más la democracia, incluyendo a la población local en los procesos de toma de decisiones, así como mejorar los servicios públicos para los ciudadanos. Sin embargo, el partido de Nueva Amazonia, que estuvo en el gobierno regional de 2007 hasta 2015, desarrolló una visión de producción agrícola intensiva combinada con “conservación” y desarrollo ecoturístico, y promovió a San Martín como la "Región Verde". Se emprendieron grandes inversiones en infraestructura, se incrementó la producción de café y cacao y se abrió terreno para el cultivo agroindustrial de jatropha y palma aceitera.
Asimismo, el 70 por ciento del territorio de la región de San Martín se delimitó, con escaza consulta a los pueblos, para la “conservación”. Hasta ahora se han fijado 1.340.000 hectáreas, persiguiendo un objetivo de 2.5 millones de hectáreas que fue establecido por el Programa Nacional de Conservación Forestal para Mitigación del Cambio Climático. La finalidad es lograr el control sobre el acceso y uso de los bosques. El Área de Conservación Regional (ACR) Cordillera-Escalera y las Zonas de Conservación y Recuperación de Ecosistemas (ZoCREs) se han superpuesto en gran medida a territorios indígenas y, hasta el momento, el gobierno regional no ha abordado la problemática de los derechos de las comunidades indígenas amparados por la ley.
La conservación y los cultivos perennes, es decir, aquellos cultivos que tienen un ciclo de vida largo o permanente, han sido vistos hasta ahora como la respuesta regional a la deforestación. Sin embargo, las acciones del gobierno de San Martín para delinear y confinar bosques bajo planes de conservación constituyen una amenaza existencial para el acceso y uso de los bosques por parte de las comunidades Kechwa-Lamas. Por otro lado, el enfoque en la agricultura comercial perenne se ha convertido en un impulsador de la deforestación.
Los campesinos migrantes se trasladan a áreas de bosque despejadas para la producción de cultivos comerciales (por ejemplo, café y cacao), áreas que las comunidades Kechwa-Lamas consideran territorio consuetudinario. Las plantaciones comerciales son también una amenaza cada vez mayor. Las comunidades asentadas en zonas alejadas, muy dentro de los bosques, patrullan constantemente sus territorios para mantener alejados a los migrantes.
Algo es definitivo. Cuando la distancia entre las áreas de bosque y las comunidades aumenta, el tamaño promedio de las fincas se reduce, los patrones de cultivo cambian hacia un cultivo perenne, como el cacao, y el uso de los bosques se reduce. En contraste, cuando hay un acceso fácil, los bosques se integran en las actividades de medios de vida, proporcionando una fuente considerable de alimentos (de plantas a animales). Donde no hay bosque cercano, el uso puede limitarse a la caza ocasional en algún bosque lejano.
Es así que vemos tres dinámicas influyendo hoy los territorios de bosque en San Martín. La primera son las reivindicaciones de la población indígena, mayoritariamente Kechwa-Lamas, sobre sus territorios consuetudinarios; la segunda es la tala de bosque principalmente por las poblaciones migrantes; y la tercera, que vincula las dos primeras, es la expansión de cultivos comerciales perennes y áreas de conservación. Estas dinámicas por su parte han hecho invisible el potencial de los sistemas agrícolas locales para promover medios de vida beneficiosos y sostenibles, así como el de los bosques secundarios diversos (bosques regenerados naturalmente) que podrían resultar ser la mejor protección para el bosque nativo.
La tenencia de la tierra y el uso de los bosques
Bajo la ley de comunidades nativas, el pueblo Kechwa-Lamas tiene derecho a reclamar derechos de uso de sus bosques, aunque la remoción estatal de los derechos de propiedad sobre sus bosques consuetudinarios sigue siendo fuertemente discutida. No hay datos sobre el alcance de las reclamaciones, pero de acuerdo a una fuente informal: cuarenta y dos aldeas han reclamado tierras dentro de la ACR Cordillera-Escalera, superando las 120 mil hectáreas. El área de bosque que los pueblos han solicitado varía de 120 a 50 mil hectáreas. La comunidad de Yuri Lamas, una de las pocas que ha logrado el título de territorio de bosque tiene 31 mil hectáreas dentro de la ACR. Sin embargo, el Gobierno Regional ha sido lento en abordar estas demandas, argumentando que no es por razones políticas que no han seguido la ley, sino por razones presupuestarias y técnicas y por las dificultades de viajar a zonas remotas para realizar las mediciones necesarias.
El escaso acceso a sus derechos sobre la tierra, abre la puerta para que las comunidades busquen otras formas de titulación, como es el caso de las concesiones. Pero estas son muy diferentes. El título ofrece derechos de uso a perpetuidad, siguiendo en gran medida las prácticas consuetudinarias, aunque con algunas restricciones. El enfoque de concesión, por su parte, promueve actividades de conservación implementadas a través del apoyo técnico de organismos intervinientes, utilizando expertos, técnicas, tecnologías y reglamentos para capacitar a los habitantes en el manejo y preservación de bosques conforme a protocolos y estándares específicos. Las concesiones además vienen con derechos territoriales reducidos, el uso regulado de tierras ancestrales y con acuerdos de concesión limitados en el tiempo, sin garantía de extensión.
Por lo tanto, las opciones de los Kechwa-Lamas para mantener el control de sus territorios tradicionales pueden estar cada vez más conectadas con la necesidad de comportarse como "conservadores" o "nativos ecológicos." Pero también hay signos de que la nueva gobernanza sobre bosques está dirigida hacia un uso de la tierra más mercantilizado para satisfacer mercados mundiales y “verdes” en expansión (por ejemplo, aceite de palma y secuestro de carbono).
¿La expansión de cultivos perennes protege los bosques?
Siempre ha habido un fuerte énfasis en la producción agrícola en los planes de desarrollo regional. El enfoque en los cultivos perennes (principalmente café, cacao y palma aceitera) se presenta a menudo como una expansión más respetuosa con el medio ambiente que los cultivos anuales y como un medio para detener la agricultura de tala y quema, reduciendo así la necesidad de abrir nuevas tierras.
Se han aumentado los cultivos comerciales permanentes en comunidades Kechwa-Lamas. Los agricultores han ampliado la producción de café y cacao, con énfasis en este último. Sin embargo, en ninguno de los pueblos los campos de cacao y café reemplazan a los campos de tala y quema. Estos últimos, con cultivos comestibles, pueden superponerse con los cultivos perennes durante el establecimiento de la capa de sombra, pero los dos usos de la tierra desempeñan papeles fundamentalmente diferentes.
¿Nuevas maneras de ver y manejar los bosques amazónicos?
Los nuevos enfoques de los medios de subsistencia en los bosques en San Martín se han desplazado desde hace 20 años hacia sistemas agroforestales y el interés creciente por productos no maderables. El gobierno regional y las universidades locales han promovido "nuevos enfoques" basados en la ciencia (cartografía, paquetes de manejo de suelo y cultivos perennes). El último desarrollo han sido los servicios ecosistémicos o ambientales. A medida que se han desarrollado programas para el pago de servicios ambientales y programas de compensación como REDD, se han producido nuevos intereses de uso de la tierra. Algunos ven este emergente mercado de servicios ecosistémicos como la razón principal de la baja aprobación de títulos de bosque para las comunidades.
En la actualidad, hay pocos proyectos operacionales de pagos por servicios ambientales en San Martín y los que están en proceso se dirigen hacia áreas de bosque que tienen otros niveles de protección y poblaciones pequeñas. Todavía no se ha establecido ningún proyecto REDD sobre territorio indígena, aunque han habido intentos de persuadir a los pueblos Kechwa-Lamas para que vendan derechos de carbono. El proceso de REDD en San Martín organizado como una mesa redonda fue considerado como el más progresivo en la Amazonía peruana, cuando se inició en 2009. Pero los grupos indígenas sintieron que estaban mal representados y varios de ellos organizaron conjuntamente una "mesa redonda indígena". La principal crítica al proceso REDD en Perú y San Martín enfatiza que el gobierno peruano, en su afán por implementar este programa, ignoró la disputa sobre los derechos de tenencia de tierra. Las organizaciones indígenas temen que REDD y otros programas similares abran la Amazonia para la explotación de los recursos por las transnacionales (verdes) y que lancen otro auge extractivo en torno a los pagos de carbono, como sucedió con el caucho y el petróleo.
¿Paisajes de bosque o paisajes de mercado?
En el corazón de los conflictos sobre el control de la tierra están las cuestiones de derechos. Por un lado, desde la perspectiva de los Kechwa-Lamas, nuevos actores han aparecido, aplicando nuevas formas de confinamiento y privatización. El estado, representado por el gobierno regional, excluye a los pueblos indígenas mediante la creación de reservas y zonas de conservación. A través de mecanismos de división territorial –como la creación de la ACR Cordillera Escalera y las Zonas para la Conservación y Recuperación de Ecosistemas (Zocres) - se está declarando el control sobre las personas y los bosques. Estos también son una forma de crear nuevos “paisajes de mercado,” en términos de secuestro de carbono y paisajes de bosque "prístinos" para el consumo del turismo. En este proceso se descuidan además los marcos legales existentes que otorgan derechos consuetudinarios a los pueblos indígenas. Si bien el gobierno no desafía abiertamente sus derechos per se, los están socavando efectivamente a través de una inacción magistral.
Los intereses del capital agroindustrial y la globalización de la economía regional se promueven directamente e indirectamente a través de la promoción de la nueva agricultura comercial y las plantaciones de árboles. De especial relevancia son las actividades expansivas de los migrantes andinos que se benefician del desarrollo comercial de las plantaciones que promueve el gobierno. Por ende, también se está creando un "paisaje de trabajo" a través de los nuevos procesos que emergen con los cambios socioeconómicos, prácticas agrícolas cambiantes y nuevas dinámicas urbanas. Los procesos que parecieran no centrarse directamente en los bosques suelen tener enormes impactos sobre la deforestación, la recuperación de los bosques y los medios de vida de los pueblos.
Las prácticas de las familias Kechwa-Lamas, por su parte, ofrecen más esperanza para el futuro del bosque que las iniciativas de conservación del gobierno regional. La llamada conservación de los bosques y la discusión sobre REDD y el secuestro de carbono han llegado a ser tan dominantes que han oscurecido otras dinámicas en juego que son esenciales en la Amazonía. Sin bien los pueblos de Kechwa-Lamas son utilizados como una “marca” regional para promocionarse como un símbolo de la diversidad étnica y cultural, el modelo que se promueve para el uso de tierras y bosques en la región no se basa en las prácticas de los Kechwa-Lamas, sino en el rápido aumento de los cultivos comerciales, el monocultivo y las plantaciones a gran escala. Los sistemas Kechwa-Lamistas pueden ayudarnos a comprender aspectos esenciales de los sistemas de producción y usos del suelo más diversos, combinando la producción y preservación de alimentos y bosques. Lamentablemente, la población de Kechwa-Lamas se considera como un grupo étnico colorido, más no como una fuente de inspiración y conocimientos para el futuro de los bosques en San Martín.
* Este artículo está basado en la investigación realizada en 2018 bajo el título: "Forest Dynamics in the Peruvian Amazon: Understanding Processes of Change" (en inglés).
Luis Romero Rengifo, Centro Waman Wasi Lamas, San Martín, Perú, wamanwasi@gmail.com
Marquardt, Kristina, Pain Adam y Bartholdson Örjan, Universidad Agrícola de Suecia
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Pérou - Le peuple Quechua Lamista - coco Magnanville
Autre nom : Llacuash Population : 22.513 personnes Langue : quechua Répartition géographique Département de San Martín Province de Bellavista : district de San Pablo Province d'El Dorado : dist...
http://cocomagnanville.over-blog.com/2019/07/perou-le-peuple-quechua-lamista.html