Brésil - Le peuple Arara Shawãdawa

Publié le 29 Octobre 2019

Foto: Francisca Arara (Diaká), 2005.

Peuple autochtone du Brésil vivant dans l’état d’Acre et qui, comme les autres peuples de cet état a subi les effets de la fièvre du système d’exploitation du caoutchouc pendant les dernières décennies du XIXe siècle. Ils ont été exploités, expatriés et encerclés dans leur représentation physique et culturelle.

Ils s’efforcent ces dernières années d’inverser le processus en revalorisant leur langue et leurs traditions et en revendiquant des droits territoriaux face à l’état brésilien.

Autodésignation : shawãdawa

Autres noms : shawanawa, xawanáua, xawanáwa, chauã-nau, ararapina, ararawa, ararana, tarahana.

Population : 677 personnes

Langue : shawãdawa de la famille des langues pano.

Il y a peu de locuteurs de la langue maternelle, peut-être encore 7 vivants. Les autres comprennent la langue mais ne la parlent pas.

Ils étaient ridiculisés et critiqués au moment de la conquête et du boom du caoutchouc quand ils parlaient leur langue et ils ont commencé à ne plus la transmettre à leurs enfants. Il y a toute une génération d’enfants éduqués seulement en portugais. Depuis le début des années 90, ils cherchent à « sauver » leur propre langue, bénéficiant en cela du soutien de la Commission Acre –pro-indian (CPI Acre) pour mettre en place une éducation bilingue au sein du groupe. Leurs enfants et adolescents reçoivent une éducation de la langue avec des enseignants formés par le CPI Acre.

Localisation

Deux Terres Indigènes (T.I)

T.I Arara/Igarapé Humaitá – 87571,69 hectares, 419 personnes homologuée. Villes : Porto Walter, Tarauacá.

T.I Jaminawa/Arara do rio Bagé – 28.926 hectaresn 195 personnes, homologuée. Partagée avec le peuple Yaminawá (Langue pano). Villes : Jordão, Marechal Thaumaturgo, Tarauacá.

La plus grande partie des Arara réside dans la T.I De l’igarapé Humaitá dont les cours d’eau définissant les limites sont le rio Zinho cruzero do Vale (igarapé Humaitá) un affluent de la rive droite de la partie supérieure de la rivière Juruá et les igarapés Nilo et Grande.

Il y a 3 villages, Raimundo Do Vale, Foz do Nilo et Boa Vista. L’accès aux villages se fait par voie navigable mais il existe des routes de terre qui les connectent entre eux et qui coupent la T.I.

La vallée dans laquelle est située la réserve est pour les zoologistes et les botanistes une région biologique diversifiée de l’Amazone avec la plus grande concentration d’espèces végétales et animales de la planète dont de nombreuses espèces endémiques.

Il y a plusieurs types de forêts (selvas), la forêt ouverte avec la présence de palmiers, de bambous, les vegas, des forêts inondées de façon périodique ou permanente, la forêt dense dans les plaines alluviales et dans les montagnes, la forêt naine sur les bordures et sommets des montagnes.

 

Foto: Ana Luiza Melgaço coordenado pro Francisca Arara, liderança Shawãdawa, 

Histoire du contact

La région actuellement occupée par les Arara était le territoire des groupes Pano et Aruak depuis la période pré-Cabralino, mais à partir du milieu du XIXe siècle, elle a commencé à être occupée également par des exploiteurs et des commerçants venus de Belén, Manaos et autres centres urbains situés le long du rio Solimões (Aquino & Iglesias, 1999). Entre-temps, l'exploitation et l'occupation effective de la région du Juruá supérieur ne se sont produites qu'au cours des deux dernières décennies du XIXe siècle, après plusieurs combats avec les groupes autochtones locaux. Durant cette période, la région était peuplée principalement de migrants du nord-est du Brésil qui, fuyant la sécheresse de 1877, ont établi plusieurs sites et routes de caoutchouc afin d'extraire le latex de l'hévéa brasiliensis.

A la fin de la dernière décennie du XIXe siècle, le Jurua supérieur était déjà peuplé de Brésiliens, lorsque les Péruviens "caucheros", exploitant le caoutchouc (castilloa ellastica) et d'autres produits forestiers ont occupé la région. L'occupation des caucheros péruviens fut itinérante et de courte durée, se terminant au début du XXe siècle, tandis que celle du nord-est fut massive et durable (Castello Branco, 1930 : 640).

Selon l'histoire orale des Arara et les sources historiographiques du Juruá supérieur, ce n'est qu'au début du XXe siècle que le groupe est entré en contact avec des agents de la société nationale. En 1905, lors de l'ouverture d'une route reliant Cocamera, dans le Tarauacá, à Cruzeiro do Sul, Felizardo Cerqueira et Ãngelo Ferreira, ainsi que les Indiens Yawanawa, Rununawa et Iskunawa, ont réussi à contacter les Arara, qui étaient situés dans la région de l'igarapé Forquilha , tributaire de la rive gauche du Riozinho da Liberdade (Tastevin, 1926:49). A cette époque, les Arara qui vivaient près de cet igarapé résidaient avec les indiens Rununawa, tous dirigés par le célèbre tuxaua Tescon, qui était marié à la fille d'un tuxaua Arara.

Les références à Tescon à la tête des Arara sont une constante dans les sources écrites sur le Haut Jurua, comme celle du lieutenant de l'armée Luis Sombra, qui en 1907 a maintenu le contact avec les "xauánauás (araras)" sur le Riozinho da Liberdade. La même année, l'ingénieur Nunes de Oliveira a visité les malocas de plusieurs indiens de la région, rencontrant Tescon à proximité de l'igarapé Forquilha. En 1911, Tescon et les autres indiens qu'il dirigeait restèrent dans le Riozinho da Liberdade lorsque l'ingénieur Máximo Linhares, assistant du Service de Protection des Indiens et de localisation des travailleurs nationaux (SPILTN), traversa les vallées des rivières Juruá et Tarauacá. Máximo Linhares a trouvé des Arara, Ararapinas, Contanauás, Caxinauás, Jaminauás et Tuxinauás sur le rio Humaitá, affluent du cours supérieur du Muru ; Caxinauás, Jaminauás, Curinas, Catuquinas, Aninauás, Ararauás et Capanauás dans le Haut "Embira" (Envira) et des malocas des Caxinauás et Araras (castello branco19-23).

Après 1912, le père français Constantino Tastevin se trouvait dans le Juruá supérieur, qui relatait les guerres intertribales constantes établies par les Araras au début du XXe siècle, en plus d'avoir fait une distinction entre les Araras du Tauari et ceux de Forquilha, il laissait entendre que les Arara étaient répartis en plusieurs groupes, ou dans différents villages du même groupe. Toujours dans les récits de Tastevin, les migrations entreprises par les Arara le long des rios Tejo, Bagé, Liberdade et Arahuaca (Riozinho Cruzeiro do Vale) sont notées, permettant de vérifier le combat qui a entraîné la mort de Tescon du fait d'un conflit avec les Arara (Tastevin, 1928:208-209).

En 1914, Tescon fut assassiné par les Indiens Arara, ce qui entraîna la dispersion du groupe. Selon la mémoire des Arara, parce que Tescon a battu sa femme Arara et menacé ses proches, ils ont déclaré la guerre contre le groupe de Tescon dans la région de Riozinho da Liberdade, ce qui a entraîné sa mort. Après cet affrontement, il y eut d'autres guerres provoquées par les Indiens dirigés par Tescon, dans le but de venger sa mort, ce qui conduisit les Arara à migrer vers les environs des rios Bagé, Tejo, Gregório et Riozinho Cruzeiro do Vale. Les Arara se sont installés sur les rives du Riozinho Cruzeiro do Vale et du rio Valparaíso probablement après la mort de Tescón en 1914, et ils ont migré plusieurs fois, jusqu'à ce qu'ils soient situés dans les années 1920 dans les régions du caoutchouc de Cruzeiro do Vale et Humaitá. Même si la région était divisée en zones de caoutchouc, le groupe n'est pas resté figé dans une seule localité, car il continuait à se déplacer le long des rioss Valparaíso, Riozinho Cruzeiro do Vale, Riozinho da Liberdade et Bagé.

A cette période, une partie des Arara, également appelée dans l'historiographie Ararauás et Ararapinas, vivait sur les rives des rios Humaitá, affluent du Muru, Turunaia, Tauari et Embira (maintenant Envira). Dans l'intervalle, il n'est pas possible d'affirmer, sur la base d'informations orales et écrites, que ces Arara ont rejoint plus tard ceux qui vivaient dans l'igarapé Forquilha. Selon la mémoire orale des Arara, ils se trouvaient dans la région de Riozinho da Liberdade et après plusieurs migrations, ils se sont installés à Riozinho Cruzeiro do Vale. Au cours de ces migrations, il y eut de nombreuses guerres intertribales établies par les Arara, qui prirent fin après l'insertion des Arara dans l'entreprise de caoutchouc.

Afin d'avoir les Arara comme force de travail, les "patrons" ont sponsorisé plusieurs "correrias" (recrutement violent du travail esclave), utilisant quelques "antiguos" (ancêtres) Arara comme agents du processus d'insertion du groupe dans les activités productives des ouvriers du caoutchouc. Ces anciens sont fortement présents dans la mémoire des Arara, et sont des références de l'identité du groupe et du territoire occupé depuis des temps immémoriaux. L'information sur les "anciens", en général, est liée aux "correrias", aux guerres intertribales, à la parenté, à l'organisation sociale, aux coutumes traditionnelles, aux pratiques de sécession et aux migrations du groupe à travers un vaste territoire qui comprenait les régions des bassins des rios Liberdade, Gregório, Bagé, Cruzeiro do Vale, Tejo, Humaitá et Envira.

Tout au long de la seconde moitié du XXe siècle, les Araras ont été sous la domination des patrons, migrant constamment à la recherche de meilleures conditions de vie dans les zones de caoutchouc de la région, qui ont affecté leur ancien territoire, notamment Valparaíso, Russas, Nilo, Humaitá et Concordia. En raison des maladies et des représailles des mécènes, certains Arara qui vivaient près du rio Bajé ont migré, dans les années 1970-1980, vers la région de Riozinho Cruzeiro do Vale et le rio Valparaíso, où plusieurs familles Arara étaient établies. Pendant cette période, ils ont commencé à revendiquer leurs droits territoriaux et en 1985, la terre indigène Arara de l'Igarapé Humaitá a été identifiée et délimitée.

Après avoir garanti une partie de leur territoire, plusieurs familles qui étaient sous la domination des patrons, dispersées par les rios Liberdade et Bagé, ont préféré les abandonner pour vivre avec leurs proches sur le territoire indigène ou dans des zones proches. Quand, en 1994, les anthropologues du groupe de travail de Porter (1 204/93) se trouvaient dans la région, il n'y avait plus de familles Arara dans le Riozinho da Liberdade, mais plusieurs vivaient en dehors des limites de la terre indigène, dans la région de l'igarapé Grande, tributaire du rio Valparaiso, ainsi que de nombreuses autres dans la ville de Cruzeiro do Sul. Avec l'objectif d'insérer une parcelle de territoire qui n'était pas envisagée auparavant, les Arara ont commencé à revendiquer, tout au long de la décennie 1990, l'expansion des terres autochtones occupées par le groupe, qui n'ont été fréquentées qu'en l'an 2000, avec la réalisation des études anthropologiques d'identification et délimitation du territoire.

Le 19/12/2001, l'approbation des études d'identification des terres par la Funai (fondation de l'indien) a été publiée au Journal officiel de l'Union et, le 04/12/2002, le décret déclaratoire du Ministre de la Justice a donné aux Indiens la possession permanente.

traduction carolita d'un extrait de l'article sur les Arara Shawadawa du site pib.socioambiental.org

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Organisation sociale et politique

Pour ce peuple il n’existe pas de données sur les moitiés linéaires, les groupes de résidence, le mariage préférentiel et les familles étendues ou nucléaires, les comportements, la terminologie de la parenté et d’autres aspects liés à l’organisation sociale et la parenté dans une période antérieure à l’occupation du Haut Juruá par le front expansionniste du caoutchouc.

La maloca a été remplacée par les dirigeants indigènes par des maisons, 3 par village. Il n’y a pas d’uniformité des familles élargies dans chaque village.

Ils ont dû procéder à une réorganisation de la parenté du groupe pour modifier le modèle patrilinéaire caractéristique de la famille linguistique pano dans le but de devenir des descendants de ces anciens également appelés Arara.

Les hommes Arara n’ont qu’une seule épouse, autrefois pour se marier l’homme devait disposer d’un fusil de chasse pour aller chasser et avoir un champ à planter pour subvenir aux besoins de sa femme. Il devait également construire une maisons et avant que celle-ci ne soit terminée l’épouse vivait chez son père.

Les mariages de nos jours sont encouragés chez les jeunes couples âgés de 13 à 16 ans ce qui favorise la croissance démographique.

Les plantations sont faites par les hommes et les femmes donnent un coup de main pendant la récolte.

Le manioc fournit la farine de manioc dont la préparation est une activité masculine. Le produit de la chasse et la farine de manioc constituent l’alimentation de base du peuple.

Les femmes s’occupent des taches domestiques ainsi que des soins aux jeunes enfants et aux animaux.

Les Arara sont organisés dans l’association du peuple Arara de l’igarapé Humaitá ou APAIH qui a pour but d’améliorer les relations sociales, économiques et culturelles avec la société environnante.

Les anciens sont toujours garants de la mémoire arara et les plus jeunes ont un intérêt considérable à apprendre les mythes et les rituels pratiqués par leurs ancêtres, plus intensément que par le passé.

Les rituels sont à présent réalisés à des moments précis.

Le mariri, une danse indigène qui existe chez d’autres groupes pano est pratiqué par les Arara pour maintenir la cohésion du groupe et mettre en valeur leur identité.

Le rituel du sinbu (liane qui entre dans la composition de l’ayahuasca) est pratiqué par certains seulement.

Le rituel de l’injection de lait de crapaud est pratiqué pour récupérer les qualités essentielles du chasseur, avec pour objectif la vision, l’audition et la chance.

Ils prennent le crapaud campô et en retirent avec un instrument épais le « lait » qui réside dans son corps. Ils brûlent 2 à 3 points circulaires sur la peau du chasseur avec une cigarette et y introduisent le lait. Cela génère des vomissements et des excrétions qui sont stimulés par la consommation de caissuma (une boisson à base de manioc fermenté) avant l’injection. Le lendemain le chasseur a plus de compétences et d’efficacité à la chasse. Ce lait de crapaud a également d’autres propriétés médicinales intéressantes pour les Arara.

La chasse, la pêche, l’agriculture et la cueillette ont subi des modifications suite aux contacts avec les blancs.

L’arc et les flèches ont été remplacés par des armes à feu, pour pêcher ils adopté les hameçons et les lignes en nylon ainsi que les filets, pour l’agriculture ils ont introduit des instruments en fer, houes, haches….

Ils élèvent des animaux pour la consommation et la vente sur le marché. Les porcs sont vendus à Porto Valter. L’argent obtenu est reconverti en biens essentiels (sel, sucre, médicaments, poudre à canon, plombs).

La collecte est toujours une source alimentaire importante et les connaissances végétales se transmettent de génération  en génération.

L’agriculture de coivara (une technique de plantation) permet de planter plusieurs types de plantes et les cultiver successivement : manioc, maïs, bananes, canne à sucre, haricots, riz, igname, patate douce, tabac, poivre.

Ils ont introduit depuis peu dans leurs cultures, celle du pupunha ou palmier pêche (palmier indigène amazonien) et du guarana.

Ils fabriquent toujours un peu d’artisanat utilitaire, des ornements et des armes de chasse et de pêche et un artisanat pour la vente surtout constitué de bijoux.

Source : pib.socioambiental.org

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Peuples originaires, #Arara Shawadawa, #Brésil

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