Brésil – Le peuple Kaingang
Publié le 9 Septembre 2019

Peuple autochtone du Brésil vivant dans plus de 32 Terres Indigènes (T.I) des états de Paraná, Santa Catarina, Rio Grande do Sul, São Paulo.+
Population : 45.620 personnes (2014)
Autodésignation : kanhgág, kaingang
Selon Teschauer (1927) les Guyanás de la côte Atlantique seraient les ascendants des Kaingang. Les dénominations guayaná, goyaná, goainaze et wayanaze seraient des noms donnés aux Kaingang dans cette région.
Langue : kaingang de la famille des langues macro-jê.
Il y a 5 dialectes :
- São Paulo (SP) entre les rios Tietê et Paranapanema.
- Paraná (PR) entre les rios Paranapanema et Iguazú.
- Dialecte central (C) entre les rios Iguazú et Uruguay dans l’état de Santa Catarina.
- Dialecte du sud-ouest (SO) au sud du fleuve Uruguay et à l’ouest du rio Passo Fundo, dans l’état de Rio Grande do Sul.
- Dialecte du sud-est (SE) au sud du fleuve Uruguay et à l’est du rio Passo Fundo.
Terres Indigènes
Santa Catarina

Kaingang de Santa Catarina revendiquant des droits territoriaux à Brasília. Foto: André Dusek/ AGIL, 1984
- T.I Aldeia Kondá – Réservée – 2300 hectares, 373 personnes. Ville Chapecó.
- T.I Ibirana- La Klãnõ – 37.018 hectares, 2057 personnes. Homologuée. Villes : Doutor Pedrinho, Itaiópolis, José Boiteux, Vitor Meriles. Partagée avec les Guaraní ñandeva , les Guaraní Mbya et les Xokleng.
- T.I Palmas – 3800 hectares, 755 presonnes. Homologuée. Villes : Abelardo Luz, Palmas.
- T.I Toldo Chimbangue – 988 hectares, 531 personnes. Homologuée. Ville : Chapecó.
- T.I Toldo Chimbangue II – 954 hectares, 84 personnes. Homologuée. Ville : Chapecó. Partagée avec les Guaraní ñandeva , les Guaraní Mbya.
- T.I Toldo Imbu – 1965 hectares, 381 personnes. Déclarée. Ville : Abelardo Luz.
- T.I Toldo Pinhal – 4846 hectares, 189 personnes. Déclarée. Villes : Arvoredo, Paial, Seara.
- T.I Xapecó – 15.623 hectares, 5338 personnes. Homologuée. Villes : Abelardo Luz, Entre Rios, Ipuaçu. Partagée avec les Guaraní Mbya.
- T.I Xapecó Glebas A et B – 660 hectares, 845 personnes. Déclarée. Villes : Abelardo Luz, Entre Rios, Ipuaçu.
Paraná

Groupe Kaingang d e la TI Apucaraninha dansant au Centre Culturel de Londrina (PR). Foto: Kimiye Tommasino, 2000.
- T.I Apucarana – 5575 hectares, 1752 personnes, réservée. Ville : Tamarana.
- T.I Barão de Antonina I – 3751 hectares, 460 personnes. Homologuée. Ville : São Jerônimo do Serra. Partagée avec les Guaraní ñandeva.
- T.I Faxinal – 2043 hectares, 683 personnes. Homologuée. Ville : Cándido de Abreu.
- T.I Ivaí – 7306 hectares, 1552 personnes. Homologuée. Villes : Manoel Ribas, Pitanga.
- T.I Mangueirinha – 16.375 hectares, 765 personnes. Réservée. Villes : Chopinzinho, Coronel Vivida, Mangueirinha.
- T.I Marrecas – 16.839 hectares, 665 personnes. Domaine indigène. Villes : Guarapuava, Prudentápolis, Turvo. Partagée avec les Guaraní ñandeva.
- T.I Queimadas – 3077 hectares, 610 personnes. Homologuée.
- T.I Rio das Cobras – 18.682 hectares, 3250 personnes. Homologuée. Villes : Espigão alto do Iguaçu, Nova Laranjeiras.
- T.I São Jerônimo da Serra – 1339 hectares, 674 personnes. Homologuée. Ville : São Jerônimo da Serra. Partagée avec les Guaraní ñandeva.
- T.I Tibagy/Mococa – 859 hectares, 155 personnes. Homologuée. Villes : Ortigueira.
- T.I Yvyporã Laranjinha – 1238 hectares, 184 personnes. Déclarée. Villes : Abatiá, Cornélio Procópo, Ribeirão do Pinhal, Santa Amélia. Partagée avec les Guaraní ñandeva.
Rio Grande do Sul

Kaingang de Iraí (RS). Foto: Vilaine Capellari, 1994.
- T.I Borboleta – 632 personnes, identifiée – Ville : Espumoso.
- T.I Cacique Doble – 4426 hectares, 815 personnes. Homologuée . Ville : Cacique Doble. Partagée avec les Guaraní ñandeva et les Guaraní Mbya.
- T.I Carazinho – 75 personnes, identifiée. Ville : Carazinho.
- T.I Carreteiro – 602 hectares, 197 personnes. Homologuée. Ville : Agua Santa.
- T.I Estrela – 25 hectares, 125 personnes. Réservée. Villes : Caxias do Sul et Estrela.
- T.I Guarita – 23.406 hectares, 5776 personnes. Homologuée. Villes : Erval Seco, Redentora, Tenente Portela. Partagée avec les Guaraní ñandeva et les Guaraní Mbya.
- T.I Inhacorá – 2843 hectares, 1133 personnes. Homologuée. Ville : São Valério do Sul.
- T.I Kaingang de Iraí – 280 hectares, 644 personnes. Homologuée. Ville : Iraí.
- T.I Lageado do Bugre – 112 personnes. Identifiée ou en cours.
- T.I Ligeiro – 4565 hectares, 1453 personnes. Homologuée. Ville : Charrua.
- T.I Mato Castelhano –Fág TY KA – 3567 hectares, 304 personnes. Identifiée mais sujet à contestation. Ville ! Mato Castelhano
- T.I Monte Caseros – 1112 hectares, 568 personnes. Homologuée. Villes : Ibiraiaras, Muliterno.
- T.I Morro do Osso – 115 personnes, identifiée.
- T.I Morro Santana – 19 hectares, réservée. Ville : Farroupilha.
- T.I Nonoai – 193830 hectares, 2638 personnes. Réservée. Villes : Alpestre, Gramado dos Loureiros, Nonoai, Planalto, Rio dos Indios. Partagée avec les Guaraní ñandeva et les Guaraní Mbya.
- T.I Nonoai rio da Várzea – 16.415 hectares, 548 personnes. Homologuée.
- T.I Novo Xengu – 135 personnes, identifiée. Villes : Constantina, Novo Xingu.
- T.I Passo Grande do rio Forquilha – 1916 hectares, 1008 personnes. Déclarée. Villes : Cacique Doble, Sananduva.
- T.I Por Fi Ga – 8 hectares. 128 personnes. Réservée. Ville : São Leopoldo.
- T.I Rio dos Indios – 715 hectares, 143 personnes. Déclarée. Ville : Vicente Dutra.
- T.I Serrinha – 11.950 hectares, 1760 personnes. Réservée. Villes : Constantina, Engenho Velho, Ronda Alta, Três Palmeiras.
- T.I Ventarra – 772 hectares, 196 personnes. Homologuée, Ville : Erebago.
- T.I Votouro – 3041 hectares, 1055 personnes. Homologuée. Villes : Benjamin Constant do Sul, Faxinalzinho.
- T.I Votouro –Kandorá – 5977 hectares, 176 personnes. Identifiée. Villes : Benjamin Constant do Sul, Faxinalzinho.
São Paulo
- T.I Icatu – 301 hectares, 148 personnes, homologuée. Ville : Bráuna. Partagée avec les Terena.
- T.I Vanuire – 709 hectares, 177 personnes. Homologuée. Villes : Arco Iris, Tupã. Partagée avec le peuple Krenak.

Les 30 terres indigènes ne représentent qu’une petite parcelle de leurs territoires traditionnels répartis sur les 4 états et la situation des communautés présente des conditions variées. Dans tous les cas la structure sociale et les principes cosmologiques sont toujours présents et actualisés dans les différentes situations qu’ils traversent.
L’histoire des contacts entre les Kaingang et les colonisateurs européens commence au XVIe siècle lorsque des groupes de la côte Atlantique rencontrent les premiers portugais On ne sait pas s’il s’agissait des ancêtres des Kaingang.
Même si la grande majorité des indigènes réduits au cours des XVIe et XVIIe siècles faisaient partie de l’ethnie Guaraní, il est connu que des groupes ancestraux des Kaingang actuels ont été réduits à Conceição dos Gualachos sur les rives du rio Piquiri à Incarnación.
Les armes
Autrefois ils fabriquaient des armes de guerre et de chasse, des tissus en fibres, des paniers de tacuara de taille et formes différentes, des objets de décoration et des ustensiles en céramique et des contenants en calebasses.
Les armes de guerre étaient principalement des arcs (uy) avec des flèches (dou), des lances (urugurú). Les pointes de flèches étaient en os de signe (alouatta fusca) et plus tard elles seront en fer quand ils en obtiendront des blancs.
Les arcs étaient construits en bois de tabebuia chrysantha, ils mesuraient de 2.10 m à 2.40 m voire plus.
De nos jours ils fabriquent toujours des arcs de fonction décorative pour les vendre comme souvenirs sur le marché.
Ils n’organisent plus de guerres évidemment et quand ils chassent ils se servent de fusils.

Instruments de musique
C’est surtout lors du rituel du kikikoi sur la Terre Indigène Xapecó que les instruments de musique traditionnels sont utilisés. Ce sont des cornes de bœuf ou de tacuara (oaquire), des flûtes en tacuara (coqué), des maracas (xii, xik-si), des sifflets en tacuara également.
Ci-dessous un lien vers un article complémentaire
Le rite comme contexte de la mémoire des origines
https://journals.openedition.org/assr/12552#tocto1n1
source : pib.socioambiental.org

Ces "hommes de la forêt" ont développé leur culture à l'ombre d'Araucaria brasilensis, dont ils se nourrissaient des pignons de pin.
Au Brésil, les forêts les mieux préservées sont entretenues par les indigènes.


Le Kiki, le rituel d'adoration des morts, a lieu à la demande des proches de la personne décédée au cours des années précédentes.
La photographie correspond aux préparations faites sur la Terre Indigène Xapecó (état de Santa Catarina).

Kaingang d'Ivaí (Rio Grande do Sul). Photo : Vilaine Capellari, 1994 (pib.socioambiental.org)

Famille Kaingang de Passo Fundo (Rio Grande do Sul). Photo : Musée des Indiens, 1922 (pib.socioambiental.org)
traduction carolita du site Pueblos originarios.com

Família kaingang fazendo fogo de chão na TI Apucaraninha (PR). Foto: Kimiye Tommasino, 1999.
Organisation sociale et politique
En conséquence des influences profondes produites par l'histoire violente à partir de la dynamique développée entre la population indigène et les colons blancs, des analyses de l'organisation sociale et politique des Kaingang seront développées à partir de la présentation de ce que nous avons convenu d'appeler le "modèle traditionnel " et le "modèle actuel". Plutôt que de mettre l'accent sur les différences, cette différenciation vise à fournir les outils permettant de comprendre les principes qui organisent la vie sociale kaingang.
Modèle traditionnel
Les Kaingang, ainsi que d'autres groupes de la famille linguistique macro-jê, se caractérisent par le fait d'être des sociétés sociocentriques qui reconnaissent des principes socio-cosmologiques dualistes, présentant un système de moitiés. Parmi les Kaingang, les moitiés originales de la société s'appellent Kamé et Kairu. Les archives des premiers conquérants des Campos de Guarapuaba suggèrent que les colonisateurs percevaient partiellement un tel mode d'organisation sociale. Les agents conquérants savaient que les Kaingang reconnaissaient certaines divisions sociales, puisque ces divisions résultaient de l'existence de groupes différents ayant des attitudes différentes envers les Blancs. Le père Chagas Lima (1812) procède ainsi en identifiant la "tribu" des Camés et des Votorões comme alliés et la tribu des Dorins comme rebelles au contact avec les blancs.
Le système des moitiés, en tant qu'articulateur de l'organisation sociale des Kaingang, produit des formes beaucoup plus complexes que celles identifiées par les premiers colonisateurs. Dans le mythe de l'origine recueilli par Telêmaco Borba (1882) il y a une version résumée de la cosmologie dualiste kaingang. Dans ce mythe, les héros culturels Kamé et Kairu produisent non seulement les divisions entre les hommes, mais aussi les divisions entre les êtres de la nature. De cette façon, et selon la tradition Kaingang, le Soleil est Kamé aussi bien que la Lune est Kairu, le pin est Kamé et le cèdre est Kairu, le lézard est Kamé et le singe est Kairu, etc. L'expression sociologique la plus forte de cette conception dualiste est le principe d'exogamie entre les moitiés. Selon la tradition Kaingang, les mariages doivent être célébrés entre des individus appartenant à des moitiés opposées ; les Kamé doivent épouser les Kairu et vice versa.
Si les mariages unissent idéalement des membres appartenant aux moitiés Kamé et Kairu, les enfants de ces mariages idéaux reçoivent la filiation de la moitié paternelle. Divers documents ethnologiques révèlent la présence d'ascendance patrilinéaire. Teschauer (1927), par exemple, affirme que, selon la tradition Kaingang, "l'enfant devait son existence exclusivement au père. La mère n'était que la dépositaire et la gardienne de la progéniture (...) la condition du père passait aux enfants et non celle de la mère " (Teschauer 1927:44). Malgré le modèle patrilinéaire de descendance, la forme traditionnelle de résidence chez les Kaingang est la matrilocalité, dans laquelle, après le mariage, le gendre commence à vivre dans la maison du beau-père. Ce mode de résidence est commun à tous les groupes Jê.
Comme nous l'avons vu, l'appartenance à une certaine moitié provient de la descendance paternelle. La ratification de cette identité se fait par le choix d'un nom pour le nouveau-né. La nomination parmi les Jê, et en particulier parmi les Kaingang, a été décrite comme un processus important pour l'établissement des identités sociales. Les héros mythologiques Kamé et Kairu eux-mêmes ont créé et nommé les êtres de la nature. Les noms appartenaient aux deux moitiés. Les enfants, une fois nommés, reçoivent leur identité sociale qui, avec la progéniture paternelle, sera leur marque distinctive. Contrairement à la progéniture, qui ne peut être modifiée, les noms peuvent être manipulés afin de protéger l'enfant contre les maladies ou autres malheurs.
Les principes socio-cosmologiques traditionnels et dualistes des Kaingang reposent sur une structure sociale fondée sur l'articulation d'unités sociales territorialement localisées, composées de familles entrelacées qui partagent des responsabilités cérémonielles, sociales, éducatives, économiques et politiques. La morphologie sociale des Kaingang suit des principes complémentaires et asymétriques liés aux principes dualistes. L'unité sociale minimale kaingang est le groupe familial composé d'une famille nucléaire (parents et enfants). Ces groupes familiaux font partie d'unités sociales plus larges que l'on peut appeler des groupes domestiques composés, idéalement, d'un couple âgé, de leurs fils et filles non mariés, de leurs filles mariées, de leurs gendres et petits-enfants. Ce groupe domestique n'occupe pas nécessairement la même pièce, mais le même territoire. D'après les récits historiques (XIXe siècle) et les observations récentes, nous pouvons affirmer que ces groupes domestiques étaient formés par des groupes de vingt à cinquante individus. Le groupe domestique est une unité sociale fondamentale dans la construction de la sociabilité kaingang puisque, grâce à la combinaison des règles de résidence matrilocale (résidence après le mariage dans la maison du père de l'épouse) et de descendance (paternelle), des hommes et des femmes de moitiés opposées coexistent au sein de ces unités, reproduisant d'une certaine manière les principes socio-cosmologiques de dualisme de moitiés. De nombreux auteurs affirment que c'est la dynamique établie entre beau-père et gendre qui est à la base de toute l'organisation politique des sociétés Jê et, aussi, celle des Kaingang.

En fait, selon les récits historiques, nous percevons que les groupes nationaux sont englobés dans deux autres grandes unités sociales : les groupes locaux et les unités politiques et territoriales. Les groupes locaux correspondent à l'articulation entre certains groupes nationaux qui, par des liens de parenté, entretiennent une relation de réciprocité mutuelle. Les unités politico-territoriales correspondent à leur tour à des sphères plus englobantes dans l'articulation entre les groupes locaux. La même asymétrie de statut postulée pour le groupe domestique (beau-père et gendre) se produit dans les relations entre les groupes locaux et les unités politiques-territoriales. Les grands chefs kaingang du XIXe siècle étaient, en effet, les chefs des unités politico-territoriales (põ'í bang) et entretenaient une relation de domination sur les chefs des groupes locaux (põ'í ; rekakê). Ainsi, les documents historiques décrivent le pouvoir de commandement absolu de chefs tels que Nonoai, Braga, Doble, Condá, Fongue et Nicafim sur de vastes territoires au nord-ouest du Rio Grande do Sul et à l'ouest de Santa Catarina. La population estimée de ces unités politico-territoriales au XIXe siècle se situait entre trois cent et cinq cents individus.
Modèle actuel
Tous les paramètres de l'organisation sociale mentionnés ci-dessus sont, d'une certaine manière, présents dans la construction de la sociabilité des Kaingang actuels. Nous pouvons percevoir qu'il y a une permanence claire des principes, en particulier dans ou qui se réfère aux règles de l'ascendance, de la résidence, de la production économique et de l'autorité politique.
La conception de l'ascendance reste opérante chez les Kaingang. Le même critère d'identité ethnique asa par le concept d'ascendance paternelle. Etre Kaingang signifie être le fils d'un père Kaingang. Dans les terres autochtones kaingang, il existe un nombre important d'individus classés comme métis (enfants de mariages entre kaingang et blancs), "mixtes" (enfants de parents de deux ethnies autochtones différentes telles que Kaingang avec Guaraníes ou Kaingang avec Xokleng), Indiens (blancs mariés aux femmes kaingang qui vivent assimilés comme membres de la communauté des épouses) ou croisés (selon les kaingang eux-mêmes, ces enfants sont définis comme des fils de mère indienne et de père indiens blanc qui ne parlent pas leur langue)
Une fois que la règle de résidence après le mariage est matrilocale, le père et le fils commencent théoriquement à vivre dans des résidences séparées après le mariage des enfants. Cette façon de partir n'empêche pas les parents et les enfants de maintenir des relations de solidarité, particulièrement visibles dans le travail aux champs. En effet, beaucoup de Kaingang prétendent que leurs enfants héritent des champs de leurs parents. De plus, il y a d'innombrables cas où les champs des parents et des enfants sont contigus. Nous percevons l'existence de la même règle en matière d'organisation politique ; il y a sans doute une récurrence dans la permanence des enfants dans les charges et positions occupées par les parents. D'après certains documents historiques et d'après les observations sur le terrain, il est courant que les enfants succèdent à leurs parents dans la position de chef.
La règle de la matrilocalité est maintenue comme principe structurant dans la constitution des groupes nationaux. Il est courant que dans les maisons construites très près l'une de l'autre, il y ait des femmes qui entretiennent des relations de consanguinité (sœurs, filles et petites-filles, par exemple) et des hommes par affinité (beau-père, beau-fils et beaux-frères). De toute évidence, toutes les familles ne sont pas organisées selon ce modèle, bien qu'il existe des documents historiques et ethnographiques qui prouvent que la matrilocalité constitue un modèle de résidence.

Il y a des cas où le mode de résidence n'est pas matrilocal. Dans ces cas, la forme de résidence la plus courante est la néolocalité, où le couple constitue un nouveau foyer. Même dans ces cas, ce sont les relations de parenté qui garantissent la socialisation de la nouvelle famille dans la communauté. Cela signifie que, bien que le modèle résidentiel présente des modifications par rapport au modèle traditionnel, les mécanismes de solidarité que constitue la parenté continuent de fonctionner comme une forme de stratégie de sociabilité autochtone. En effet, pour les Kaingang, la pire punition qu'ils peuvent recevoir est celle d'être chassés -le transfert, comme ils l'appellent eux-mêmes- du pays de leur famille. Les personnes transférées non seulement s'éloignent de leur nombril et de leurs morts, mais surtout, elles sont séparées de leurs proches et, à cause de cette action, elles souffrent d'innombrables privations.
Si nous restons attentifs et établissons une comparaison entre le modèle traditionnel et le modèle actuel de sociabilité des Kaingang, nous pouvons affirmer que la famille et les groupes domestiques du passé et du présent sont structurellement identiques. En d'autres termes, les groupes domestiques comprennent les groupes familiaux. Nous pouvons étendre cette comparaison et affirmer que les groupes locaux du passé correspondent aux groupes conformés au présent. Évidemment, il y a des différences entre ces deux groupes. Dans le passé, le modèle d'un groupe local était formé par des activités telles que la chasse, la cueillette, les guerres avec les voisins, les alliances tenues dans des événements rituels, entre autres activités. Actuellement, les groupes de solidarité partagent des croyances religieuses et des pratiques productives d'un autre ordre, bien qu'ils demeurent un groupe ayant sa propre identité sociale. Si nous sommes d'accord avec cette comparaison, nous pouvons avancer dans la compréhension des stratégies de sociabilité kaingang en affirmant que ces groupes de solidarité englobent des unités sociales plus petites (groupes domestiques et groupes familiaux) et, à leur tour, sont englobés par des unités sociales plus grandes. Dans le passé, nous avons convenu d'appeler ces unités sociales des unités politico-territoriales majeures ; dans le contexte actuel, nous avons identifié deux autres unités sociales qui sont englobantes, à savoir les villages et les terres autochtones.
Une telle structure sociale est visible à la fois dans la répartition des maisons et dans la répartition des familles. Cependant, c'est dans l'organisation politique du Kaingang que ce modèle de sociabilité est le plus clairement présenté à l'observateur. Les Kaingang, comme le soulignent un grand nombre d'études, ont une structure politique hautement hiérarchisée. Le poste le plus élevé de cette hiérarchie est occupé par le chef, suivi du vice-chef. Ce dernier n'est pas seulement un acteur secondaire dans la prise de décision du chef. En fait, ce poste jouit d'un grand prestige et ses attributions sont comparées à celles du chef. Dans le modèle traditionnel, selon les anciens, le chef et le vice chef devraient appartenir à des moitiés opposées ; cette règle est encore maintenue dans certaines terres Kaingang. Les Kaingang eux-mêmes le justifient : ce n'est qu'avec des individus appartenant à des moitiés opposées qu'il est possible de planifier des actions politiques ; en revanche, les sanctions ne peuvent être appliquées que par des individus appartenant à la même moitié. Il y a donc une conception de complémentarité entre ces positions.
Les attributions du chef et du vice chef impliquent à la fois la représentation de la collectivité avec les autorités du monde blanc et les décisions sur les différents aspects des dynamiques internes. Pour les Kaingang, en termes généraux, l'autorité politique de leurs chefs est directement liée à la capacité du cacique à représenter leur collectivité comme il se doit. À cette fin, ils s'attendent à ce que l'autorité de leurs chefs dépasse les limites de la terre autochtone. En d'autres termes, il est important que l'autorité indigène soit aussi une autorité dans le "monde blanc". Il existe de nombreux cas où les chefs combinent ces deux attributs et sont, en même temps, des chefs et des conseillers municipaux dans les municipalités voisines. La participation du chef et du vice-chef à la dynamique interne de la terre indigène est liée aux processus de prise de décision impliquant des aspects économiques, politiques, juridiques et éthiques. De telles décisions impliquent la participation d'autres autorités Kaingang, celles que l'on appelle généralement les leaderships, une sorte de conseil local. Outre le chef et le vice-chef, les autres membres des directions sont des personnes qui exercent des fonctions spécifiques, soit liées au contrôle social (appelés "soldats", "capos" ou "sergents"), soit liées aux processus décisionnels (appelés "capitaines" et "conseillers"). Ce sont des termes utilisés par les Indiens eux-mêmes. Dans une recherche menée entre 2000 et 2003, au cours de laquelle les structures politiques de dix terres autochtones Kaingang ont été analysées, Fernandes a constaté que, parmi ces Indiens, il y a, en moyenne, une autorité politique pour six familles (ou trente individus).
L'élection du chef se fait par le biais d'élections auxquelles participent les hommes de plus de quinze ans. Il s'agit d'un processus courant dans les terres autochtones kaingang ; dans les terres autochtones kaingang du Rio Grande do Sul, des élections sont organisées avec des partis identifiés comme étant le maïs et les haricots ou fèves. Les électeurs déposent un grain correspondant à leur candidat dans les urnes. Dans la terre indigène ligeiro, pendant les élections de l'an 2 000, un troisième candidat s'est présenté qui a utilisé du soja pour ceux qui voulaient voter pour lui. Théoriquement, le chef nomme ses successeurs politiques (vice chef et membres des directions). Bien que les élections soient une pratique consolidée dans la vie politique des Kaingang, les candidats au poste de chef font partie des familles les plus prestigieuses des terres autochtones.
Tout comme il existe une structure hiérarchique dans les positions politiques, il existe également une hiérarchie dans les processus de prise de décision. Les "soldats", les "capos" et les "sergents" sont responsables de la résolution de petits problèmes tels que les querelles internes, l'"ivresse", les accusations de petits vols et le manque de respect pour l'autorité. Les décisions sont prises en réunion, généralement devant la maison du "capitaine" du village. Dans les réunions, les délinquants exposent leurs motifs et les "soldats" (qui dans ce contexte sont appelés "chefs") discutent et exposent leurs motifs dans une tentative de conciliation. Les peines infligées aux contrevenants reconnus coupables varient. Dans le passé, les Kaingang se caractérisaient par des peines extrêmes pour les délinquants. La plus connue de ces punitions s'appelait "le tronc" dans lequel les pieds du délinquant étaient attachés. Après la création du Service de Protection des Indiens (Serviço de Proteção aos Índios - SPI), dans les années 1940, la pratique du "tronc" a été remplacée par l'emprisonnement dans les terres autochtones Kaingang. Aujourd'hui, cependant, des "troncs" sont produits dans certaines terres indigènes. Il y a des cas où les délinquants accusés de crimes graves sont soit attachés à un arbre (généralement assez longtemps pour "guérir" l'excès d'alcool du sujet), soit emprisonnés sans droit à l'hygiène et à la nourriture, ne reçoivant que de l'eau et même, dans les cas les plus graves, sont transférés dans une autre terre autochtone. Les peines, en moyenne, ne durent pas plus de trois jours. Dans les cas mineurs, les délinquants sont appelés à fournir des services à la collectivité, comme le nettoyage des routes et l'accès aux écoles ou aux postes de santé.
Les transferts se produisent dans des cas extrêmes, qui se produisent à l'occasion, et relèvent de la seule responsabilité du chef. Hypothétiquement, les transferts sont appliqués après qu'une personne, pour la troisième fois consécutive, a commis une infraction grave. Il est de notoriété publique, cependant, que le transfert est imposé, dans de nombreux cas, à des individus de l'opposition et à ceux qui critiquent constamment la politique locale. Il existe de nombreux cas de groupes familiaux qui, sous la pression du pouvoir politique interne, abandonnent la vie sur les terres autochtones et migrent souvent vers les centres urbains. Selon les membres d'un groupe de Kaingang qui a abandonné la terre indigène Xapecó et réside depuis huit ans dans le secteur périphérique de la ville de Florianópolis, les persécutions et les privations imposées aux opposants des dirigeants politiques poussent les sujets et les familles à abandonner la terre. C'est également le cas des familles qui ont abandonné la terre indigène Nonoai et construit un emã (village) au centre de la ville de Chapecó, dans l'état de Santa Catarina, en 1998 et, plus tard, en 2000, ont été transférées dans la zone rurale de la municipalité. Comme on peut le constater, les expulsions et les transferts sont une ressource très utilisée. Les exemples pourraient être multipliés.
traduction carolita d'un extrait de l'article sur les Kaingang du site pib.sociambiental.org