Equateur : La Nationalité Waranka
Publié le 15 Novembre 2018
Peuple autochtone qui fait partie de la nationalité Kichwa des hautes terres équatoriennes.
Ils vivent principalement dans les zones andines et rurales, dans la partie centrale de Bolívar, dans les cantons ci-dessous :
►Canton de Guaranda : paroisses Gabriel Inacio Veintilla, Facundo Vela, Guanujo, Salinas, San Simón, Simiatug, San Luis de Pambil
►Canton de Chillanes : paroisse de Chillances
►Canton de Chimbo : paroisse d’Asunción (Ansacoto)
►Canton d’Echeandia : paroisse d’Echeandia
►Canton d San Miguel : paroisse de San Pablo de Atenas
►Canton de Caluma : paroisse de Caluma

sur la carte n° 16

Langue : kichwa
Population : 17.000 personnes
Autre forme du nom : guaranga.
Waranka = mille en quechua
Les ancêtres appelaient les nouveau-nés guagua chigüil ou chigüillitos et les enveloppaient dans une ceinture en les emmaillotant très serré.
Le peuple Waranka est actuellement dans un processus de récupération idéologique et culturelle réclamant ses droits et son territoire.
Histoire
Ils sont traditionnellement apparentés au peuple autochtone Puruhá avec lesquels ils ont longtemps été confondus. Ce peuple vit dans la région voisine de Chimborazo. Ils sont également apparentés au peuple Tomabela installé entre Bolívar et Tungurahua.
Le peuple Waranka serait originaire de la tribu pré-inca deq Chimbus ou Chimbos dont on mentionne la légende de Chimbo Cando connu comme le chef Guaranga qui aurait dirigé la résistance contre l’invasion Inca venant du Pérou, à l’endroit où se trouve actuellement la ville de Guaranda.
Après la conquête inca, plusieurs femmes et hommes auraient été déplacés comme mitimaes vers les environs du lac Titicaca au Pérou. Après la fin de la conquête espagnole et après 2 siècles de vie républicaine en Equateur, ce peuple (comme le reste des autochtones de la Sierra) serait le résultat d’un métissage indigène entre Chimbos, Tomabelas, Puruháes et Incas qui a adopté le kichwa comme langue et symbole culturel.

Organisation sociale
L’organisation sociale est basée sur la famille, la plupart des familles sont nucléaires bien que la présence de familles élargies soit observée. Le peuplement est semi-concentré et dispersé dans les zones urbaines ou les centres paroissiaux. L’autorité maximale est l’assemblée communale précédée du chapitre.
Les maisons sont fabriquées avec du cangahua (une roche sédimentaire) et de la paille, parfois en terre. Elles ne comportent qu’une seule chambre à coucher.
Les maisons traditionnelles de Simiatug sont construites en tapial, en pisé avec des toits de chaume ou de zinc et peu de matériaux mixtes. Chaque famille possède 2 maisons, une pour la cuisine et l’autre pour la chambre à coucher et la cave.

Tenue vestimentaire
Les hommes portent des ponchos de laine de mouton tissés sur des métier à tisser de ceinture et un pantalon de couleur foncée.
Les femmes portent un large anaco (jupe) avec des plis à la taille, tenu par une ceinture multicolore, une blouse blanche, une couverture attachée avec un tupu (sorte de broche), des boucles d’oreilles et des colliers de perles ainsi qu’un chapeau blanc.
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Festivités
Le festival de carnaval est l’une des attractions touristiques les plus importantes. Le carnaval a comme signification la célébration de la Pachamama afin de la remercier pour les produits reçu tout au long de l’année. C’est le reflet de la couleur et de l’interculturalité de Bolívar. C’est une culture qui n’est pas celle d’un musée, une culture vivante, la carishina représentative de leur Pawkar Raymi, une fête fleurie dans laquelle les hommes se déguisent en femmes, une tradition transmise de génération en génération se manifestant en février ou en mars.
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La Pachamama
La Pachamama est tout ce qui nous entoure, tout ce que nous voyons. C’est la Terre-Mère qui nous nourrit, qui nourrit chaque être humain, dans laquelle nous avons la vie, nous avons l’eau qui est aussi composée du soleil, qui est le soleil-père qui nous donne la chaleur avec ses rayons, que nous sentons, nous nous sentons vivants, nous sentons cette énergie de pouvoir respirer, de vivre, de se sentir latent dans ce monde et d’être qui nous sommes, de montrer que nous sommes de lunes et de montrer au monde qui nous sommes (Muguicha, 2016)
Economie
La principale activité économique du peuple Waranka est l’agriculture, l’élevage et l’artisanat et tourisme. Les cultures sont celles du maïs, des légumes, des céréales. Ils produisent des objets artisanaux ; la paroisse de Salinas de Tomabelas est connue pour sa production agro-industrielle de produits laitiers et de chocolat distribués à l’échelle nationale et internationale.
Un modèle d’autogestion existe à Salinas avec Funorsal, une organisation de second degré devenue force motrice d’un processus de développement agro-industriel communautaire.
La minga
C’est l’une des traditions du peuple qui est une organisation communautaire au sein de laquelle les adultes, les jeunes et les enfants travaillent ensemble dans le cadre des traditions et des coutumes indigènes qui subsistent au sein du peuple Waranka. Cette tradition agricole implique la récolte de l’orge et du blé (à la fin du mois de juillet au début du mois de juin). C’est une expression patrimoniale qui reflète leur pensée et leur idéologie. La moisson est accompagnée de chants « jaylli » dont chaque phrase ou séquence a un ton différent, parfois accompagné de churros ou de cornes. Ce chant est utilisé pour que les mingueros ne soient pas distraits. Ils font des pauses pour se reposer, boivent de la chicha ou déjeunent. Après les récoltes, ils fabriquent les « barbas » puis procèdent au battage pour obtenir le produit final qui est le grain d’orge ou de blé.

Alimentation
Un plat de base est le cochon d’inde aux pommes de terre.
Boissons :
Chicha de jora : quelques semaines avant le carnaval , les familles commencent à préparer le pot en argile pour y mettre à fermenter le chicha, cette boisson traditionnelle étant servie à cette époque.
L’oiseau bleu est un spiritueux typique de la province de Bolívar élaboré à partir d’alcool de canne à sucre avec une teneur en alcool de 30°.
Traditions
Le chamico
Ce rituel consistait à fumer ce que les Waranka appellent « tabaco de altura ». un cercle de feu était tracé au sol puis, chaque participant au rituel fumait la préparation hallucinogène.
Le mariage
Selon la tradition, lorsqu’un couple décidait de s’unir, la femme tissait une ceinture (le chumbi) avec des broderies spéciales et la portait le 21 mars pour la montrer pendant les danses du festival indiquant sa volonté de s’unir. Dans les broderies symboliques, a ceinture reflétait les souhaits souvent des jeunes femmes : le nombre d’enfants qu’elles désiraient avoir et leur position, le sexe des enfants, ce qu’elles voulaient faire, leur future partenaire qui ne devait pas être de leur communauté pour éviter les problèmes de consanguinité….
Après le mariage, l’homme s’installait dans la communauté de la femme.
Ataw Hualpa
Selon les croyances ancestrales, dans le rituel Ataw Hualpa (les créateurs choisis), un rituel qui est toujours pratiqué, il est dit qu’à chaque génération, un garçon ou une fille nait avec une grande force énergétique distinctive. Lorsque la naissance des bébés a lieu, on recherche un animal domestique qui est né en même temps que le bébé et s’il semble fort et robuste, cela indique que le « guagua » a un « bon dos », c’est-à-dire qu’il porte chance et que l’animal né portera également le nom de guagua. Ce concept d’énergie est utilisé depuis des milliers d’années et il est caractéristique des curacas.
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Histoire relative à la nationalité Kichwa des hautes terres équatoriennes
Cette nationalité s’est implantée dans tout le haut plateau équatorien y compris dans d’autres régions en raison de mouvements migratoires des différents peuples qui la composent.
Les Kichwa des Hautes terres équatoriennes se sont implantés dans les provinces suivantes :
►Carchi où était installé le peuple Pastos ;
►Imbabura : implantation des nationalités Otavalo, Karanqui, Natabuela et Kayambi ;
►Pichincha : la nationalité Kitucara ;
►Cotopaxi : installation du peuple Panzaleo ;
►Tungurahua : installation des nationalités Chibuleo, Salasaca et Kisapincha ;
►Bolivar : la nationalité Waranka ;
►Chimborazo : les Puruhás ;
►Provinces de Cañar et d’Azuay : installation de la nationalité Kañari ;
►Loja : implantation des nationalités Saraguro et Paltas.
Ces peuples sont liés par la langue kichwa, par un territoire qui leur a été confisqué pendant l’époque coloniale espagnole, par une cosmovision commune concernant la terre et l’univers et par des liens commerciaux existant bien avant l’arrivée des Espagnols.
Histoire
Ce sont des habitants immémoriaux de ces hauts plateaux équatoriens, ils étaient organisés en seigneuries et confédérations ethniques qui ont développé une culture fondée sur la propriété communautaire et le principe de réciprocité. Hélas, leur développement a été bouleversé par l’arrivée des Espagnols en 1492. Une nouvelle forme de production où la propriété qui appartenait à ces peuples est devenue la propriété absolue de la monarchie et des Espagnols. Un nouveau mode de vie arriva également avec les conquérants. Les Kichwas doivent quitter leurs territoires d’origine et partir à travers l’Amérique du sud, procédé qui permettait de contrôler toute forme de rébellion de leur part.
Ils furent soumis au travail forcé dans les mines, les ateliers de construction, la construction de routes et de villes coloniales et d’encomiendas. Ce travail se déroulait dans des conditions inhumaines. Par exemple, pour les hommes autochtones qui travaillaient dans les mines cela signifiait tout simplement la mort.
L’encomienda* était le point d’articulation de la société coloniale, moyen permettant le contrôle du travail indigène, permettant aux espagnols de recevoir des tributs des communautés indigènes, d’organiser la production agricole et artisanale, de contrôler la domination idéologique par le biais de l’évangélisation.
Les obrajes* constituaient le travail obligatoire s’adressant aux femmes qui devaient migrer vers les centres de production textile en tant que mitayos. Ce travail était également réalisé dans des conditions insalubres provoquant souvent le mort de femmes indigènes.
Les travaux des indigènes dans la construction de routes et de bâtiments dans les villes coloniales ont permis aux peuples de transposer leur savoir-faire architectural et de perpétuer leur relation avec la nature dans les églises (décoration intérieure basée sur leur cosmovision). Cette opportunité a néanmoins côuté la vie à nombre d’entre eux.
Entre 1810 et 1830, époque de l’indépendance des colonies de la domination espagnole, on note aucun changement dans les circonstances d’exploitation et de soumission des peuples y compris dans les 70 premières années de la République.
Après la révolution libérale le 5 juillet 1895 à laquelle participèrent beaucoup d’indigènes, d’importants changements auront lieu dans la législation relative à la terre et à la situation des indigènes. La collusion entre partis, l’emprisonnement pour dettes, ‘intervention de l’église dans les affaires de l’état sont éliminés et les grands domaines appartenant à l’église sont expropriés et transférés à la propriété publique.
L’élimination du concertaje* (accord agricole) conduit à la libération de la main d’œuvre indigène dont la plupart migrent vers la côte pour offrir leur force de travail. Ils vont tomber dans une autre forme d’assujettissement avec les propriétaires des plantations.
Le huasipungo* était une autre forme de soumission au travail des peuples indigènes. Cette pratique est née avec la libération des indigènes du concertaje, une pratique consistant à donner un morceau de terre à l’indigène en échange de quelques journées de travail dans la grande hacienda.
Le huasipungo donne naissance à 2 formes de groupement indigène :
►Les huasipunguerons et les roturiers libres.
Les premiers sont situés à l’intérieur du domaine, les seconds dans les centres paroissiaux religieux au marché.
Dans ce nouvel ordre de propriété foncière, il y a eu une augmentation démographique des communautés indigènes donnant lieu à des migrations de la campagne vers les villes, à différente soulèvements exigeant le droit à la terre, des luttes qui, dans les années 60 aboutirent à la première réforme agraire qui va bénéficier à très peu de huasipungueros.
Les années 70/80 sont consacrée par ces personnes à la constitution d’une organisation régionale garantissant et dirigeant leurs luttes, ECUARUNARI.
Le niveau de sensibilisation et d’organisation s’accroit parallèlement aux soulèvements pour la reconnaissance de ces peuples.
Au sujet des obrajes :
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obrajes dans le corregimiento de Quito https://ealincangouce.wixsite.com/historia-del-ecuador/get_involved
Il s'agissait d'usines textiles de laine, de coton et de cabuya (agave), qui produisaient également des espadrilles, des sacs, des mèches, des selles, des chapeaux, de la poudre à canon, etc. et où les indigènes étaient obligés de travailler, jour et nuit, souvent jusqu'à leur mort.
« Chaque Indien travaillait 312 jours par an, et le maximum qu'ils pouvaient gagner pendant cette période était de 40 pesos, chacun pesant 8 réaux... Dans chaque Obraje, il y avait une prison, des fers, des chaînes et des coups de fouet. Les enfants ont été cruellement maltraités. De leur salaire étaient déduits les impôts et la pension synodale du prêtre. L'Indien payait sa nourriture et ses vêtements ; et bien souvent même des médicaments étaient déduits de leurs misérables salaires, qui leur étaient vendus à un prix très élevé, même lorsque l'excès de travail les laissait avec quelque maladie... Les Indiens étaient épuisés en peu de temps : le travail auquel ils n'étaient pas habitués était la cause de la mort de beaucoup d'entre eux" (Roberto Andrade.- Histoire de l'Équateur, volume I p. 109) .
https://www.enciclopediadelecuador.com/obrajes/
Au sujet de l’encomienda
Système d'« esclavage » que les Espagnols exerçaient sur indigènes d'Amérique. L'encomienda était une ancienne institution espagnole du Moyen Âge, et consistait en un territoire qui fournissait des revenus à un noble. En Amérique, cela a changé d'une manière vraiment dramatique et est devenu simplement « une disposition royale par laquelle le roi d'Espagne donnait des terres et des Indiens à perpétuité, comme prix, en récompense des souffrances endurées par ses soldats qui ont étendu les domaines de l'Espagne aux Antilles. La terre reçue à perpétuité était appelée Encomienda ; le noble espagnol qui la recevait pour avoir tué et exploité des Indiens était l'Encomendero et la mine de richesse et la source d'exploitation dans l'Encomienda, c'est-à-dire l'Indien, était appelé Encomendado » (M. Navas Jiménez.- Histoire, géographie et éducation civique ; n° 2, p. 41) . L'encomienda obligeait les Indiens à payer de lourds tributs aux encomenderos, et ceux-ci, en réciprocité théorique, à christianiser l'Indien ; le défendre des « cannibales » ou des attaques d’autres peuples ; et leur apprendre les travaux agricoles et comment laver l'or.
Ces encomiendas ont finalement laissé les Indiens dans une grande misère. (https://www.enciclopediadelecuador.com/encomienda/)
Sur le concertaje et le huasipungo
Les ouvriers ou « péons » vivaient dans les haciendas avec leurs familles. Ils « passaient des accords » (des engagements) avec les propriétaires, les « patrons » pour les
travaux. C'est pourquoi on les appelait « conciertos ». Ils avaient un salaire, mais ils ne le recevaient jamais, car ils étaient endettés envers leurs patrons. Les ouvriers demandaient à leur employeur des avances de fonds pour payer les impôts et les obligations religieuses, comme les baptêmes, les mariages, les enterrements et autres.
La relation entre les peones et les patrons n'était libre qu'en théorie. En réalité, il s’agissait d’une forme de travail obligatoire, puisque l’employeur pouvait emprisonner le travailleur pour lui faire payer la dette. Parfois, les péons recevaient une portion de terre du propriétaire, le « huasipungo », qu’ils travaillaient avec leur famille.
C'est pourquoi on les appelait « huasipungueros ». Les dettes ne s'arrêtent pas même avec la mort du travailleur concerté. Elles passèrent à sa veuve et à ses enfants. L'ouvrier était soumis au patron, qui avait le soutien du clergé et des autorités de l'État. Le curé prêchait la soumission et faisait payer des services religieux qui perpétuaient la dette. Le lieutenant politique de la paroisse et d'autres autorités pouvaient envoyer en prison ceux qui ne payaient pas leur dette Le concertatje a eu lieu dans tout le pays, mais il a été plus fort dans la Sierra. (https://themeeveryday.blogspot.com/2011/09/el-concertaje.html)
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Sources : CONAIE.org, gruposetnicos cu.blogspot.com, wikipédia en espagnol ; Waranka, cultura multiétnica, comunicación y tradiciones. Tras la pista de sus orígenes, revistas.ute.edu.ec.