L'Organisation de la Société Civile Las Abejas d'Acteal et les membres du Congrès National Indigène rejettent fermement la privatisation de l'eau.

Publié le 5 Juillet 2018

Organisation Société Civile Las Abejas d'Acteal
Terre Sacrée des Martyrs d'Acteal
Municipalité de Chenalhó, Chiapas, Mexique.
22 juin 2018. 

Au Congrès National Indigène
Au Conseil Indigène de Gouvernement 
Aux défenseurs des droits de l'homme
Aux médias libres
Aux médias nationaux et internationaux
A la société civile nationale et internationale

Sœurs et frères :

Pendant que les partis politiques mènent leur campagne politique en racontant des mensonges et, comme d'habitude, de fausses promesses au peuple, Enríque Peña Nieto a profité de ce 5 juin pour privatiser plus de 300 bassins versants du pays, qui contiennent 55 pour cent des lacs et rivières du pays.

Le prétexte de Peña Nieto pour signer les 10 décrets est de prendre soin de l'eau pour l'avenir et d'éviter ainsi la surexploitation de l'eau, mais, en tant que peuple organisé, il ne nous trompe pas, en réalité ce sont des décisions de remettre l'eau à des sociétés transnationales qui ont toujours pillé notre pays, autorisées par les gouvernements à leur tour servile au système capitaliste de mort.

En tant que peuple Tsotsil, membres de l'Organisation de la Société Civile Las Abejas d' Acteal et membres du Congrès National Indigène (CNI), nous rejetons la privatisation de l'eau, parce que nous considérons cette ressource comme sacrée et non à vendre. L'eau n'est pas la création de l'être humain et mettre un prix dessus est absurde et irrationnel.

Les politiques entreguistas du mauvais gouvernement mexicain doivent à leur tour être arrêtées par l'organisation et le renforcement des modes de vie et de l'utilisation des ressources naturelles offertes par la Terre mère et avec respect, comme nos premiers parents nous l'ont enseigné.

Face aux privatisations des richesses de notre Mère Terre et de notre nation mexicaine, il est temps de renforcer nos organisations, il est temps de faire avancer la construction de nos autonomies, car ni un parti politique, ni un candidat à la présidence de la république, ni un gouverneur, ni un président municipal n'a la conviction ou l'honneur de défendre ces privatisations avec leur vie, comme nous les femmes et nous les hommes l'avons fait ; au contraire, ils font partie et sont complices de toute politique de capitulation dans l'histoire de ces gouvernements fantômes du système capitaliste de mort.

Avec la privatisation de l'eau par Peña Nieto et d'autres politiques qui violent nos droits humains et collectifs, nous réitérons notre condamnation et notre rejet catégorique de la "Loi de Sécurité Intérieure", comme nous l'avons déjà dit, il s'agit de semer la terreur, de contrôler la population civile, de violer légalement les droits humains des peuples organisés, comme, par exemple, de rejeter la privatisation de l'eau.

Dans ce milieu de campagnes électorales où beaucoup de gens placent encore leur "espoir" dans les partis politiques ; depuis Acteal nous exprimons notre solidarité avec nos compañeros de l'ejido Tila, membres du CNI, nous respectons leur décision de ne pas permettre l'installation de bureaux de vote de l'Institut National Electoral pour les prochaines élections, parce qu'ils font simplement usage de leur droit à l'autodétermination et à l'autonomie.

De même avec tout le respect, nous faisons notre leur dénonciation contre les paramilitaires qui sont en train de réactiver les caciques des partis politiques de ce peuple ch'ol. Nous, gardiens de la Mémoire et de l'Espoir, nous rappelons que dans la Zone Nord du Chiapas entre 1995 et 1996, elle a servi de laboratoire pour la création de groupes paramilitaires dans le cadre du Plan de Campagne Chiapas 94 et a culminé avec le Massacre d'Acteal le 22 décembre 1997, les disparitions forcées, les exécutions extrajudiciaires à Tila et Sabanilla et le massacre de 45 de nos frères et sœurs et 4 non nés à Acteal , continuant de rester impunis à ce jour.

Et un autre des cas non punis commis par les paramilitaires dans la zone nord du Chiapas est la disparition forcée de Minerva Guadalupe Pérez Torres, le 20 juin 1996, "qui voulait voir son père malade et s'est rendue à Masojá Suchjá, dans la municipalité de Tila, dans la zone nord du Chiapas. Les membres de l'organisation de développement "Paix et justice" ont maintenu un siège paramilitaire dans le village de Miguel Alemán et l'ont détenue illégalement à un poste de contrôle. Le témoignage de l'un d'entre eux a raconté les faits : Elle a été emprisonnée et détenue au secret, torturée, violée par plus de 50 paramilitaires elle avait 19 ans. Les quelques personnes poursuivies ont été acquittées en raison de l'inefficacité du système judiciaire mexicain et parce que le corps des femmes est aussi un territoire à contrôler dans la politique anti-insurrectionnelle de la terreur. Depuis Acteal, Site de Conscience, nous crions : JUSTICE POUR MINERVA !

C'est tellement de douleur, tellement d'infamie que les mauvais gouvernements nous ont fait et continuent de nous faire par l'intermédiaire de leurs paramilitaires et de leur armée fédérale, mais c'est de la douleur que nous saisissons la force et l'organisation.

Malgré l'impunité du massacre d'Acteal, nous n'abandonnons pas et réitérons aussi souvent que nécessaire que nous sommes convaincus que la justice ne sera pas rendue par l'auteur du crime, mais que nous, les survivants nous-mêmes, devons penser et construire une justice vraie et digne comme nous avons marché et construit l'Autre Justice, el Lekil Chapanel (justice digne), avec d'autres peuples et organisations sœurs.

Depuis la Terre Sacrée d'Acteal , nous condamnons la politique d'immigration " tolérance zéro " du président américain Donald Trump, celle de séparer les enfants latino-américains de leurs parents, cet acte n'est rien d'autre que du racisme. Peu importe la couleur de notre peau, notre culture et notre langue, parce que nous sommes tous des êtres humains et nous avons une conscience et une morale, mais ce président américain est inhumain.

Avec la douleur dans le cœur, nous exprimons notre solidarité avec les familles des victimes de l'éruption du volcan de fuego dans le sud du Guatemala le 3 juin, nous savons que la perte de leurs proches est irréparable, peut-être notre parole ne change rien, mais nous savons qu'ici à Acteal nous prions pour les survivants et surtout pour que les enfants puissent surmonter cette terrible tragédie. Nous leur envoyons beaucoup de force et d'embrassades sincères.

Et malgré la douleur que le peuple traverse, nous voulons envoyer nos félicitations au Front Populaire en Défense de Soconusco, à l'occasion de son 3ème anniversaire de lutte et de résistance contre l'exploitation minière et pour la vie. Sœurs et frères, restez organisés, gardez votre cœur fort, la Mère Terre nous remerciera de la défendre et de prendre soin d'elle.

Depuis Acteal, Maison de la Mémoire et de l'Espoir.


CORDIALEMENT


La voix de l'Organisation de la Société Civile Las Abejas d'Acteal.

Pour le conseil d'administration :

Martín Pérez Pérez  Mariano Gómez Ruiz 

Pedro Pérez Pérez  Manuel Pérez K'oxmol

Alonso Ruiz López   Manuel Nuñez Gutiérrez 

traduction carolita d'un article paru sur le site Espoir Chiapas le 23 juin 2018

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