Mon enfance

Publié le 26 Octobre 2016

Berthe Morisot- Par Berthe Morisot — Travail personnel, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=18417440

Berthe Morisot- Par Berthe Morisot — Travail personnel, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=18417440

J'ai eu tort, je suis revenue
dans cette ville loin perdue
ou j'avais passée mon enfance.
J'ai eu tort, j'ai voulu revoir
le coteau où glissaient le soir
bleus et gris ombres de silence.
Et je retrouvais comme avant,
longtemps après,
le coteau, l'arbre se dressant,
comme au passé.
J'ai marché les tempes brûlantes,
croyant étouffer sous mes pas.
Les voies du passé qui nous hantent
et reviennent sonner le glas.
Et je me suis couchée sous l'arbre
et c’étaient les mêmes odeurs.
Et j'ai laissé couler mes pleurs,
mes pleurs.
J'ai mis mon dos nu a l’écorce,
l'arbre m'a redonné des forces
tout comme au temps de mon enfance.
Et longtemps j'ai fermé les yeux,
je crois que j'ai prié un peu,
je retrouvais mon innocence.
Avant que le soir ne se pose
j'ai voulu voir
les maisons fleuries sous les roses,
j'ai voulu voir
le jardin ou nos cris d'enfants
jaillissaient comme source claire.
Jean-Claude, Régine, et puis Jean -
tout redevenait comme hier -
le parfum lourd des sauges rouges,
les dahlias fauves dans l’allée,
le puits, tout, j'ai tout retrouvé.
Hélas
La guerre nous avait jeté la,
d'autres furent moins heureux, je crois,
au temps joli de leur enfance.
La guerre nous avait jetés là,
nous vivions comme hors la loi.
Et j'aimais cela. Quand j'y pense
ou mes printemps, ou mes soleils,
ou mes folles années perdues,
ou mes quinze ans, ou mes merveilles -
que j'ai mal d’être revenue -
ou les noix fraîches de septembre
et l'odeur des mures écrasées,
c'est fou, tout, j'ai tout retrouve.
Hélas
Il ne faut jamais revenir
aux temps cachés des souvenirs
du temps béni de son enfance.
Car parmi tous les souvenirs
ceux de l'enfance sont les pires,
ceux de l'enfance nous déchirent.
Oh ma très chérie, oh ma mère,
ou êtes-vous donc aujourd'hui?
Vous dormez au chaud de la terre.
Et moi je suis venue ici
pour y retrouver votre rire,
vos colères et votre jeunesse.
Et je suis seule avec ma détresse.
Hélas
Pourquoi suis-je donc revenue
et seule au détour de ces rues?
J'ai froid, j'ai peur, le soir se penche.
Pourquoi suis-je venue ici,
ou mon passé me crucifie?
Elle dort a jamais mon enfance.

1969

Rédigé par caroleone

Publié dans #Chanson non crétinisante

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M
Encore une très belle chanson qui, comme beaucoup de celles que tu proposes, fait partie de mon univers musical. Je trouve qu'elle n'a rien à envier à celle de Ferrat "nul ne guérit de son enfance". Emotion garantie pour beaucoup d'entre nous ...
C
C'est un bel univers que le tien, je le découvre en même temps que je recherche des chansons non crétinisantes et c'est intéressant et instructif. Ce n'est pas un univers dans lequel on entre facilement, c'est un peu comme entrer dans la poésie, il y faut de la patience et de l'implication, vouloir comprendre, chercher le sens profond de l'écrit . Mais ce sont les seuls textes qui peuvent vieillir, du moins je le pense et je l'espère.