Relations Cuba /USA - Ca se réchauffe ? D'annie Arroyo

Publié le 8 Avril 2015

Agur, compañeros!

Vous l'avez sans doute remarqué, c'est le printemps! Ça se réchauffe !
Ça se réchauffe, ça se réchauffe, clament les optimistes en parlant des
relations entre Cuba et les USA.

Ça se réchauffe ? Oui, peut-être. Enfin, pas aussi vite que certains
veulent le croire.

Certes, depuis le 17 décembre dernier, date où les deux états ont annoncé
un dégel dans des relations plus glacées que la banquise, Barack Obama a
pris une série de mesures pour assouplir l’embargo. Comme l’envoi de devises
vers l’île des Caraïbes ou la possibilité de payer par carte de crédit
leurs achats à La Havane pour les voyageurs étasuniens autorisés à se rendre
dans un pays que les USA continuent de faire figurer sur la liste des états
terroristes. Toutes ces mesures en attendant que le Congrès, contrôlé par
les Républicains, dont tous les chefs de la mafia cubano-américaine de
Miami, lèvent le blocus imposé par leurs prédécesseurs il y a un demi siècle.
Une attente qui risque de durer quand on sait que les leaders de la majorité
dans les deux chambres y sont pour l’instant hostiles. «Les mesures prises
par Obama sont incomplètes et insuffisantes et ne changent pas l’essence de
cette mesure unilatérale maintenue par le gouvernement américain contre
Cuba» depuis 53 ans, a affirmé le ministre du Commerce extérieur Rodrigo
Malmierca au quotidien officiel Granma.

Parmi les mesures prises par Obama figure l’autorisation d’un «
investissement illimité pour aider les entreprises privées et des organisations non
gouvernementales indépendantes sur l’île » (sources : AFP), un investi
ssement jusqu’alors officieux et réservé à l’USAID, l’agence chargée du
développement de la démocratie chez les autres. On imagine les rêves et les
convoitises déclenchés pat l’annonce, et pas que chez MacDo et Coca Cola ! Les
promoteurs de tous bords, immobiliers et touristiques, se voient déjà en train
de réaliser des affaires en or sur la côte antillaise de l’île, à peu près
vierge de grandes stations touristiques, ou dans la capitale, dont les
trésors immobiliers feraient, après appropriation et restauration, de superbes
palaces pour les flots de touristes yanquis. Et à ce sujet, justement, il
semble que l’île exerce un attrait de plus en plus grand sur les foules US
qui, avec leur ignorance habituelle que seule ma diplomatie naturelle m’
empêche de qualifier de « crasse », n’ont pas l’air de savoir que le Cuba d’
aujourd’hui n’a rien de commun avec le Cuba de Batista, celui de la pègre
et des bordels, des casinos et des filles, où les blancs et le billet vert
étaient les rois du monde.
Mais tous ces requins financiers devraient écouter le gouvernement cubain
qui rappelle, parfois sèchement, par la voix de diverses personnalités que
les terrains appartiennent au peuple cubain, même si l’île est ouverte à
des investissements dans d’autres secteurs.

Avant d’aller plus loin, il va falloir concrétiser les discussions qui ont
eu lieu lors des rencontres bilatérales qui se sont tenues à La Havane et à
Washington, à savoir dans un premier temps enlever Cuba de la liste noire
et permettre l’établissement de véritables ambassades dans les deux
capitales respectives, donc l’autorisation pour les banques de traiter avec l’île
communiste, ce qui est encore loin d’être le cas. Pour l’instant, la
liste des entreprises et des individus amnistiés de ce « crime financier » n’
est que de la poudre aux yeux. Il va falloir également négocier le chapitre
des indemnisations. Quand Castro et ses Guérilleros ont imposé la
Révolution, en 1959, le nouveau gouvernement a saisi et nationalisé les énormes
actifs américains dans le pays, plantations de canne à sucre et autres
propriétés privées, dont plusieurs hôtels Hilton, sociétés du téléphone, des
transports publics, etc. dont la valeur atteindrait 7 milliards de dollars selon
les exilés contre-révolutionnaires de Floride, une somme qu’ils réclament à
cor et à cris.

C’est oublier un peu vite que l’embargo total sur les transactions
économiques et financières, décrété en février 1962, renforcé par la loi
Helms-Burton en 1996, a sérieusement affecté le développement de l’île et a causé
une perte de plus de 100 milliards de dollars au peuple cubain, selon toutes
les estimations publiées à ce jour. Cuba tient beaucoup à ce que le
problème du contentieux soit abordé, sinon réglé. On comprend pourquoi.
On comprend aussi pourquoi les USA préfèrent dévier les débats sur le
respect des Droits de l’Homme à Cuba. Un sujet brûlant inscrit au cœur de la
dernière rencontre entre les deux pays, rencontre qui s’est tenue très
récemment à Washington.

A mon avis, les Yanquis feraient mieux de faire profil bas. En matière des
Droits de l’Homme, leur réputation n’est plus à faire. Ne sont-ils pas,
selon des estimations officielles de commissions de l’ONU, le pays qui a la
plus forte proportion de détenus du monde ? Celui qui exécute plus de gens
que la Chine, l’Iran ou ces pays terroristes que les Etats-Unis montrent du
doigt… De la monstruosité de Guantanamo où croupissent encore une centaine
de détenus qui ont subi des tortures indignes et qui n’ont toujours pas été
jugés après 14 ans de détention à la longue liste des états qui pratiquent
la peine de mort, en passant par les fusillades dans les Campus
Universitaires et autres lieux publics, la liste des atrocités made in USA est
implacable.

Et si vous aviez un doute sur la façon dont les Etats-Unis appliquent la «
justice », je vous offre deux pièces jointes éloquentes. L’une porte sur la
plainte déposée contre le gouvernement yanqui par Alan Gross (celui qui a
été « échangé » contre Gerardo, Ramon et Tony), l’autre sur l’exécution d’
un condamné à mort en Oklahoma.

Ah, pour finir sur une note « humanitaire » concernant la peine de mort aux
USA, sachez que la Géorgie suspend ses exécutions pour un problème de
produit létal (ses fournisseurs habituels occidentaux, pris sans doute de
scrupules, ont décidé de cesser leurs envois) et que, à cause de ce même genre
de problème, l'Utah pourrait rétablir la peine capitale par peloton
d'exécution.

C’est pas un progrès, ça ? Avec de telles avancées humanitaires, les USA
vont pouvoir donner des leçons de morale au monde entier. Les Cubains y
seront-ils sensibles ? Faut voir. Nous qui les connaissons, nous savons qu’ils
ont assez de bon sens pour ne pas tomber dans un aussi gros panneau et assez
d’humour pour dire à leurs interlocuteurs qu’ils commencent par balayer
devant leur porte.

On vous le dit : ça se réchauffe, ça se réchauffe !

Annie Arroyo

Kubako Etxea – France Cuba

07-04-15

source : Txakal

Rédigé par caroleone

Publié dans #ABYA YALA, #Cuba

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