Brésil : Les xatanawa
Publié le 11 Décembre 2014
A présent que les retombées médiatiques se sont calmées à propos de ce contact, j’entreprends de rédiger un article succinct sur ce peuple représenté par sept survivants .
On ne sait pas grand-chose d’eux mais depuis qu’ils sont entrés volontairement en contact avec un groupe ashaninka du village de Simpatia sur la terre indigène Kampa du haut rio Envira dans l’état d’Acre, pour leur demander de la nourriture et des équipements cet été, on en sait un peu plus car ils parlent de leur vécu.
Leur auto-désignation est xatanawa = le peuple arara.
Leur langue est une langue pano proche de celle des yaminahua qui ont pu recueillir leurs témoignages.
Cette langue est courante chez nombre peuples d’Amazonie tels les matsès et matis, les yaminahua, les chitonahua et les yora.
De quel groupe viennent-ils ?
Il est supposé qu’ils soient les derniers d’un groupe chitonahua (ou murunahua) du Pérou, un peuple isolé qui avait fui en 1996 les conflits avec les bûcherons pour se réfugier le long de la rivière Minuya au Pérou.
Les chitonahua sont proches des nahua du haut Manu ou des yora, c’est un groupe guerrier qui s’est illustré entre autre dans des actions de résistance armée dont l’une d’elle qui empêcha la réalisation de la route transamazonienne dans le parc national de Manu.
Les 7 indiens en bonne santé au moment du contact portaient les chevaux coupés « au bol », quelques peintures sur le visage et portaient pour tout vêtement une ceinture en écorce de envira qui leur sert à accrocher une hache mais également à y attacher leur pénis comme cela se pratique chez des peuples d’Amazonie.
Ils étaient armés d’arcs et de flèches, savent chanter de belles mélodies et imiter les sons des animaux de la forêt.
Pérou : Les peuples isolés - coco Magnanville
Peuples isolés du Pérou image survival Ces flèches disposées en croix signifient : DEFENSE D'ENTRER.......respectons leur intimité !! Ils ont choisi délibérément de vivre isolés, ils exist...
http://cocomagnanville.over-blog.com/article-perou-les-peuples-isoles-103251306.html
Leur terrible histoire
Ils ont pu raconter à leurs interprètes ce qui leur est arrivé en faisant des descriptions physiques qui ont perlis d’identifier un narcotrafiquant portugais tristement célèbre dans la région du nom de Joaquim Antonio Custadio Fadista.
Ces 7 indiens sont les survivants d’un génocide certainement perpétré par ce sinistre individu et ses hommes.
Selon leur interprète la majorité des personnes âgées ont été massacrées par des non-Indiens au Pérou. Ils ont tiré sur eux avec des armes à feu et ont incendié leurs maisons. Ils ont dit que beaucoup sont morts et qu’ils les ont enterrés dans une fosse commune.
Fadista en effet est coutumier des actions armées et il a envahi en 2011 la base Xinane de la funai qui a été désactivée par la suite. Arrêté par deux fois par la police fédérale puis par la police civile, il a été relâché aussitôt. Il est recherché par la police péruvienne pour ses activités de trafic (bois, drogue) impuni pour sa pratique de génocide qui doit faire l’objet d’une enquête.
Les descriptions des indiens du massacre correspondent donc à la description physique de Fadista et indiquent la quantité de personnes et d’armement qui étaient possibles.
Selon survival, alors que les autorités péruvienne et brésilienne ont signé un accord de coopération pour protéger le territoire des Indiens isolés de cette zone en mars 2014, les bûcherons illégaux, les trafiquants de drogue et les compagnies pétrolières et gazières continuent d’exposer les Indiens isolés à la violence et à la maladie.
Pourquoi vivre en isolement volontaire ?
Les indiens ont également révélé l’existence de 8 populations d’indigènes isolés dans la région frontalière entre le Brésil et le Pérou (environ dans le 10e parallèle sud).
L’isolement a été adopté par ses peuples volontairement comme mode de survie face à ce que l’histoire leur a donné à voir des contacts avec l’homme blanc et la civilisation. Ces groupes connaissent l’homme blanc et savent très bien de quoi il est capable car ils en ont fait les frais et ce n’est pas pour rien qu’ils fuient.
Cette tactique est peu habituelle chez les peuples premiers qui ne sont pas des êtres vivant en isolement, leur vie est ponctuée de rencontres et de partages même si souvent cela se passe lors de conflits mais en rien les peuples originaires sont des êtres isolés des autres hommes.
Il faut se rappeler ce que les indiens de la région ont subi par le passé :
- Le boom du caoutchouc (de 1895 à 1915) : massacres, exploitation, génocides, des ethnies entières ont disparu.
- L’évangélisation et son cortège de cruautés assimilatrices pour certains peuples
- Dictature militaire
Et de nos jours :
- Programme d’accélération de la croissance avec ses barrages, des routes, ses activités forestières, les plantations également etc….
Maintenant on peut aussi ajouter ses autres fléaux à cette liste pour les indiens contactés :
- Pressions sur les terres
- Extraction illégale de l’or
- Commerce illégal de bois précieux (acajou et cèdre)
- Trafic de cocaïne
- Violences perpétrées par les trafiquants, violences physiques, viols, génocide.
- Maladies virales liées aux contacts avec la civilisation…
Autre combat à présent : Survivre aux maladies des blancs
Il convient avec énergie de faire tout ce qui est possible pour permettre à ses indiens survivants de survivre encore une fois au choc bactérien provoqué par le contact.
Ils n’y sont pas du tout préparés ne pouvant pas posséder des anticorps contre des maladies inconnues dans leur écosystème.
A savoir que lors des premiers contacts et cela vaut pour toutes les ethnies, la moitié de la population périt de maladies de contact, respiratoires ou microbiennes.
Déjà le 17 juillet, la funai précisait que les indiens avaient reçu un traitement antigrippal car ils n’avaient pas échappé au choc microbien.
Normalement, l’état a promis 5 millions de reals et des ressources pour qu’aucun indien ne meurt après ce contact.
C’est possible il me semble car lorsque les arara en 1987 puis les korubo en 1996 sont sortis de l’isolement, ils ont été pris en charge efficacement pour éviter toute épidémie et s’en sont sortis.
Espérons que les xatanawa puissent trouver leur place dans cette société brésilienne qui est si injuste avec les peuples orginaires.
Sources : le blog de Bernard Comoli, Oubliez les mythes coloniaux : le contact des xatanawa met fin à une résistance centenaire, survival