Papouasie-Nouvelle-Guinée : Les trobriandais

Publié le 16 Octobre 2014

Papouasie-Nouvelle-Guinée : Les trobriandais

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J'ai eu beaucoup de plaisir et un grand intérêt à voyager le temps d'un moment avec ce peuple rare et beau.

J'aimerais que cet article qui ne sera pas le seul sur la toile puisse sortir un peu du lot en cela qu'il ne sera pas tourné essentiellement sur les mœurs des trobriandrais mais uniquement sur leur mode de vie.

Ce qui m'a attirée chez ce peuple c'est qu'il est matrilinéaire, mais je ne suis pas restée bloquée uniquement sur le détail des moeurs car les anthropologues le font bien mieux que moi, et ce qui m'a retenue auprès d'eux, c'est tout ce qui fait leur univers lié à l'harmonie, la poésie, la beauté des choses et la douceur.

J'espère que c'est ce que vous y retrouverez également.

Caro

Peuple autochtone de l'île de Kiriwina dans l'archipel des Trobriands, dans le Massim qui est l'extrémité orientale de la Papouasie- nouvelle- Guinée.

Population : environ 12.000 personnes

Cet archipel est découvert au XVIIIe siècle par le navigateur français Entrecasteaux qui lui donne le nom de son second le comte de Trobriand qui avait pour devise : Trop brillant pour être terni.

Il y a une douzaine d'îles coralliennes plates entourées d'un lagon. Les îles Trobriand ont une superficie de 440 km2.

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Au 19 e siècle arrivent les puissances occidentales pour civiliser les autochtones.

Les missionnaires sont les premiers à s'installer dans l'île avec pour mission l'assimilation des autochtones en tentant de déstabiliser le rôle du chamane ce qui entrainera forcément par la suite un grand déséquilibre dans l'économie et la vie sociale du peuple .

Dans les années 60, introduction de l'argent dans l'île qui perturbe le système de don et contre-don des indigènes. Ce système de la kula est reconnu comme établissant la paix dans les îles du Pacifique et toute cette économie qui repose sur une vision aussi positive ne pourra qu'être ébranlé par la force des choses.

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image maison du chef

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Le village

Il y a aux abords du village une petite maison d'hôte sur pilotis pour accueillir les gens de passage.

Le village est constitué de maisons disposées autour d'une place circulaire, elles sont en bambou, ornées et sculptées montées sur pilotis avec un toit de palmes.

La maison du chef est bien plus décorée que les autres pour montrer son prestige.

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image maison de l'igname

Chaque famille a sa maison de l'igname dans laquelle sont stockés les tubercules.

Légende ou mythe de création

Les îles ont jailli du Pacifique. Deux sœurs sont apparues suivies par des jeunes filles vierges qui ont été déflorées par les gouttes d'eau. Pour avoir un enfant, il leur suffisait de marcher sur les bords de l'océan et un esprit sorti des eaux les fécondaient. Ainsi est né le peuple trobriandais.

Les tabous

L'homme et la femme qui ne sont pas marier n'ont pas le droit de manger ensemble ni de se donner la main en public

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Tenue vestimentaire traditionnelle

Les hommes sont juste vêtus d'un pagne .

Les femmes portent une jupette en fibres de palmiers et vont les seins nus. Le haut des cuisses doit être caché car c'est considéré comme indécent de les montrer.

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Le mariage

Lorsque deux êtres veulent s'unir, cela donne lieu à des cadeaux échangés entre les deux familles et un repas qui scelle le mariage. Le mariage de préférence est la cousine croisée patrilatérale = la fille de la sœur du père.

L'unité familiale est basée sur la femme et ses enfants. La femme après son mariage va vivre chez son mari dans le village de son oncle maternel. Elle ne vit pas sur les terres de son clan.

Organisation sociale et familiale

Le clan matrilinéaire

Le clan est celui de son ancêtre qui est toujours une femme. Les femmes ont pas mal de pouvoirs, elles sont magiciennes, elles transmettent la filiation. Il n'y a pas de complexe œdipien dans ce système car c'est l'oncle qui a l'autorité sur les enfants de sa sœur.

Seul le chef autrefois pouvait être polygames. Il en tirait sa puissance et sa richesse car les parents de ses femmes devaient lui donner une partie de leurs récoltes. La chefferie est transmise selon le droit d'aînesse: le fils aîné puis les cadets et le fils aîné de la sœur aînée enfin. La chefferie est souvent assurée par les anciens.

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La grossesse, le petit enfant

Les mamans portent des capes de maternité. Les femmes enceintes sont très entourées aussi bien par la famille, le village, les villages voisins car il faut offrir à cet esprit qui va naître un corps plein d'harmonie. La future maman ne doit pas entendre des choses désagréables, on lui fait régulièrement des rites magiques sur le corps, le monde autour d'elle doit être un monde de beauté.

Le nouveau-né vient d'un esprit réincarné qui peut changer d'avis et retourner dans son monde invisible. Aussi, l'enfant ne reçoit-il un prénom que vers l'âge de 5 ans quand on juge que l'esprit est bien incarné.

Elles allaitent leurs bébés jusqu'à deux ans en commençant à diversifier l'alimentation vers l'âge de trois mois en lui donnant une bouillie de taro au lait de coco.

La mère et l'oncle maternel sont les tuteurs légaux de l'enfant qui appartient au clan de sa mère comme dans les sociétés matrilinéaires. Il sera sous la protection du totem du clan de sa mère et le père n'aura pas d'autorité sur lui, il devra gagner l'amour de son enfant. Lui, en tant que père ne s'occupe pas de ses enfants, par contre en tant qu'oncle il s'occupera des enfants de sa sœur. Vers l'âge du sevrage, le père peut s'occuper de l'enfant mais l'autorité revient toujours à l'oncle.

La maturité des enfants, l'éducation

Les enfants sont affranchis de l'autorité des adultes, ils sont donc très raisonnables. Ils sont considérés comme de jeunes adultes. Il n'y a pas de rite de passage ou d'initiation chez ce peuple. Les enfants deviennent adultes sans heurts, il ne faut pas les bousculer, les laisser s'épanouir, qu'ils grandissent dans l'harmonie qui est le maître-mot de ce peuple. Comme l'enfant est dépendant de lui, de ses actes, il connait très vite ses limites.

De même ils ont droit à la liberté sexuelle jusqu'au mariage, car ensuite il convient d'être fidèle. Les jeunes sont les membres de la société les plus privilégiés, ils sont enviés des adultes. Les liaisons amoureuses des jeunes ne posent pas de problèmes en dehors de l'inceste. La virginité n'est pas imposée pour le mariage et les jeunes ne sont pas obligés de travailler. Ils ont à leur disposition des maisons de célibataires les bukumatula pour se livrer à leurs ébats en toute tranquillité.

Dans les années 1910/1920, Bronislaw Malinowski à étudié les mœurs "libertines" des trobriandais et en a fait un ouvrage qui sert de référence et dont on peut trouver avec le lien ci-dessous une analyse que je juge intéressante : ICI.

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[Image from Malinowski 1922, Frontispiece]

Le chamane

Il est le gardien des rites et fait des incantations dans des feuilles repliées en cornet. Il procède ainsi afin d'être l'intermédiaire entre les vivants et les morts, pour protéger les pêcheurs, éloigner les requins et favoriser de bonnes pêches. Il ouvre aussi le début du travail de plantation en donnant le rythme avec ses incantations.

Le premier chamane de la création est sorti de terre avec les connaissances de la magie. Les chefs quand à eux sont arrivés bien après au cours de l'histoire, le magicien ou chamane étant toujours l'homme fort de la société.

Les chamanes connaissent les remèdes des plantes. Les soins consistent également en des massages et des scarifications sur le front.

A la mort d'un proche parent, hommes et femmes se rasent les cheveux et se peignent le corps en noir. Cela donne lieu à de longues cérémonies avec des dons et contre dons.

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Peuple d'horticulteurs

Dans les jardins de corail, tout pousse en abondance. Ils produisent plus que nécessaire à leur subsistance car l'homme étant le tuteur des enfants de sa sœur, il leur donne des aliments. Les jardins sont mis en jachère puis défrichés et brûlés et on y plante en particulier de l'igname et du taro. Les femmes portent les récoltes dans des paniers sur leur tête. L'igname en particulier est important pour sa valeur nutritive et comme source de prestige.

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La pêche

Elle se pratique surtout avec un filet et en groupe de plusieurs bateaux. Chacun frappe l'eau avec sa perche pour rabattre le poisson. Les villages côtiers échangent leurs pêches contre les cultures des villages des terres.

Les fêtes

La fête du retour annuel des morts est un moment très important et rituel dans l'année, après les récoltes. La mort n'est qu'un passage pour une autre existence.

Les femmes tout d'abord fabriquent des jupes en feuilles de bananiers teintées pour les hommes. Elles leur fabriquent également une couronne de plumes blanches qui les fait ressembler à des marguerites. Ils sont parés pour les danses qui sont différentes et durent plusieurs jours. La fête dure 28 jours en tout. Avant la danse finale qui est la plus importante, les hommes passent devant une magicienne qui regarde leur beauté, leur caresse le visage en chantant des psaumes pour les préparer. La beauté corporelle est très importante, source d'harmonie. Les visages des hommes ensuite sont sereins, ils sont en état de grâce. Les villages voisins participent à la fête, il y a une grande foule au village.

On peut considérer ce peuple comme des sortes de bardes des mers du sud avec des textes poétiques et des musiques douces accompagnées de petites guitares qui font penser aux tahitiens. D'ailleurs, leur double origine, au croisement des civilisations mélanésiennes et polynésiennes n'y est pas étrangère.

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La kula

Ces expéditions en pleine mer sur des pirogues (mazawa) de 15 mètres de long contenant une vingtaine d'hommes comptaient beaucoup dans la vie des trobriandais autrefois. Ces expéditions étaient basées sur l'échange avec d'autres trobriandais, étrangers parfois. Les objets échangés étaient des colliers et des brassards qu'ils troquaient contre les mêmes objets ou des biens qu'ils n'avaient pas chez eux. Dans les objets échangés se trouvaient les qualités des êtres humains qui en les échangeant transmettait ses qualités personnelles. Ce marché économique inter tribal revêtait pour l'économie et les échanges d'amitié un moment-clé de leur civilisation qui s'est perdu avec l'arrivée des occidentaux.

Don et contre-don

A plusieurs occasions de l'année on procède à des dons qui donnent lieu à d'autres dons qui chaque fois se révèlent lus importants que ceux que l'on a donné. C'est une façon de briller en société. L'orgueil devient une qualité car l'individu ne veut pas que celui qui reçoit soit dépossédé en quoi que ce soit. Les jupettes en fibres non portées font partie du système de don et d'échanges.

Le don d'ignames urigubu est fait chaque année par un homme au mari de sa sœur. Le frère de sa femmes devra quand à lu fournir une partie de sa récolte qui sera redistribuée à la famille de ses proches parents. Le don cérémoniel d'ignames entretient ainsi des liens privilégiés entre le frère et la sœur d'un même clan matrilinéaire.

Ce lien à propos du système de la kula ICI

Sources : Le film de Betty et Jacques Villeminot, matricien.org, société matrilinéaire des trobriandais de Reynier

Rédigé par caroleone

Publié dans #indigènes et indiens, #matrilinéarité

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E
article très intéressant, merci !