Chiapas : Violences à Mitziton

Publié le 1 Août 2014

Chiapas : Violences à Mitziton

Les violences qui se déroulent à Mitzitón depuis quelques semaines ont été présentées de diverses manières. Originaire de ce village du Chiapas, je propose ici ma version.

L’appât de l’argent est en train de gangrener l’ensemble de la communauté, aussi bien dans un camp que dans l’autre. En l’absence de travail sur place, des villageois pratiquent le trafic de bois et de migrants pour se procurer des revenus.

Sur les affaires de bois coupé illégalement, je ne peux pas me prononcer, mais il me semble que le camp qui dénonce les coupeurs de bois ne s’en prive pas non plus (parfois, ils coupent plus loin du village, ce qui fait que ça ne se voit pas).

Les gens qui sont allés chercher du travail ailleurs sont vite exclus de la communauté. En conséquence, ils sont obligés de payer pour la réintégrer (et ainsi pouvoir participer aux fêtes, par exemple).

Les leaders – qui accaparent en permanence l’expression du village vers l’extérieur – accaparent aussi l’argent qui peut être récolté pour la cause qu’ils défendent (par exemple, quand un barrage de route permet de récolter des fonds).

Et puis il y a les religions. A Mitzitón comme dans la plupart des communautés du Chiapas, on assiste à une guerre ouverte entre catholiques et évangélistes ; les évangélistes représentent aujourd’hui 60% des croyants des villages. Tantôt ce sont les catholiques qui attaquent, tantôt c’est l’inverse. Puisque les évangélistes ne croient pas au Diable et qu’ils refusent les images, ils refusent de participer aux fêtes patronales du village, et c’est évidemment source de conflit.

Il y a quelques années, pour sortir de cette atmosphère de conflit permanent, un groupe d’évangélistes a quitté Mitzitón pour aller créer une autre communauté à proximité, mais ça n’a pas suffi à éteindre les rancœurs : la preuve, le récent viol suivi de meurtre d’une jeune fille de cette nouvelle communauté, qui était venue à au village à l’occasion de la fête de fin d’année scolaire.

A Mitzitón, un groupe d’évangélistes a, il y a quelque temps, changé de camp pour rejoindre les catholiques ; maintenant, ils luttent contre les autres évangélistes.

Ce qui est à noter aussi, c’est que ces conflits divisent les familles.

Tout ceci crée une situation très compliquée !

La situation semble arranger le gouvernement, qui ne semble rien vouloir faire, ou qui prend parti, ce qui ne fait que jeter de l’huile sur le feu. Je m’interroge aussi sur l’indépendance de l’organisation de défense des droits de l’homme qui est intervenue dans le village.

Je précise que la violence ne serait pas si extrême à Mitzitón, si le gouvernement du Chiapas n’avait pas décidé de réaliser coûte que coûte l’autoroute qui doit relier San Cristobal de Las Casas à Palenque : toutes les divisions sont bonnes pour affaiblir les communautés où certains s’opposent à ce projet, comme c’est le cas à Mitzitón !

Selon moi, ce qu’il faudrait c’est une table-ronde – ce qui n’a jamais eu lieu -, à la condition qu’elle soit précédée d’une enquête véritable permettant de déterminer les responsabilités. Je crois que cette enquête conduirait à inculper les leaders : il faudrait les obliger à payer pour les dégâts qu’ils ne cessent de causer à leur propre communauté.

HG

Rédigé par caroleone

Publié dans #Le chiapas en lutte

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