Quelques compagnons de route : Ernesto, Pablo, Federico et les autres......
Publié le 17 Juillet 2011
Je suis trop faible pour marcher sur les pas de ma vie sans personnalités à l'esprit fort pour m'épauler grâce à leurs mots, à leurs chants aussi.
Ce pourquoi je fais souvent référence dans mes articles à ces compagnons de route : ce sont souvent des poètes, des écrivains à la sensibilité proche de la mienne, des écorchés vifs, des martyrs qui m'ont touchée dans leur vie et leur façon d'être, leur trajectoire, leur parcours de vie sont des exemples pour moi et leurs livres sont toujours sur ma table de chevet au cas où .....
En ce moment, je vais avoir besoin d'eux intensément pour combler un manque certain et pour m'aiguillonner sur ce chemin qui me reste à parcourir et que je sais semé d'embuches......
Je vous les fait découvrir, redécouvrir, avec des textes qui me plaisent, j'espère que vous trouverez aussi du réconfort dans leur lecture.
Caroleone
ERNESTO,
Dans mes compagnons de route favoris, tu es bien sûr celui qui compte le plus et auquel comme des milliers d’autres dans le monde entier je m’identifie. En tant que femme, évidemment, cette identification est certainement moins « guerrière », bien que….
Ernesto, j’aime ce que tu as été, ta sincérité, ton refus de mentir, ta témérité, ton esprit de sacrifice qui t’as fait mettre de côté ta famille pour la réussite de la révolution pour la masse, ceci peu d’entre nous est capable de la faire. J’ai aimé ton courage envers et contre tout, surtout le désir de vaincre la maladie, de passer au-dessus et de faire avec, je m’identifie beaucoup à toi dans ce combat, tu es mon exemple.
Tu vivais ta vie intensément, voulant rattraper coûte que coûte ses années perdues de ton enfance volée par la maladie, tu savais très bien que ta vie serait courte, il fallait donc que tu la remplisses bien, ce que tu as fait avec brio et talent.
Personne sur terre ne t’égale et ne t’égaleras, tu es passé à la postérité, ta mort t’a rendu plus cher aux yeux de tous, je sais que si je revenais sur terre dans cent ou deux cents ans, tu serais encore là, sur les drapeaux, les tee-shirts comme un symbole de liberté. C’est toi qui as gagné Ernesto !!
Dédié à mon papy avec toutes mes pensées sincères
Anecdote : Le nain barbu
« Au commencement (de notre révolution), l’énorme Oncle Sam apparaissait dans les bandes dessinées regardant, mi-amusé mi-étonné, le nain barbu qui prétendait lui donner un coup de pied aux jambes, car il ne pouvait l’atteindre plus haut.
Néanmoins, les dimensions du nain se sont agrandies jusqu’à prendre des proportions américaines, et devenir le symbole vivant des obsessions des propriétaires de l’argent en Amérique.
Ainsi, chaque fois qu’un peuple prétend exprimer son mécontentement et son non-conformisme contre l’exploitation, il lève ce drapeau que nous chérissons, le portrait de Fidel Castro. »
(Dans Le rôle de l’Université dans le développement économique de Cuba, 2/3/1960)
PABLO,
L’un de mes préférés encore, que mes lecteurs n’ont cesse de voir apparaître sur ce blog, car il est mon porte-parole, je trouve toujours chez lui des textes forts pour exprimer mes sentiments, mes joies, mes colères et aussi l’actualité.
Pablo, terrien sensuel, amoureux de la nature, des femmes, de l’humanité au cœur grand comme ça, à la sensibilité à fleur de peau me ressemble énormément. Ses écrits me touchent, sa noirceur me plaît quand elle exprime les crimes des hommes, j’aime son franc-parler, ses mots crus, ses mots doux quand il parle d’amour, sa sincérité, son amitié pour ceux qui ont traversé, nombreux , sa vie et sa façon de l’exprimer toujours simplement comme tout bon communiste qui se respecte. C’est d’ailleurs l’un des communistes que je respecte le plus dans l’honnêteté de ses engagements……il avait réellement de grandes qualités comme Ernesto, c’est une grande perte pour l’humanité.
Extrait de LES VERS DU CAPITAINE
ODE ET GERMINATION
Le goût de ta bouche et la couleur de ta peau,
Peau, bouche, mon fruit de ces jours rapides,
Dis-moi, ont-ils été sans cesse à ton côté
A travers années et voyages, lunes et soleils
Et terre et pleurs et pluie et joie
Ou seulement aujourd’hui, seulement
Sortent-ils donc de tes racines
De même qu’à la terre aride l’eau apporte
Des germinations inconnues
Ou qu’aux lèvres de la cruche oubliée
Arrive avec l’eau le goût de la terre ?
Je ne sais pas, ne m’en dis rien, tu ne sais pas.
Nul ne connaît ces choses-là.
Mais quand j’approche tous mes sens
De la lumière de ta peau, tu disparais,
Tu fonds comme l’acide
Parfum d’un fruit,
Comme la chaleur d’un chemin,
L’odeur du maïs qui s’égrène,
Le chèvrefeuille du soir pur,
Les noms de la terre poudreuse,
L’arôme sans fin du pays :
Magnolia et buisson, sang et farine
Et galop de chevaux,
Comme la lune poussiéreuse du village,
Le pain fraîchement né :
Ah ! Tout de ta peau revient à ma bouche,
Revient à mon cœur, revient à mon corps
Et je redeviens avec toi
La terre que tu es :
Tu es en moi printemps profond :
Et à nouveau en toi je sais comment je germe.
PABLO NERUDA
FEDERICO,
Mon compagnon sensible et doux, le poète assassiné, la lumière d’Espagne éteinte violemment à jamais, quelle cruauté dont on ne se remettra pas……
Tout me touche dans ta poésie, la beauté de tes mots, leur sensibilité exacerbée, l’impression de sentir cette fin tragique, ce désir de vivre intensément comme seuls ceux qui savent inconsciemment qu’ils vivront peu le font……mon romantique espagnol, cet hommage pour toi avec mon poème préféré :
COMPLAINTE SOMNAMBULE
Verte que je t’aime verte.
Verte brise, Vert ramage.
Le bateau est sur la mer,
Le cheval dans la montagne.
Elle a l’ombre sur la taille
Et rêve à sa balustrade,
Verte est sa chair, cheveux verts,
Son regard de froid métal.
Verte que je t’aime verte.
Au clair de lune gitane,
Elle ne peut voir les choses
Et les choses la regardent.
Verde que te quiero verde.
Verde viento, Verde ramas.
El barco sobre la mar
Y el caballo en la montaña.
Con la sombra en la cintura
Elle sueña en su baranda,
Verde carne, pelo verde,
Con ojos de fria plata.
Verde que te quiero verde.
Bajo la luna gitana,
Las cosas la estan mirando
Y ella no puede mirarlas.
Verte que je t’aime verte.
Le givre en grandes étoiles
Avec le poisson de l’ombre
Ouvre à l’aube son canal.
Le figuier lime son vent
De ses branchages qui grattent.
La montagne, chat farouche,
Sort ses acides agaves.
Mais qui viendra ? Et par où...?
Toujours à sa balustrade,
verte est sa chair, cheveux verts,
songeant à d'amères vagues.
Verde que te quiero verde.
Grandes estrellas de escarcha,
Vienen con el pez de sombra
Que abre el camino del alaba
La higuera frota su viento
Con la lija de sus ramas,
Y el monte, gato garduéno,
Eriza sus pitas agrias…….
Pero quien vendra? y por donde...?
Ella sigue en su baranda,
verde carne, pelo verde,
soñando en la mar amarga.
VLADIMIR,
Un compagnon de route écorché vif, rebelle au possible qui n’a pas trouvé mieux que d’en finir une bonne fois pour toutes avec cette vie qui le faisait souffrir, cet amour perdu pour Lili qui le rongeait. La passion est souvent présente chez les révolutionnaires, les communistes, nous sommes des personnes entières qui vivons toutes nos actions à 200 % et qui les payons souvent cash……je fais partie de ces gens-là et je le paie chaque jour.
Le plus beau poème de Vladimir, c’est celui-ci :
ECOUTEZ !
Ecoutez !
Si on allume les étoiles
C’est donc à quelqu’un nécessaire,
C’est que quelqu’un désire qu’elles soient,
C’est que quelqu’un nomme perles ces crachats
Et, déchirant
La tempête au midi des poussières
Il se précipite vers dieu,
Craint d’être en retard,
Pleure,
Baise sa main noueuse,
Implore,
Il lui faut absolument une étoile !
Jure
Qu’il ne supporte pas ce martyre sans étoile !
Et après,
Marche de long en large,
Avec inquiétude,
Calme, pourtant, en apparence.
Il dit à quelqu’un :
« Alors, ça va, maintenant ?
T’as plus peur ?
Hein ? »
Ecoutez !
Si on allume
Les étoiles
C’est que c’est à quelqu’un nécessaire,
C’est qu’il est indispensable
Que chaque soir,
Par-dessus les toits,
S’allume au moins une étoile !
VLADIMIR MAIAKOVSKI
RENE,
Combattant infatigable de la résistance, poète à la sensibilité exacerbée, au génie créatif, à la poésie sublime et rare, tu m’offres ton épaule sur les chemins de la vie avec tes textes dans lesquels je ressens chaque fois un grand désespoir, une pointe d’amertume et tellement de sentiments……
Je me sens aussi proche de tes combats politiques très anarchisants somme toute, comme moi, tu ne voulais pas te donner entièrement au communisme qui ne te convenais pas totalement.
Tu manques à la poésie française……
FEUILLETS D’HYPNOS, numéro 178
La reproduction en couleur du Prisonnier de Georges de La Tour que j’ai piquée sur le mur de chaux de la pièce où je travaille, semble, avec le temps, réfléchir son sens dans notre condition.
Elle serre le cœur mais combien désaltère !
Depuis deux ans, pas un réfractaire qui n’ait, passant la porte, brûlé ses yeux aux preuves de cette chandelle.
La femme explique, l’emmuré écoute. Les mots qui tombent de cette terrestre silhouette d’ange rouge sont des mots essentiels, des mots qui portent immédiatement secours.
Au fond du cachot, les minutes de suif de la clarté tirent et diluent les traits de l’homme assis. Sa maigreur d’ortie sèche, je ne vois pas un souvenir pour la faire frissonner. L’écuelle est une ruine. Mais la robe gonflée emplit soudain tout le cachot.
Le Verbe de la femme donne naissance à l’inespéré mieux que n’importe quelle aurore.
Reconnaissance à Georges de La Tour qui maîtrisa les ténèbres hitlériennes avec un dialogue d’êtres humains.
RENE CHAR
Le prisonnier Georges De la Tour
Caroleone