Pablo Neruda : Atacama
Publié le 10 Mars 2013
Intolérable voix, sel
disséminé, cendre
substituée, thyrse noir
avec sa perle extrême où la lune apparaît
aveugle, en des couloirs de cuivre en deuil.
Quel matériel, quel cygne creux
enfonce dans le sable son nu moribond
et durcit sa clarté liquide et lente ?
Quel dur rayon brise son émeraude
entre des pierres indomptables,
cristallisant le sel perdu ?
Terre, terre
sur la mer et sur l’air, sur le galop
de l’amazone pleine de coraux :
grenier amoncelé où le blé dort
dans cette racine tremblante de la cloche :
Ô mère de l’océan ! qui produis
le jaspe dur, la silice dorée :
sur ta peau, pure peau de pain, loin des arbres de
la forêt,
il n’y a rien hormis tes lignes de secret,
rien si ce n’est ton front de sable,
rien si ce n’est les nuits et les journées de
l’homme,
mais auprès de la soif du chardon, là
où un papier s’enfonce oublié, une pierre
marque les berceaux profonds de l’épée et de la
coupe
et signale les pieds endormis du calcium.
Pablo Neruda ( Chant général du Chili)