Mitzitón, Chiapas: défaire les géographies du capital et territorialiser l'espoir

Publié le 27 Juin 2010

Chiapas, région tzotzil, en 1918, « quatorze anciens se sont donnés la peine de construire la communauté ». Ils l’appelèrent Ni-tzi-ton, museau de chien en pierre. Mais des fonctionnaires ont violenté l’Histoire forgeant en un bloc le nom de Mitzitón. Mitzitón ébauche son territoire dans le cheminement, l’appartenance et le devenir entre les montagnes, les champs de maïs ou de haricots, entre pommes de terre et fèves. Mais la délimitation géographique du système capitalistel’a marqué de symboles de violence. Ici une caserne militaire, à l’intérieur des terres un temple évangélique où s’organisent les

paramilitaires de l’Armée de Dieu, et dans les « plans » des gouvernements, fédéral et de l’état, une autoroute qui prétend rompre une fois de plus ces géographies.

Mitzitón a obtenu le caractère d’ejido le 12 mai 1941, produit du réformisme présidentiel de Lazaro Cardenas. En 1979 le

dernier éleveur de la zone, Alfredo Aguilar, est parti. « Quand le propriétaire de la fi nca est parti, les fi ls et neveux des peones et des membres de l’ejido y ont joué, et ainsi les gens ont commencé à investir le lieu et à construire des maisons ». Parallèlement, les militaires ont commencé à s’installer sur un des côtés de l’ejido.

Aujourd’hui, avec le Projet Mésoaméricain pointe la menace d’une autoroute San Cristobal

– Palenque, qui est évidemment la voie qui permettra la libre circulation des marchandises à connecter aux couloirs interrégionaux, même ceux en devenir.

Les membres de l’ejido racontent que depuis 1996, cyniquement, cette route sert au « trafic, organisé par les paramilitaires, de nos frères guatémaltèques et salvadoriens. Ils laissent des camions remplis des frères guatémaltèques

et salvadoriens juste devant la communauté, comme ça, enfermés, dans le froid et sans nourriture ; ils le font aussi pour

nous obliger à faire leur sale boulot. »

Le problème n’est pas tant le trafi c de frères indigènes que l’élagage des arbres par le groupe paramilitaire. « La protection du bois est un accord entre les membres de l’ejido. Si quelqu’un a besoin de bois pour se chauff er ou pour construire il faut d’abord demander l’autorisation aux autorités et à l’assemblée.

Si cette autorisation n’est pas demandée on met une amende, mais les paramilitaires se fi chent bien des accords du peuple, ils sont juste là pour l’argent et pour molester. »

Ils racontent que les marques de violencedans leur géographie, sur le territoire comme  sur les corps, sont réapparues avec le groupe paramilitaire. « Le village s’est scindé, une partie a laissé tomber le travail commun, a arrêté de participer aux fêtes, un compañero a été assassiné, ont débuté le harcèlement constant et les menaces régulières aux femmes, hommes, enfants et anciens comme aux bois, aux puits, aux coutumes. »

« Avant que les paramilitaires arrivent nous étions 1200 habitants à avancer ensemble, aujourd’hui ils sont 100 à faire le sale boulot et pas les tâches communautaires. » Les paramilitaires sont nommés Los Muscan

stojomajic (non coopérativistes).

En 1999 « Carmen Diaz Lopez – qui depuis 1996 trafi que des frères centraméricains – a formé un groupe pour prêcher la parole catéchiste, pour ensuite former une religion évangélique.

» En 2000 ils ont construit leur temple à Mitzitón et de là ils ont manifesté leur non collaboration avec le village, dans tout ce qui implique une certaine coopération.

Depuis 2001 les paramilitaires bénéfi cient de la protection des mauvais gouvernements.

« On a trouvé une fois 29 frères honduriens et guatémaltèques détenus ici, la police est arrivée, a arrêté Carmen Diaz et en quatre heures un juge de San Cristobal a libéré les délinquants. L’assemblée a décidé d’expulser le trafi quant, lui retirant le droit d’usage de la terre, et il est parti vivre dans le municipe de Teopisca. Actuellement les paramilitaires nous obligent à dialoguer avec eux, avec le mauvais gouvernement et ses commissions, mais les gens du village refusent d’aller à une

discussion avec des assassins d’indigènes. Ce sont eux qui ont assassiné notre compañero le 24 juin, ça va faire un an qu’ils l’ont tué et maintenant ils veulent dialoguer. L’assassin se balade et se moque de nous, l’autorité lui ayant

rendu sa liberté quatre mois après les faits. »

Il existe diff érentes sortes d’armes. Ici on préfère plutôt celle qui consiste à aller de l’avant avec les autres.

On compte avec impatience les jours de fête : il y en a 8 chaque année qui permettent d’oublier les jours diffi ciles. On commence maintenant à préparer la prochaine fête, on espère seulement que « les paramilitaires ne vont pas venir nous y ennuyer, mais aujourd’hui on a trouvé au petit matin cinq troncs devant la maison du paramilitaire Francisco Gomez, le lieu même où en mars plusieurs de nos compañeros ont été attachés pour être brûlés avec de l’essence, ils font ça

pour nous menacer. »

Aujourd’hui la défense du territoire va plus loin que la seule résistance, on défend maintenant aussi bien le chemin parcouru que celui a parcourir, ce projet politique de vie proche de la lutte de l’EZLN. La résistance se manifeste au-delà de pratiques non capitalistes, au travers d’une manière de voir et de faire avec entre peuples, collectifs et individus en vue de l’émancipation du capital dans cette crise de civilisation.

 

 

Texte complet sur

www.desinformemonos.org

 

 

Mitzitón, Chiapas: défaire les

géographies du capital

et territorialiser l’espoir

Extrait d’un texte original de Diana Itzu Lana

5 Numéro 7 - Juin / Juillet 2010 - www.desinformemonos.org

Vers 11h30 le 26 septembre 2009, groupe

de trente à quarante hommes à encerclé

la salle communautaire dans le quartier

de Kennedy Road à Durban, en Afrique

du Sud. Armés de bâtons, machettes et

armes automatiques, évoquant le langage

du confl it politique parrainé par l’état qui

divisa le pays durant les dernières années

de l’Apartheid, le groupe a lancé son attaque

contre une réunion de la Ligue des

Jeunes Abahali baseMjondolo (AbM) qui

se tenait là. Dans la panique qui suivit,

quatre personne ont trouvé la mort, douze

ont été blessées et les attaquants ont pris

le contrôle du lieu.

Le lendemain, le groupe d’attaquants est

revenu dans le quartier avec la police et

des offi ciels du Congrès National Africain

(ANC) et se sont appliqués à détruire et

saccager plus de deux douzaines de maisons,

toutes appartenantes aux membres

élus du Comité de Développement de

Kennedy Road (KRDC).

« Nous sommes attaqués », ont déclarés

dans un communiqué de presse commun

KRDC et AbM une semaine après.

« Nous avons été agressés physiquement

avec diff érents types d’armes : pistolets,

couteaux, et même une épée. Nous avons

été expulsés de nos maisons et de notre

communauté. La police n’a rien fait pour

stopper ces attaques malgré nos demandes

d’aide. » la déclaration continue : « Ce

qui s’est passé à Kennedy Road fut, tel

un coup d’état, le remplacement par la

violence d’une organisation communautaire

démocratiquement élue. L’ANC a

pris le contrôle de tout ce que nous avons

construit à Kennedy Road. »

Les années précédentes, le principal

mouvement social du pays, Abahali

baseMjondolo (« banlieusards » en zulu)

a impulsé bon nombres d’actions. Après

avoir émergé en 2005 dans le quartier de

Kennedy Road au cours d’une dispute sur

le logement avec le conseil citoyen local

de l’ANC, le mouvement des habitants

des banlieues a grossi jusqu’à atteindre

dix mille membres dans plus de trente

quartiers informels le long de la province

KwaZulu-Natal.

Dès ses deux premières années d’existence,

les eff orts de mobilisation d’AbM

ont été confrontés à la violence d’état et

à la répression politique. En 2005, par

exemple, la police a illégalement interdit

des manifestations autorisées et attaqué

les résidents de Foreman Road quand ils

ont pris la rue. Un an plus tard, la police

a arrêté le président et le vice-président du

mouvement alors qu’ils se rendaient à un

entretien pour une radio, les frappant et

torturant sous surveillance. En 2007, la

police a tiré sur une marche pacifi que.

« Avec l’attaque d’AbM à Kennedy Road »,

assure son président S’bu Zikode en octobre

2009, « il est clair qu’aujourd’hui cette

idéologie technocratique sera secondée

par la violence dès que des hommes et

des femmes ordinaires insisteront sur leur

droit à s’exprimer et à être entendus sur ce

qui concerne leur vie quotidienne ».

Cette nécessité, entre gens ordinaires,

de parler et de penser par soi-même est

encore plus pressante à l’approche de la

Coupe du monde 2010. Dans tout le pays

le gouvernement a gâché des millions dans

la construction et la réhabilitation de stades

pour ces rencontres qui auront lieu

en juin et juillet, alors que des millions

d’habitants n’ont pas de logement ou d’eau

potable, et autres services de base. Au lieu

de remplir sa promesse d’emplois et de

développement équitable, la Coupe du

monde a fourni opportunément les planifi

cateurs urbains et les spéculateurs sur

les biens et les ressources qui cherchent à

éliminer le négoce informel des quartiers

commerciaux des centres-villes et à nettoyer

les sans cesse croissants quartiers

des banlieues. Au regard du droit des pauvres

à la ville, il semblerait qu’AbM a été

attaqué juste quand il le fallait.

 

Texte complet sur

www.desinformemonos.org

 

 

 

 

 

 

 

 

Rédigé par caroleone

Publié dans #Le chiapas en lutte

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