Les Mapuche en Argentine : La revanche des gens de la terre
Publié le 27 Février 2011
Au cours de la dernière décennie un processus de récupération de l’identité du peuple Mapuche a commencé.
Depuis 2001, 240 000 hectares ont été récupérés par les communautés Mapuche
Texte : Martin Cúneo. Illustration: Emma Gascó
La première secousse
Pour la Confédération Mapuche, 1992
est le point d’infl exion. Ils se sont rendus
compte qu’ils ne pouvaient pas reculer
davantage, que 500 ans après ils étaient
toujours vivants et que c’était l’opportunité
de repenser leur histoire. Ils
devaient avancer.
Ce mouvement porte ses fruits avec
la réforme de la Constitution, et leur
permet d’obtenir la reconnaissance
juridique des droits des indigènes sur
leurs terres en plus de la gestion de ses
ressources naturelles.
La troisième invasion
Les confl its pour la terre se sont multipliés
en 2001. Pressions de l’industrie touristique,
entrée de compagnies minières et
pétrolières... À cela s’est ajoutée l’arrivée
d’éleveurs nationaux et étrangers.
L’occupation de la parcelle de Benetton
par le couple mapuche en 2002 fut suivie
d’une violente évacuation. Des lettres
furent envoyées. Il y eut des entrevues et
même un rendez-vous Luciano Benetton
lui-même. « Ils nous ont dits que nous
étions des imbéciles, que nous ne savions
pas attendre. Nous avons attendu trois
ans et nous avons décidé de retourner
sur la parcelle », dit Rosa. En 2007 ils ont
réoccupé le terrain et ils y vivent toujours
aujourd’hui.
Des cas emblématiques
Quintupuray, deux crimes et une récupération.
En 1993 Lucinda Quintupuray fut
tuée de deux coups de feu. Son fi ls Victorio
s’est installé sur les terres. Quelques
mois plus tard il mourut noyé. Au bout
de 15 ans, en 2008, après plusieurs réclamations,
le terrain fut récupéré.
Le vieux truc de la reforestation. Les programmes
de reforestation de la Banque
Mondiale ont pour conséquences que des
terres publiques passent à des capitaux
privés. Quand une entreprise replante
des arbres, elle a la possibilité de légaliser
et revendre la terre, souvent avec des
gens sur ces terres
Territoire Mapuche.
Le 8 novembre
2010 un éditorial du quotidien La Nación
alertait sur le danger de réviser l’histoire
argentine et de prétendre montrer la
Campagne du Désert de 1879 comme
un acte génocidaire contre les peuples
originels. Une autre des préoccupations
était la récupération de terres de la part
des communautés mapuches, prises aux
éleveurs de Patagonie.
« Ils sont préoccupés car le peuple
Mapuche lutte maintenant pour ses
droits » dit Lefxaru Nawel, de l’Observatoire
des Droits de l’Homme des Peuples
Indigènes. « Ils veulent les Mapuche
comme il y a 100 ans, quand ils sont
passés du statut de propriétaire à celui
d’ouvrier agricole ».
En août 2002, Rosa Nahuelquir a
perdu son travail. Avec son mari Atilio
Curiñaco, ils décidèrent de récupérer une
parcelle qui appartenait depuis des générations
à la famille d’Atilio. Pour atteindre
leur rêve, ils ont du s’aff ronter au géant
du textile Benetton. Et ils sont devenus un
symbole de la lutte pour la terre.
En se renseignant sur les origines de la
propriété de Benetton, ils ont découvert
un des plus grands scandales de corruption
de l’histoire argentine. Douze ans
après la Conquête du Désert, le président
d’alors, José Uriburu, a donné 900 000
hectares à dix citoyens anglais, qui à leur
tour ont transféré leurs biens à la Argentinean
Southern Land Company Ltd, une
entreprise fantôme créée pour recevoir
ces biens. On pense que la donation fut
un paiement pour des armes anglaises
utilisées pour la Conquête.
Quelques 42 000 hectares furent remis
à 1800 éleveurs de la Société Rurale, les
mêmes qui avaient fi nancé la campagne
contre les peuples originaires. Cette campagne
avait fait 14 000 morts parmi les
indigènes et avait rendu esclaves 14 000
esclaves. Ceux qui fi nirent par habiter
les villes n’ont pas prospéré. Ils se sont
installés aux périphéries et peu à peu ont
perdu leur culture.
http://desinformemonos.org/wp-content/uploads/2011/02/Desinformemonos11_francais.pdf