Honduras : Le peuple Tawahka
Publié le 16 Juin 2012
Les tawahkas
Il s’agit du plus petit groupe autochtone du Honduras qui comprend moins de 1000 personnes.
C’est un peuple d’horticulteurs qui pratique la culture itinérante, c’est un peuple fluvial et forestier.
C’est un sous-groupe des sumus ou mayangna que l’on retrouve également plus nombreux dans l’état du Nicaragua et que je traiterais dans un sujet séparé.
Ils seraient les descendants d’un des plus grands groupes indigènes d’Amérique centrale pendant la période coloniale.
Autres noms : sumu, soumo, sumo, taguaca, mayangna
Réserve de la biosphère Tawahka Asangni
Située au cœur du corridor biologique méso-américain, entre les départements d'Olancho et de Gracias a Dios, avec le décret de création n° 157-99, avec une extension de 233 142 hectares, où se trouvent les communautés Tawahka et plusieurs localités non autochtones, qui se caractérisent comme des établissements de colons agricoles, qui ont à ce jour une superficie dégradée estimée à 36 174 hectares, représentant 15 % de la biosphère, dont environ 67 % sont utilisés pour des pâturages pour le gros bétail et pour la culture de céréales de base.
Plus précisément, elle est située entre les municipalités de Dulce Nombre de Culmi, Olancho et Wampusirpi, dans le département de Gracias a Dios, et est bordée par des communautés Misquito et Mestizo, ces dernières récemment formées par des flux migratoires qui entrent dans la zone à la recherche de terres "gratuites" ou à bas prix pour le développement d'activités agricoles et d'élevage, Dans la plupart des cas, ces familles sont dirigées par des personnes qui fuient la justice hondurienne pour les crimes commis. C'est pourquoi la biosphère leur sert de cachette, représentant un danger imminent pour la sécurité physique des communautés Tawahka et Miskito.
La BTA est une zone dont les richesses n'ont pas encore été caractérisées, car elle est encore considérée comme l'une des plus grandes zones protégées du pays. Sa flore comprend une variété d'espèces, notamment des arbres à bois coloré comme l'acajou, le cèdre, le maria et d'autres utilisés pour la fabrication d'objets artisanaux, comme le tuno, le majao et des plantes médicinales, dont une utilisée pour lutter contre le poison de l'acacia jaune, qui est abondant dans la zone.
La faune comprend le tapir, le cerf, plus de cinq variétés de singes dont le singe à face blanche, l'olingo, le singe araignée, ainsi qu'une population régulière de sangliers, de jaguillas, de tatous, de ratons laveurs, de tigres et d'autres petits mammifères.
Quant aux oiseaux, on y trouve des ibis, des perroquets, des pénélopes, des dindons, des chachalacas, des aigles harpies, des éperviers et d'autres petits oiseaux en grand nombre, ce qui représente un fort potentiel pour le développement de l'écotourisme. L'altitude la plus élevée de la BTA est inférieure à 1000 mètres au-dessus du niveau de la mer. Le Cerro Asangbusna, reconnu comme un site cérémoniel ancestral du peuple Tawahka, est l'un des plus élevés.
Cette zone protégée est l'une des zones où l'on trouve le plus de sources d'eau naturelles, dont plus de sept rivières, avec des débits allant de 20 à 100 mètres, la plus grande étant la rivière Patuca, formée par les rios Guayape et Guayambre, qui reçoit les eaux des rios Wampú, Cuyamel, Aner, Wasparasni, Capapan et Pao, ce qui en fait un moyen de transport excellent et unique car la zone ne possède pas de routes pour le transport par véhicules à moteur. Les eaux de ces rivières sont un refuge aquatique pour diverses espèces dont des lézards, des poissons cuyamels, des tortues, des crevettes, des crabes et des tilapias qui se sont reproduits en raison du débordement d'un étang d'élevage artificiel d'un ranch privé de la région. (traduction ecured)
Coucher de soleil sur le rio Patuca
Langue : tawahka du groupe macro-chibcha
La langue n’est pratiquement plus parlée suite aux pressions de l’assimilation
Origines
On pense que les tawahkas, tout comme les miskitos et les ramas ont émigré du pays qui est de nos jours la Colombie à travers l’isthme de Panama.
Petit historique
- 1604 : premiers contacts avec des occidentaux, déclin du peuplement
- Au long du XVIIe siècle : traitement brutal par les missionnaires espagnols basés au sud-ouest, esclavage par les miskitos.
Localisation
Ils vivent le long du fleuve Patuca et sont répartis sur 50 km le long du fleuve. Ils pratiquent l’horticulture le long du fleuve ainsi que la pêche et cultivent également des parcelles dans la forêt environnante, tout en pratiquant également la cueillette des fruits sauvages.
Un territoire d’une superficie de 233 hectares leur a été je pense attribué dans la réserve de biosphère tawahka Asangni dans la Mosquitia.
Religion
Ils marient rites catholiques hérités de force par les missionnaires et leurs rites chamaniques.
Le chaman ou sukia doit surmonter des épreuves physiques pour être dignes de leur tâche, ils connaissent les pouvoirs de guérison et détiennent les savoirs sur les plantes médicinales.
Ils estiment que le fleuve et leurs champs s’inscrivent dans un environnement plus vaste qu’ils appellent « pampas », la forêt. C’est une vaste ressource à laquelle leur vie est inextricablement liée.
Ils considèrent qu’il est nécessaire de respecter la forêt en observant certaine règles : ne pas chasser les animaux tabous tels le singe hurleur, ne pas faire trop de bruit afin de ne pas déranger les esprits, ne pas tuer trop d’animaux ou sans raison….
Mode de vie
Les villages tawahkas sont pauvres, privés d’eau, d’électricité et d’assainissement. On ne peut accéder aux villages que par pirogues, le voyage pouvant durer 3 ou 4 jours. La population est en baisse croissante par manque de soins et d’hygiène.
Alimentation
Leur régime alimentaire est composé de riz, bananes plantain, manioc, maïs, plantes cultivées et médicinales, fruits tropicaux et parfois viande, poissons, crabes, poulet. La chasse concerne les cerfs et les tapirs entre autre.
Agriculture
Bananes plantain
Il s’agit d’une agriculture de subsistance mais malgré tout ces dernières années ils ont adopté de nouvelles techniques agricoles qui restent toujours traditionnelles.
Ils ont la particularité de cultiver sur deux sortes de terrains :
- Les plaines en bordure du fleuve, aux sols fertiles et riches
- Les hautes terres au-delà du fleuve aux sols beaucoup moins riches
Le climat tropical permet d’ensemencer facilement tout au long de l’année. Les parcelles sont exploitées individuellement ou petits groupes familiaux. Chaque paysan possède des champs en altitude et en plaine, ceux en altitude sont cultivés en alternance en utilisant le principe de la jachère.
Les grands aménagements agricoles autour d’une communauté se définissent en fonction des principales cultures y étant exploitées.
Les exemples cités ci-après proviennent de la communauté KRAUSIRPE qui est la plus nombreuse et qui compte six domaines principaux :
- Vergers
- Jardins sur rives
- Champs de haricots dans les plaines
- Champs de manioc en altitude
- Champs de riz en altitude
- Potagers dans la communauté
Le manioc d’altitude
Les tawahkas cultivent 22 variétés de manioc, réparties en groupes de 9 par champs en moyenne. La manioc est récolté une à deux fois par semaine, il faut donc que les parcelles ne soient pas trop éloignées de la communauté.
Les femmes s’occupent de la récolte mais les champs éloignés sont toujours cultivés uniquement par les hommes. La manioc peut commencer à être récolté quatre mois après la plantation. Les tawahkas plantent également d’autres espèces pour intercaler les cultures sur les mêmes parcelles : patates douces, yautia, igname, canne à sucre, ananas.
Le manioc sert à de nombreux plats entre autre un plat qui est mis à fermenter pendant plusieurs jours et qui est conservé dans des feuilles de bananier.
La boisson typique chicha à base de manioc fermenté est aussi préparée.
La monoculture du riz
Le riz est une espèce introduite dans les années 50 et qui est devenue l’une des principales récoltes. Ce sont les champs les plus importants en surface cultivées par les tawahkas et il n’est pas cultivé sur des parcelles de jachères car le riz à besoin de beaucoup de nutriments pour pousser. Ils plantent 11 variétés de riz qui mûrissent à différents moments ce qui permet de répartir les récoltes et de s’assurer contre un échec possible d’une variété. Le riz se cultive seul, quelquefois quelques blocs séparés de canne à sucre et d’ananas partagent le champ.
Il est cultivé en altitude à la saison humide et intercalé avec les haricots. Ils cultivent quatre variétés de maïs ce qui est beaucoup moins que par le passé.
Les haricots et le plantain sont cultivés en plaine, plus rarement en altitude. Les haricots sont cultivés à la saison humide sur un sol fertile et bien drainé.
Les plantains
Les bosquets de plantain constituent le caractère dominant des vergers et peuvent courir jusque sur 3 hectares. Les tawahkas connaissent 22 variétés différentes de plantain qui joue un rôle central dans l’alimentation tout au long de l’année.
Les cultures de plantain tendent à s’intercaler avec le cacao. Certains paysans cultivent jusqu’à trois hectares de cacao, la culture est en extension depuis les cinq dernières années.
Dans les vergers, en plus des plantains et du cacao, on trouve différents arbres fruitiers :
- La palme de pêcher ou péjibaye (bactris gasipaes)
- Les agrumes
- Les avocats
- Les pommes de malacca
- Les zapotes
- L’arbre à pain
Palmier-pêche
Pommes de malacca
Pomme de malacca
zapote
Les jardins de plaine servent à la culture des plantes sauvages à essence médicinale.
Les potagers sont gérés par les femmes et on y trouve :
- des légumes,
- des plantes médicinales
- des espèces cultivées pour l’artisanat comme le coton,
- le crescentia cujete dont le fruit sert à la fabrication de bols, assiettes, tasses (calebasse)
- la plante colorante le curcuma,
- le schénanthe qui est une plante médicinale qui compose une boisson rafraichissante (citronnelle)
- Des condiments comme l’albahaca (ocimum micranthum, du basilic)
- Le turul tun (eryngium foetidum ou coriandre mexicaine)
- Le piment rouge
calebasse
coriandre mexicaine
Un peuple très connaisseur des plantes qui constituent son écosystème ainsi que de leurs vertus
Lors d’études sur la diversité de la forêt, les tawahkas ont été capables de dénombrer l’ensemble des 180 essences d’arbres présentes, 95% d’entre elles étant jugés par eux utiles.
Ils apprécient le bois des espèces d’arbres qui se trouvent sur leur territoire :
- L’acajou ou caoba leur fournit le bois pour fabriquer les pirogues qui seront parfois vendues aux voisins.
- Le cèdre d’Espagne ou cedro leur sert à faire des canoës
Leurs seules ressources proviennent néanmoins de la culture du cacao qui pousse tout seul dans la forêt et les connaissances dans les vertus médicinales des plantes peuvent leur fournir également un centre d’intérêt économique en rapport avec la capitale.
Le besoin grandissant de générer des revenus constitue également un facteur nouveau pour les Tawahkas.
Ces facteurs sont à évaluer pour examiner leurs effets éventuels sur l’environnement forestier et, par extension, sur la réserve. Les Tawahkas possèdent toutefois un atout majeur, étant donné que chaque membre de leur communauté est,en fait, un véritable écologiste, doté de connaissances concrètes et capable d’apprécier les rouages de l’environnement naturel. Ils sont donc déjà sensibilisés à l’importance de l’intégrité biologique de toute réserve. En outre, leurs pratiques traditionnelles, comme la culture itinérante et la jachère, l’agroforesterie et l’exploitation durable de la forêt constituent autant de preuves d’un mode de vie réellement durable capable de générer suffisamment de revenus pour maintenir un niveau de vie moderne acceptable.
Les Tawahkas seront certainement confrontés à de difficiles décisions à l’avenir dans le rôle qu’ils ont choisi, celui de gardiens de la forêt, mais ils sont éminemment qualifiés pour cela. En tant que société, les Tawahkas savent qu’il leur est impossible de rester isolés culturellement du reste du monde. Ils s’adaptent en développant leurs propres programmes visant à régler les problèmes liés à l’accroissement de leurs communautés et à la création de revenus, ainsi qu’à l’installation d’eau potable et d’égouts. Ils s’intéressent aussi à la création d’un jardin botanique afin d’étudier le potentiel de plantes endémiques et exotiques dans le cadre d’un projet d’agroforesterie durable. Une autre possibilité serait de mettre sur pied une activité artisanale basée sur des produits forestiers durables pour
l’exportation. Mais le plus important reste que les Tawahkas ont lancé leur propre programme d’étude de l’environnement, dans leur langue, afin d’enseigner à leurs enfants comment leur peuple a toujours vécu dans la forêt et doit continuer de le faire sans la détruire, car sans forêt il ne peut pas y avoir de Tawahkas.
Sources : sur le net et inspirée par : Paysannerie forestière, étude de cas de la culture itinérante traditionnelle au Honduras de Paul House ici
Tous les liens vous mènent à des articles que j'ai écrit sur mes deux blogs.
Caroleone