Bolivie : Les chipayas
Publié le 18 Août 2012
Les chipayas
Peuple indigène de Bolivie qui vit dans l'altiplano
Population
Environ 1200 personnes
La plus grande partie vit dans le village de Santa Ana Chipaya à 3800 mètres dans l’altiplano bolivien qui est situé au bord du salar de Coipasa.
Les Moratos vivent au bord du lac Poopo, ils sont environ 500 personnes.
Les inu-itus vivent au bord de la rivière Desaguadero et sont environ 130 personnes.
D’autres groupes vivent sur la rive péruvienne du lac Titicaca.
En 1683, le recensement ordonné par le duc de la Paleta donne un nombre de 267 chipayas. L’accroissement actuel a lieu au cours du siècle dernier suite à une révolution agraire qui leur a permis d’utiliser les eux de la rivière Lauca pour faire des cultures et élever des porcs. En 1974, le recensement indiquait 880 personnes. Le patrimoine génétique des chipayas est resté stable et très proche de leurs ancêtres urus à cause de leur isolement géographique strict ainsi qu’à l’endogamie presque absolue. Les chipayas constituent un micro foyer qui rend difficile tout métissage, leur acculturation est faible et ils sont capables de résister aux pressions de l’extérieur
Langue : la langue puquina était la 3e langue officielle de l’empire inca, actuellement elle s’est diversifiée en deux branches uru-chipaya :
- Celle parlée par les urus qui est un mélange d’aymara et d’espagnol
- Celle parlée par les chipayas
Sur le milieu naturel
L’altiplano
Ce nom signifie « plaine d’altitude » en espagnol, il est situé au cœur de la cordillère des Andes, c’est la plus haute région habitée au monde après le plateau du Tibet. Il s’étend sur 1500 km de long. Situés dans la zone la plus larde de la cordillère des Andes, il s’étende sur quatre pays , l’Argentine, la Bolivie, le Pérou et le Chili mais la majeure partie se situe en Bolivie.
Les salars
Salar de Coipasa
A l’époque pléistocène, l’altiplano était recouvert d’un vaste lac, le Ballivian. Aujourd’hui cette étendue d’eau est à l’origine du lac Titicaca et du lac Poopo. Le salar d’Uyuni et le salar de Coipasa sont deux grands lacs de sel formés lors de l’assèchement du Ballivian. Ils sont devenus des étendues arides où même les arbres ont difficulté à pousser.
Tata Sabaya (image)
Au pied du volcan Sabaya, ou tata Sabaya, où le sable du désert de Carangas se mélange au sel des salines de Coipasa, au cœur d’une des régions les plus inhospitalières de l’altiplano, les chiapayas sont parvenus à survivre dans des conditions très précaires. La végétation est de type steppes, le sel, le froid, l’altitude, le manque d’eau pour milieu naturel n’ont pas parvenu à les décourager.
Le village
Le village de Santa Ana Chipaya date de l’époque des reducciones (1575), l’époque où les espagnols ont concentré la population autochtone sur des territoires fixes afin de faciliter leur contrôle. Actuellement, les enfants passent la semaine au village sous la surveillance d’un aîné pour aller à l’école. Les parents viennent les rechercher le week-end, parfois le père va y passer la nuit. Les maisons qui composent le village sont plus confortables que les maisons dans le salar. L’école est très importante pour les familles qui souhaitent voir leurs enfants éduqués et capables d’avoir ensuite une autre vie que la leur.
image actulatino
Un chipaya cite
« Une personne sans éducation, c’est comme une maison sans fenêtre, un aveugle sans possibilité ».
Les ancêtres
Les chipayas représentent l’un des touts premiers peuples de Bolivie descendant des urus qui eux descendraient des paléos-amérindiens, premiers habitants de cette région qui remonte à plusieurs dizaines de milliers d’années.
Caractères anthropométriques
Il a été remarqué que les caractéristiques morphologiques des chipayas sont différentes de celles des autres communautés amérindiennes des Andes : taille plus petite, teint plus sombre, crâne plus allongé ce qui se nomme dolichocéphalie.
Les chipayas ont fait les frais du mépris des autres peuples qui les ont petit à petit repoussés dans ces terres qui sont les plus hostiles du territoire.
Les urus dont ils descendent peuplaient les rives du lac Titicaca. Ce peuple a toujours été en opposition avec les voisins aymaras qui tentèrent aussi de les déposséder de leurs terres.
A présent, ils vivent une reconnaissance de leurs traditions comme les autres peuples indigènes de Bolivie depuis l’arrivée au pouvoir du président Evo Morales, lui-même indigène aymara. Les 36 ethnies du pays ont retrouvé leur place, leur langues sont enseignées à l’école, leurs pratiques autorisées, tout ceci à contribué à redonner leur fierté à ses peuples.
A savoir que leurs terres ancestrales sont réservées à ceux qui les travaillent, si cette terre est inoccupée pendant une période de deux ans, elle peut leur être enlevée.
Les maîtres de l’eau
On peut en effet leur donner cette appellation, car arriver à survivre et trouver de l’au dans cette région aride relève d’une grande ingéniosité et de grandes capacités d’adaptation. Ils ont réussit à trouver un système pour dessaler l’eau de la rivière Lauca et détournant son cours, sans cette maîtrise, il était impossible d’avoir la possibilité d’une eau consommable. Leurs techniques d’irrigation sont très complexes. Elles consistent en le lavage de la couche de sel et ne la préparation de parcelles plus ou moins étendues mais peu productives car elles sont utilisées sur une période d’un an. Les barrages sont ingénieux car constitués en tresses de pailles, les digues tiennent deux ans pour arriver à dessaler convenablement les sols afin d’y planter ensuite la quinoa.
Confection des tresses de paille (image)
De même pour permettre à leurs animaux de se désaltérer, ils creusent d’immenses ravins et doivent les dessaler au fiur et à mesure des pluies. Les animaux sont tributaires des hommes pour leur survie, si ces derniers consomment de l’eau salée, ils sont pris de diarrhées et meurent rapidement. Les chipayas sont donc très attentifs à tous les animaux qu’ils élèvent.
Chaque famille possède un puits que le chef de famille a construit lui-même et qu’il convient aussi de protéger du sel lors des fortes pluies.
L’ayllu (la communauté)
L’organisation de l’ayllu n’est pas tellement différente de celle des communautés aymaras voisines. L’ayllu est divisé en deux moitiés, les ayllus Aransaya et Manansaya. Chaque ayllu est composé d’un ensemble de familles étendues contrôlant un territoire déterminé. Chaque ayllu est une unité sociale et territoriale indépendante de l’autre, avec ses propres autorités politiques, ses fêtes, ses saints patrons, ses terrains de culture. Dans chaque ayllu, la préférence est l’endogamie. Elle est définie comme une société dualiste où les relations entre les deux moitiés est caractérisée par des formes de compétition et de rivalité qui auparavant se manifestaient par des combats violents entre les deux ayllus. Aujourd’hui elles s’expriment symboliquement lors des fêtes.
Depuis quelques décennies, un troisième ayllu, Ayparavi s’est constitué à l’est du territoire chipaya, dans un secteur très sableux où les cultures se font entre des dunes.
Un chef est élu pour la période d’un an pour gérer chaque communauté. Toute la vie sociale et politique de celle-ci repose sur lui.
Mode de vie
Les habitations
Elles sont constituées huttes coniques nommées putukus en pierres sèches soudées au torchis, le toit est constitué d’un chaume, je pense réalisé avec la paille de quinoa. A l’intérieur, pas de meuble, les chipayas dorment par terre sur des peux de mouton.
Elevage
Ils élèvent des moutons, des lamas et des porcs qui vivent en liberté. Ils vont de temps en temps attraper les porcs mâles afin de les castrer pour arriver à contrôler le troupeau et qu’il ne s’éloigne pas.
Ils pratiquent une chasse à la fronde pour attraper des flamants roses ou d’autres grands oiseaux. En dehors de leur chair, la graisse de flamant est utilisée pour soigner différents rhumatismes. Cette chasse était interdite sur tout le territoire bolivien mais le nouveau gouvernement l’a rétablie uniquement dans cette région.
Ce sont les ancêtres des chipayas qui permirent à ces oiseaux de venir dans cette partie du monde, en creusant des lagunes dans lesquelles les oiseaux savent trouver différents petits crustacés.
Alimentation
Elle est constituée de la quinoa et des produits dérivés, farine entre autre, de la viande de mouton et de pommes de terre.
La quinoa
Pour arriver à cultiver la quinoa qui est leur aliment de base, il leur faut user encore de ruse. Les plantations s’effectuent sur des terres dessalées et pour pallier au vent fréquent et violent en cette altitude, ils ont eu l’idée de confectionner de petites barrières coupe-vent à l’aide de paille de quinoa enterrés à l’oblique. Cela permet aux graines de lever correctement.
Le travail des sols est pratiqué entre communautés et l’entraide est décidée qui permettra de ne pas épuiser chaque année les mêmes sols.
Quand un chipaya travaille pour une autre communauté, son travail est rémunéré en quinoa : une journée de travail + un sac de quinoa.
La Coca aujourd'hui: symbole de l'indien de l'altiplano
La coca est encore très utilisée par les indiens de l'altiplano; 92% des hommes et 89% des femmes utilisent la coca et 82% et 68% respectivement la mastiquent.
L'utilisation de la coca est associée aux indiens et pour cette raison également elle aurait été discriminée. Son utilisation est le symbole de leur identité et de la solidarité entre ceux qui sont pour contre ceux qui sont contre. On peut dire que la coca est la colonne vertébrale de la structure de la culture andine.
Il y a trois types de relation des habitants des Andes avec la coca:
Economique
La feuille de coca cultivée dans les communautés comme une monnaie d'échange de produits. Elle est cultivée pour générer de l'argent et répondre à la nouvelle demande urbaine.
Sociale
Dans les cultures andines toute interaction sociale est conçue en termes d'échanges de réciprocité et la feuille de coca y joue un rôle clé. Il n'y a pas d'échange social sans coca.
Par exemple si un indien demande un ayni (une personne choisie pour s’entraider), il doit également offrir une poignée de coca. L’autre en recevant la coca s’engage dans la relation.
Toute demande faite à un chef de communauté doit être accompagnée de coca et d’alcool. De la même façon la coca est très importante lorsqu’un chef est investi de ses fonctions, ou lorsque ceux qui conduisent un groupe de danseurs traditionnels sont nommés.
La demande en mariage doit être faite par la famille du futur marié avec une poignée de coca. Le succès de la demande sera indiqué par l’acceptation ou non du cadeau.
Pour organiser des tâches plus complexes, comme des fêtes, constructions ou encore une bataille contre l’ennemi, la communauté doit se réunir une nuit entière. La coca est alors distribuée et mastiquée toute la durée de la rencontre.
La coca est donc la clé pour entrer dans des relations sociales des cultures andines, elle promeut la confiance.
Socialement, la coca est offerte pour étendre et renforcer les relations de réciprocité extrêmement importantes dans le monde andin pour acquérir du travail, du prestige, du pouvoir et une intégration sociale.
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Pratiques magiques
Dans les Andes, tous les rituels et cérémonies religieuses qui subsistent sont similaires, avec quelques variations. L'utilisation de la coca dans un sens magique a pour but de protéger l'individu de la sorcellerie, de changer la mauvaise fortune et de prédire le futur. Sans coca il serait impossible au devin de prédire le futur ou de trouver la source de malaise de son patient et de le soigner car il serait incapable de comprendre la punition infligée par la Pachamama, les gardiens ou d'autres dieux.
Pour protéger du futur et prévenir des mauvais sorts la coca est mâchée et ensuite brulée. Lors des rites de fertilité elle est donnée aux animaux. C'est très important alors d'avoir une grande quantité de coca, d'alcool et de nourriture car c'est symbole d'abondance et sans cela la cérémonie est sans utilité.
Dans un sens religieux, la coca est utilisée pour simplement dire merci ou faire des offrandes aux dieux. Tous les rites traditionnels andins sont célébrés avec des feuilles de coca. Toutes les personnes présentes doivent mâcher de la coca sous la direction du maître de cérémonie. Ainsi la coca est indispensable pour faire des offrandes, des offices aux ancêtres, à la Pachamama, en tant qu'acte de remerciement pour les bonnes récoltes, la santé ou l'épanouissement des animaux.
La coca sera toujours présente dans les moments importants des vies car ce n'est pas seulement un produit mais un héritage, ce n'est pas seulement le plus important élément de survie des indiens, mais la représentation de ce qui leur est sacré, leur culture, leurs traditions et leur force contre l'abus et l'exploitation.
Religion
Elle est faite d'un syncrétisme religieux dans lequel les cultes à la pachamama rivalisent avec ceux à la vierge ou aux saints.
Tenue vestimentaire
Les vêtements confectionnés en laine sont de couleur marron sont composés de pantalons, ponchos, vestes superposées pour résister au froid. Les femmes ont la particularité d’avoir les cheveux tressés de fines petites nattes comme le font les africaines, les simbas. Elles marchent bien souvent nus-pieds.
Les hommes portent des petits bonnets composés de protèges-oreilles qui se portent en dessous le chapeau de paille tressée.
Les hommes tricotent eux-mêmes les accessoires nécessaires à leur tenue vestimentaire, le chef ayant tout un panel d’objets décorés et officiels.
Ils perpétuent tous les savoirs faire ancestraux qu’ils ne veulent surtout pas perdre et ils sont prêts à se battre pour pérenniser ses traditions.
Caroleone
Sources : erudit.org (Les chipayas, une sous population bolivienne de H. Gutierrez et M. L. Urquieta), le documentaire Rendez-vous en terre inconnue , caserita.com