L’os à vœux. Poésie inspirée d’une légende des indiens Crees des marais
Publié le 10 Mars 2024
oie des neiges Par DickDaniels (http://theworldbirds.org/) — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=18228083
Une fois j’ai fait le vœu
d’écrire une poésie sur l’Os à vœux.
Dans le ciel printanier de Winnipeg
Une oie des neiges, toute seulette apparut
Elle volait, seule, vraiment seule et se posa
Seule, toujours seule sur le lac,
Nagea
Jusqu’au rivage.
Mais le lynx guettait, là-bas, tout au loin
Mais pourtant, si près :
Le vent lui avait envoyé un message :
Celui de la nature-même de l’oie.
Le lynx se léchait par avance les vibrisses
Ces vibrisses-là qui vibraient et lui chatouillaient le museau
Toutes heureuses de la suite.
L’oie eut un moment de doute
Son 6e sens n’était pas trop défaillant
Seulement,
Elle n’eut pas le temps de s’envoler, le lynx
Avec ses vibrisses telluriques était déjà sur elle
Il la croquait, la broyait, ne voulant rien laisser :
Il avait une faim de lynx !
Les plumes, les os,
Tout y passa !
Et quand il s’apprêtait à briser un os
Pour en aspirer la moelle comme par une paille
Un homme poussa un cri !
Vite le lynx !
D’un bond le lynx
était tout en haut de l’arbre.
L’homme fouilla parmi les débris de la malheureuse oie dévorée
Il trouva un os qui lui disait « je ne suis pas comme les autres ».
Cet os protège le cœur
C’est un os à vœux.
L’homme le contempla
Comme on contemple un objet merveilleux
Cet os était un objet merveilleux
Il avait le pouvoir de métamorphose
Celui de « jouer des tours »
On pouvait faire apparaître des choses
C’était simple :
Il suffisait de les invoquer
D’en faire le vœu
On pouvait changer son apparence
On pouvait encore grâce à l’os à vœux
Créer toutes sortes de situations
Dont je ne vous conterais pas la suite :
Elle est écrite dans un livre merveilleux comme l’os
Qui fait plonger l’adulte dans le monde merveilleux de l’enfance
En lisant les contes et les poèmes en langue des bois
En langue-nature, en langue-vraie
De ceux qui font corps avec la forêt
Avec l’arbre, la neige, l’oiseau, le caribou
De ceux qui savent écouter, voir, entendre le silence entre les sons
De ceux qui savent se poser pour réfléchir
Pister, traquer et se nourrir sans pour autant affaiblir quoi que ce soit.
Ce sont les Crees, peuple originaire à la langue belle et soyeuse
Comme la petite oie des neiges
Qui, un jour, se sacrifia
Pour que l’on puisse, nous autres,
Faire un jour, un vœu.
Carole Radureau (09/03/2024)
Poésie librement inspirée du récit L’os à vœux, du livre du même nom d’Howard A.Norman, « Récits et paroles des indiens Crees, traduction française par Lauret S. Munnich, La mémoire des sources, Editions du Seuil