Pérou : Lima : les maires d'extrême droite menacent la culture et la mémoire historique
Publié le 10 Janvier 2023
Photo : ANDINA/Juan Carlos Guzmán
Il ne leur a pas suffi d'effacer la fresque de Máxima Acuña. Ils veulent maintenant s'attaquer au lieu de mémoire et à la sculpture qui rend hommage aux victimes du conflit armé interne.
Servindi, 9 janvier 2023 - L'aile d'ultra-droite arrivée au pouvoir à Lima a lancé une attaque qui menace la culture et vise à altérer la mémoire historique de la capitale du pays.
Non contents d'effacer la fresque de la leader Máxima Acuña, ils cherchent maintenant à céder le Lieu de mémoire (LUM) aux Forces armées et à faire disparaître la sculpture emblématique "L'œil qui pleure".
Défenseure effacée
Le premier signe de cette offensive des nouveaux maires arrivés au pouvoir sous l'égide du parti d'ultra-droite Renouveau populaire (RP) s'est produit à Barranco.
Le 5 janvier, la peinture murale de la défenseure des terres Máxima Acuña, située dans ce quartier de Lima, a été étonnamment recouverte d'une épaisse couche de peinture jaune.
La fresque a été enlevée par la nouvelle maire de Barranco, Jessica Vargas de Renovación Popular, qui a décidé de commencer son mandat de maire de cette manière.
La fresque, peinte par l'artiste Erick Cárdenas en 2021 dans le cadre des célébrations du bicentenaire du Pérou, représente la détermination des femmes qui se sont battues dans l'anonymat pour leurs familles et leurs communautés.
Avant et après la fresque de Máxima Acuña qui a été effacée par la nouvelle administration municipale de Barranco. Photo : Internet
Máxima Acuña est une agricultrice et une défenseuse de l'environnement reconnue pour son combat contre le mégaprojet minier Conga à Cajamarca, qui lui a valu de recevoir le prix Goldman pour l'environnement en 2016.
Le retrait de la fresque ne peut s'expliquer que par l'ultra-droite qui perçoit cette œuvre comme un signe de "haine" et de "polarisation", comme l'a laissé entendre le député Alejandro Cavero.
Selon un message qu'il a posté sur Twitter, il a félicité la maire Jessica Vargas pour sa décision d'effacer la fresque. La fresque doit être effacée : "Il faut gouverner pour tout le monde, sans idéologie ni manipulation", a-t-il déclaré.
La vérité est que tout le monde dans le district ne pense pas de cette façon. C'est pourquoi, le 8 janvier, un groupe de résidents locaux s'est réuni sur la Plaza de Barranco pour protester contre cette attaque culturelle.
La manifestation a également rappelé l'artiste afro-péruvienne qui nous a représentés aux Grammys, Rosa Guzmán León, qui avait également une peinture murale dans le quartier qui a été effacée.
LUM et El ojo que llora
Pour l'ultra-droite, cela ne semble pas suffisant, et elle cherche maintenant à attaquer deux autres emblèmes de la mémoire historique de la capitale à travers sa figure la plus notoire : Rafael López Aliaga.
López Aliaga, le nouveau maire de Lima, également issu de Renovación Popular, vise le Lugar de la Memoria, la Tolerancia y la Inclusión Social (LUM) et la sculpture "El ojo que llora" (l'œil qui pleure).
"Assez de ces musées de la mémoire et de la réconciliation qui n'ont rien à voir avec la mémoire et la réconciliation. Là-bas (...) ils prêchent cela, les bains de sang, c'est leur mentalité", a-t-il déclaré dans un récent discours.
Le LUM, administré par le ministère de la culture, est un espace mémorial éducatif et culturel qui abrite l'histoire de la violence survenue au Pérou entre 1980 et 2000.
Selon López Aliaga, dans ce lieu "s'écrit un récit où les guides eux-mêmes vous mentent de manière flagrante, présentant les forces armées et la police comme si elles étaient des agresseurs".
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D'autre part, le "Ojo que llora", situé dans le Campo de Marte, quartier de Jesús Maria, honore et préserve la mémoire des victimes du conflit armé interne subi par le pays.
Agacé par la mémoire protégée par ces espaces, le maire a proposé qu'ils soient administrés par les forces armées et la police, les victimes présumées.
"Laissez-les raconter l'histoire telle qu'elle est. Qui mieux que les forces armées et la police nationale peuvent nous dire ce qu'ils ont souffert en combattant pour leur pays", a ajouté le maire de Lima.
Selon le rapport final de la Commission Vérité et Réconciliation, le conflit armé interne au Pérou a fait quelque 69 000 victimes, dont 46 % ont été causées par le Sentier lumineux et 30 % par des agents de l'État.
Bien que le groupe subversif ait perpétré plusieurs massacres condamnables, cela n'élimine pas les crimes également perpétrés par les militaires dans le cadre de la stratégie de la terre brûlée : tuer des suspects et des innocents.
traduction caro d'un article paru sur Servindi.org le 09/01/2023
Lima: alcaldes de ultraderecha amenazan cultura y memoria histórica
No les bastó con borrar el mural de Máxima Acuña. Ahora buscan atentar contra el Lugar de la Memoria y la escultura que honra a víctimas del conflicto armado interno. Servindi, 9 de enero, 2023...